1 juillet 2016 à février 2017. Donald Trump, un « réaliste » imprévisible et « bas de plafond ». Réfugiés. Terreur à Nice. Irma ravage les Antilles. 18818
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Publié par (l.peltier) le 16 août 2008 En savoir plus

1 07 2016

Face à la pression foncière et immobilière qui s’exerce sur la Côte d’Azur, on aurait pu croire que le Parc national de Port-Cros était contraint à une position défensive; eh bien il n’en est rien,  tout au contraire, car le voilà qui signe avec les communes figurant sur cette carte une charte par laquelle elles s’engagent à mettre en œuvre des mesures de protection déjà en vigueur au sein du Parc de Port-Cros, ce qui sur terre concerne 11 191 ha, et en mer 123 000 ha.

3 07 2016

Un minibus piégé tue 323 personnes en plein centre de Bagdad, dans un quartier commerçant majoritairement chiite : l’attentat est revendiqué par le Groupe EI.

14 07 2016    22 h 45′

Un camion fonce sur 2 km de la promenade des Anglais, à Nice tuant 86 personnes, à la fin du feu d’artifice. Alexandre Niguès, 38 ans, grutier à Nice, rentre chez lui en vélo, voit le camion, voit qu’il est là pour tuer, pose son vélo, accroche le camion coté conducteur, voit le chauffeur se saisir d’une arme, vitre fermée. Il saute pour échapper à un tir. Dans les secondes suivantes, Franck Terrier, quinquagénaire travaillant sur l’aéroport, arrive en scooter sur l’arrière du camion qui l’a doublé précédemment, après avoir fait descendre sa femme, parvient à jeter son scooter sous les roues du camion puis à entrer dans la cabine coté conducteur, vitre ouverte, et se battre avec le terroriste qui lui donne un coup de crosse ; et quand il s’en relève, reprend le combat : le camion est alors à l’arrêt. Il va se cacher derrière la roue avant-gauche.

Mais comment ne pas se poser de question sur la qualité du travail fourni par les policiers de Nice, municipaux aussi bien que nationaux, avant le drame : la partie piétonne de la Promenades des Anglais est interdite aux camions de plus de 3.5 tonnes. Nice est la ville de France avec la densité maximum de caméras de surveillance : 1 257 – une pour 360 habitants – ! Les jours précédents, le terroriste est venu repérer les lieux avec un camion de location de 19.5 tonnes, camion bien anonyme puisque le nom du loueur – ADA – n’y figure même pas ! Sur l’ensemble du territoire, la circulation est interdite à ce genre de véhicule du samedi 22 h au dimanche 22 h, et les jours fériés et jours de fête ! Donc, ce camion n’avait pas le droit de circuler le 14 juillet !

Il n’y a donc eu personne pour visionner ces vidéos, et en tirer les conséquences : un véhicule de location de 19 tonnes, dans une zone qui lui est interdite ? Et, le 14 juillet, ce même camion de livraison à 22 h 45′ : de quelle société, pour livrer quoi, à qui ? Quels sont donc les restaurateurs, les bars qui attendent une livraison un 14 juillet à cette heure-là ? Les approvisionnements ont été faits au plus tard le vendredi 11, et si une fourniture vient à manquer, eh bien, le serveur dit désolé. Il n’y en a plus. Un déménagement ? À cette heure-là ? Où est l’autorisation municipale ? Où est donc l’indispensable et si déconsidéré bon sens ? Ils étaient 64 de la police nationale, il y avait aussi la police municipale, il y avait aussi le RAID – Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion (Police Nationale) -, et il y avait encore des militaires de Sentinelle.

Le proverbe italien fatta la lege, trovato l’inganno – sitôt la loi sortie, on en trouve le contournement – est illustré en permanence par ceux-là même qui devraient la faire respecter. C’est l’accoutumance vicieuse au double langage : une règle pour donner le cadre général, puis des dérogations en série pour arranger tous les solliciteurs avec pour résultat que tout le monde a le sentiment qu’il n’y a plus de règle : et ça, le tueur l’avait très bien senti.

À se demander lequel, dans le concours pour qui sera le plus pied-nickelé, est le champion, du terroriste Mohamed Mahouaiej Bouhlel, tunisien de 31 ans, qui a l’inconscience de venir faire un repérage la veille, sans même savoir probablement qu’il est interdit de circulation avec toutes les caméras qui le filment, ou des policiers qui n’ont même pas visionné les images de ces caméras !   En réunion de préparation du dispositif policier pour le 14 juillet, les policiers disent : un camion ? Ça, on ne s’y attendait pas. Et c’est bien là qu’il y a de quoi être stupéfait, c’est bien là le cœur de l’affaire. La police nationale dira qu’elle avait ce jour-là 64 hommes en poste à Nice. On croirait avoir affaire à de jeunes soldats formés à la va-vite et qui tombent comme des mouches sitôt sur le front parce qu’ils ne savent pas renifler d’où peut bien provenir le danger. Les vieux professionnels, eux, restent vivants, ou s’ils sont tués, c’est dans une proportion bien moindre. Les policiers de Nice se sont ramassé comme des bleus parce qu’ils n’avaient pas assez de bouteille, pas assez de flair, pas assez de professionnalisme. À la fin du XVIII° siècle, Georges Washington disait à un officier : Général Saint Clair, en trois mots : attention aux surprises (…) Encore et toujours : attention aux surprises. À Nice, des terroristes peuvent arriver par la mer, en surface ou sous la surface,  par la terre à pied en surface ou sous la surface, par les égouts, en voiture ou en camion, par air en commandant un drone : au nom de quoi éliminer l’une de ces options ? Comment pouvons-nous être anesthésiés à ce point, sans réaction face à l’anormal, totalement dépourvus de l’instinct du chasseur qui fait du prédateur une victime ? Et les querelles entre ministère de l’Intérieur et ville de Nice sur les effectifs de chacun à un temps T sont dérisoires face à de constat d’échec sur toute la ligne. Le procès débutera en septembre 2022, en l’absence de Mohamed Lahouaiej Bouhlel, tué par les policiers ce 14 juillet  2016.

15 07 2016  

Tentative ratée de coup d’état en Turquie : 290 morts. Les putschistes n’étaient pas très dangereux : En tout et pour tout une demi-douzaine de F-16, une dizaine d’hélicoptères, une quarantaine de blindés et moins de cinq  cents hommes. Leur premier objectif : s’emparer de Recep Tayyip Erdogan en vacances à Marmaris, dans le sud-ouest du pays. Des proches suggèrent à Erdogan de se réfugier à  Rhodes, une île grecque au sud à un quart d’heure d’hélicoptère. Il s’y refuse, même si la situation semble de plus en plus grave. Un appel du général Umit Dundar, commandant de la I° armée, celle d’Istanbul, change la donne. Vous êtes le président légitime et je vous suis loyal, affirme-t-il, lui demandant de le rejoindre à Istanbul, où il est en mesure d’assurer sa sécurité. Un hélicoptère emmène aussitôt M. Erdogan et sa garde rapprochée vers l’aéroport de Dalaman, au sud-est, où attend l’avion présidentiel. C’était à un quart d’heure près, a raconté le chef de l’État. Quand les 3 hélicoptères de putschistes partis de la base de Cigli, près d’Izmir, arrivent sur zone, l’avion présidentiel a déjà décollé. Escorté par deux F-16 loyalistes, l’avion est un moment approché par un F-16 putschiste qui s’éloigne.

Levent Turkkan a convoqué le patron de l’armée de terre, Salih Zeki Colak, et son adjoint pour une réunion dans le bureau du général Akar. Il est 21 heures le 15 juillet. Un groupe d’hommes des forces spéciales avec à sa tête un des comploteurs, le général Mehmet Disli, fait irruption dans la pièce, demandant aux trois généraux de rejoindre le mouvement. Le chef d’état-major refuse, ainsi que le chef de l’armée de terre, dont l’appui serait crucial, car elle représente 65 % des effectifs. Menacés, frappés, ils sont emmenés à la base aérienne d’Akincilar, le quartier général des putschistes en lointaine périphérie d’Ankara. Ces derniers n’ont donc pas réussi à faire basculer la direction de l’armée. Le nom du meneur des putschistes n’importe guère, ils sont pour la plupart soupçonnés d’appartenir à la confrérie de Fethullah Gülen, réfugié aux Etats-Unis depuis 1999 qui après avoir été longtemps allié d’Erdogan, est devenu son pire ennemi. Fethullah Gülen est une des têtes majeures de l’islam contemporain, écrivain prolifique, à la tête d’un mouvement humaniste qui marque beaucoup de sympathie pour le PKK, partisan d’un état laïque et d’un islam libéral et tolérant. Il nie toute implication dans cette tentative de coup d’Etat.

