Joël Chenal, 52 ans, médaille d’argent en slalom géant aux JO d’hiver de Turin en 2008, devenu entraîneur de ski féminin est accusé de harcèlement sexuel par plusieurs jeunes, parfois très jeunes skieuses. Cela durait depuis longtemps et il est peu de monde dans le milieu, qui ait ignoré l’affaire, mais… mais tout le monde se taisait… tout le monde sauf trois vieux – Léo Lacroix, 1937, Guy Perillat, 1940, Jean-Claude Killy 1943, soit une moyenne d’âge de 85 ans – qui envoient un courrier de protestation à qui de droit, choqués de ce silence qui protège Joël Chenal. Est-ce à dire que tous les autres anciens champions, plus jeunes, n’ont rien trouvé à redire à cette affaire ? est-ce à dire que seuls des champions de plus ou moins 85 ans estiment inadmissible un comportement qu’eux-mêmes n’ont jamais connu ? À la notoire exception d’Adrien Duvillard Junior, ce sera silence radio sur tous les horizons. On en a froid dans le dos. Honte à tous ces responsables au comportement clanique qui préfèrent la malhonnêteté au courage qu’il faut pour porter assistance à personne en danger, honte à ceux qui préfèrent le silence coupable à la parole libératrice. Honte à l’omerta mafieuse.
Joël Chenal, porté par des skieurs de l’équipe de France, lors des finales de la Coupe du monde de ski, le 15 mars 2009 à Are (Suède). Olivier Morin/AFP
En 2020, un film français que personne n’attendait fait l’effet d’une claque dans le milieu : Slalom. Charlène Favier y raconte l’histoire de Lyz (Noée Abita), 15 ans, qui vient d’intégrer une section ski-études au lycée. Fred (l’acteur belge Jérémie Renier), ex-champion et désormais entraîneur, décide de tout miser sur sa nouvelle recrue. Galvanisée par son soutien, Lyz s’investit à corps perdu, physiquement et émotionnellement. Elle enchaîne les succès mais bascule sous l’emprise absolue de Fred.
La réalisatrice parvient ici à représenter frontalement la naissance et les caractéristiques d’une relation abusive, faite de harcèlement, de manipulation et de domination. On retrouve dans Slalom de nombreux facteurs précités plus haut : les pressions psychologiques exercées sur Lyz, la construction fragile de l’adolescente en quête d’identité, une figure d’autorité respectée et intouchable (Fred), des parents absents et un éloignement physique … Charlène Favier s’est inspirée de sa propre expérience, elle qui a également connu l’emprise dans le ski de compétition. Elle expliquait à Allociné : Ce film a été fait pour libérer la parole, ouvrir un débat et qu’on essaye, enfin, de trouver les mots ensemble pour parler de ce qu’il se passe quand des choses pareilles se produisent.
Allociné
Et la parole se libéra. CQFD. Charlène Favier : bravo, bravo, bravo. Il est rare qu’un film dénonçant une réalité avec autant d’avance, colle d’aussi près à la réalité qui attendra 2025 pour arriver à la surface.
6 07 2025
Conséquence de pluies diluviennes : en 45 minutes, les eaux du fleuve Guadalupe au Texas montent de 8 mètres ! plus de 100 morts.
8 07 2025
Adoption de la loi Duplomb qui allège les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, plus particulièrement celui de betteravier, qui prétend que seule, l’acétamipride peut venir à bout du puceron vert, cet insecte qui troue la plante pour boire sa sève et qui ainsi lui inoculent un virus, celui de la jaunisse. Concernés aussi au premier chef par cette loi, les cultivateurs de noisettes y ont recours pour se débarrasser des balanins, ces charançons qui dévorent les fruits à coque. L’Anses – Agence Nationale de Sécurité Sanitaire – a déjà publié deux rapports pour dire qu’il existe des alternatives biologiques à l’acétamipride, en 2018 et en 2021, préconisant l’association de deux insecticides autorisés, le lambda-cyhalothrine et le pyrimicarbe, ou encore l’utilisation d’autres produits rapidement substituables aux néonicotinoïdes : le flonicamide et le spirotétramate, à l’impact plus limité sur l’environnement.
Eleonore Pattery, une étudiante de 23 ans en Master QSE et RSE (Qualité, Sécurité, Environnement / Responsabilité Sociétale des Entreprises). n’ayant aucun lien particulier de près comme de loin avec le monde agricole, lance une pétition pour la remise en cause de ce texte et, obtient plus de 500 000 signatures dès le samedi 19 juillet, et plus d’un million le dimanche 20 juillet, 1.5 million le mardi 22, 2 millions le 27 juillet …de quoi ouvrir un nouveau débat à l’Assemblée Nationale, sans pour autant remettre la loi en question, mais elle a tout de même du plomb dans l’aile. C’est dire la puissance et l’efficacité des réseaux sociaux sur des situations hautement politiques. C’est donc bien une erreur que de penser que les réseaux sociaux ne sont qu’un repère de jeunes narcissiques ivres de pouvoir faire partager tous leurs réflexions.
Parmi la cinquantaine de personnes auditionnées par les sénateurs avant l’examen de la loi, il n’y avait pas un seul médecin, pas un toxicologue, pas un représentant de l’Inserm, du CNRS, ou du ministère de la santé.
Pierre Sujobert, professeur d’hématologie
Sa pétition, au succès phénoménal
Je m’appelle Eléonore PATTERY, j’ai 23 ans, et je suis actuellement en Master QSE et RSE (Qualité, Sécurité, Environnement / Responsabilité Sociétale des Entreprises).
En tant que future professionnelle de la santé environnementale et de la responsabilité collective, j’apprends chaque jour à appliquer ce que vous — législateurs — refusez aujourd’hui de respecter vous-mêmes.
La Loi Duplomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire. Elle représente une attaque frontale contre la santé publique, la biodiversité, la cohérence des politiques climatiques, la sécurité alimentaire, et le bon sens.
Cette loi est un acte dangereux. Pour les travailleurs, les habitants, les écosystèmes, les services écosystémiques, et pour l’humanité tout entière. Elle fragilise les réseaux trophiques et compromet la stabilité de notre environnement – dont nous dépendons intégralement. Nous sommes ce que nous mangeons, et vous voulez nous faire manger quoi ? Du poison.
Les grands textes l’avaient déjà dit : Le rapport Brundtland, l’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire (MEA), les rapports du GIEC, les études de l’OMS, de l’INRAE, de Santé Publique France… Tous alertent depuis des décennies sur les conséquences des politiques destructrices du vivant et de la santé. Et pourtant, vous persistez à légiférer contre l’intérêt général.
Un acte possiblement inconstitutionnel. Selon l’article L110-1 du Code de l’environnement, l’État français est garant de principes environnementaux comme :
6° Le principe de solidarité écologique, qui appelle à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l’environnement des territoires concernés, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés ;
Et la LOI constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 relative à la Charte de l’environnement (JORF n°0051 du 2 mars 2005 page 3697) (annexée à la Constitution de 1958) dans son chapitre 1er :
Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.
En validant cette loi, vous violez potentiellement ce droit constitutionnel, et portez atteinte à l’obligation de précaution, pourtant consacrée par le principe n°15 de la Déclaration de Rio et repris dans notre droit.
Je m’oppose donc à la Loi Duplomb.
Par cette pétition, je demande : Son abrogation immédiate ; La révision démocratique des conditions dans lesquelles elle a été adoptée ; La consultation citoyenne des acteurs de la santé, de l’agriculture, de l’écologie et du droit.
Aujourd’hui je suis seule à écrire, mais non seule à le penser.
Avec plus de 2,1 millions de signatures, le Conseil Constitutionnel fera preuve de raison en invalidant le 7 août l’article réautorisant l’usage de néonicotinoïdes.
13 07 2025
Pour être libre dans ce monde, il faut être craint et pour être craint, il faut être puissant.
Emmanuel Macron
Donc la France va doubler son budget non plus pour 2030, mais pour 2027, soit 6,5 milliards d’euros d’ici deux ans.
23 07 2025
Valentin Paret Peintre arrive en tête au Ventoux : il faut remonter à 2002 pour une victoire française au sommet du Géant de Provence avec Richard Virenque.
Juillet 2025
Quid de l’énergie en Chine ?
Des reliefs couverts de plus de 60 000 panneaux photovoltaïques à Jinhua, dans la province de Zhejiang (Chine), le 11 avril 2025. Cost Foto Bestimage.
Des étendues désertiques du Gansu au nord aux monts du Yunnan au sud, en passant par les collines creusées d’anciennes mines de charbon du Shanxi et les marais salants du golfe de Bohai, la Chine se couvre de panneaux solaires à un rythme qui défie l’imagination. Les installations photovoltaïques font désormais partie du paysage, de même que les éoliennes. Le pays, pourtant encore de loin premier émetteur de gaz à effet de serre au monde, occupe une place à part du fait de son effort en matière de transition énergétique.
Environ 55 % des panneaux installés dans le monde en 2024 ont été posés en Chine et, rien qu’en cinq mois, entre janvier et mai, 198 gigawatts (GW) de panneaux solaires ont été déployés sur le territoire chinois – un peu moins que la puissance installée cumulée aux Etats-Unis (239 GW). La Chine a ainsi franchi les 1 000 GW de panneaux solaires installés – elle peine à tenir le rythme de leur branchement au réseau – quand l’Union européenne (UE) était à 338 GW à la fin de l’année 2024.
La Chine a bâti le système d’énergies renouvelables le plus étendu (…) et la chaîne industrielle dans les nouvelles énergies la plus complète, lançait le président, Xi Jinping, le 23 avril dans un message adressé à un sommet virtuel sur le climat organisé par le Brésil. En un cercle qu’il juge vertueux, l’Etat-parti entend faire de la Chine le premier pays à concilier transition énergétique et croissance économique soutenue.
La Chine part de loin. Au début des années 2010, le charbon est encore roi, le parc de voitures à essence est en pleine expansion et l’air à Pékin est irrespirable. Les autorités estiment à cette époque à 1,2 million le nombre de morts causées chaque année par la pollution de l’air, devenue un problème politique majeur. En 2015, un documentaire d’une ancienne journaliste de la télévision d’Étatn Chai Jing, qui pense que cet airpocalypse est la cause d’une tumeur chez sa fille avant même sa naissance, émeut nombre de familles.
La protection de l’environnement devient une composante majeure des plans quinquennaux qui organisent les ambitions du gouvernement. À partir du douzième plan (2011 – 2015), la Chine désulfure massivement les centrales à charbon, responsables en grande partie des pluies acides et des particules fines et explore le déploiement de lignes à ultra-haute tension pour acheminer l’électricité verte des régions arides et ensoleillées de l’Ouest comme le Qinghai et le Xinjiang vers les centres industriels des régions côtières.
Invitées par Pékin à investir massivement dans les industries de la transition énergétique, les provinces rurales y voient l’occasion d’amorcer enfin un rattrapage économique. Un groupe de la région alors encore peu dynamique de l’Anhui, Sungrow, devient au cours des années 2010 le deuxième plus gros fabricant mondial d’onduleurs (derrière le géant chinois Huawei), indispensables pour convertir l’électricité des panneaux photovoltaïques. Et ce grâce à des contrats majeurs pour des fermes solaires à travers la Chine et un programme d’électrification de villages reculés.
En 2020, les autorités de la même province de l’Anhui font venir un prestigieux constructeur de voitures électriques alors au bord de la faillite, le shanghaïen Nio qui, contre un premier chèque équivalent à 800 millions €, installe à Hefei une usine automatisée remplie de robots allemands. Dans l’attente d’une rentabilité, Nio est encore aujourd’hui régulièrement soutenu par des fonds publics locaux.
Li Auto à Changzhou, XPeng à Canton, Leapmotor à Jinhua… Partout en Chine, des constructeurs émergent grâce au soutien de collectivités locales. Tous ne survivront pas. À Yichun, petite ville du Jiangxi, le siège de l’administration locale est dominé par un écran géant sur lequel sont listés tous les investissements dans les nouveaux secteurs de l’économie et leur état d’avancement. Là-bas, le constructeur automobile Neta et ses emplois tenaient grâce aux financements des autorités locales, jusqu’à se déclarer en cessation de paiements en juin. Les producteurs de panneaux solaires se plaignent aussi de la difficulté à survivre, les groupes les plus puissants cassant en permanence les prix.
Il y a du trop-plein, mais la Chine estime que c’est par la masse de sa production que les technologies vertes deviennent accessibles à l’échelle planétaire. Ses entreprises, en concurrence féroce entre elles, innovent sans cesse pour réduire les coûts, améliorer les performances et tenter de dégager une marge. Le leader mondial des batteries automobiles, CATL, installé dans la province du Fujian, à Ningde (38 % du marché mondial), et le deuxième, BYD (15 %, mais premier producteur de voitures électriques de la planète), à Shenzhen (Guangdong), sont dans une guerre à qui saura rendre accessible la batterie chargeable en cinq minutes.
L’empire du Milieu dispose de 80 % de la capacité de production de panneaux solaires dans le monde, de 60 % pour les éoliennes, il construit la moitié de la soixantaine de réacteurs nucléaires actuellement en chantier sur la planète et domine environ 70 % du marché mondial des batteries pour véhicules électriques. Son savoir-faire dans les batteries automobiles lui permet en retour de prendre l’avantage dans un autre secteur-clé : les armoires de stockage d’énergies de source intermittente, nécessaires pour rendre le solaire et l’éolien viables à grande échelle.
La Chine renforce ainsi sa domination industrielle avec une présence sur toute la chaîne, des investissements dans les matières premières partout dans le monde jusqu’aux produits finis. Le gouvernement, lui, soutient l’ensemble par des subventions et une planification à long terme.
Pour Pékin, cette industrie de la transition énergétique apporte une réponse à la crise du modèle économique précédent. Le secteur immobilier s’est figé et la consommation intérieure n’est jamais repartie au rythme d’avant la pandémie de Covid-19. Les nouvelles technologies de la transition et du numérique, elles, ont progressé trois fois plus vite que le reste de l’économie en 2024, générant plus de 1 600 milliards € de produit intérieur brut, soit l’équivalent de l’économie espagnole.
La force de traction de la transition énergétique n’est plus tant la politique que le marché. Des familles dont les revenus ne sont pas élevés peuvent désormais s’acheter une voiture électrique, tandis que le coût d’un champ de panneaux solaires ou d’éoliennes est devenu plus faible que celui de centrales au charbon ou au gaz naturel, constate Jiang Kejun, professeur en politiques climatiques sur le campus de Canton de l’Université des sciences et technologies de Hongkong. M. Jiang sait de quoi il parle : il a longtemps dirigé un institut rattaché à la très puissante agence de planification étatique.
