Dans la mythologie grecque, Prométhée est le dieu qui, contre l’avis de ses pairs, offre le feu aux Hommes. Celui grâce à qui l’humanité peut espérer perdurer. Dans les faits, les Hommes ont compris comment faire du feu il y a 400 000 ans, plusieurs centaines de milliers d’années après l’avoir découvert – notamment à la suite de retombées de foudre – sans savoir le reproduire. Et si nous n’avions pas été les premiers à maîtriser cet élément ? Une étude publiée dans Nature démontre que nos ancêtres se sont certainement fait devancer sur ce plan.

C’est une découverte époustouflante, cela change la donne dans notre champ de recherche, déclare Simon Parfitt, l’un des auteurs principaux de l’étude et chercheur en archéologie affilié au Musée d’histoire naturelle de Londres. Alors qu’ils opéraient des fouilles sur le site de Barnham, dans le Suffolk, l’homme et ses collègues sont tombés sur un fragment de pyrite d’à peine 2 centimètres. Ce minéral, que l’on confond parfois avec l’or, trouvé près d’âtres vieilles de 400 000 ans, a certainement servi à allumer sciemment un feu. Or, notre espèce évoluait à cette époque en Afrique, loin, très loin de l’Angleterre.

Dès qu’on a vu la pyrite, on a compris qu’on avait mis la main sur quelque chose de remarquable. La pyrite n’apparaît pas naturellement dans ce paysage ; sa présence montre que les personnes présentes avaient la capacité d’allumer sciemment un feu, explique Simon Parfitt.

Le site de Barnham est connu comme un haut lieu de l’archéologie depuis la fin du XIX° siècle. Alors qu’il était utilisé comme mine d’argile, les mineurs tombaient régulièrement sur des os d’éléphants, de biches ou de bisons et sur des preuves de présence humaine. Ils ont notamment déterré des outils très probablement issus de la culture clactonienne, associée à des populations qui sont arrivées sur les terres (désormais) britanniques il y a 450 000 ans. D’autres outils semblent être plus récents et probablement fabriqués par une autre espèce.

Restent ces fragments de pyrite disposés autour d’âtres qui semblent avoir accueilli des feux de camp. Lorsque les scientifiques ont découvert des silex disposés juste à côté de la pyrite, ils n’ont plus eu aucun doute : les habitants de la zone ont, pour sûr, fait du feu de leurs propres mains. Mais qui étaient-ils ? Pas des Homo Sapiens, c’est sûr. Nos ancêtres n’avaient pas encore quitté l’Afrique à l’époque.

On estime que les outils clactoniens retrouvés sur le site ont été fabriqués par les Homo heidelbergensis, qui ont vécu entre il y a 700 000 et 220 000 ans. Les personnes qui leur ont succédé, et qui ont probablement maîtrisé le feu, donc, sont certainement leurs descendants : les hommes de Neandertal. Cela donne de nouvelles informations sur notre propre espèce. Lorsque les Homo sapiens sont arrivés en Europe, d’autres maîtrisaient déjà le feu, les outils et les armes.

Lola Breton GEO  le