Une vague de purges sans précédent est déclenchée, avec arrestations, tabassages, dénonciations, confessions. 10 000 militaires, membres des services, magistrats sont ainsi arrêtés ; 58 000 fonctionnaires sont mis à pied, les universitaires ont interdiction de quitter le territoire, plus de 10 000 passeports de service sont annulés. Les arrestations se font d’après des listes préétablies. Des mandats d’arrêt ont été délivrés contre 42 journalistes. Le premier décret de l’état d’urgence ordonne la fermeture de 1 125  associations, de 35 hôpitaux, de 15 universités, de 19 syndicats, de 934 écoles dont les biens sont confisqués. Sorti de l’épreuve en héros, le président turc, qui se fait désormais appeler généralissime, emmène son pays à marche forcée vers une dictature de moins en moins teintée de démocratie. Des domaines qui devraient rester dans les mains du politique comme l’urbanisme, sont privatisés : il en va ainsi à Istanbul où le bâtiment est intégralement confié à une société privée à but lucratif : TOKI, ce qui se traduit par une densification de l’habitat génératrice de tous les maux. Fin novembre 2020, la justice condamnera à la prison à vie 337 personnes !

19 07 2016

Adama Traore, 1.79 m, 86 kg, est à vélo dans la rue du Beffroi à Beaumont sur Oise ; il va retrouver son frère Bagui pour fêter ses 24 ans. Il est 17 h 50′. Deux heures plus tard, son décès sera prononcé dans la gendarmerie de Persan. Des gendarmes à la recherche de Bagui, l’avaient trouvé en compagnie d’Adama, qui s’était enfui à leur vue, d’abord en vélo, puis à pied. Rejoint, il avait été plaqué au sol. Il faisait chaud, pas loin de 35°. La déroulé de l’intervention est complexe, les témoignages rares et contradictoires. Quatre ans plus tard, l’affaire ne sera  toujours pas définitivement jugée, les expertises médicales se contredisant les une les autres. Le cœur a lâché, c’est certain, mais on ne sait pas précisément pour quelle raison.

25 07 2016 

Si l’Afrique sort un jour de son enlisement  dans la corruption, ce sera bien grâce aux femmes, mères courage pour la plupart : Chantale Ramazani Wazuri, est présidente des juges de paix de Lubumbashi-Kamalondo, au Congo, à la tête de  trente-quatre juges pour des dossiers passibles de six mois à six ans de prison. Elle est soumise à des pressions de plus en plus fortes pour faire condamner Moïse Katumbi, l’ancien gouverneur de la province congolaise du Katanga de 2007 à septembre 2015, 52 ans, très riche homme d’affaires, longtemps allié du président Joseph Kabila, puis devenu l’un de ses plus farouches opposants depuis qu’il peut être candidat aux élections présidentielles, prévues pour novembre 2016, mais qui pourraient être reportées.

Le 21 juillet, elle est convoquée par Paulin Ilunga Tanda, son supérieur à Kinshasa qui lui dicte la sentence : Mettez trois ans de prison, un million de dollars de dommages et intérêts, et demandez son arrestation immédiate.  Sinon, on vous révoque et on vous condamne à dix ans de prison.

Trois jours avant l’audience, reprogrammée au 25 juillet, Paulin Ilunga Tanda me tend un jugement déjà rédigé. Ma conscience m’a empêchée d’aller plus loin.

La conscience de Chantale Ramazani Wazuri en avait pourtant vu d’autres.  Ce sont la présidence et l’ANR qui contrôlent la justice, ça a toujours été comme ça. On vous donne des instructions, vous les appliquez, et vous ne dites rien parce que sinon on vous interroge, on vous intimide…, raconte-t-elle.

Pas cette fois-ci. La magistrate relève la tête et prend la plume. Le 25  juillet, juste après le deuxième  jugement confirmant le premier, elle adresse une lettre aux Nations unies, à l’Union européenne, au président congolais, au premier ministre, au chef de l’ANR, au procureur général… Dénonçant les  contraintes physiques et morales exercées sur elle, citant nommément les personnalités mises en cause, elle demande que sa signature  extorquée soit considérée nulle et de nul effet.

L’armée débarque chez elle mais la juge a pris les devants : elle se cachera pendant deux semaines avant de s’enfuir en avion, direction la France, grâce à la complicité de policiers de l’aéroport de Kinshasa.

Réfugiée en France, sous la protection de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), Chantale Ramazani n’envisage pas de rentrer dans son pays, sauf changement de pouvoir.

Résumé de Christophe Châtelot. Le Monde du 22 09 2016

26 07 2016     

Michael Moore, réalisateur américain nous parle des élections présidentielles aux États-Unis :

Chers amis, chères amies,

Je suis désolé d’être le porteur de mauvaises nouvelles, mais je crois avoir été assez clair l’été dernier lorsque j’ai affirmé que Donald Trump serait le candidat républicain à la présidence des États-Unis. Cette fois, j’ai des nouvelles encore pires à vous annoncer : Donald J. Trump va remporter l’élection du mois de novembre.

Ce clown à temps partiel et sociopathe à temps plein va devenir notre prochain président. Le président Trump. Allez, dites-le tous en chœur, car il faudra bien vous y habituer au cours des quatre prochaines années : PRÉSIDENT TRUMP !

Jamais de toute ma vie n’ai-je autant voulu me tromper.

Je vous observe attentivement en ce moment. Vous agitez la tête en disant : Non Mike, ça n’arrivera pas ! Malheureusement, vous vivez dans une bulle. Ou plutôt dans une grande caisse de résonance capable de vous convaincre, vous et vos amis, que les Américains n’éliront pas cet idiot de Trump. Vous alternez entre la consternation et la tentation de tourner au ridicule son plus récent commentaire, lorsque ce n’est pas son attitude narcissique.

Par la suite, vous écoutez Hillary et envisagez la possibilité que nous ayons pour la première fois une femme à la présidence. Une personne respectée à travers le monde, qui aime les enfants et poursuivra les politiques entreprises par Obama. Après tout, n’est-ce pas ce que nous voulons ? La même chose pour quatre ans de plus ?

Il est temps de sortir de votre bulle pour faire face à la réalité. Vous aurez beau vous consoler avec des statistiques (77 % de l’électorat est composé de femmes, de personnes de couleur et d’adultes de moins de 35 ans, et Trump ne remportera la majorité d’aucun de ces groupes), ou faire appel à la logique (les gens ne peuvent en aucun cas voter pour un bouffon qui va à l’encontre de leurs propres intérêts), ça ne restera qu’un moyen de vous protéger d’un traumatisme. C’est comme lorsque vous entendez un bruit d’arme à feu et pensez qu’un pneu a éclaté ou que quelqu’un joue avec des pétards. Ce comportement me rappelle aussi les premières manchettes publiées le 11 septembre, annonçant qu’un petit avion a heurté accidentellement le World Trade Center.

Des millions de gens seront tentés de devenir marionnettistes et de choisir Trump dans le seul but de brouiller les cartes et voir ce qui arrivera.

Nous avons besoin de nouvelles encourageantes parce que le monde actuel est un tas de merde, parce qu’il est pénible de survivre d’un chèque de paie à l’autre, et parce que notre quota de mauvaises nouvelles est atteint. C’est la raison pour laquelle notre état mental passe au neutre lorsqu’une nouvelle menace fait son apparition.

C’est la raison pour laquelle les personnes renversées par un camion à Nice ont passé les dernières secondes de leur vie à tenter d’alerter son conducteur : Attention, il y a des gens sur le trottoir !

Eh bien, mes amis, la situation n’a rien d’un accident. Si vous croyez encore qu’Hillary Clinton va vaincre Trump avec des faits et des arguments logiques, c’est que vous avez complètement manqué la dernière année, durant laquelle 16 candidats républicains ont utilisé cette méthode (et plusieurs autres méthodes moins civilisées) dans 56 élections primaires sans réussir à arrêter le mastodonte. Le même scénario est en voie de se répéter l’automne prochain. La seule manière de trouver une solution à ce problème est d’admettre qu’il existe en premier lieu.