Li Shuo, devenu directeur du programme sur la Chine et le climat d’Asia Society après avoir travaillé chez Greenpeace, fait un constat proche. Cela a commencé par une vision très claire du gouvernement sur la nécessité d’améliorer la situation sur le plan de l’environnement tout en en tirant les avantages économiques. Mais ensuite l’échelle, l’intégration des chaînes d’approvisionnement, l’efficacité industrielle ont engendré une baisse des coûts qui permet à la Chine, devenue hyperpuissance des technologies vertes, d’apporter ses produits et sa technologie au monde, dit-il.
Malgré cela, la Chine a encore émis 12 milliards de tonnes de CO2 en 2024, soit 30 % du total de la planète pour seulement 18 % de sa population. Alors que le pays a longtemps insisté dans les négociations climatiques sur la responsabilité des Occidentaux, un Chinois émet toujours moins de CO2 qu’un Américain, mais plus du double d’un Français. La part du charbon a chuté dans sa consommation énergétique, passant de plus de 70 % en 2010 à 58 % en 2024, mais le pays en brûle toujours 40 % de plus que tout le reste de la planète réunie.
Les observateurs se demandent quand cet effort massif dans les renouvelables se traduira enfin par une baisse de ses émissions. La Chine s’est engagée à atteindre le pic de ses émissions d’ici à 2030 et la neutralité carbone en 2060. Une étude du Centre de recherche sur l’énergie et l’air propre, basé à Helskini, a constaté en mars que les émissions de la Chine ont baissé de 1 % sur un an.
Les aléas du dynamisme de l’économie ainsi que de l’utilisation des climatiseurs, dont sont très friands les Chinois, du fait des canicules plus fréquentes rendent toute prédiction hasardeuse, alors que de leur côté les États-Unis abandonnent leurs ambitions climatiques. Mais la Chine pourrait être très proche dès maintenant de son pic d’émissions. Certes, le pays continue de choquer en construisant de nouvelles centrales au charbon, mais 80 % de la hausse de sa demande en électricité est désormais couverte par les énergies dites propres, approchant ainsi du basculement si elle continue à installer du renouvelable à un tel rythme.
Sa domination de l’économie de la transition n’est pas sans conséquences sur ses relations avec le reste du monde. Pékin considère faire sa part du travail parfois dans des secteurs longtemps délaissés par les Occidentaux tels que les batteries et refuse d’entendre que ses subventions puissent être destructrices d’emplois ailleurs, comme l’en accuse l’UE. La Chine se contente de répéter que c’est elle qui rendra la transition possible pour tous. Les États-Unis ont fermé la porte : Joe Biden avait imposé 100 % de droits de douane aux voitures électriques chinoises et Donald Trump détricote les politiques climatiques.
Les Européens sont donc en première ligne et peinent à réaliser à quel point il sera difficile, si ce n’est illusoire, d’envisager combler le retard industriel et technologique tandis que le leader poursuit son sprint. À une autre époque, la Chine n’était pas parvenue à rattraper les Allemands et les Japonais dans les moteurs à essence, elle avait dû les forcer à s’adosser à des entreprises locales sur son marché.
La technologie chinoise est vraiment forte maintenant. L’Europe est confrontée à ce que subissait la Chine il y a vingt ou trente ans sur les voitures thermiques. Pour promouvoir l’emploi local, il faut demander aux groupes chinois de faire des coentreprises localement, comme la Chine l’a imposé par le passé, conseille Jiang Kejun, qui a longtemps travaillé auprès des planificateurs chinois.
Jordan Pouille, Harold Thibault, correspondants à Pékin. Le Monde du 13 juillet 2025
1 08 2025
Aujourd’hui, en regardant Gaza, en observant jour après jour ce qui s’y déroule, je dois me rendre à l’évidence tragique : un crime a lieu à Gaza, un crime de génocide. Des voix de plus en plus nombreuses, y compris parmi les historiens et les associations israéliennes, se lèvent pour le dire, et je mesure et j’admire le courage qu’il faut pour le faire, à l’image d’Omer Bartov et d’Amos Goldberg, ou de B’Tselem et de Médecins pour les droits humains.
A l’heure où l’on commémore le génocide de Srebrenica de juillet 1995, qui conduisit à la disparition de 8 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie et au déplacement forcé de 30 000 personnes, je comprends désormais comment ce qui me semblait impossible hier est possible aujourd’hui. Je comprends que le silence, l’aveuglement volontaire, la paralysie morale, bien plus que des faiblesses humaines, sont les conditions mêmes par lequel le génocide est possible.
Comment accepter de voir ainsi mises hors-jeu les organisations internationales, bafoué le droit international, sans même évoquer les pressions inouïes exercées sur la justice internationale ? Toutes ces attaques ont bien pour but de maintenir la chape de plomb et de silence, puisque ces organisations ont précisément pour mandat de qualifier et de nommer l’innommable.
Se taire, c’est se rendre complice. Nommer, c’est déjà agir. Oui, il faut aujourd’hui appeler les choses par leur nom. A Gaza, sous nos yeux, c’est bien un génocide qui se déroule. Toutes les formes de mort s’y accumulent : la mort par l’écrasement des bombardements incessants, la mort par la faim organisée, la mort par balle pour avoir voulu arracher quelques grammes de farine à l’arrière d’un camion, la mort par l’abandon absolu d’une population privée d’eau, d’électricité, de médicaments. La mort aussi par l’humiliation quotidienne infligée aux survivants, privés non seulement de dignité, mais aussi de toute espérance. Toutes ces formes de mort convergent dans un seul lieu, sous l’effet d’une intention claire.
Cette intention n’est pas abstraite : elle est annoncée, clamée, revendiquée par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou et de nombreux responsables politiques israéliens qui, avec la complicité de l’administration américaine et la passivité des Etats européens, assument désormais ouvertement le projet d’effacer tout un peuple.
Chaque Palestinien, chaque enfant, chaque vie innocente devient coupable par assimilation à l’acte terroriste du 7-Octobre. Chaque Palestinien, chaque enfant est perçu comme un obstacle à la réalisation du projet messianique d’un Grand Israël. Dans cette logique effrayante, tous deviennent coupables, tous sont condamnés. Aujourd’hui, trop de consciences, partout dans le monde, préfèrent ne pas voir, préfèrent ne pas savoir, et détournent volontairement le regard de cette réalité douloureuse.
Nous vivons trop souvent aujourd’hui hors de l’histoire collective tragique qui est en train de s’écrire, dans une bulle protégée, dans un espace mental, moral et physique où l’indifférence règne en maître, où ceux qui vivent confortablement peuvent détourner le regard des atrocités qui se déroulent à quelques mètres d’eux. C’est l’espace de l’aveuglement volontaire, celui de la complicité passive.
Je veux m’adresser aujourd’hui aux consciences, aux peuples, aux Etats, pour que soient enfin rompus le silence et l’inaction. Pour que chacun, intellectuel, artiste, citoyen, là où il est, prenne position clairement, fermement, immédiatement. Pour que cesse cette complicité passive qui rend possibles les pires tragédies humaines.
Car, demain, personne ne pourra dire qu’il ne savait pas. Nous savons, nous voyons, nous comprenons. Nous avons le devoir moral absolu d’agir, de parler, de nous opposer à cette folie meurtrière qui se déroule devant nous. Reconnaître cette vérité doit plus que jamais nous conduire à refuser tout amalgame, toute essentialisation, à rester attentifs et vigilants pour prévenir tout regain d’antisémitisme.
Il est temps que la France et les nations du monde retrouvent la parole perdue de l’honneur, celle qui refuse le génocide, celle qui refuse l’inhumain. Il est temps de revenir à ce devoir premier de toute politique : protéger les vies humaines, empêcher l’irréparable, préserver l’humanité en chacun de nous. Aujourd’hui, l’histoire se déroule implacablement. Elle nous juge déjà. Ne lui laissons pas dire que nous avons échoué à sauver Gaza. Ne lui laissons pas dire que nous avons été complices par lâcheté ou par indifférence. D’autant plus que nous savons que nous pouvons agir.
Nous savons que nos Etats sont en mesure d’apporter des réponses concrètes. En décrétant la suspension immédiate de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, tant que les violations des droits humains persistent. En soutenant activement la poursuite effective des responsables israéliens devant la Cour pénale internationale et en appliquant ses mandats d’arrêt.
En organisant, aussi, l’acheminement urgent de l’aide humanitaire par le biais d’une intervention armée légitime, motivée par le devoir international de protéger les populations civiles ; en ouvrant les portes de Gaza aux journalistes du monde entier car, plus que jamais, nous avons le droit et le devoir de savoir ; en amplifiant, enfin, la mobilisation internationale pour la reconnaissance d’un Etat palestinien viable, capable de protéger ses citoyens et de vivre en paix et en sécurité aux côtés d’Israël.
Mais, au-delà de tous ces moyens à notre disposition, c’est aujourd’hui la mobilisation de chacun d’entre nous, partout dans le monde, exprimant clairement et fermement son refus de l’inacceptable. Seuls, nous ne pouvons rien. Ensemble, nous pouvons tout.
Dominique de Villepin premier ministre de 2005 à 2007. Le Monde du 1° août 2025
Quand les narco trafiquants versent dans le social. Quand les seules personnes qui s’opposent encore à vous sont les policiers, il n’est pas nécessaire d’avoir pété un câble pour s’afficher ainsi au grand jour. Il y a seulement trente ou quarante ans, un maire se serait étranglé en découvrant un tel courrier ; aujourd’hui, rien, ou trois fois rien : et puis, après tout, ça ne mange pas de pain, n’est-ce pas ?
Lettre d’excuse et d’engagement de la Gitanie aux résidents de Bagnols sur Cèze.
Chers habitants de Bagnols sur Cèze, [du quartier des Escanaux. ndlr].
Nous tenons, par cette lettre, à vous présenter nos plus sincères excuses pour les nuisances sonores et les éventuelles dégradations qui ont pu causer des désagréments dans le quartier. Nous comprenons pleinement que ces situations aient pu affecter votre quotidien, et nous en sommes profondément désolés.
Conscients de l’importance du respect et du bien-être de chacun, nous avons pris la décision de mettre en place plusieurs initiatives afin d’améliorer la situation et de renforcer le lien entre tous les habitants. Aujourd’hui, par exemple, un atelier de peinture est organisé pour embellir le quartier et permettre à chacun de participer à son amélioration.
Si vous avez besoin d’aide, quelle qu’elle soit, sur le plan financier ou pour toute autre difficulté, nous vous invitons à vous adresser à nous. Nous mettons également à disposition des jeunes motivés pour vous rendre service, que ce soit pour des courses, du bricolage ou toute autre aide dont vous pourriez avoir besoin.
Nous souhaitons aussi apporter de la joie aux enfants en installant des stands et en distribuant des jouets pour tous.
Encore une fois, nous vous prions d’accepter nos excuses pour les désagréments passés et espérons que ces actions permettront de créer un climat plus serein et solidaire au sein du quartier.
Pauline Ferrand Prévôt, 33 ans, à quelque dix kilomètres du col de la Madelaine, 1993 m., s’envole vers la victoire de l’étape, laissant la plupart des suivantes à plus de 3′ : elle est bien, seule, et quand elle se retourne pour voir s’il y a des poursuivantes, ses yeux sourient aux nuages, en bas ; il fait toujours beau, au-dessus des nuages ; elle déploie une régularité de métronome, une niaque constante et cela l’habille du maillot jaune, qu’elle gardera le lendemain soir, en gagnant encore l’étape après une autre échappée en solitaire. Elle entre dans la cour des grands. Magnifique championne, dotée d’un remarquable palmarès, très polyvalente, qui a, comme pour la plupart des coureurs, dut laisser de la place aux inévitables galères :
Championne du monde sur route (2014),
en cyclo-cross (2015),
en VTT cross-country (2015, 2019, 2020, 2022 et 2023),
en short-track (2022 et 2023)
en gravel, une discipline qui consiste à rouler principalement sur des routes non goudronnées (2022),
championne olympique de VTT cross-country (2024),
vainqueure de Paris-Roubaix au mois d’avril 2025.
la grande classe…. elle avait du bonheur plein les yeux
6 08 2025
Un printemps bien pluvieux a fait pousser la végétation nettement plus que d’habitude, un été sans eau la sèche et tout cela fait une masse inflammable qui n’attend que le vent et l’étincelle accidentelle ou criminelle pour entrer dans l’apocalypse : 17 000 ha partis en fumée en 48 heures, malgré le combat de 2 100 pompiers. Un mort, 23 blessés, essentiellement des pompiers.
près de Saint Laurent de la Cabrerisse, dans les Corbières, Aude. Abdul. Saboor / Reuters
15 08 2025
Donald Trump n’arrive pas à Arkhangelsk pour y rencontrer Vladimir Poutine les mains vides, mais avec une paix entre Arménie et Azerbaïdjan obtenue une semaine plus tôt à son initiative : Et pourquoi n’as-tu rien pu faire, toi ?
Moïse avait dit : Tout est loi. Jésus avait dit : Tout est amour. Freud avait dit : Tous est sexe. Einstein avait dit : Tout est relatif. Et Donald Trump dit : Tout est business : c’est en confiant à des sociétés américaines la gestion d’un corridor de 35 km de long qui permettra le désenclavement d’un territoire azerbaïdjanais qu’il a obtenu cette paix ; chacun des partenaires en reconnaissait la nécessité, mais en même temps en demandait la gestion exclusive. Trump arrive et leur dit : Poussez-vous, moi, je vais le faire. Et ainsi fut fait.
L’accord prévoit notamment la création d’un ambitieux couloir de transit – ferroviaire, routier, énergétique avec des oléoducs et des gazoducs, numérique avec des câbles de fibre optique – censé relier, sur 32 kilomètres, l’Azerbaïdjan à son exclave du Nakhitchevan, voisine de la Turquie, en passant par la province arménienne de Siounik, qui borde la frontière avec l’Iran. Baptisé Route Trump pour la paix et la prospérité internationale, ce projet vise à désenclaver toute la région.
14 08 2025
À la veille du sommet Trump Poutine en Alaska sur le sort de l’Ukraine :
Ces temps-ci, au brouillard de la guerre s’est ajouté le brouillard de la diplomatie. Il est inutile d’essayer de démêler les impulsions confuses de l’administration Trump. Nous devons prendre pied sur le seul terrain solide à notre disposition : les objectifs russes – d’autant plus que c’est toujours de ce côté que bascule le président américain. Là, les choses sont claires. L’économie russe est en train de sombrer à un rythme accéléré.
Militairement, la Russie progresse, mais pas assez vite pour gagner la course avec le naufrage économique. À Moscou, on a une longue mémoire. On se souvient que la plupart des agrandissements territoriaux de l’Empire russe ont été réalisés avec la complicité et l’aide d’une ou de plusieurs puissances étrangères : dans le sillage de la Prusse et de l’Autriche pour le partage de la Pologne en 1772 ; en s’entendant avec la Turquie pour la reconquête des États caucasiens en 1920 – 1921 ; en s’appuyant sur l’Allemagne pour la reconquête des Etats baltes et l’annexion de la Galicie (pacte Ribbentrop-Molotov, signé en 1939). Pourquoi ne pas avoir recours à Donald Trump pour soumettre l’Ukraine ?
L’outil militaire est toujours un pis-aller aux yeux des hommes du Kremlin. Ils préfèrent de loin la manipulation et la subversion. Et c’est là qu’ils excellent, à cause de l’ignorance occidentale des méthodes de projection de puissance russes, pourtant toujours identiques. Outre la cooptation d’un complice étranger, la deuxième caractéristique de l’expansion russe est la tactique du salami. La Russie débite sa victime en tranches (on l’a vu avec l’Ukraine : d’abord la Crimée, puis le Donbass…) ; la première tranche acquise, elle passe à la deuxième, puis à la troisième.
Les propositions russes à Steve Witcoff [envoyé spécial du président américain, qui s’est rendu en Russie le 6 août] illustrent ce procédé. Vladimir Poutine exige des Etats-Unis que ceux-ci, en préalable à une hypothétique négociation en vue d’un cessez-le-feu, forcent les Ukrainiens à évacuer les parties de la région du Donetsk qu’ils contrôlent encore, et qui sont les lignes fortifiées les plus solides du front ukrainien ; le tout en échange d’un bout de territoire symbolique dans la région de Soumy.
Si Donald Trump se prête à cette manœuvre, la Russie gagne sur tous les tableaux. Elle obtient sans effort des marchepieds stratégiques pour la conquête du centre et du sud de l’Ukraine. Elle démoralise les Ukrainiens en faisant parader les Américains, alignés sur les exigences du Kremlin. Elle discrédite le parti pro-occidental en Ukraine, préparant le terrain à l’installation au pouvoir à Kiev d’un oligarque tenu par Moscou, faisant campagne sur une politique de paix (comme le fait Bidzina Ivanichvili en Géorgie).
Pour obtenir cet alignement, Moscou mise sur la vanité, l’ignorance et la sottise de Donald Trump. Mais pas seulement. La souricière est garnie d’un appétissant bout de gruyère. La Russie fait miroiter à Trump un deal somptueux : en échange d’un coup de main en Ukraine, d’une levée des sanctions et d’un accès renouvelé à la technologie occidentale, elle confierait la gestion et la revente de son gaz destiné à l’Europe à une société américaine.
On peut penser que Donald Trump aurait droit à sa part de cette manne fabuleuse. Là encore, l’histoire est éclairante. Elle nous enseigne le sort de ces concessions octroyées par le Kremlin quand l’économie russe est aux abois : dès que les Occidentaux ont investi et lancé la production, le gouvernement russe spolie le partenaire étranger, encore heureux s’il peut sauver quelques plumes. La Russie utilise la promesse du business à des fins de puissance. Aujourd’hui, elle a besoin de se refaire une santé économique, elle a besoin de vaches à lait, et ce n’est pas la Chine, un prédateur comme elle, qui lui fournira le nécessaire.
Avec Donald Trump, le Kremlin a trouvé le partenaire rêvé qui, à son exemple, réduit la politique étrangère au racket et à l’extorsion. Il reste à voir si Trump osera affronter l’opinion américaine en commettant une infamie inouïe, la trahison d’un allié, abandonné à un ennemi qui a juré sa perte.
Que peut faire l’Europe face à l’axe russo-américain ? Rester lucide, d’abord. Il faudra sans cesse garder à l’esprit l’acharnement avec lequel la Russie a détruit l’Ukraine depuis des décennies, le mélange de brutalité et de machiavélisme diabolique dont elle a fait preuve pour casser le moral ukrainien, faire éclater le front occidental, découpler les Etats-Unis de l’Europe, saper l’Union européenne, tout cela en détruisant sa propre prospérité pour la seule jouissance d’écraser un voisin qui voulait être libre. La Russie est une immense machine de destruction qui, après l’asservissement de l’Ukraine, se ruera contre l’Europe, pas forcément sous la forme d’une invasion militaire mais par la démoralisation et la propagation de la haine, de la bêtise, de l’égoïsme national suicidaire et du nihilisme.
L’Europe devra se dissocier clairement de la trahison américaine. Il faut exiger des garanties de sécurité pour Kiev, insister sur le déploiement de forces européennes en Ukraine, ne pas laisser le pays seul face à la Russie. Il faut que l’Europe prenne conscience qu’elle a des cartes à jouer. L’Amérique de Trump ne suffira pas à remettre à flot l’économie de la Russie. Sans le savoir, les Européens sont en position de force. Historiquement, l’Empire russe n’a tenu que par les Européens cooptés par le pouvoir russe. Aujourd’hui, après leur expérience calamiteuse avec l’autarcie et le pivot vers la Chine, les Russes ont une conscience aiguë de leur dépendance à l’égard de l’Europe.
En conséquence, les Européens doivent faire savoir dès aujourd’hui que les affaires (achat du gaz compris) ne reprendront avec la Russie que lorsqu’elle aura évacué les territoires occupés. L’administration Trump est en train de réaliser le sauvetage du régime de Poutine dont elle a besoin pour racketter l’Europe. L’intérêt de l’Europe est au contraire que la Russie se débarrasse de l’autocratie. Ne donnons pas au régime russe les moyens de soudoyer sa population, d’entretenir un gigantesque appareil militaire et policier dirigé contre nous. Il serait désastreux que l’indépendance économique péniblement acquise face à la Russie soit sacrifiée à des intérêts à courte vue.
Françoise Thom, historienne, spécialiste de l’Union soviétique et de la Russie postcommuniste. Le Monde du 14 08 2025
15 08 2025
Sommet Trump Poutine à Anchorage, Alaska. Après, c’est comme avant. Trump réalise que son tropisme pour le deal, efficace en Arménie/Azerbaïdjan, ne fonctionne pas avec Poutine qui, lui, veut annexer toute l’Ukraine et démanteler l’OTAN et l’Europe.
25 08 2025
François Bayrou s’est épuisé à essayer de gravir cet Everest de problèmes insurmontables, à supporter le poids de cette dette de 3 450 milliards €, qui s’accroit tous les ans de 150 milliards €. Pour ne pas avoir à dire qu’il renonce, il annonce qu’il aura recours à un vote de confiance devant l’Assemblée nationale le 8 septembre : comme il est certain qu’il sera mis en minorité, il n’aura pas à démissionner, puisque ce sont les députés qui se chargeront de le faire. Et cela lui permettra de suivre de près les travaux de restauration à 40 000 € de son bureau de maire de Pau. Et Macron refilera la patate chaude à Sébastien Lecornu, 39 ans, jusqu’alors ministre de la Défense.
26 08 2025
La megafusée Starship de Space X, haute de plus de 120 mètres, réussit son envol, après une série d’échecs. Starship est aussi le nom du vaisseau, le propulseur se nommant Super Heavy.
Emmanuel Macron, président de la République, écrit à Benyamin Netanyahou, premier ministre d’Israël.
Cher Monsieur le premier ministre,
J’ai bien reçu votre lettre du 17 août que vous avez décidé de rendre publique avant même que je ne la reçoive. C’est pourquoi ma réponse, par parallélisme, sera elle aussi rendue publique pour la clarté de nos débats mais pour ma part je tenais à vous le faire savoir et j’attendrai que vous en ayez pris connaissance, c’est là l’élémentaire courtoisie.
La lutte contre l’antisémitisme ne saurait être un sujet d’instrumentalisation et ne peut nourrir aucun désaccord entre Israël et la France.
Au titre des premières actions menées après mon élection, j’ai tenu, dans l’enceinte tragique du Vel’ d’Hiv [la cérémonie s’est déroulée place des Martyrs Juifs du Vélodrome d’Hiver (15° arrondissement de Paris)], le 16 juillet 2017, à solennellement endosser – et vous aviez souhaité ce jour-là être à mes côtés – la définition de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) qui condamne l’antisionisme comme un antisémitisme. C’était la première fois qu’un président de la République français allait aussi loin et je l’assume parfaitement. La protection de nos compatriotes juifs contre la montée de l’antisémitisme est, depuis le premier jour, une priorité absolue de mon action. Cette responsabilité incombe à la France, et la totalité des services de l’Etat y est engagée. Elle ne saurait faire l’objet d’aucune manipulation dans un moment où nous faisons face à l’instrumentalisation d’un conflit qui n’appartient pas à la France mais pèse sur sa cohésion nationale et la sécurité de nos concitoyens.
Alors que j’ai promulgué le 31 juillet dernier la loi proposée par le Sénat relative à la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur, que nous avons tenu de février à avril les assises de lutte contre l’antisémitisme, que la France a consacré 15 000 policiers à la protection des lieux de réunion de la communauté après le 7 Octobre et que policiers et volontaires se sont mobilisés pour la sécurité des athlètes et touristes israéliens lors des Jeux olympiques et paralympiques de l’été dernier, ces accusations d’inaction face à un fléau que nous combattons de toutes nos forces sont inacceptables et offensent la France tout entière.
L’histoire nous enseigne que là où tente de s’ancrer l’antisémitisme, prospèrent avec lui toutes les formes de racisme et de haine. C’est au nom de cette leçon que la République française est l’inlassable ennemie de l’antisémitisme depuis la Révolution de 1789. En conséquence, nul ne peut douter, s’il est de bonne foi, que je demeure et demeurerai garant de l’impérieuse nécessité de combattre cette abomination, partout et toujours. Et ce serait une faute d’expliquer, voire de justifier, l’antisémitisme en France par les décisions que j’ai pu prendre. Les antisémitismes de notre pays viennent de loin, ont longtemps été nourris par l’extrême droite, sont aujourd’hui aussi alimentés par l’extrême gauche qui essentialise la communauté juive et soutient la haine contre cette dernière. Tout antisémitisme est une trahison de la République et de son universalisme.
Mais la définition de l’IHRA ne saurait dédouaner Israël des politiques qu’elle mène aujourd’hui à Gaza et dans le reste des territoires palestiniens. Nous avons de graves désaccords, mais, fidèle en cela à l’amitié qui lie la France et le peuple d’Israël, j’ai tenu à maintenir le dialogue le plus étroit avec vous, un dialogue fondé sur notre attachement indéfectible au droit d’Israël à l’existence et à la sécurité.
Notre détermination à ce que le peuple palestinien dispose d’un Etat est ancrée dans notre conviction qu’une paix durable est essentielle à la sécurité de l’Etat d’Israël, à sa pleine intégration régionale dans un Moyen-Orient enfin en paix, à une logique de normalisation que nous soutenons et qui doit pouvoir être menée à son terme au plus vite. Cette paix durable passera par la création d’un Etat palestinien souverain, reconnaissant Israël et son droit à la sécurité, démilitarisé, vivant dans la paix à vos côtés.
En aucun cas, cette double conviction ne reflète une quelconque complaisance permettant au Hamas ou à d’autres groupes terroristes d’utiliser un tel Etat pour menacer votre pays à l’avenir. L’Etat palestinien doit constituer la fin du Hamas. Nous sommes convaincus, après près de deux ans d’opérations israéliennes à Gaza, que c’est aujourd’hui la seule manière d’éradiquer réellement le Hamas et d’éviter à la jeunesse israélienne de se consumer dans une guerre permanente, dévastatrice pour les Palestiniens de Gaza, mais également pour Israël et la région tout entière.
Pour y parvenir, nous avons, avec l’Arabie saoudite, rassemblé à New York les 28 et 29 juillet dernier de très nombreux gouvernements arabes, occidentaux et autres, qui ont marqué leur disponibilité à s’impliquer dans une stratégie pour le jour d’après, y compris à assumer des responsabilités de sécurité transitoires dans la bande de Gaza dans le cadre d’une mission de stabilisation, à soutenir et contribuer au désarmement des groupes terroristes à commencer par le Hamas, à aider à renouveler une gouvernance palestinienne viable, libérée de l’emprise du Hamas, et à reconstruire un territoire aujourd’hui dévasté.
Cet engagement est inédit. Il résulte de notre indignation face à un désastre humanitaire épouvantable à Gaza que rien ne saurait justifier. Il découle également de la conviction qu’un exode massif de Gazaouis poussés par la famine et la violence, outre l’indignité morale qu’elle constitue, aura des effets directs et durables sur la sécurité régionale et internationale, y compris sur celle d’Israël et de l’Europe. Il résulte surtout d’une volonté collective inédite de voir advenir une paix durable dans un Moyen-Orient où Israël a largement contribué ces deux dernières années à réduire une autre menace, celle de l’Iran.
Cette disponibilité à contribuer à l’après-guerre à Gaza s’accompagne de la résolution d’avancer de la même manière vis-à-vis du reste des territoires palestiniens occupés et de les transformer en un Etat séparé, démilitarisé et réformé qui vivra en paix à vos côtés. Un Etat palestinien où la haine de l’autre n’aura pas de place, qu’il s’agisse de l’enseignement et des autres politiques menées. Nous sommes prêts à être collectivement comptables des engagements pris à New York ainsi que par le président Abbas dans sa lettre du 9 juin 2025.
Ce chemin est difficile, mais il donne à Israël une main puissante et nouvelle sur son avenir : une normalisation étendue à l’échelle du monde musulman ; la fin du conflit permanent qui a affecté votre peuple avant et depuis la fondation de l’Etat d’Israël ; la fin d’une grave dégradation de l’image morale d’Israël, qui est devenue le prétexte et le moteur d’un nouvel antisémitisme que nous devons combattre mondialement.
Cet engagement est inédit et je vous appelle à ne pas l’écarter d’un revers de la main, au nom de notre amitié avec le peuple d’Israël.