Comprenez-moi bien, j’entretiens de grands espoirs pour ce pays. Des choses ont changé pour le mieux. La gauche a remporté les grandes batailles culturelles. Les gay et lesbiennes peuvent se marier. La majorité des Américains expriment un point de vue libéral dans presque tous les sondages. Les femmes méritent l’égalité salariale ? Positif. L’avortement doit être permis ? Positif. Il faut des lois environnementales plus sévères ? Positif. Un meilleur contrôle des armes à feu ? Positif. Légaliser la marijuana ? Positif. Le socialiste qui a remporté l’investiture démocrate dans 22 États cette année est une autre preuve que notre société s’est profondément transformée. À mon avis, il n’y a aucun doute qu’Hillary remporterait l’élection haut la main si les jeunes pouvaient voter avec leur console X-box ou Playstation.

Hélas, ce n’est pas comme ça que notre système fonctionne. Les gens doivent quitter leur domicile et faire la file pour voter. S’ils habitent dans un quartier pauvre à dominante noire ou hispanique, la file sera plus longue et tout sera fait pour les empêcher de déposer leur bulletin dans l’urne. Avec pour résultat que le taux de participation dépasse rarement 50 % dans la plupart des élections. Tout le problème est là. Au mois de novembre, qui pourra compter sur les électeurs les plus motivés et inspirés ? Qui pourra compter sur des sympathisants en liesse, capables de se lever à 5 heures du matin pour s’assurer que tous les Tom, Dick et Harry (et Bob, et Joe, et Billy Bob et Billy Joe) ont bel et bien voté ? Vous connaissez déjà la réponse. Ne vous méprenez pas : aucune campagne publicitaire en faveur d’Hillary, aucune phrase-choc dans un débat télévisé et aucune défection des électeurs libertariens ne pourra arrêter le train en marche.

Voici 5 raisons pour lesquelles Trump va gagner :

  1. Le poids électoral du Midwest, ou le Brexit de la Ceinture de rouille

Je crois que Trump va porter une attention particulière aux États bleus de la région des Grands Lacs, c’est-à-dire le Michigan, l’Ohio, la Pennsylvanie et le Wisconsin. Ces quatre États traditionnellement démocrates ont chacun élu un gouverneur républicain depuis 2010, et seule la Pennsylvanie a opté pour un démocrate depuis ce temps. Lors de l’élection primaire du mois de mars, plus de résidents du Michigan se sont déplacés pour choisir un candidat républicain (1,32 million) qu’un candidat démocrate (1,19 million).

Dans les plus récents sondages, Trump devance Clinton en Pennsylvanie. Et comment se fait-il qu’il soit à égalité avec Clinton en Ohio, après tant d’extravagances et de déclarations à l’emporte-pièce ? C’est sans doute parce qu’il a affirmé (avec raison) qu’Hillary a contribué à détruire la base industrielle de la région en appuyant l’ALÉNA. Trump ne manquera pas d’exploiter ce filon, puisque Clinton appuie également le PTP et de nombreuses autres mesures qui ont provoqué la ruine de ces quatre États.

Durant la primaire du Michigan, Trump a posé devant une usine de Ford et menacé d’imposer un tarif douanier de 35 % sur toutes les voitures fabriquées au Mexique dans le cas où Ford y déménagerait ses activités. Ce discours a plu aux électeurs de la classe ouvrière. Et lorsque Trump a menacé de contraindre Apple à fabriquer ses iPhone aux États-Unis plutôt qu’en Chine, leur cœur a basculé et Trump a remporté une victoire qui aurait dû échoir au gouverneur de l’Ohio John Kasich.

L’arc qui va de Green Bay à Pittsburgh est l’équivalent du centre de l’Angleterre. Ce paysage déprimant d’usines en décrépitude et de villes en sursis est peuplé de travailleurs et de chômeurs qui faisaient autrefois partie de la classe moyenne. Aigris et en colère, ces gens se sont fait duper par la théorie des effets de retombées de l’ère Reagan. Ils ont ensuite été abandonnés par les politiciens démocrates qui, malgré leurs beaux discours, fricotent avec des lobbyistes de Goldman Sachs prêts à leur écrire un beau gros chèque.

Voilà donc comment le scénario du Brexit est en train de se reproduire. Le charlatan Elmer Gantry se pose en Boris Johnson, faisant tout pour convaincre les masses que l’heure de la revanche a sonné. L’outsider va faire un grand ménage ! Vous n’avez pas besoin de l’aimer ni d’être d’accord avec lui, car il sera le cocktail molotov que vous tirerez au beau milieu de tous ces bâtards qui vous ont escroqué ! Vous devez envoyer un message clair, et Trump sera votre messager !

Passons maintenant aux calculs mathématiques. En 2012, Mitt Romney a perdu l’élection présidentielle par une marge de 64 voix du Collège électoral. Or, la personne qui remportera le scrutin populaire au Michigan, en Ohio, en Pennsylvanie et au Wisconsin récoltera exactement 64 voix. Outre les États traditionnellement républicains, qui s’étendent de l’Idaho à la Géorgie, tout ce dont Trump aura besoin pour se hisser au sommet ce sont les quatre États du Rust Belt. Oubliez la Floride, le Colorado ou la Virginie. Il n’en a même pas besoin.

  1. Le dernier tour de piste des Hommes blancs en colère

Nos 240 ans de domination masculine risquent de se terminer. Une femme risque de prendre le pouvoir ! Comment en est-on arrivés là, sous notre propre règne ? Nous avons ignoré de trop nombreux avertissements. Ce traître féministe qu’était Richard Nixon nous a imposé le Titre IX, qui interdit toute discrimination sur la base du genre dans les programmes éducatifs publics. Les filles se sont mises à pratiquer des sports. Nous les avons laissées piloter des avions de ligne et puis, sans crier gare, Beyoncé a envahi le terrain du Super Bowl avec son armée de femmes noires afin de décréter la fin de notre règne !

Cette incursion dans l’esprit des mâles blancs en danger évoque leur crainte du changement. Ce monstre, cette féminazie qui – comme le disait si bien Trump – saigne des yeux et de partout où elle peut saigner a réussi à s’imposer. Après avoir passé huit ans à nous faire donner des ordres par un homme noir, il faudrait maintenant qu’une femme nous mène par le bout du nez ? Et après ? Il y aura un couple gay à la Maison-Blanche pour les huit années suivantes ? Des transgenres ? Vous voyez bien où tout cela mène. Bientôt, les animaux auront les mêmes droits que les humains et le pays sera dirigé par un hamster. Assez, c’est assez !

  1. Hillary est un problème en elle-même

Pouvons-nous parler en toute franchise ? En premier lieu, je dois avouer que j’aime bien Hillary Clinton. Je crois qu’elle est la cible de critiques non méritées. Mais après son vote en faveur de la guerre en Irak, j’ai promis de ne plus jamais voter pour elle. Je suis contraint de briser cette promesse aujourd’hui pour éviter qu’un proto-fasciste ne devienne notre commandant en chef. Je crois malheureusement qu’Hillary Clinton va nous entraîner dans d’autres aventures militaires, car elle est un faucon perché à droite d’Obama. Mais peut-on confier le bouton de nos bombes nucléaires à Trump le psychopathe ? Poser la question, c’est y répondre.

Cela dit, notre plus grand problème n’est pas Trump mais bien Hillary. Elle est très impopulaire. Près de 70 % des électeurs la considèrent comme malhonnête ou peu fiable. Elle représente la vieille manière de faire de la politique, c’est-à-dire l’art de raconter n’importe quoi pour se faire élire, sans égard à quelque principe que ce soit. Elle a lutté contre le mariage gay à une certaine époque, pour maintenant célébrer elle-même de tels mariages. Ses plus farouches détractrices sont les jeunes femmes. C’est injuste, dans la mesure où Hillary et d’autres politiciennes de sa génération ont dû lutter pour que les filles d’aujourd’hui ne soient plus encouragées à se taire et rester à la maison par les Barbara Bush de ce monde. Mais que voulez-vous, les jeunes n’aiment pas Hillary.