Monsieur le premier ministre,
Aujourd’hui, votre gouvernement a décidé d’une nouvelle phase de l’offensive menant à la réoccupation de Gaza. J’ai la conviction, et je la partage avec ces nombreux partenaires, qu’une telle mesure impacterait la vie du peuple israélien pour les décennies à venir, ferait porter un coût insupportable à vos voisins palestiniens et contribuerait à faire manquer l’opportunité historique qui s’offre à vous, en tant que premier ministre ayant conduit aux destinées d’Israël pour la plus longue période de son histoire, ainsi qu’au peuple israélien, de sortir de la bataille qu’Israël mène aujourd’hui à perte, pour gagner la bataille de la paix. L’opportunité de transformer les gains militaires qu’Israël a obtenus sur les terrains régionaux en victoire politique durable au bénéfice de sa sécurité et de sa prospérité.
Les Etats-Unis, le Qatar et l’Egypte n’ont eu de cesse de faire aboutir un cessez-le-feu pour la libération de tous les otages. C’est notre priorité. La France a perdu plus de 50 de ses enfants lors du pogrom du 7 octobre. Trois otages français n’ont pas survécu. En pensant à eux tous, à la famille Bibas et aux David aujourd’hui, à la douleur et à la souffrance de tant de familles qui attendent toujours le retour de leurs proches, et à toute la douleur endurée par les Gazaouis, ma conviction est qu’agir avec humanité et courage pour mettre fin à cette guerre constitue notre devoir collectif, et la seule voie réaliste. Nous vous proposons une voie pour la suite, crédible, engageante pour la communauté internationale et les partenaires régionaux, qui seront au rendez-vous de la paix. C’est votre responsabilité de la saisir.
L’occupation de Gaza, le déplacement par la force des Palestiniens, leur réduction à la famine, la déshumanisation haineuse des discours, l’annexion de la Cisjordanie, n’offriront jamais une victoire à Israël. Ils viendront au contraire renforcer l’isolement de votre pays, nourrir ceux qui y trouvent prétexte à l’antisémitisme et mettre en danger les communautés juives à travers le monde. Les Palestiniens ne disparaîtront pas de la terre où ils ont aussi leur racine et nul ne voit quel chemin s’ouvrirait alors pour que la vocation d’Israël à rester une grande démocratie et le foyer national de la judéité, puisse se réaliser. En un mot ces mesures donneront la victoire à ceux qui refusent qu’Israël soit reconnu comme l’ami, l’allié fiable et le partenaire de confiance qu’il a vocation à être et que nous souhaitons qu’il soit.
La France ne peut se résoudre à voir ainsi un pays ami plonger dans un déchaînement de violence contraire à son histoire, ses origines et son essence démocratique et tourner le dos à la possibilité que l’histoire lui offre aujourd’hui. Je ne peux m’y résoudre et vous propose encore une fois, en ami fidèle, de travailler ensemble, avec tous les partenaires internationaux, à une paix durable pour vous, votre peuple et toute la région. Un cadre crédible pour une sortie de crise à Gaza est à portée de main. Un cessez-le-feu permanent est à portée de main. Quelle autre voie offrez-vous aujourd’hui à vos alliés et à votre peuple ?
Les images barbares de l’otage israélien Evyatar David ont rappelé au monde, si besoin était, que le Hamas ne devait plus jamais représenter une menace pour Israël ni jouer un rôle dans la gouvernance future à Gaza et des territoires palestiniens. Avec cette vidéo infâme, le groupe terroriste poursuit ce qu’il a constamment fait ces deux dernières années : blesser l’âme juive au plus profond, ce faisant nous offensant tous à vos côtés, prolonger le calvaire des otages et des familles et maintenir le peuple de Gaza dans une souffrance inouïe. En agissant ainsi, il cherche également à vous pousser à prendre des décisions irréversibles, qui ne serviront que sa survie et son emprise idéologique et jetteront Israël dans un avenir de guerre que vous avez aujourd’hui la possibilité et l’opportunité historique d’éviter.
La France sera toujours l’amie d’Israël et des Palestiniens et c’est à ce titre, Monsieur le premier ministre, que nous poursuivrons notre action pour la paix et la sécurité de tous.
C’est à ce titre, Monsieur le premier ministre, que je vous appelle solennellement à sortir de la fuite en avant meurtrière et illégale d’une guerre permanente à Gaza qui expose votre pays à l’indignité et votre peuple à une impasse, à cesser l’illégale et injustifiable recolonisation de la Cisjordanie et à saisir la main tendue des partenaires internationaux disposés à travailler à un avenir de paix, de sécurité et de prospérité pour Israël et la région.
31 08 2025
La terre tremble en Afghanistan, – magnitude 6 – à l’est de Kaboul, à 27 km au nord-est de Jalalabad ; le premier décompte parle de 2 205 morts, plus de 3 640 blessés. Des secouristes devront parfois faire cinq heures de marche pour secourir des victimes, la règle des talibans exigeant aucun contact physique avec une femme tant que la famille n’a pas donné son accord, on verra des femmes attendre pendant des heures l’accord de la famille, on verra le département d’État américain faire part de sa sympathie, … mais rien de plus ; l’US Aid a été réduite à rien il y a plusieurs mois.
5 09 2025
L’Europe inflige une amende de 2.95 milliards € à Google pour abus de position dominante. Trump manque de s’étrangler. Google fait appel.
25 09 2025
Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Jean de La Fontaine. Les animaux malades de la peste.
Nicolas Sarkozy, ancien président de la République est condamné à cinq ans de prison dans l’affaire des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle qui l’avait mené à l’Élysée en 2007. Pour une fois que les faits viennent donner tort à La Fontaine, on ne va pas bouder notre satisfaction, ni regretter que les juges refusent que nos gouvernants dirigent une république bananière. Les indignés parleront d’un document, pièce essentiel du jugement, qui serait un faux, terme très maladroitement repris par l’énoncé du jugement quand en fait ce document ne fait que contenir une erreur sur une date (Kadhafi a changé plusieurs fois le calendrier lybien, ce qui a mis beaucoup de confusion dans son administration), ce qui ne fait pas de ce document un faux.
De là à envoyer en prison sans possibilité d’échappatoire un ancien président de la République au motif que l’association de malfaiteurs, finalement la seule qualification retenue, représente un trouble grave à l’ordre public, on se dit que c’est bien embêtant quand des juges perdent toute jugeotte, qu’ils mettent le bouchon bien loin et que vient à leur manquer le plus élémentaire bon sens ; ce qui les anime ne peut pas être la seule justice. Encore une catégorie professionnelle déconnectée de la réalité, n’ayant pas idée de ce qu’entraînent ses décisions ; irresponsable en quelque sorte. Il va faire appel, certes, mais l’exécution provisoire, malgré la présomption d’innocence l’enverra tout de même à la Santé le 21 octobre 2025, avec du jamais vu comme couverture médiatique. Sa demande immédiate de remise en liberté lui sera refusée dans un premier temps, mais il sortira finalement le 9 novembre.
années
amende million €
interdiction d’exercer une fonction publique
interdiction des droits civiques, civils, de famille
inéligibilité
interdiction de gérer, exécution provisoire
Nicolas SARKOZY
5, avec mandat de dépôt à effet différé, exécution provisoire
0.1
5
5
Claude GUÉANT
6
0.25
Brice HORTEFEUX
2
0.02
5
5
Alexandre DJOURI
6
3
15
Wahib NACER
4
2
5
Khaled BUGSHAN
3
4
10
Bechir SALEH
5
4
15
Sivajothi RAJENDRAM
1.5
0.1
Thierry GAUBERT, Éric WOERTH qui, dix jours plus tard deviendra ministre de l’aménagement du territoire dans le gouvernement Lecornu I, Edouard ULLMO, Ahmed BUGSHAM (frère de Khaled) et Ziad TAKIEDDINE († 23 09 2025) sont relaxés.
5 10 2025
Le premier ministre Sébastien Lecornu donne la composition de son nouveau gouvernement : on a bien du mal à voir où peut bien se retrouver la nouveauté : Bruno Le Maire, à la Défense, perçu à tort ou à raison [1] comme étant le ministre qui a accru la dette de 1 000 milliards € et Roland Lescure, macroniste pur jus aux finances… ça ressemble surtout à de la provocation.
La composition du gouvernement ne reflète pas la rupture promise, fulmine aussitôt Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur et président du parti Les Républicains (LR), qui n’a pas été prévenu de cette nomination. Il pourrait quitter le gouvernement dès lundi, à l’issue d’un comité stratégique du parti convoqué en urgence pour trancher le casus belli. Il y avait le soutien sans participation, Bruno Retailleau invente la participation sans soutien, lancera la députée Renaissance des Hauts-de-Seine Prisca Thevenot. On entendra encore : Le seul exploit de Lecornu, c’est qu’il a réussi à cramer le socle commun.
Face à cette bronca, dans les heures qui suivent Sébastien Lecornu démissionne. Tous cela sent de plus en plus la fin de régime. Pitoyable. Pathétique mais presque. Accuser Emmanuel Macron d’être responsable de la situation en ayant dissous l’Assemblée Nationale, c’est tout de même tenir un raisonnement très pervers : c’est dire que les députés élus démocratiquement peuvent former une assemblée à même d’enrayer toute politique, c’est dire que le président de la République a commis une faute quand en fait il n’a fait qu’exercer son droit. Les choses auraient-elle été bien différentes si le président avaient nommé un premier ministre accepté par la gauche ? rien n’est moins sur. Ce qui semble évident, c’est l’impuissance congénitale des partis politiques dans leur actuelle composition à accepter le principe même du compromis, qui soi-disant, ne fait pas partie de la culture politique française. Encore cette référence à la spécificité française qui n’est qu’un blocage psychologique, un refus catégorique d’évoluer. En octobre 2025 la chaîne de télévision Public Sénat invitera des représentants étrangers pour leur demander comment était perçue la situation française chez eux ; Portugal, Italie, Canada français, Grande Bretagne étaient sur le plateau, et l’Allemagne en duplex ; et tous, tous, étaient unanimes : nous avons tout comme vous une même diversité de partis politiques, mais nous avons appris à faire des compromis ; vous les Français, vous ne le voulez même pas ! et donc il est bien normal que vous n’y parveniez pas.
Et quand Emmanuel Macron recevra les représentants du peuple avant de nommer un ènième premier ministre, il refusera d’inviter le RN et LFI ! Ahurissant d’aveuglément comme de surdité ! Et pour relancer la machine à créer la paralysie, le ènième premier ministre sera … Sébastien Lecornu ! Il va très vite faire ce qu’il faut pour que Standards & Poors Global Ratings une Agence de notation dégrade la note de la France, ce qu’avait déjà fait Fitch le 12 septembre et que s’apprête à faire l’Agence Moody’s fin octobre : suspendre la réforme des retraites jusqu’à l’élection présidentielle de 2027.
Par où t’es rentré ? on t’a pas vu sortir. Philippe Clair 1984.
Explique-moi, Papa, C’est quand qu’on va où ?
Auteur : Renaud Sechan, Compositeur Julien Clerc. 2009
J’me suis chopé cinq cent lignes :
« Je n’dois pas parler en classe »
Ras l’bol de la discipline !
Y’en a marre, c’est digoulasse !
C’est même pas moi qui parlais,
Moi j’répondais à Arthur
Qui me demandait, en anglais,
Comment s’écrit No Future
Si on est puni pour ça
Alors j’dis « Halte à tout ! »
Explique-moi, Papa,
C’est quand qu’on va où ?
C’est quand même un peu galère
D’aller chaque jour au chagrin
Quand t’as tell’ment d’gens sur Terre
Qui vont pointer chez « fout-rien »
‘Vec les d’voirs à la maison
J’fais ma s’maine de soixante heures,
Non seul’ment pour pas un rond,
Mais en plus pour finir chômeur !
Veulent me gaver comme une oie
Avec des matières indigestes,
J’aurai oublié tout ça
Quand j’aurai appris tout l’reste,
Soulève un peu mon cartable,
L’est lourd comme un cheval mort,
Dix kilos d’indispensables
Théorèmes de Pytahgore !
Si j’dois m’avaler tout ça
Alors j’dis « Halte à tout ! »
Explique-moi, Papa
C’est quand qu’on va où ?
L’essentiel à nous apprendre
C’est l’amour des livres qui fait
Qu’tu peux voyager d’ta chambre
Autour de l’humanité,
C’est l’amour de ton prochain,
Même si c’est un beau salaud,
La haine ça n’apporte rien,
Puis elle viendra bien assez tôt
Si on nous apprend pas ça
Alors j’dis « Halte à tout ! »
Explique-moi, Papa
C’est quand qu’on va où ?
Quand j’s’rai grande
j’veux être heureuse,
Savoir dessiner un peu,
Savoir m’servir d’une perceuse,
Savoir allumer un feu,
Jouer peut-être du violoncelle,
Avoir une belle écriture,
Pour écrire des mots rebelles
À faire tomber tous les murs !
Si l’école permet pas ça
Alors j’dis « Halte à tout ! »
Explique-moi, Papa
C’est quand qu’on va où ?
Tu dis que si les élections
Ça changeait vraiment la vie,
Y’a un bout d’temps, mon colon,
Qu’voter ça s’rait interdit !
Ben si l’école ça rendait
Les hommes libres et égaux,
L’gouvernement décid’rait
Qu’c’est pas bon pour les marmots !
Si tu penses un peu comme moi
Alors dis « Halte à tout ! »
Et maintenant, Papa
C’est quand qu’on va où ?
Si tu penses un peu comme moi
Alors dis « Halte à tout ! »
Et maintenant, Papa
C’est quand qu’on va où ?
9 10 2025
Accord sur la paix à Gaza. Qui ne s’en réjouirait ? Les Gazaouis vont cesser de vivre sous la terreur des bombardements, 2 000 des leurs devraient être libérés des prisons israéliennes, mais en même temps comment ne pas rester sceptique quand il vient de deux hommes – Trump et Netanyahou – qui ne veulent pas entendre parler d’un État Palestinien ? Dès le 19 octobre les Israéliens reprendront leurs bombardements sur Gaza.
10 10 2025
On les nommera nos cousins d’Amérique : le Français de 30 ans Arthur Rinderknech et le Monégasque de 26 ans Valentin Vacherot font l’affiche de la finale du Masters 1000, le tournoi de tennis de Shangaï et c’est le second, classé 204° mondial, qui l’emporte sur son cousin, classé 54°. Ils sont tous deux pratiquement inconnus en France, et pour cause, tous deux sont partis s’inscrire dans une Université américaine, Texas A & M, de 2014 à 2018 pour le premier parti en éclaireur, de 2017 à 2021 pour le second, puisque les responsables du tennis en France ne les trouvaient pas assez bons pour intégrer l’équipe des grands. Ils ont fait comme Léon Marchand, comme Cyréna Samba-Mayela, en argent sur le 100 m. haies des J.O. De Paris 2024, et ils sont vingt-six comme cela (chiffres donnés par Athlètes USA.com)… il y a un problème évident de management du sport en France.
19 10 2025
Bien souvent, les voleurs gardent une longueur d’avance sur les gendarmes : fric frac d’anthologie vite fait et presque bien fait au Louvre à 9 h 30, presque car les voleurs ont tout de même laissé tomber la couronne de l’impératrice Eugénie, vite retrouvée dans un caniveau, brisée et cabossée, et abandonné pas mal d’objets qu’ils ont manipulé, c’est-à-dire porteurs de 150 ADN : gants, outils, casques etc… . Un monte-charge et une disqueuse pour s’introduire dans la galerie Apollon, et s’y concentrer sur deux vitrines où se trouvent le collier de la parure de saphirs de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense, composé de huit saphirs et de 631 diamants, et le diadème de l’impératrice Eugénie, qui compte près de 2 000 diamants. Au total, plus de 8 700 diamants, 34 saphirs, 38 émeraudes et plus de 200 perles dérobées, Et voilà l’affaire pliée en 7 minutes, avec des bijoux d’une valeur qui sera estimée à 88 millions €. Des gardiens viennent mettre en fuite les voleurs. Deux T Max – des scooters très rapides – suffisent à emmener le butin, et enfin, bien sûr, on a droit à l’inévitable déferlement d’indignations, de lamentations sur fond d’incantation .
Il y a des trous dans la raquette du système de sécurité, et dans la conception même du système car on ne peut pas attribuer ce vol à une défaillance du système : au contraire, tout à fonctionné, tout… sauf le cerveau de ceux qui ont conçu et validé ce système de sécurité. Rachida Dati ira de sa déclaration subliminale : Il n’y a pas eu de défaillance, il y a eu des failles. Belle envolée qui n’est pas sans rappeler un certain, responsable mais pas coupable proféré par Georgina Dufoix en 1991. Mais après tout peut-être bien que les voleurs n’ont pas eu à se creuser vraiment les méninges pour monter ce coup puisqu’il leur aurait suffi d’avoir communication d’un rapport sur la sécurité demandé en 2018 au joaillier Van Cleef & Arpels qui identifiait cette fenêtre donnant sur le quai François Mitterrand comme étant l’un des plus grands point de vulnérabilité de l’établissement. Et quoi de plus facile que de photocopier un rapport pour ensuite le vendre au premier demandeur venu.
Mais comment un monte-charge peut-il être dressé en toute impunité quai François Mitterrand pour accéder au Louvre un dimanche matin ? Le signalement de ce monte charge à 9 h 36 par un cycliste qui a appelé le 17, ne semble pas avoir déclenché quoi que ce soit. sans doute était-il déjà trop tard. Le balcon par où sont entrés les voleurs n’était pas dans le champ de la seule caméra couvrant la Galerie d’Appolon, alors qu’il y avait déjà eu un vol à partir d’un échafaudage en 1976. L’installation de ces caméras, hors emprise du bâti du Louvre, donc sur la voie publique, est-elle du ressort du Louvre et donc de l’État, ou de la Ville de Paris ? Il n’y a pas d’entreprise qui travaille ce jour-là, hormis les services d’astreinte en Santé et Sécurité. Et donc, si l’on voit un monte-charge, cela devrait très vite déclencher une alerte. On repense au 14 juillet meurtrier de Nice, quand les policiers municipaux ne voyaient rien d’anormal à ce qu’une fourgonnette de chantier soit sur la promenades des Anglais un jour férié.
Une vidéo a été prise par un visiteur et a été été dévoilée par BFMTV. On y voit un cambrioleur s’emparer des bijoux avec une aisance déconcertante. On constate aussi l’apathie de toutes les personnes présentes dans la galerie, du simple fait que le voleur avait l’apparence d’un agent en plein travail.
BFMTV
Tous ces oublis, objets perdus dans la précipitation sont du miel pour des policiers férus d’ADN, et dès le samedi 25 octobre, deux des quatre malfaiteurs seront arrêtés, et un peu plus tard, le 30, encore cinq autres. Ne reste plus qu’à trouver la cachette.
Diadème de l’impératrice Eugénie.
Grand nœud de corsage de l’impératrice Eugénie (broche).
Broche reliquaire.
Diadème, collier et boucles d’oreilles de la parure de saphirs de la reine Marie Amélie et de la reine Hortense.
Collier et boucles d’oreilles de la parure d’émeraudes de l’impératrice Marie-Louise.
Diadème de l’impératrice Eugénie
Couronne de l’impératrice Eugénie, retrouvée cabossée dans un caniveau
Le monte-charge utilisé lors du cambriolage du musée du Louvre, le 19 octobre 2025 à Paris. Le fabricant allemand prendra dès lors comme slogan : quand il faut faire vite.
La galerie d’Appolon. Ç’a n’a pas l’air de se bousculer devant les vitrines ; dès lors pourquoi exposer tous ces bijoux ?
25 10 2025
La Fondation Cartier s’installe dans l’ancien bâtiment des antiquaires du Louvre, initialement les Grands magasins du Louvre, réhabilités par Jean Nouvel.
La métaphore du porte-avions employée par Nouvel est éloquente. Il y a quelque chose de militaire dans cette affaire. Ou de carcéral, selon l’angle de vue. Par endroits, on pourrait même se demander si on n’est pas dans une station du Grand Paris Express.
Isabelle Regnier Le Monde du 26 10 2025
Les Grands Magasins du Louvre, rue de Rivoli, à Paris, vers 1880. Paris-Musées/Musée Carnavalet – Histoire de Paris. Il avait commencé par être le Grand Hôtel du Louvre, dès 1855.
La Fondation Cartier pour l’art contemporain, à Paris, en 2025. Martin Argyroglo/Jean Nouvel/ADAGP, Paris, 2025
29 10 2025
Le monde du rap en France… mieux vaut en rire, voire s’en esclaffer qu’en pleurer… le top du bling bling, du tape à l’œil, du clinquant, d’un abyssal vide culturel… un vrai concentré de nullité qui s’est trouvé un paradis : Dubaï et, à défaut, plus près de chez nous, le Maroc.
Tout le monde a une Rolex. Si à 50 ans on n’a pas une Rolex, c’est qu’on a quand même raté sa vie.
Jacques Seguéla
Jacques Séguéla, né en 1934 (la force tranquille, l’un de ses meilleurs appâts) père des rappeurs ? se réjouirait-il d’une telle filiation ? Vu l’immense vanité, vu le narcissisme du bonhomme, c’est bien possible.
Aujourd’hui, le rap s’est hissé au sommet. Depuis une décennie, ses stars, encore presque exclusivement masculines, dominent la scène musicale hexagonale. Leur puissance ne se mesure pas seulement à ces stades remplis en un temps record, aux milliards de streams, aux albums écoulés par dizaines de millions ou aux centaines de millions de vues sur YouTube. Car au-delà de ces chiffres vertigineux, ce genre musical bouleverse la langue française, influence la mode, questionne la société et façonne une certaine vision du monde. Le rap redessine aujourd’hui l’imaginaire collectif de millions de Français bercés à PNL, Jul, Werenoi, Gims, SCH et d’autres.
En dix ans, de 2015 à 2025, tout a basculé : explosion du genre reconfiguré par le numérique ; affaiblissement progressif des géants de l’industrie musicale. Les rappeurs ont de façon spectaculaire renversé le rapport de force avec les maisons de disques : les contrats se signent à leurs conditions, les avances atteignent des millions. Ces artistes ont tous imposé leur façon de faire : celle d’entrepreneurs ultracapitalistes, aussi décomplexés que déterminés.
(…) Jamais avant cette décennie l’argent n’avait tant circulé ni attisé la convoitise d’acteurs issus de la grande criminalité, en toute impunité. Car derrière la face éclatante de l’Empire, une autre réalité plus sombre prospère. Une mécanique de prédation et d’emprise sans précédent s’est enclenchée. Des narcotrafiquants en fuite et recherchés, voire incarcérés, par les autorités françaises traitent en direct avec des majors et leurs méthodes de négociation intègrent inévitablement la violence. Depuis plusieurs années, des rappeurs sont extorqués et menacés, des producteurs et collaborateurs d’artiste tués, le plus souvent dans le silence d’un Empire peu enclin à solliciter l’aide de la police pour régler ses affaires. Jusqu’à ce qu’un palier soit franchi à l’été 2024 avec l’opération menée par un commando de tueurs disciplinés et équipés d’armes de guerre contre l’équipe du rappeur marseillais SCH. L’un de ses membres meurt, criblé de balles.
De jeunes organisations criminelles à la violence sans limite ont fait irruption dans le rap. De Marseille, où elle règne sur un pan du narcotrafic, la DZ Mafia cherche à se diversifier par la force, et les rappeurs multimillionnaires se retrouvent dans son viseur. Plus au nord, entre Paris et Le Havre, la BMF, acronyme de Black Manjak Family, s’est fait remarquer dans le cadre de la sanglante évasion de prison du narcotrafiquant Mohamed Amra. Proche de l’artiste Koba LaD, ce gang se révèle, aussi, bien connu des filiales françaises de majors comme Universal et Sony, qui traitent depuis plusieurs années avec certains de ses membres.
En mai 2025, autour de la mort tragique de Werenoi, plus grand vendeur de l’industrie musicale française de ces deux dernières années tous genres confondus, les larmes et les millions d’euros s’entremêlent. Son distributeur, Believe, tout comme son entourage, avait fini par faire avec le milieu du narcobanditisme, avide de percevoir une part de son avance record et de ses revenus.
Dans le plus grand secret, les majors ont été contraintes de glisser, peu à peu, dans une lente dérive. Quitte à signer avec des structures créées par des figures du crime organisé des accords confidentiels enfouis dans les strates opaques de groupes cotés en Bourse, dont les actionnaires s’appellent Bouygues, Bolloré ou l’Etat français. Comme Frank Sinatra en son temps mais dans des proportions tout à fait inédites, le rap n’échappe pas à la prédation du milieu. Elle est là, incontrôlable, impossible à contourner. Il faut parfois se cacher, partir loin, hors de portée, explorer d’autres horizons. (…)
Ces rappeurs se détournent de la France, s’invitent à la table de présidents africains, de rois et d’émirs. Ils posent leurs valises et logent un pan de leur fortune naissante dans la scintillante cité État de Dubaï, carrefour éphémère et stratégique de cette nouvelle géographie. (…)
L’autoroute des ambitieux du nouveau monde se nomme Sheikh Zayed Road. L’immense bande d’asphalte rectiligne perce une jungle de tours futuristes érigées sur ce qui était, il n’y a pas si longtemps encore, un bout de désert parsemé de villages de commerçants et de chasseurs de perles. Transformée en un centre de négoce et de services haut de gamme en tous genres, Dubaï incarne une forme d’apogée de la réussite. (…)
Chaque semaine, les artistes vont et viennent accompagnés de leurs équipes pour des showcases, des vacances à grands frais mais aussi pour créer des sociétés et ouvrir des comptes bancaires. D’autres s’y installent à demeure, dans l’espoir d’échapper au fisc, à la justice de l’État ou à celle de la rue. (…)
Quitte à réinventer sa vie, pourquoi ne pas le faire dans le bling de Dubaï, confortablement installé à l’une des tables enfumées du Café de Paris ? Cet établissement sans charme ni alcool se situe dans le quartier prisé de Business Bay, mais à l’écart des avenues les plus luxueuses. (…) C’est l’un des lieux de rendez-vous de la frange la plus interlope de la communauté française. Les derniers tubes de rap en fond sonore, des influenceurs se gobergent à une table voisine de celle d’escrocs des cryptomonnaies, qui saluent chaleureusement des agents immobiliers évoquant des transactions en cash et des producteurs de concerts de rap affalés dans des fauteuils, occupés à tirer sur leurs narguilés entourés de filles maquillées à l’excès. Pour le côté mondain, quelques stars défilent en toute simplicité.
Maes [célèbre rappeur franco-marocain] passe de temps à autre, toujours escorté d’amis comme l’influenceur Kamel Tatouage, après un tour au barber shop voisin dont ils font la promotion sur les réseaux sociaux. Lorsqu’il est en ville, son ancien mentor devenu son ennemi du moment, Booba, se pointe au volant d’une Ferrari de location, précédé de son équipe de sécurité. Lacrim est un habitué du lieu et Dadju s’y montre aussi, avant de se produire sur scène, tout comme son frère Gims. Le rappeur exubérant de Saint Ouen Heuss l’Enfoiré ne passe pas inaperçu comme autrefois Werenoi, tous deux unis par leur pacte avec Malsain [surnom d’une figure du narcotrafic en Seine Saint Denis, désormais installée au Maroc, qui s’intéresse depuis longtemps au business du rap. Les auteurs consacrent un chapitre au rôle majeur qu’il joue dans l’ombre de certains artistes.]