Pas une journée ne passe sans que des milléniaux me disent qu’ils ne l’appuieront pas. Je conviens qu’aucun démocrate ou indépendant ne sera enthousiaste à l’idée de voter pour elle le 8 novembre. La vague suscitée par l’élection d’Obama et la candidature de Sanders ne reviendra pas. Mais au final, l’élection repose sur les gens qui sortent de chez eux pour aller voter, et Trump dispose d’un net avantage à cet effet.

  1. Les partisans désabusés de Bernie Sanders

Ne vous inquiétez pas des partisans de Sanders qui ne voteront pas pour Hillary Clinton. Le fait est que nous serons nombreux à voter pour elle ! Les sondages indiquent que les partisans de Sanders qui prévoient de voter pour Hillary sont déjà plus nombreux que les partisans d’Hillary ayant reporté leur vote sur Obama en 2008. Le problème n’est pas là. Si une alarme doit sonner, c’est à cause du vote déprimé. En d’autres termes, le partisan moyen de Sanders qui fait l’effort d’aller voter ne fera pas l’effort de convaincre cinq autres personnes d’en faire de même. Il ne fera pas 10 heures de bénévolat chaque mois, et n’expliquera pas sur un ton enjoué pourquoi il votera pour Hillary.

Les jeunes n’ont aucune tolérance pour les discours qui sonnent faux. Dans leur esprit, revenir aux années Bush-Clinton est un peu l’équivalent d’utiliser MySpace et d’avoir un téléphone cellulaire gros comme le bras.

Les jeunes ne voteront pas davantage pour Trump. Certains voteront pour un candidat indépendant, mais la plupart choisiront tout simplement de rester à la maison. Hillary doit leur donner une bonne raison de bouger. Malheureusement, je ne crois pas que son choix de colistier soit de nature à convaincre les milléniaux. Un ticket de deux femmes aurait été beaucoup plus audacieux qu’un gars blanc, âgé, centriste et sans saveur. Mais Hillary a misé sur la prudence, et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de sa capacité à s’aliéner les jeunes.

  1. L’effet Jesse Ventura

Pour conclure, ne sous-estimez pas la capacité des gens à se conduire comme des anarchistes malicieux lorsqu’ils se retrouvent seuls dans l’isoloir. Dans notre société, l’isoloir est l’un des derniers endroits dépourvus de caméras de sécurité, de micros, d’enfants, d’épouse, de patron et de policiers ! Vous pouvez y rester aussi longtemps que vous le souhaitez, et personne ne peut vous obliger à y faire quoi que ce soit.

Vous pouvez choisir un parti politique, ou écrire Mickey Mouse et Donald Duck sur votre bulletin de vote. C’est pour cette raison que des millions d’Américains en colère seront tentés de voter pour Trump. Ils ne le feront pas parce qu’ils apprécient le personnage ou adhèrent à ses idées, mais tout simplement parce qu’ils le peuvent. Des millions de gens seront tentés de devenir marionnettistes et de choisir Trump dans le seul but de brouiller les cartes et voir ce qui arrivera.

Vous souvenez-vous de 1998, année où un lutteur professionnel est devenu gouverneur du Minnesota ? Le Minnesota est l’un des États les plus intelligents du pays, et ses citoyens ont un sens de l’humour assez particulier. Ils n’ont pas élu Jesse Ventura parce qu’ils étaient stupides et croyaient que cet homme était un intellectuel destiné aux plus hautes fonctions politiques. Ils l’ont fait parce qu’ils le pouvaient. Élire Ventura a été leur manière de se moquer d’un système malade. La même chose risque de se produire avec Trump.

Un homme m’a interpellé la semaine dernière, lorsque je rentrais à l’hôtel après avoir participé à une émission spéciale de Bill Maher diffusée sur HBO à l’occasion de la convention républicaine : Mike, nous devons voter pour Trump. Nous DEVONS faire bouger les choses ! C’était là l’essentiel de sa réflexion.

Faire bouger les choses. Le président Trump sera l’homme de la situation, et une grande partie de l’électorat souhaite être aux premières loges pour assister au spectacle.

La semaine prochaine, je vous parlerai du talon d’Achille de Donald Trump et des stratégies que nous pouvons employer pour lui faire perdre l’élection.

Cordialement,

Michael Moore

Ce billet de blog a initialement été publié sur The Huffington Post et traduit de l’anglais par Pierre-Etienne Paradis.

Un commentaire d’Alain Le Chenadec : Cette élection est sans doute un des premiers effets collatéraux du monde de l’information selon Internet. J’aime bien la formule très juste : la victoire des commentaires sur le corps de l’article. S’il y a une révolution Internet, elle est bien là, dans la victoire incontestable de la rumeur et du faire-savoir viral. Zuckerberg a admis récemment que Facebook pouvait être un producteur d’information tout en se dégageant d’une quelconque responsabilité sur la véracité de l’information en question, et c’est difficile de dire autre chose… ce n’est pas la route qui est responsable des accidents de voiture !

29 07 2016   

Trois fanatiques islamistes font un carnage à Istanbul : 45 morts. Trois jours plus tard, ce sera 20 morts à Dacca, au Bengladesh, et encore le surlendemain, plus de 300 morts à Bagdad, et encore un fou qui tue 9 personnes dans un centre commercial de Munich le 22 juillet, et 80 morts à Kaboul le 24 juillet, et un vieux prêtre égorgé dans une église à Saint Etienne du Rouvray le 26 juillet… etc … Et nous restons impuissants face à cette folie : les Occidentaux parviendront sans doute à venir à bout de l’Etat Islamique – Daech -, mais cela n’arrêtera pas la folie, qui n’a nul besoin de Daech pour passer à l’acte : les réseaux sociaux, Internet, les armes en vente quasiment libres, les incohérences entre justice et police qui, toutes deux, ont une guerre de retard, y suffisent largement.

Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde.  Jamais ces mots d’Albert Camus n’ont été aussi pertinents. Jamais ils n’ont été, hélas, en aussi parfaite résonance avec l’actualité. Comment peut-on continuer à nommer du seul mot de terroristes les tueurs islamistes ? Quelle est cette prudence qui refuse de qualifier le terroriste ? De quelle couleur politique est-il, de quelle appartenance ? Quelle idéologie l’inspire ? Les tueurs nazis n’étaient-ils que des assassins, des criminels ou bien étaient-ils des assassins parce que nazis ?

Faire l’économie du qualificatif islamiste consiste à faire entrer le geste du tueur dans la catégorie du fait divers. Ne pas le faire, c’est intégrer la culpabilité de l’accusation d’islamophobie. Elle fait partie de la stratégie discursive de l’islamisme. Elle obéit à une logique de disqualification de la critique. Serait-il raciste de regarder de près la matrice islamique de l’islamisme ? Claude Lévi-Strauss ou Germaine Tillon seraient-ils coupables de ce crime intellectuel ?

Continuer à psychiatriser ces crimes relève d’une étrange prudence. Si le camion fou était conduit par un déséquilibré, aurait-il fallu l’interner dans un asile, s’il n’avait pas été abattu ? Le prêtre égorgé sur l’autel de son église l’a-t-il été par deux malades mentaux ? L’empressement que mettent les médias à ne pas qualifier ces crimes ou à les qualifier en leur ôtant leur inspiration politico-religieuse interdit de comprendre le moment dans toute son amplitude.

Comment peut-on continuer à nommer attentat-suicide des bombes humaines ? Quelle est la part suicidaire du geste de celui qui se fait exploser au milieu de civils innocents ? Est-il un désespéré, un dépressif pour qui la vie n’aurait plus de saveur ? En qualifiant de suicidé celui qui tue en se donnant la mort, on donne à ce geste la valeur d’un désespoir quasi romantique qui attire à son égard compassion et interrogation.

Qu’est-ce que ce malheureux a eu à subir pour ainsi se donner la mort ? Les victimes de la bombe humaine n’auraient-elles pas une part de responsabilité dans ce geste ? Ainsi, l’attentat-suicide culpabilise ses victimes autant qu’il les tue. Le martyr jubile de ce coup double, il jouit dans cette apothéose puisque désormais ce sont soixante-dix vierges qui l’attendent au paradis.

L’idéologie compassionnelle si soucieuse des causes sociales ne peut rien comprendre au terrorisme islamiste si elle continue à le lire dans les catégories politiques et psychologiques qui sont les siennes. Les Américains auraient-ils pu anticiper le 11 septembre 2001 ? Non, car ils n’imaginaient pas qu’un tel geste fut possible. Il n’entrait pas dans les scénarios imaginés par la CIA. Le camion tueur de Nice aurait-il pu être imaginé ? La réponse est non, pour les mêmes raisons portées par cet interdit de penser hors du politiquement correct.