(…) Au Café de Paris, à Dubaï, les plus fidèles clients sont les bandits. Ceux-là débarquent à la nuit tombée en Lamborghini, Rolls-Royce Cullinan, Brabus 800, vêtus casual chic ou plus décontracté, en tee shirt, short et claquettes griffées de maisons de luxe. L’atmosphère de la terrasse change alors, du seul fait de leur présence, qui n’échappe à personne. Ces individus dont les noms donnent des sueurs aux policiers ont beau ne pas se cacher, il vaut mieux les observer sans se faire remarquer. Sur les coups de 22 heures, ils prennent place pour se détendre ou gérer les détails de leurs importations de cocaïne et de haschich par tonnes, depuis l’Amérique du Sud, les Caraïbes, le Maroc. (…)
Il n’y a qu’à traverser l’avenue pour retrouver leurs homologues belgo-marocains [allusion à la Mocro Maffia, puissant cartel belge et néerlandais, originaire du Maroc] dans un autre bar-restaurant chicha, le Fomo. (…)
Chaque semaine, dans une boîte de nuit baptisée le Blu Dubaï une soirée est consacrée au rap français, La Parisienne, organisée par un DJ belgo-marocain ayant autrefois officié dans les clubs Blu de Bruxelles et de Rotterdam (Pays-Bas). Dans la succursale dubaïote, il reçoit les plus grands noms du rap français, de Werenoi à Booba en passant par Gims, Maes, Lacrim et SCH. Au point que le Blu est vite devenu un lieu incontournable pour les artistes, qui en ont fait une sorte de filiale offshore de l’Empire. La grande majorité des têtes d’affiche du rap ont des attaches à Dubaï, leur base arrière. Certains y ont même élu domicile à l’année. Ils sont reçus à bras ouverts, avec leurs capitaux et leurs audiences sur les réseaux sociaux où ils vantent la destination. (…)
En France, les rappeurs soudainement riches à millions et leurs producteurs s’agacent des coups de boutoir de l’administration fiscale, en contribuables peu sensibles aux vertus d’une redistribution dont ils n’ont pas toujours bénéficié. Après tant de galères, de misère pour certains, ils ne saisissent pas toujours l’intérêt de verser leur écot à une collectivité qui les a, disent-ils, méprisés et relégués aux marges de la société. Ce partage, les plus généreux d’entre eux le règlent à leur manière en privilégiant les aides directes et informelles ou le versement aux associations de leurs quartiers. Parfois mal conseillés, souvent trop dépensiers, presque tous les artistes à succès ont connu des démêlés avec le fisc, appâté par leurs publications sur les réseaux sociaux, où ils font volontiers étalage de trains de vie disproportionnés. (…)
Les artistes ont appris à jouer avec la mondialisation, choisissant de créer des sociétés implantées sur l’île Maurice, au Luxembourg, au Portugal ou au Maroc pour percevoir leurs avances et leurs revenus. Sur ce plan là aussi, Dubaï occupe évidemment une place de choix. La gamme d’outils financiers nécessaires pour opérer y est aussi vaste que l’offre de conseils en matière de fiscalité et d’investissements. Sans surprise, les rappeurs exigent désormais des majors de leur verser leurs avances et leurs recettes sur des comptes locaux, contrôlés directement ou à travers des proxys, des prête-noms. (…)
À Dubaï, les rappeurs français les plus clairvoyants s’efforcent de réinvestir les fonds dans des business nécessitant peu de compétences et de suivi mais garantissant une certaine rentabilité. Outre les barber shops et les restaurants, Dadju et son manager ont lancé un concept autour du padel dans un complexe chic où le ticket d’entrée pour les investisseurs s’élève à près de 350 000 € pour 10 % du capital. Maes se vante d’avoir investi dans la société qui gère Aristo Desert, un centre de divertissement plutôt coquet, à l’écart de la ville, où les drapeaux du Maroc et des Emirats arabes unis faseyent au vent. Avec sa piscine, ses terrains de jeux, son restaurant et ses locations de puissants buggies pour sillonner les dunes, le site est prisé des rappeurs de passage, de stars du football comme Kylian Mbappé et d’influenceurs. Mais le placement privilégié reste l’immobilier, la valeur refuge à Dubaï, celle qui peut générer de colossales plus-values. (…)
Sheikh Zayed Road a souvent servi de décor et d’inspiration à Maes, devenu ces dernières années une influente star du rap français. Le jeune Franco-Marocain aux nombreux disques de platine s’est établi à Dubaï à la fin de l’année 2021, pour ne pas risquer de tomber sous les balles en plein cœur du quartier des Beaudottes, à Sevran, en Seine Saint Denis, où il a grandi. [Le nom de cette place forte du narco banditisme et du rap revient souvent dans le livre, les auteurs expliquant comment certaines bandes convoitent l’argent des rappeurs.]
Maes le sait : de gros voyous ont placé un contrat sur sa tête. En apparence, ils ne lui reprochent pas grand-chose, si ce n’est d’avoir un peu trop oublié d’où il vient, comme ils disent. Et de tirer profit de leurs propres histoires, celles des petits et grands trafiquants dont Maes chante les mésaventures.
Parmi les griefs figure aussi le refus d’apporter l’aide escomptée à de jeunes rappeurs sevranais désireux de percer dans l’industrie. L’argent de l’artiste, riche et célèbre, ne ruissellerait pas assez dans les poches des caïds et de leurs obligés. Début décembre 2021, en guise d’avertissement, des petits en mission commandée ont mis le feu aux trois véhicules de l’équipe de tournage d’un clip de Maes dans la cité. Deux Mercedes Classe G et un Sprinter partis en fumée. Le lendemain, l’artiste de 26 ans est revenu arpenter le quartier pour en découdre. Aux Beaudottes, deux jeunes hommes du clan ennemi sont visés par des tirs et blessés. Une escalade dans la violence. Avec cette riposte, le rappeur devient une cible à abattre. Sa mère, son épouse alors enceinte de jumeaux, leur petite fille et ses beaux-parents se retrouvent exposés aux représailles de la soldatesque des maîtres de la cité. Maes s’est donc résigné à prendre le chemin de l’exil en famille, en classe affaires sur la compagnie Emirates, pour s’établir à Dubaï. (…)
Dans l’écrin de verdure de Dubaï Hills, il loue une villa cubique de 300 mètres carrés bardée de caméras reliées à son smartphone. La star savoure à nouveau la liberté et, surtout, la tranquillité. (…)
Lui aussi vit pleinement ce Dubai dream. Son ami Kamel Tatouage se mobilise pour l’assister, le protéger, le distraire aussi. Il lui présente du beau monde et veut le mettre bien, inquiet de voir Maes encore aiguillonné par l’angoisse de la mort et, devine-t-il, tenté par la vengeance. Avec lui, l’artiste au sourire enjôleur a pris des kilos de muscles, sculptés chaque jour à la salle de sport Binous, la plus grande de l’émirat, où des instagrameurs français soulèvent de la fonte sans se départir de leurs montres à plusieurs centaines de milliers d’euros. Au fil du temps, le rappeur a fini par prendre goût à ce bonheur clinquant, à cette ville où il peut déambuler sans être reconnu ni menacé. Mais une partie de lui-même est ailleurs. Et en guerre. (…)
En ce début de mois de décembre 2022, c’est son manager du moment qui s’offre une petite semaine sur place. Maes apprécie de passer du temps avec Batire Mendy dit Batzo, trentenaire discret et taiseux qui a aussi lancé sa propre marque de vêtements baptisée MJK, en référence à sa communauté Manjak dont le bras armé est la Black Manjak Family de Koba LaD et ses affidés.
Dix jours après son retour à Paris, à la sortie d’un rendez-vous en fin d’après-midi avec un autre rappeur dans un restaurant de Champs-sur-Marne, Batzo lâche ses derniers mots au téléphone : Je me suis fait allumer. Au bout du fil, son épouse. Ce vendredi 16 décembre vers 19 heures, un sicaire juché à l’arrière d’un scooter vient de le tuer d’une balle de calibre 9 mm tirée dans l’aisselle gauche. Interrogés par la police, plusieurs proches du défunt partagent leurs hypothèses sur un probable lien entre cet assassinat et la guerre déclenchée autour de Maes à Sevran. (…)
Sous le choc, à Dubaï, Maes présente ses condoléances à la veuve de Batzo. Les policiers, eux, ont saisi le téléphone du producteur. Il contient des messages échangés avec Maes montrant que le rappeur cherchait à s’en prendre à Bigor [un membre du camp adverse] et son équipe… Maes l’ignore et tourne dans la foulée un clip sur Sheikh Zayed Road, au volant d’une Porsche blanche décapotable de location, suivi d’un convoi de Rolls Royce, de Mercedes et de Lamborghini immaculées, simplement griffées du nom de son label Omerta étalé en larges lettres sur les capots. (…)
Le deuil n’atténue ni ses envies de vengeance ni sa consommation frénétique. Tout en se préparant à la guerre, Maes veut se constituer un patrimoine pour son épouse et leurs enfants, en cas de chute sur le champ de bataille. (…) Dans la foulée, il a remis son gilet pare-balles pour s’offrir une furtive déambulation dans les rues de Paris. Chacun de ses déplacements est millimétré, les périmètres sécurisés, les voitures souvent changées. Il sait que ses ennemis le traquent sans relâche. Les maîtres du quartier des Beaudottes et des environs savent prendre leur temps. Le prix du pardon, de la sécurité aussi, ils l’ont fixé à un lourd, soit 1 million €, et 50 % des revenus de sa musique, selon les dires de Maes. Cette proposition, formulée par une connaissance utilisée comme intermédiaire, était censée lui garantir la paix et la sécurité. Il l’a refusée. (…)
La police soupçonne que, par messagerie cryptée, il ait pris attache avec une équipe de tueurs à gages de Seine Saint Denis. Le fameux Bigor et l’un de ses associés, avec qui il régente des points de deal dans les cités des anciennes Beaudottes et du Gros Saule, seraient désignés comme les cibles à éliminer. Pour ce contrat, l’artiste proposerait 150 000 € (Note des auteurs : selon une note de renseignement de la section de recherches de la gendarmerie du 14 décembre 2023. À ce stade, Maes n’a toujours pas été entendu par la justice française. Il n’a pas été condamné et reste présumé innocent).
À Dubaï, Maes se met à naviguer dans les eaux troubles de la grande criminalité internationale. Sans oublier le business. Le rappeur a pris soin de développer sa propre marque de vêtements, à l’esthétique évidemment sombre. Il écoule des maillots de boxe et des hoodies griffés du nom de son label, avec trois têtes cagoulées en guise de logo. Sur l’un de ses sites de vente de vêtements en ligne dont le PDG d’Universal Music France, Olivier Nusse, est directeur de publication, l’artiste propose ses collections Balles, illustrée par trois cartouches de calibre, et Cagoule.
Sur une autre plateforme gérée par son label, il commercialise des tee-shirts et pulls siglés Mocro Mafia. (…) Coupé de sa ville de Sevran et en quête de nouvelles sources d’inspiration mais, aussi, d’éventuels protecteurs, Maes commence à discrètement frayer avec des rappeurs de cet écosystème qui viennent se mettre au vert, tourner des clips à gros budget et parler de vive voix avec leurs donneurs d’ordre. Fasciné par la découverte de cet univers, il se met à chanter la Mocro Maffia et à se créer un nouveau personnage encore plus violent, plus marocain aussi et absolument globalisé. Son ami Werenoi n’est alors pas insensible à cette influence. Tu m’as vu à Dubaï en terrasse avec des gros bonnets de la Mocro, chante-t-il avec Lacrim. (…)
Le spectre de Maes plane de plus en plus sur cette spirale de violence meurtrière. Au point que les langues se délient peu à peu et que son dessein de vengeance commence à s’ébruiter. Lui-même s’en ouvre auprès d’autres artistes. Lorsque Werenoi ou Gims lui rendent visite à Dubaï, Maes fait calmement état de ses envies de représailles et livre même des bribes de ses plans. De Paris à Marseille, dans le petit milieu très renseigné des grands truands des cités, le rappeur de Sevran devient un sujet. D’autant qu’il se murmure qu’il contacte de plus en plus d’équipes de shooters sur les messageries cryptées, commettrait l’erreur d’écrire et même d’envoyer certaines de ses sollicitations par messages vocaux.
Maes tente aussi de prendre attache avec des affiliés de la DZ Mafia qui ne donnent pas suite, privilégiant les bonnes relations avec les parrains de ses ennemis. (Note des auteurs : contacté à plusieurs reprises en direct et par le biais de son avocate, Maître Diane de Condé, Maes n’a pas donné suite à nos sollicitations. Maître de Condé précise que l’artiste n’est mis en examen dans aucune procédure à ce jour. De son côté, Universal Music France se refuse à tout commentaire.) En revanche, son activisme finit par attirer l’attention des policiers qui s’intéressent sérieusement au rappeur, désormais plus que fortement suspecté de mettre des contrats sur ses cibles depuis sa villa familiale de Dubaï. Plusieurs enquêtes sont ouvertes par le parquet de Bobigny avant d’être transmises à la juridiction nationale de lutte contre le crime organisé. (…)
Les enquêteurs de la police judiciaire de Seine Saint Denis continuent dans le même temps à avancer dans le plus grand secret. Ils soupçonnent Maes d’avoir réactivé une équipe de la Cité blanche, à Sevran. Elle pourrait être derrière plusieurs assassinats, pensent-ils. Sous l’alias de Renar ou Mario, le rappeur aurait participé activement aux préparatifs d’expéditions meurtrières sur un groupe Telegram dédié, baptisé Top, avec Faucon, qui endosse le rôle du logisticien, ou un certain John Wick, du nom du personnage hanté par la vengeance qu’incarne Keanu Reeves dans une série de films. (…)
Avec une discipline et un professionnalisme quasi militaires, les habitudes de l’ennemi sont patiemment étudiées, les stratégies d’élimination esquissées, le recours à certaines armes de guerre, jugées les plus appropriées, envisagé. Il y a toutefois un imprévu. À Paris, les enquêteurs analysent le téléphone d’un trentenaire contrôlé début juin 2024 à Sevran alors qu’il circulait dans la nuit à trottinette, visage cagoulé et mains gantées. Une banale patrouille l’a arrêté chemin du Marais du Souci, comme un présage.
L’individu s’est laissé contrôler sans opposer la moindre résistance. Sur lui, les policiers ont découvert un pistolet semi-automatique Glock au chargeur garni, prêt à l’emploi. L’exploitation de son téléphone permet aux policiers d’exhumer nombre de conversations entre Renar, Faucon et John Wick. Selon un document judiciaire de synthèse, ces éléments permettent de penser que Maes aurait dirigé les opérations depuis Dubaï en fournissant des instructions précises et en désignant les cibles à abattre. Il finançait également cette organisation en opérant des virements bancaires au bénéfice de plusieurs de ses membres. La justice le soupçonne aujourd’hui d’être derrière deux assassinats, commis respectivement les 3 mai et 14 juin 2024. (…)
Début 2025, à Dubaï, les indiscrétions de la rue apprennent à Maes qu’il fait désormais l’objet d’une notice rouge d’Interpol. Elle a effectivement été émise le 18 décembre 2024 à la demande de la France, mais n’a pas été rendue publique. A l’aube d’une visite du ministre de la justice, Gérald Darmanin, à Abou Dhabi et Dubaï, l’artiste craint l’extradition.
Le nouveau garde des sceaux s’apprête à rencontrer son homologue et des acteurs-clés des milieux sécuritaires émiratis pour évoquer le renforcement de la délicate coopération judiciaire. Jusqu’ici, les demandes d’extradition émises par les Français se sont le plus souvent heurtées à des fins de non-recevoir. En coulisses, les hauts responsables de la police et de la justice françaises n’hésitent pas à parler de corruption au sein de l’administration émiratie. Cette fois, Gérald Darmanin souhaite obtenir des actes concrets. Il prévoit de remettre une liste de vingt-sept Français établis à Dubaï et réclamés par les autorités. Des habitués du Café de Paris, notamment, comme Walid Georgey, Maes à la scène, figurent en bonne position sur ce document confidentiel.
Manifestement informé des préparatifs du déplacement du ministre, pourtant resté secret, le rappeur affine la logistique de son plan de fuite. Le 10 janvier, il célèbre son trentième anniversaire en famille, avec une poignée d’amis. Il n’a pas fait état de sa décision de prendre le large, refusant la fatalité de l’extradition.
Pour quitter les Emirats arabes unis dans la clandestinité, les hors-la-loi ont l’habitude de payer cher pour se faufiler à bord de navires commerciaux vers l’Inde, l’Iran, le Kenya, ou de corrompre des hauts responsables à l’aéroport de Dubaï afin d’embarquer sans laisser de traces sur des vols commerciaux ou de jets privés. Le rappeur a choisi de s’évader par la route, sans son épouse et leurs enfants. Deux jours avant l’arrivée de Gérald Darmanin, ce samedi 18 janvier 2025, Sheikh Zayed Road sert de décor au dernier acte de la vie d’artiste en liberté de Maes.
Par la fenêtre de la voiture qui le transporte, défilent les buildings d’une ville jamais assoupie, puis un désert pierreux ouvre sur les eaux turquoise du golfe d’Oman. Le passeur gère sans anicroche le franchissement de la frontière avec Oman contre quelques milliers de dirhams, pour éviter le signalement à Interpol. L’artiste continue sa route, sans encombre, jusqu’à la capitale du sultanat, Mascate, où il rallie l’aéroport international. Il s’y engouffre dans le confort d’un luxueux jet privé spécialement affrété pour l’occasion, direction Le Caire, d’où il redécolle pour le Maroc. Maes y a acquis la nationalité une dizaine d’années plus tôt et prévoit de s’y reposer, faire venir sa famille, mais aussi de résoudre une bonne fois pour toutes ses problèmes.
Pour ce faire, il compte s’entretenir avec Malsain en vue de négocier avec lui une protection, voire une médiation avec les grands des Beaudottes, à défaut d’un plan d’éliminations ciblées. À l’aéroport de Casablanca où il débarque le 22 janvier, Maes comprend immédiatement que son grand voyage clandestin touche à sa fin : des membres des forces de sécurité royales et des agents en civil se dirigent calmement vers lui. Son dernier coup de téléphone, il le réserve à Gims, pour l’informer de son arrestation et lui demander d’activer son réseau haut placé au Maroc pour intervenir en sa faveur. Les motifs de l’arrestation sont flous mais pourraient être liés à des faits commis sur le territoire marocain ainsi qu’à des liens avec une nébuleuse criminelle suspectée entre autres de trafic d’armes à Tanger, la grande ville du Nord.
Recherché activement par les autorités françaises, signalé par Interpol aux polices du monde entier, le rappeur de Sevran se retrouve cerné. Il est transféré à Tanger, où un magistrat le place en détention provisoire. Il reçoit rapidement la visite de policiers français qui l’interrogent. Les conditions d’incarcération sont rudes. Maes ne bénéficie pas tout de suite des privilèges accordés aux détenus VIP, et son frère Adam peine à choisir un avocat marocain de confiance pour organiser sa défense. L’épouse de l’artiste reçoit de courts appels téléphoniques, lui fait entendre la voix de ses enfants. Dans le cadre de la coopération judiciaire avec la France, des policiers émiratis se déplacent à leur domicile de Dubaï pour notifier, fin février 2025, le gel du compte bancaire du label Omerta. À Marrakech, Gims ne se mobilise pas pour Maes. A Dubaï, il tourne début mai un clip avec Werenoi, dans une ambiance détendue.
Paul Deutschmann, Simon Piel et Joan Tilouine L’Empire, Flammarion 2025. Morceaux choisis dans le Monde du 29 10 2025.
L’ouragan Melissa ravage les Caraïbes, dans le Golfe du Mexique, 30 morts en Haïti, 20 à la Jamaïque. Des vents à 300 km/h. Quelque 735 000 personnes ont été évacuées en Haïti.
A Boca de Dos Rios village, à Santiago de Cuba, le 30 octobre 2025. Yamil Lage / AFP
30 10 2025
Xi Jingping et Donald Trump se rencontrent pendant 90′ sur l’aéroport de Pusan en Cotée du sud. Si tu ne veux plus me vendre tes microprocesseurs je ne te vends plus mes terres rares. Tout est dit et Donald Trump fera du rétropédalage. Du temps de la guerre froide – 1950 – 1989 – les échanges entre la Chine et les États Unis étaient de 2 milliards $/an ; aujourd’hui, ils sont de 2 milliards $/jour !
1° 11 2025
On est entre le mur des lamentations et un bunker d’Elon Musk.
5 11 2025
Shein – roi chinois de la fringue à bas prix – inaugure son magasin au BHV : tempête de protestations de la vertu outragée, grand’ messe de l’incantation, tous horizons politiques confondus. Une voix s’élève pour proposer un retour sur terre : celle de Thierry Breton : Mais pourquoi donc ne se contente -t-on donc pas de faire appliquer la loi, qui est européenne, mais qui existe depuis plus de trois ans ?
Thierry Breton, ancien commissaire européen chargé du marché intérieur (2019 – 2024), a défini le cadre juridique pour réguler l’espace numérique européen, à travers le règlement sur les services numériques (Digital Services Act, DSA), le règlement sur les marchés numériques (Digital Markets Act, DMA), le règlement sur les données (Data Act) et le règlement sur l’intelligence artificielle (AI Act). Il s’étonne que cette législation, adoptée à l’unanimité des États membres et par plus de 90 % des députés européens, n’ait pas été appliquée depuis 2023, alors que plusieurs géants du numérique bafouent ouvertement les règles européennes. En particulier la plateforme d’origine chinoise Shein, placée sous surveillance par le gouvernement et sous le coup de procédures judiciaires après la découverte sur le site la société de poupées sexuelles d’apparence enfantine et d’armes de catégorie A.
La législation européenne, adoptée en 2022, permet-elle toujours de responsabiliser les plateformes numériques ? L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis semble avoir libéré certains propriétaires de plateforme de tout engagement…
Que ce soit le DSA, le DMA ou le Data Act, nos lois numériques européennes ont été conçues non pas pour se donner bonne conscience, mais pour protéger nos enfants, nos concitoyens, nos entreprises, notre démocratie dans l’espace informationnel européen. Après de longs mois de débats, elles ont toutes été votées avec le soutien massif du Parlement européen et le soutien unanime des États membres. L’affaire Shein démontre à l’évidence qu’il faut commencer à les appliquer si l’on veut responsabiliser les plateformes numériques et ne pas faire comme si on découvrait ce qu’il s’y passe. Un point c’est tout.
Notre marché numérique est le plus important au monde. Il est ouvert à tous. Mais les entreprises non européennes qui veulent en tirer profit doivent respecter nos règles pour pouvoir y vendre leurs services. Alors, bien sûr, j’entends ceux qui disent en Europe qu’il faudrait peut-être ne pas les appliquer pour ne pas déplaire à Donald Trump et risquer une nouvelle salve de droits de douane américaine. Ou encore pour se prémunir contre une rétorsion éventuelle sur les terres rares de la part de la Chine. Est-ce que les États Unis ou la Chine se refusent, de leur côté, à appliquer leurs propres lois pour nous être agréables ? Ou par risque de nous déplaire ? Les enquêtes de la Commission européenne contre X, Google, Apple, Meta ou Shein tardent à sortir. La France doit-elle faire pression sur la Commission ?
J’espère que la France n’a pas attendu la révélation de ce scandale Shein pour le faire. Avant ma démission de la Commission européenne, le 16 septembre 2024, les services avaient lancé un nombre important d’enquêtes au regard d’éléments sérieux et concordants, notamment contre X, Meta, Tik Tok, Temu, Ali Express. Cela fait maintenant plus de dix-huit mois pour la majorité d’entre elles. Or, on assiste depuis à des débordements accrus innombrables, quasi quotidiennement, sur les réseaux sociaux : cyberharcèlements en tous genre, incitation au suicide, atteinte à l’État de droit, ingérences et attaques sur nos démocraties, ventes de produits totalement illégaux – pédopornographie, armes, etc. Tous les jours, des alertes de manquement aux règles qui régissent les plateformes, conformément au DSA, sont émises. Qu’attend-on pour réagir conformément à la loi ? Ce n’est pas un énième sommet sur le contrôle de nos réseaux sociaux et de notre espace informationnel dont on a besoin, c’est simplement d’appliquer les lois votées au niveau européen. Ma conviction est que, si tel avait été le cas, nous n’aurions pas à agir dans l’urgence et la précipitation sur Shein.
Le gouvernement a pris début novembre des mesures afin de bloquer Shein en France, alors que d’éventuelles sanctions relèveraient de la législation européenne. Comment l’expliquez-vous ?
Je ne connais pas la nature exacte des mesures envisagées et, donc, si elles peuvent être mises en œuvre au regard des droits européen et français. Ce que je sais, en revanche, c’est que, le 26 avril 2024, j’avais, en ma qualité de commissaire européen, notamment chargé du numérique, désigné Shein comme plateforme systémique au regard de son activité et parce qu’elle comptait plus de 45 millions d’utilisateurs en Europe. C’est un fait public. À ce titre, elle devait répondre à des obligations d’audit et de contrôle très strictes sur la vente de produits illégaux ou à risque pour les consommateurs. Cela veut dire que Shein devait fournir dans les quatre mois, puis tous les ans, un rapport détaillé des mesures de protection prises. Ce serait intéressant, me semble-t-il, de les rendre publiques, dans le contexte de l’affaire Shein. Avec le DSA, Bruxelles a, en tout cas, tous les outils pour agir dans l’immédiat. Y compris sur les algorithmes. Elle en a même l’obligation. C’est le mandat qu’elle a reçu des États membres, dont la France. Les lois sont faites pour être appliquées avec diligence.
Emmanuel Macron participe, le 18 novembre, à Berlin, au sommet sur la souveraineté numérique européenne. Que souhaiteriez-vous l’entendre dire ?
Qu’il dise que les lois numériques, qui, je le rappelle une fois de plus, ont été votées par une écrasante majorité des députés européens, soient, une bonne fois pour toutes, appliquées sans délai et avec détermination. Qu’il s’agisse du DSA, DMA, Data Act, DGA [Data Governance Act ; règlement sur la gouvernance des données] ou AI Act, elles constituent le socle commun de protection de nos enfants, de nos concitoyens, de nos entreprises, de nos démocraties, le plus abouti à ce jour dans le monde.
Elles ne sont peut-être pas encore parfaites, elles peuvent peut-être être améliorées, mais il faut les appliquer. Et non ouvrir, une fois de plus, je ne sais quel débat sur leur pertinence ou leur supposée intransigeance vis-à-vis des Gafam. Et lorsque, pour éviter de déplaire à ceux-ci, je vois que certains, à Bruxelles, voudraient déjà, avant même de les avoir mises en œuvre, assouplir les règles de l’AI Act, votées par nos colégislateurs, pour minimiser, en Europe, les risques liés au développement massif et non contrôlé de l’intelligence artificielle, les bras m’en tombent !
Thierry Breton, ex-commissaire européen au Marché intérieur. Propos recueillis par N. Se. Le Monde du 11 11 2025
22 11 2025
Amine Kessaci, militant marseillais contre le narcotrafic rend hommage à son frère Mehdi assassiné le 13 novembre :
Au nom de mon frère Mehdi, mort pour rien, exécuté en pleine rue, au nom de ma famille déchirée de douleur, au nom de tous les miens, je veux vous remercier d’être mobilisés aujourd’hui.
Mon frère Mehdi était innocent. Il n’était coupable que d’être mon frère. Il était bon, droit, sincère. Il avait la vie devant lui. Retenez son nom. Faites-le retentir ou murmurez-le, peu importe. Mille fois répétez son nom. Ne le laissez pas tomber dans l’oubli qui est une seconde mort. Mehdi, Mehdi, Mehdi. Mehdi mon frère. Je suis inconsolable.
Je demande la justice pour Mehdi. Je demande la Justice pour Brahim, mon autre frère assassiné. Je demande la sécurité pour ma famille.
Mon frère Mehdi voulait être gardien de la paix. Il faut que la paix revienne dans nos quartiers. Il faut que notre jeunesse puisse grandir sans craindre de mourir. Ce n’est pas parce que nous vivons dans des quartiers populaires que nos vies ne valent rien.
Mon frère est mort pour rien, et on nous traite comme des moins que rien.
Nous aussi, nous valons la peine. Nous aussi, nous voulons un avenir. Nous aussi, nos nuits sont mêlées de cauchemars et de rêves. Nous aussi, nous aimons nos parents, et nos parents aiment leurs enfants.
Un homme politique a proposé que je reçoive la légion d’honneur, mais je ne cherche aucun honneur pour moi. Ma poitrine est trop lourde de douleur pour recevoir une quelconque décoration.
Ce sont les mamans des quartiers qui méritent une décoration. Pour leur courage, leur dignité, pour leur combat de chaque jour. Ma mère s’est battue pour nous élever et nous protéger. Et aujourd’hui, elle a perdu deux fils. C’est elle pourtant, qui me permet de tenir debout.
Pour elle, je ne me tairai pas. Je continuerai à dire ce que mes yeux voient, ce que mon esprit sait et ce que mon cœur me dicte.
Depuis des années, nous alertons. Nous parlons parce que nous savons que le silence tue. Mais qui nous écoute ?
L’État nous abandonne depuis trop longtemps. Chacun de ses reculs a favorisé l’avancée du narcotrafic. Le départ des services publics, la fin de la police de proximité, les moyens trop faibles des enquêteurs et des enquêteuses, les enseignants auxquels on demande tant en leur donnant si peu. Voilà ce qui fait les affaires des trafiquants.