On ne lutte pas contre une idéologie apocalyptique en disant aux djihadistes : Messieurs, tirez les premiers, non seulement par courtoisie mais parce que notre logiciel juridique nous l’interdirait. On dit de cette guerre qu’elle est asymétrique. Certes et elle l’est non seulement par les méthodes de l’ennemi, mais surtout par ce qui inspire ces méthodes. Notre incapacité obstinée, à la nommer pour ce qu’elle est : c’est-à-dire l’affrontement fondamental d’un islamisme parti à la conquête du monde ajoute à la difficulté de la combattre.

Qu’est-ce que le djihad – tel qu’il est invoqué et pratiqué par les soldats du califat ? Cette guerre sainte promet le paradis à celui qui pourchasse et anéantit les infidèles, les non-musulmans. Il s’agit de cette forme spécifique de guerre commise au nom de l’islam, visant à l’extermination ou à la soumission de populations pour la seule raison de leur identité non musulmane. Le djihad, présenté dans un premier temps comme une ascèse spirituelle visant à une communion avec le divin, a laissé place à sa forme politique telle que nous la voyons aujourd’hui à l’œuvre.

Qu’est-ce qui définit le crime contre l’humanité ? Cette notion de droit, établie après les jugements des crimes nazis au procès de Nuremberg, caractérise les crimes de masse commis contre des personnes au nom de leur origine, ethnique, religieuse, politique. Il s’agit de crimes commis au nom de ce qu’elles sont, de leur identité, de leur appartenance.

Le djihad s’inscrit dans cette définition pénale du crime contre l’humanité. L’inscrire dans cette catégorie des crimes constituerait déjà un fort coup de semonce contre tous ceux qui habillent leurs crimes du masque d’une différence culturelle. Le dire haut et fort, au nom de principes universels, permettrait de faire un tri entre ceux qui partagent cette idée d’un universel commun pour une humanité commune et ceux qui refusent cette idée d’une communauté humaine obéissant à des lois universelles.

Tant que les musulmans n’auront pas fait ce travail critique sur leur corpus spirituel, ils resteront aveugles sur les sources de leur supposée humiliation. C’est au sein de l’islam que des voix doivent s’élever pour dénoncer cette monstruosité. Elles existent et c’est elles qu’il faut saluer.

On dira les choses comme on voudra : choc des civilisations déplaît aux indignés debout jour et nuit, parce que culturellement trop belliqueux, mais ne pas nommer le djihad pour ce qu’il est, c’est-à-dire un projet de crime contre l’humanité mené au nom d’une idéologie politico-religieuse, ne nous donnera pas les moyens intellectuels de combattre et de vaincre ce fléau.

Jacques Tarnero. Le Monde du 13 08 2016

Notre monde moderne est en train de recréer des tribus pillardes, des confins barbares, d’abord et avant tout parce qu’il existe un monde à piller, un monde sédentaire au sens d’Ibn Khaldun, [le Machiavel tunisien du XIV° siècle] un monde éduqué, ouvert, attaché à produire et à échanger beaucoup plus qu’à se défendre. […]  C’est l’exacerbation de la non-violence centrale qui crée la violence marginale.

Gabriel Martinez-Gros. Fascination du djihad. Fureurs islamistes et défaite de la paix. PUF 2016

12 08 2016

Il est dans l’athlétisme quelques noms qui passent à la postérité pour avoir été les auteurs de record à la durée de vie particulièrement longue : ainsi de Valeriy Brumel, russe et Javier Sotomayor, cubain, pour la hauteur, Sergueï Bubka, russe, pour la perche, Bob Beamon, américain, pour le saut en longueur et Michael Johnson, américain lui aussi pour le 400 mètres avec 43″18 en 1999. Moins médiatisé mais aussi remarquable, celui du 10 000 m. féminin par la chinoise Wang Jungzia en 29’31″78 le 8 09 1993.

Et ce vendredi 12  août, aux JO de Rio, l’Ethiopienne Almaz Ayana 24 ans, 1.66 m, 47 kg, bat ce vieux record de 14 secondes en 29’17″45 : après 5 000 m. elle lâche ses concurrentes, à l’arrivée la seconde est à 150 mètres derrière et elle a dépassé presque toutes les autres qui ont donc plus d’un tour de retard sur elle !

Le surlendemain, c’est le record du 400 m. masculin qui tombe avec un 43″03 réalisé par un quasi inconnu sud-africain : Wayde van Niekerk de 24 ans, qui fait jeu égal avec Kirani James, grenadin et Lashawn Merrit, américain, pendant les 300 premiers mètres pendant lesquels il ne voit personne, étant dans le couloir extérieur, puis, à l’entrée de la dernière ligne droite, place une accélération à laquelle sont incapables de répondre les deux autres pour finir, seul, avec l’or et un nouveau record du monde. Quasi inconnu… des simples amateurs d’athlétisme… car, pour les connaisseurs, il est loin d’être inconnu : champion du monde à Daegu, en Corée du Nord en 2011, à 19 ans, un 100 m. en 9’98″ en 2016, un 200 m. en 19’94″en 2015. Bob Beamon lui-même confesse qu’il s’attendait à cela de la part de ce garçon. Sa course n’est pas sans rappeler sur la même distance celle de Colette Besson, la petite fiancée de la France, 52’03″ à Mexico en 1968, avec un finish plus puissant plus implacable que celui de Colette Besson, plus à l’arraché, à la gnaque.

Pour le reste, c’est autant les médias qui font le jeu que les athlètes : le demi-dieu Usain Bolt, idole des stades tout acquis à sa dévotion, s’en va faire des photomontages où il se place, une marche plus bas que  O Cristo Redentor [1], dans la même attitude, en DRH christique de l’humanité.

À l’opposé, Renaud Lavillenie recordman du monde du saut à la perche, qui, dans cette dramaturgie très manichéenne, va endosser l’habit du looser. Il est le grand outsider, puis au fur et à mesure du concours, est talonné, puis finalement dépassé par un jeune et beau Brésilien, Thiago Braz da Silva qui ne s’attendait pas à dépasser son record personnel de 10 centimètres ! Et le public de soutenir à fond celui qui va peut-être terrasser le blanc, recordman du monde, qui se fait copieusement et très grossièrement siffler. Parvenir à se concentrer dans pareille ambiance, c’est mission impossible… il n’est que second. On a rarement vu un athlète recevoir une médaille d’argent en versant des larmes d’amertume. Il devait pourtant bien savoir qu’un peuple qui ne jure que par la fiesta – le club med 365 jours par an – ne risque pas en même temps de bien savoir ce que sont le fair-play et l’élégance. Les Jeux Olympiques ne sont pas loin des jeux du cirque, et quand les pouces sont tournés vers le bas, c’est l’humanité qui disparaît en premier. Si on ne veut pas connaître cela, on n’y va pas. Il parlera de public de foot, public de merde, mais il laissera entendre que c’était pour lui une découverte quand il le savait bien, avant même d’y aller.

Et puis, après tout, ce ne sont que des jeux, non ? La gagne, on est là pour ça, OK, mais savoir perdre, c’est bien aussi, et Renaud Lavillenie tout comme Florent Manaudou, et, plus grave, comme Aurélie Muller, ne savent pas perdre, et pourtant c’est une face du fair-play. S’il vous plait messieurs dames, un peu d’humour, que diable ! Dieu merci, nous aurons eu les magnifiques médailles de Christophe Lemaître, en bronze au 200m et surtout l’argent de Kevin Mayer au décathlon, venu titiller Ashton Eaton, l’intouchable, pas loin du record du monde. Un journaliste l’interroge sur ses capacités à battre un jour le record du monde – 9 045 points, détenu par le vainqueur du soir. Au même moment, Ashton Eaton passe derrière son dauphin. They ask me if I can beat the world record, traduisait, amusé, le jeune coq. Say yes ! rétorque Ashton Eaton.