Bien sûr, nous avons besoin de policiers, de sécurité. Bien sûr, il faut renforcer les moyens de la lutte contre le narcotrafic. Mais nous avons besoin de justice sociale, d’engagement de l’Etat et des collectivités, de soutien aux associations qui font le boulot tous les jours avec très peu de moyens, et je sais de quoi je parle parce que depuis des années l’association Conscience, présidée par ma mère, fonctionne avec des moyens dérisoires.
Nous ne demandons pas la charité. Nous demandons la justice. La France entière doit comprendre que ce qui se passe dans nos quartiers la concerne. Ce pays a fermé les yeux sur ce que nous vivions, et maintenant il se réveille avec un monstre qui s’est infiltré partout. Notre pays a un problème avec les drogues : il vit sous dépendance. Et cette dépendance est exploitée par le narcotrafic. La souffrance psychologique et la misère qui monte sont des armes puissantes entre leurs mains. Ils jettent leur dévolu sur les enfants perdus de la République, les déshumanisent en les dressant comme on dresse des bêtes féroces, puis en font des esclaves dociles.
Voilà la vérité : le narcotrafic recrute. Le narcotrafic contrôle. Le narcotrafic corrompt. Et le narcotrafic tue. Plus personne ne peut dire que nous ne savions pas.
Mes frères sont morts. Mais vous tous, vous êtes vivants. Nous sommes vivants. Je ne sais pas ce que sera ma vie maintenant. Mais je sais que j’ai besoin de vous, de votre engagement, dans la durée.
Entrez en résistance. Luttez, parce que lutter c’est vivre.
Je veux voir toutes les mains se lever. Dressez-les vers le ciel pour rendre hommage à mes frères assassinés. Levez-les pour dire que nous sommes ensemble. Levez-les pour dire que ce pays ne baissera pas la tête. Levez vos mains et levez-vous. N’attendons pas assis que le narcotrafic détruise nos vies et notre pays. Pour nos quartiers, pour la justice, pour nos familles, pour nos vies, levons-nous. Debout, debout, debout.
Amine Kessaci, militant marseillais en lutte contre le narcotrafic
Paco Rassat, 27 ans, natif des Aillons, au nord de Montmélian, à l’est du Bourget du Lac, gagne le slalom de Gurgl, Autriche. Il était 14° à l’issue de la première manche ; les journalistes parleront de remontada fantastique : on peut modérer le propos en regardant le tableau d’arrivée où l’on voit que le 19° temps de cette première manche était à un peu moins d’une seconde du premier… donc remontada certes mais avec une petite pente. Et c’est dire combien ils se tiennent…
23 11 2025
Productivité affaiblie, tensions commerciales, endettement public non maîtrisé… Les raisons d’être pessimiste pour l’économie française s’accumulent, explique Patrick Artus, conseiller économique d’Ossiam et membre du Cercle des économistes.
La croissance du produit intérieur brut (PIB) n’a été en France que d’environ 1 % par an depuis 2010, et elle plafonne autour de 0,8 % en 2025. Tout laisse penser qu’elle se stabilisera durablement sous le seuil de 1 % par an.
Une dynamique aussi faible entraîne une série d’effets négatifs : progression ralentie des recettes fiscales ; moindre attractivité du territoire pour les investisseurs, qu’ils soient français ou étrangers ; incitation accrue pour les épargnants à placer leur argent à l’étranger ; faible surplus à répartir entre salariés et entreprises, et donc tensions accrues dans le partage de la valeur. Cette prévision d’une croissance anémique est probablement fondée, tant les facteurs défavorables à l’économie française s’accumulent.
Il s’agit d’abord du recul de la productivité du travail : au deuxième trimestre 2025, elle reste 2,2 % en dessous de son niveau du printemps 2019, point haut historique. Certaines causes sont conjoncturelles (survie artificielle d’entreprises peu performantes grâce aux aides Covid, développement de l’apprentissage…), mais beaucoup sont structurelles : dégradation du système éducatif, comme le montrent les résultats des enquêtes du programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves (PISA) ; niveau de compétences insuffisant de la population active, selon l’enquête du programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes ; faiblesse des dépenses de recherche-développement des entreprises (1,5 % du PIB, contre 2,4 % en Allemagne et 2,8 % aux Etats Unis) ; sous investissement dans les nouvelles technologies.
Deuxième facteur défavorable, le vieillissement démographique. La population des 20 – 64 ans, moteur de l’activité, passe de 54,2 % en 2020 à 54 % en 2025, et atteindra 53,6 % en 2030. Le recul du taux de fécondité (1,62 en 2024) amplifie cette tendance, les naissances étant désormais inférieures aux décès.
Si la productivité recule, et s’il en est de même de la population en âge de travailler, la croissance ne peut venir que d’une source : la hausse du taux d’emploi. On appelle ainsi le pourcentage de la population en âge de travailler ayant effectivement un emploi. Celui des 15 – 64 ans atteint 69,5 % au deuxième trimestre 2025, contre 69 % un an plus tôt (il n’a reflué que très légèrement au troisième trimestre : 69,4 %). Cette progression provient essentiellement de l’application des réformes successives des retraites. Mais lorsque l’emploi des plus de 60 ans cessera de monter, le taux d’emploi global se stabilisera. Et, sans transformation du système éducatif, la croissance de long terme de la France deviendra nulle.
Troisième handicap : les droits de douane instaurés par l’administration Trump : 15 % sur les importations européennes (50 % sur l’acier et l’aluminium), 30 % sur les produits chinois. D’une part, ils affaiblissent les exportations de la France vers les États Unis (− 12,6 % sur un an) ; d’autre part, ils conduisent les Chinois à rediriger une partie de leurs exportations vers l’Europe. La forte progression des exportations de la Chine vers la France, + 6,7 % sur un an, se fait au détriment des entreprises françaises.
Quatrième caractéristique défavorable à la France : l’incapacité collective à affronter la réalité des finances publiques, en particulier des comptes sociaux. Les enquêtes d’opinion (comme celle de l’IFOP pour BFM-TV en septembre 2025) montrent un rejet massif de toute réduction des dépenses sociales : santé, retraites, prestations diverses. Or ces dépenses représentent 32,3 % du PIB et expliquent les trois quarts de la hausse des dépenses publiques. Refuser de les maîtriser revient à empêcher la stabilisation de la dette, et donc à laisser dériver durablement les finances publiques.
Certes, une crise aiguë des finances publiques reste improbable : la France présente en 2025 un déficit courant faible, ce qui écarte une crise de balance des paiements. Par ailleurs, un défaut souverain de la France entraînerait un choc systémique dans la zone euro, voire la disparition de la monnaie unique : un tel scénario est peu crédible. Le risque réel est plutôt celui d’une hausse lente et continue des taux d’intérêt à long terme. Le taux à dix ans dépasse déjà le taux de croissance de long terme en valeur (inflation comprise) : 3,4 % contre environ 2,5 %. Une telle situation alimente la dette, freine l’investissement productif et pèse encore davantage sur la construction de logements.
Dernier facteur défavorable, le poids croissant des réglementations et normes. Le secrétariat général du gouvernement, qui mesure le stock de mots pour dire des normes, indique que celui-ci a gonflé de 94 % depuis 2002. Une telle inflation normative alourdit la gestion administrative des entreprises et réduit leur dynamisme.
Pris ensemble, ces éléments rendent difficile tout optimisme quant aux perspectives économiques françaises. Récapitulons : productivité affaiblie par un système éducatif dégradé, compétences insuffisantes et effort de R&D trop limité ; commerce extérieur pénalisé par les tensions commerciales ; dette publique en hausse continue sous l’effet de dépenses sociales non maîtrisées ; environnement réglementaire de plus en plus contraignant.
Le plus préoccupant reste peut-être l’absence d’inquiétude collective face à ces évolutions.
Patrick Artus est conseiller économique d’Ossiam et membre du Cercle des économistes. Le Monde du 23 11 2025
25 11 2025
Un très grand monsieur nous quitte. Si les grands de ce monde s’étaient soucié de distinguer ceux qui ont fait de leur métier un sacerdoce, – mais est-ce souhaitable ? – Emmanuel Reynaud aurait reçu cette distinction : mais était-il seulement demandeur ? Son métier : vigneron. Mais après tout, puisqu’il existe un meilleur ouvrier de France dans bien des métiers, il pourrait bien exister un meilleur vigneron de France.
Il élaborait un vin qui faisait rêver tous les passionnés, mais que bien peu ont eu la chance de goûter. Produit sur 10 hectares de vignes en quantité très limitée (environ 15 000 bouteilles par an), sans communication ni marketing, à l’écart des médias, Château Rayas est devenu, sous sa houlette, un vin mythique. Homme de silence et de recueillement face à la nature, Emmanuel Reynaud est mort le 25 novembre à Châteauneuf du Pape (Vaucluse), à 61 ans, des suites d’un cancer du rein, et le monde a perdu un de ses plus grands vignerons.
Rayas existait bien avant Emmanuel Reynaud. Son arrière-grand père Albert Reynaud avait fait l’acquisition des premières parcelles de vignes en 1880. Quand il reprit le domaine en 1997, après le décès soudain de son oncle Jacques Reynaud en pleine rue d’Avignon, ce châteauneuf du pape au terroir atypique et au goût inimitable avait déjà une belle réputation.
Mais, en replantant une partie des vignes, en refusant la course au rendement et à la concentration, en privilégiant des temps d’élevage très longs – il ne commercialisait ses cuvées qu’au bout de huit à dix ans -, Emmanuel Reynaud a réussi à hisser le vin à son sommet. Les amoureux de la production de son oncle avaient pourtant douté, à ses débuts. Quand un vigneron meurt, on porte toujours son travail aux nues, nous confiait-il en 2017. Ce qui peut devenir problématique quand son vin est le reflet de sa personnalité. Voilà pourquoi j’insiste à laisser le terroir l’emporter sur l’homme. L’expression du terroir, contrairement à une personnalité, peut se transmettre d’une génération à l’autre. J’espère que mes enfants continueront dans cet esprit. Il appartient désormais à ses fils Benoît et Louis Damien de respecter ce souhait.
À tous les égards, Château Rayas est devenu un vin hors norme. Sur place, nul château ancien, nulle bâtisse prestigieuse, pas de visite guidée ni de séance de dégustation. L’endroit n’abrite qu’un modeste chai en béton et des vignes éparpillées au milieu des bois, à l’abri des curieux. Même si l’appellation châteauneuf du pape permet l’assemblage de 13 cépages pour équilibrer le goût du vin en fonction du millésime, celui-ci ne contient que du grenache.
Alors que la réputation du terroir de Châteauneuf du Pape tient à ses galets roulés et son argile, le sol de Rayas est fait d’un sable fin, léger, dépourvu d’argile. Emmanuel Reynaud affectionnait particulièrement ce terrain dont la pauvreté était la richesse, car sa légèreté se retrouve dans le vin, avec un fruité très pur. Le résultat dans le verre est ainsi toujours déroutant : tandis que les châteauneufs sont habituellement sombres et opulents, Rayas affiche un rouge translucide très bourguignon, une élégance olfactive et une finesse en bouche qui n’appartiennent qu’à lui.
À l’écouter, Emmanuel Reynaud ne comptait pas pour grand-chose dans ce résultat. C’est la nature qui fait tout. Je ne suis là que pour la suivre et la laisser exprimer son originalité. C’est ce qui permet de façonner des vins qui racontent une histoire. Mais savoir s’effacer n’est pas aisé, il faut alors accepter de tout perdre quand la nature se rebelle, comme en 2018, année terrible en raison du mildiou. Aujourd’hui les humains veulent agir, exploiter, tout maîtriser. Ils oublient d’admirer la beauté de la création, expliquait ce fervent croyant. Nous ne sommes que des locataires de la création et notre devoir est de la respecter, la faire vivre et la partager autour de nous.
Ecœuré par le pouvoir de l’argent, Emmanuel Reynaud choisissait avec soin ses clients, ne vendait ses bouteilles qu’au compte gouttes pour contenter les passionnés plutôt que les acheteurs au portefeuille garni, refusait les cavistes et restaurateurs pratiquant des marges trop élevées. Mais ses vins sont devenus si recherchés qu’ils s’arrachent désormais, à la revente, à des prix dix fois supérieurs au tarif initial. Les amateurs peuvent toutefois se consoler avec les autres cuvées qu’il a élaborées, moins prestigieuses mais plus accessibles et au style proche : Château de Fonsalette, Pignan, La Pialade, Château des Tours.
Concernant Rayas, la bulle spéculative va certainement continuer à prendre de l’ampleur au fil des sorties de ses cuvées posthumes, au point que certains allocataires pourraient préférer revendre leurs bouteilles plutôt que de les boire. Rien n’aurait fait plus de peine à ce vigneron.
Ophélie Neiman. Le Monde du 26 11 2025
Au milieu des vignes du Château Rayas, à Chateauneuf du Pape (Vaucluse), en 2017. Arnold Jerocki/Divergence pour Le Monde.
1 12 2025
Le cyclone Ditwah ravage le Sri Lanka, l’Indonésie tuant au moins 1 200 personnes.
fin 2025
Mise en service de la gare de Villejuif Gustave Roussy desservie par les lignes 14 et 15 sud du futur réseau de la RATP, réalisé pour le Grand Paris :
Avec ses 9 niveaux étagés dans un puits de 40 mètres de diamètre, on est dans l’une des gares les plus profondes du réseau, la deuxième après la gare de Saint Maur Créteil, qui descend à 52 mètres de profondeur où passera également la ligne 15. C’est un chantier en profondeur importante. En fait, on construit ici un immeuble de très grande hauteur dans le sens inverse, déclare Cyril Papon, chef de projet secteur pour la gare.
Vu d’en bas, la gare et son dôme de verre présentent des allures d’une basilique. La toile de verre qui flotte au-dessus du puits laisse pénétrer l’air et la lumière dans les 9 niveaux de la gare. Cette gare, il faut l’imaginer comme un connecteur entre le monde de dessous et du dessus. On va conduire la lumière naturelle jusqu’à 50 mètres de profondeur, explique son architecte Dominique Perrault.
Gare emblématique du Grand Paris Express, Villejuif – Gustave Roussy connecte deux lignes du futur réseau : la ligne 15 Sud et le prolongement sud de la ligne 14. – Valentine Chapuis/AFP
[1] à tort … parce que, aux dires de l’intéressé, chaque fois qu’il a voulu parler de cela avec Emmanuel Macron pour envisager les mesures nécessaires, chaque fois cela s’est clos par un refus catégorique.
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