La suite au prochain numéro ? Mais y en aura-t-il un ? Commencer par soumettre systématiquement toutes les candidatures à des Jeux olympiques à référendum auprès des populations concernées fiscalement pourrait au départ être un bon moyen de mettre les pendules à l’heure. Dans les semaines qui viennent on pourra lire dans un journal de consommateurs de Rome, en relation avec sa candidature aux JO de 2024, les JO sont des armes de distraction massive. Le dit journal  est de sensibilité du Mouvement 5 étoiles – M 5 S -, incontournable à Rome depuis l’arrivée à la tête de la mairie de Rome de Virginia Raggi, qui a juré fidélité absolue à Bepe Grillo, fondateur du  M 5 S. Elle confirmera ce choix le 20 septembre, mais malheureusement son tout récent mandat est déjà tellement entaché de gaffes, maladresses, friponneries en tous genres, dont la plus grande étant que, de facto, ce n’est pas elle la maire de Rome, mais Bepe Grillo. Elle ne va pas chercher ses ordres à Moscou, mais chez Pepe Grillo. M 5 S est un parti d’opposition, pas de gouvernement. Le petit a besoin de grandir. Il était pourtant urgent de mettre un peu de bon sens dans ce genre d’affaire, quand on sait que les Romains n’ont pas encore fini de payer les Jeux Olympiques de 1960 !!!

Un indicatif intéressant sur les 50 dernières années, pendant lesquelles, tous les Jeux Olympiques ont coûté plus qu’ils n’ont rapporté… tous, à l’exception de ceux de Los Angeles en 1984, bénéficiaires : la principale raison en est que Los Angeles était la seule ville candidate, et encore, après que le CIO soit venu la prier instamment d’accepter : donc le CIO a bien été contraint d’entériner le budget proposé, qui de plus, a été respecté, sans augmentation aucune : paradoxalement, c’est la concurrence entre candidats qui fait flamber les dépenses, quand de façon générale, elle a tendance à tirer les prix vers le bas. Cela signifie donc que les règles d’attribution sont malsaines et demandent à être revues. Les candidates établissent des budgets qui sous-estiment les coûts, surestiment les rentrées financières et, une fois élues, sont bien obligés de faire apparaître les coûts réels, très fréquemment au moins doublés. Pour avoir dénoncé tout cela, Wladimir Andreff, professeur à la Sorbonne, spécialisé en économie du sport, se verra interdit de télévision lors des JO d’Albertville. La principale mesure réaliste qu’il propose est de faire les Jeux toujours au même endroit : refusé. C’est ce qu’avait proposé Athènes en 1996. Là encore, les populations concernées sont ignorées et les décisions prises entre les politiques et les grosses machines à fric : Télévisions, CIO, FIFA etc…, avec la fabuleuse garantie que, de toutes façons, on ne peut pas faire faillite, puisque, quel que soit le trou, c’est le contribuable qui le bouchera ! Les J.O., ça fonctionne comme un État, c’est pour cela qu’ils s’entendent si bien !

Et cela va se poursuivre avec les J.O. attribués à Paris pour 2024 : En commentant l’attribution des Jeux Olympiques de 2024 à Paris, il ne faut pas jouer les rabat-joie, même si l’annonce n’a pas provoqué des scènes de liesse populaire dans les rues. Mais, au-delà des discours sur les valeurs du sport, qui omettent au passage les problèmes de corruption et de dopage, l’État, la région Île-de-France et la ville vont entrer dans le dur des dépenses et des investissements. Sans vouloir décourager les sportifs et les organisateurs, il faut dire haut et fort que les JO sont un gouffre financier pour les villes et pays hôtes. L’économiste Victor Matheson a écrit : Les malheurs de la Grèce ont commencé avec les JO de 2004. Laissons parler les chiffres. Les JO d’Athènes avaient été budgétés à 3 milliards d’€, ils ont finalement coûté 10 milliards. Ceux de Pékin, budgétés à 11, ont coûté 30. Ceux de Londres, prévus à 2,5, plus de 11 ! Si l’on regarde aussi Sydney 2000 ou Atlanta 1996, les Jeux coûtent, en moyenne, trois fois plus que prévus. Si on applique ce ratio à Paris 2024, le budget actuel de 6,6 finira à 19 ! Munich, Boston et Hambourg, trois villes riches, se sont d’ailleurs retirées de ce piège.

Tous les sondages montraient que les Bostoniens rejetaient la candidature. Les Hambourgeois ont dit non aux JO par référendum en 2015. Puis Rome et Budapest, effrayées par les coûts et la dette en perspective, ont elles aussi abandonné. Oslo s’était retirée en 2014, car la population avait été choquée par les demandes exorbitantes des membres du CIO : voitures de luxe avec chauffeurs, portes réservées dans les aéroports, banquets pantagruéliques, etc. Si on les avait consultés, les Parisiens auraient-ils dit oui aux JO  ?

Cela étant, il faut maintenant que les citoyens parisiens et français soient clairement informés du budget des Jeux de 2024. Bercy doit exiger son respect scrupuleux. Et la Cour des comptes doit s’emparer avec vigueur de cet événement temporaire qui, s’il suscite des émotions, peut être une trappe à argent public.

Philippe Villemus. Le Midi Libre du 17 09 2017

Pour les Jeux de 2021, le Japon a décidé de fabriquer toutes les médailles d’or et d’argent qui seront attribuées aux athlètes avec la récupération de ces métaux précieux sur les téléphones portables, smartphones obsolètes. L’information a été transmise au COJO de Paris 2024 par Ines Leonarduzzi, présidente de l’ONG Digital for the Planet : il a joué les acheteurs insatisfaits : on va réfléchir !

24 08 2016      

Tremblement de terre en Italie, au nord-est de Rome, dans les Apennins, d’une magnitude de 6.2, avec un épicentre à 10 km au sud-est de Nursie, à cheval sur le Latium, les Marches et l’Ombrie. Près de 300 morts. Les principaux villages touchés : Pescara del Tronto, Accumoli et Amatrice, qui comptera 230 morts. Des centaines de répliques de moindre amplitude suivront dans la région.

26 08 2016   

Inauguration du Pont Yavuz Sultan Selim, le 3° sur le Bosphore, ancré près de la sortie du détroit sur la Mer Noire. Construit par l’architecte suisse Jean-François Klein et le Français Michel Virlojeux. Suspendu et haubané, 2 pylônes de 322 m de haut. 52 m. de large pour 2 voies ferrées au centre et huit voies pour les voitures et camions, 4 de chaque côté. 800 millions $. Depuis des décennies, Istanbul est confrontée à des embouteillages monstres, qui amènent quotidiennement la ville au bord de l’asphyxie, principalement causés par le transit des camions internationaux Europe-Asie et le contraire : le passage par Istanbul n’est qu’une nécessité routière, mais pas technique. L’accès à ce nouveau pont emprunte une autoroute dont le branchement ouest est loin d’Istanbul et qui rejoint le réseau primitif à l’est loin encore d’Istanbul, qui, ainsi, devrait se voir allégé de la quasi-totalité de ce trafic, et pourvoir retrouver des conditions de circulation à peu près normales.

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Il ne faudrait pas que les sentiments que peut légitimement inspirer le président Erdogan à nos perceptions démocratiques viennent  masquer les fantastiques efforts fournis par la Turquie pour faire échapper Istanbul et ses 15 millions d’habitants à la paralysie, à l’asphyxie.

Le sultan Bajazet II avait réalisé dès le XVI° siècle la nécessité de disposer d’autres moyens que le bac : Léonard de Vinci nous a laissé en 1502 la maquette d’un pont sur le Bosphore, d’une grande beauté ; mais, aux dires des ingénieurs d’aujourd’hui, les assises sur chaque rive n’auraient pas résisté à la plus petite secousse sismique. Il faudra donc attendre 1973 pour qu’Istanbul connaisse son premier pont suspendu sur le Bosphore. Reprenons, dans un ordre chronologique, la situation présente, à fin 2016. Le chiffre entre parenthèses indique l’ordre du pont dans un classement du nord au sud, en partant du nord :

  • Inauguré en 1973, le Temmuz Şehitler Köprössü, – Pont des Martyrs du 15 juillet – ainsi rebaptisé en 2016 après la mort de 15 manifestants qui se trouvaient sur le pont, par les auteurs de la tentative de coup d’État. Pont suspendu, long de 1.560 km. (4)
  • Inauguré en 1988, le Fatih Sultan Mehmet Köprössü, pont autoroutier, – E 80 -. (2)
  • Inauguré le 29 octobre 2013, le tunnel ferroviaire Marmaray, de 13.6 km de long, proche du pont Avrasya. (6)
  • Inauguré le 26 août 2016, le Yavuz Sultan Selim Köprössü, ci-dessus décrit. (1)
  • Inauguré le 20 décembre 2016, l’Avrasya Tünelli – tunnel Eurasia -, long de 5.4 km, Ø de 13.7 mètres, 2 étages à 2 voies chacun, qui devrait voir le passage de 70 000 véhicules par jour. Situé un peu au sud du palais Topkapi. (5)

Et, encore en travaux, avec une ouverture à la circulation prévue pour 2020, le tunnel du grand Istanbul, ferroviaire et autoroutier, sur 3 étages, le train circulant sur l’étage central, long de 6.5 km, qui devrait permettre le transport de 6.5 millions de passagers par an. (3).

Et encore, la plus grande mosquée du monde :

La « nouvelle Turquie » de Recep Tayyip Erdogan

Vue d’artiste de la future mosquée de Camlica, sur la rive asiatique du Bosphore, à Istanbul.

Et encore, le plus grand aéroport du monde, qui devrait être inauguré en 2018 :

Et encore, dans les cartons jusqu’alors, mais qui en sortira bien un jour, le gigantesque projet de canal à écluses qui relierait la Mer Noire à la Mer de Marmara, à l’ouest d’Istanbul, donc en Turquie d’Europe : 45 à 50 km de long, 150 mètres de large, 25 mètres de profondeur.

Fichier:Kanal İstanbul.svg — Wikipédia

avec une ville nouvelle de 0.5 million d’habitants. Devis global : 25 milliards d’€

Le « Kanal Istanbul » : le « projet fou » de trop pour la présidence turque (1/2) ? Un canal désiré de longue date et aux bénéfices socio-économiques potentiellement majeurs

Et encore, le gazoduc TurkStream dont les travaux seront terminés en novembre 2018 : la partie immergée de ce gazoduc, longue de 930 kilomètres sous la mer Noire, relie le port russe d’Anapa au village turc côtier de Kiyiköy, non loin d’Istanbul. À l’ouverture des vannes d’ici à la fin de 2019, les consommateurs turcs recevront du gaz des immenses champs gaziers situés dans la péninsule de Yamal, en Sibérie occidentale. La partie terrestre du tube, un tronçon de 65 kilomètres entre Kiyiköy et Lüleburgaz, près de la frontière turco-bulgare, devrait être achevée en 2019. Une fois posé jusqu’à Lüleburgaz, le gazoduc, d’une capacité de 15,75 milliards de m³/an, sera connecté au réseau turc. En 2017, la consommation turque a crû de 15 %, à 53,6 milliards de mètres cubes. Pour plus de la moitié, il s’agit de gaz russe acheminé par le gazoduc Blue Stream.

Un deuxième tronçon, d’une capacité similaire, reste à construire. Le gaz acheminé via ce deuxième tube sera destiné aux marchés européens, permettant ainsi à Gazprom de mieux contourner l’Ukraine.

Le mode de vie des habitants des mégapoles méditerranéennes [Casablanca, même si physiquement atlantique, peut-être considérée comme méditerranéenne] a tendance à s’uniformiser de plus en plus, mais néanmoins, cela s’inscrit sur des paramètres d’urbanisation extrêmement variés :

     Le Caire     Istanbul      Casablanca      Aix / Marseille Bande de Gaza
Population, en million 23      15     4        1.842 2
Densité habitants/km²  74 000     2 700     3 333       585 6 000
Surface en km² 528       5 500    1 200        3 148 360

31 08 2016   

Emmanuel Macron, jeune ministre de l’Economie et des Finances depuis deux ans, quitte Bercy. Son successeur, Michel Sapin lui adresses ses vœux : J’ai le sentiment qu’on continuera à entendre parler de toi. […]  Je souhaite que la bonne chance pour toi soit une bonne chance pour nous tous […] La responsabilité, j’espère qu’elle restera toujours dans ta tête et dans ton cœur. Huit mois plus tard, il sera élu président de la République : Le hold-up du siècle avait pronostiqué la ministre de la santé, Marisol Touraine.

Il y aura Clausewitz, Sun Tzu et Macron ajoutait le président du groupe socialiste de l’Assemblée nationale, Olivier Faure.

08 2016    

Les premières catastrophes dues au réchauffement climatique arrivent là où on ne les attendait pas : au-delà du cercle polaire où on a enregistré dans la péninsule de Yamal, en Sibérie, où l’on exploite du gaz et du pétrole, des températures de 29° à 35° en cet été. Conséquences : le permafrost dégèle et libère ce que la congélation avait fait hiberner : à long terme, ce pourrait être du méthane, mais pour le présent, c’est une bactérie mortelle qui redevient active : l’anthrax [2], qui se propage sous forme de spores dans l’air, l’eau ou la poussière ; la transmission peut se faire aussi par le taon ; un enfant en est mort et elle fait des dégâts importants dans les troupeaux de rennes. Financièrement et techniquement, cela remet bien des choses en question car les fondations des constructions, voies de chemin de fer,  avaient été faites en fonction de la dureté du permafrost : il faudra donc reprendre tout cela là où celui-ci commence à dégeler. En attendant on fonctionne à la russe, en posant dans le sous-sol des tuyaux destinés à le refroidir !

1 09 2016 

La fusée Falcon de Space X explose au sol sur son pas de tir à cap Canaveral : elle devait emporter un satellite Facebook qui aurait permis le développement de Facebook en Afrique. Cet accident va-t-il remettre en question la stratégie d’innovation permanente d’Elon Musk ? Il faut attendre pour voir quels choix va faire cet incroyable entrepreneur.

4 09 2016 

Zhang Chaolin, couturier chinois est mort lors d’une agression, le 7 août à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis. La communauté chinoise d’île de France manifeste aux cris de Liberté, égalité, fraternité et sécurité. Puis nombre d’entre eux se retrouvent dans un des hauts lieux de la communauté asiatique : le restaurant le Président à Belleville, tenu par un … Cambodgien, lequel, pas très futé pour l’heure et agacé par cet envahissement hors réservation s’écrie : Eh, moi, je ne suis pas chinois ! Sa bonne petite affaire va dès lors péricliter et il sera contraint à vendre à un authentique chinois !

13 10 2016  

Gallimard met en librairie Journal pour Anne 1964-1970, carnets et lettres d’amour de François Mitterrand à Anne Pingeot.

Pourquoi Anne Pingeot a-t-elle éprouvé le besoin de mettre cela sur la place publique ? Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. C’était un temps, enfin, il n’y a tout de même pas si longtemps, – Anne Pingeot était née – où les lettres d’amour d’un amant à sa maîtresse ou celles d’une aimée à son amant faisaient partie de ce que l’on nommait alors l’intimité, qui ne se limitait donc pas aux seules parties intimes. L’intimité regroupait des courriers, des actes notariés, des bijoux, des journaux intimes et si la lecture ou le bénéfice de ces secrets pouvait dépasser le cadre strict des auteurs et des destinataires, il ne dépassait jamais celui de la famille. On a vu ainsi des récits de déportation rester dans le cadre familial quand, sur le plan littéraire, ils auraient mérité une publication. L’intimité, c’était ce qui faisait le cœur de la vie familiale, parfois pour le pire, il n’est que de lire François Mauriac, Hervé Bazin, parfois aussi pour le meilleur : un ensemble de faits que n’avait pas à connaître le public, qui ne concernait que la famille, et se nommait alors pudeur. En confiant ces écrits à Gallimard, Anne Pingeot a fait voler en éclat cette notion d’intimité et de pudeur. On pensait cette catholique tendance janséniste à l’abri de pareil grand écart.

La pudeur est remisée, coulée, torpillée par la dictature de la com, des médias pour lesquels elle n’est qu’un empêcheur de tourner en rond. Pourquoi ? Certainement pas en hommage à François Mitterrand, lui qui avait un goût si prononcé du secret. On ne voit pas comment il aurait pu apprécier ce déballage en place publique de son amour pour cette femme, quand il était à l’exact opposé de ce genre d’attitude, s’employant au contraire à semer perplexité et confusion derrière lui. Cet homme qui était certainement un des meilleurs connaisseurs de France de ce que peut être une trahison, pour l’avoir connue à moultes reprises, soit en l’exerçant soit en la subissant, aura donc fini par en être victime, de la plus inélégante des manières, de la part de celle qu’il aimait. Et pourtant il le disait bien lui-même : Toi et moi sommes à l’intérieur d’un univers fait de nous, fait par nous, où nul autre ne peut entrer. [14 novembre 1964]. Cependant, sous réserve qu’Anne Pingeot ait remis à Gallimard l’intégralité de ces courriers, il se dégage de cette lecture comme une impression de gêne : cette façon de s’adresser à une femme idéalisée, à telle enseigne qu’en fin de compte, on ne connaît pas mieux Anne Pingeot en fin de lecture qu’au début. Il y a là-dedans du Rilke, du Ronsard, du Clément Marot, du Alain Fournier beaucoup plus que du dialogue entre un homme et une femme faits de chair et de sang. Pas de connivence, aucune quotidienneté, toujours de la hauteur… C’en est à se demander si François Mitterrand n’écrivait pas alors… pour bien d’autres lecteurs… pour être publié.

Se serait-elle crue investie d’une mission de révéler au grand public une facette du personnage qu’il ne connaissait pas, pour l’humaniser en quelque sorte, puisque selon la doxa médiatique un homme public n’a pas de vie privée ?

Mais il se pourrait bien aussi qu’un jour, Anne et Mazarine en goguette, ne se contentant pas d’avoir été très bien hébergées pendant des décennies aux frais du contribuable, aient eu un coup de cœur pour une belle maison à vendre au milieu de quelques hectares, et se soient dites : mais avec quel argent pourrions-nous acheter cela ? Nos revenus respectifs, même cumulés, ne nous le permettent pas…

  • Mazarine, je pense avoir un idée et peut-être est-elle bonne.

Quoi qu’il en soit, on ne connaît pas le contrat qui la lie pour cet ouvrage à Gallimard : – le connaîtra-t-on un jour ? Pour avoir inséré quelques une ses propres lettres, pourra-elle être considérée comme étant l’auteure de l’ensemble ? On ne sait pas à qui vont aller les droits d’auteurs, peut-être après tout à une fondation, à une ONG, pour ainsi couper court à toute polémique. Pour s’être gardé des médias, des paparazzi pendant des décennies, Anne Pingeot est aux premières loges pour cadenasser ce domaine, et elle l’a fait avec grand art : cinq émissions d’une demi-heure chacune avec Jean Noël Jeanneney [3] sur France Culture et c’est tout. De Jean-Noël Jeanneney, elle sait bien qu’il ne lui posera aucune question vulgaire du genre : Quid des droits d’auteur ? Ainsi, on se met à l’abri des indiscrets du genre Mediapart qui raffolent de mettre le nez partout.

Car il est bien certain que ce livre va faire un tabac, ce sera au moins du 500 000 exemplaires, avec des traductions dans on ne sait combien de langues. Toute la presse people s’en lèche les babines d’avance. Au hit-parade de l’émotion, les lettres d’amour de Mitterrand vont rester en tête un bon moment, ce qui est d’ailleurs tout à fait justifié : l’homme avait une bien belle plume, élégante et dépouillée.

Mais, – ah l’imprévu ! –  la concurrence va être rude avec le Un président ne devrait pas dire ça de deux journalistes du Monde dans lequel François Hollande s’adonne au culte sans limites de la Transparence : ce n’est plus un familier du monde de la communication, mais un noyé dans la communication. Côte à côte en librairie, des lettre d’amour d’un président, remarquablement écrites, et un autre président, dénué de tout charisme, désespérément gris, qui joue à s’y noyer le jeu de la transparence.

Je ne lirai pas Lettres à Anne ni Journal pour Anne. Je ne veux pas savoir pourquoi il n’a pas quitté Danielle. Je ne veux pas savoir pourquoi il n’a pas épousé Anne. Je garde l’image de l’homme à la rose au Panthéon. C’était leur jardin. Il aurait dû rester secret. Cela ne me regarde pas.

Corinne Cherrier-Chaudat. Dijon. Télérama 3484. 22 au 28 octobre 2016

21 09 2016

Ignacio Ramonet, ancien directeur du Monde Diplomatique, marche dans les pas de Michael Moore quant à l’élection présidentielle américaine à venir :

Il y a encore quelques semaines – à plus de deux mois de l’élection présidentielle du 8 novembre prochain aux États-Unis –, tous les sondages donnaient Hillary  Clinton, la candidate du Parti démocrate, gagnante. Il semblait alors évident que, malgré la masse des préjugés machistes, Mme Clinton serait la première femme à occuper le bureau ovale de la Maison Blanche et à tenir les rênes de la plus grande puissance de notre temps.

Qu’était-il arrivé au candidat du Parti républicain, le médiatique Donald Trump dont l’ascension était considérée comme irrésistible ? Pourquoi s’était-il effondré dans les sondages ? Sept Américains sur dix déclaraient alors qu’ils n’en voulaient pas comme président ; et à peine 43 % l’estimaient qualifié pour siéger à la Maison Blanche (65 % considérant, en revanche, que Mme Clinton était parfaitement apte à exercer cette tâche).

Rappelons qu’aux États-Unis, les élections présidentielles ne sont ni nationales ni directes. Il s’agit plutôt de cinquante élections locales, une par État, qui désignent les 538 grands électeurs chargés d’élire à leur tour le (ou la) chef de l’Etat. Ce qui relativise singulièrement les sondages à caractère national.

Face à de si mauvais résultats cependant, le candidat républicain Donald Trump décida, en août dernier, de remanier son équipe et de nommer un nouveau chef de campagne, Steve Bannon, directeur du site ultra conservateur Breitbart News Network. Trump modifia aussi son discours pour s’adresser à deux groupes d’électeurs décisifs : les Afro-américains et les Hispaniques.

Parviendra-t-il pour autant à inverser la tendance et à s’imposer sur la dernière ligne droite de la campagne ? Ce n’est pas impossible. En fait, Trump semble d’ores et déjà avoir, en partie, rattrapé son retard par rapport à Mme Clinton. Personnage atypique, avec ses propositions odieuses, grotesques ou sensationnalistes, Trump a déjà déjoué les pronostics. Face à des poids lourds comme Jeb Bush, Ted Cruz ou Marco Rubio qui, de surcroît, comptaient sur l’appui décidé de l’ensemble de l’establishment républicain, peu d’analystes donnaient Trump gagnant aux primaires du Parti républicain. Et cependant, il a écrabouillé ses adversaires, les réduisant en cendres.

Depuis la crise dévastatrice de 2008 (dont nous ne sommes pas encore sortis), plus rien n’est comme avant nulle part. Les citoyens sont profondément déçus, désenchantés et désorientés. La démocratie elle-même, comme modèle, a perdu une grande part de son attrait et de sa crédibilité. Tous les systèmes politiques ont été secoués jusqu’aux racines. En Europe, par exemple, les séismes électoraux inédits se succèdent, depuis la victoire de l’extrême droite en Autriche jusqu’au Brexit anglais ou la récente défaite de la chancelière allemande Angela Merkel dans son Land de Mecklembourg-Poméranie.

Mais le bouleversement ne se limite pas à l’Europe, il suffit de voir l’écrasante victoire électorale, en mai dernier, de l’inclassable et tonitruant Rodrigo Duterte aux Philippines… Tous les grands partis traditionnels sont en crise. On assiste partout à l’ascension de forces de rupture, soit des partis d’extrême droite (en Autriche, pays nordiques, Allemagne, France), soit des partis populistes et anti-système (Italie, Espagne). Partout, le paysage politique est en voie de transformation radicale.

Cette métamorphose atteint aujourd’hui les États-Unis, un pays qui a déjà connu, en 2010, une vague populiste ravageuse, incarnée à l’époque par le Tea Party. L’irruption du milliardaire Donald Trump dans la course à la Maison Blanche prolonge cette vague et constitue une révolution électorale que nul n’avait su prévoir. Même si, apparemment, la vieille bicéphalie entre démocrates et républicains demeure, en réalité la montée d’un candidat aussi atypique que Trump constitue un véritable tremblement de terre. Son style direct, populacier, et son message manichéen et réductionniste, qui sollicite les plus bas instincts de certaines catégories sociales, est fort éloigné du ton habituel des politiciens américains. Aux yeux des couches les plus déçues de la société, son discours autoritaro-identitaire possède un caractère d’authenticité quasi inaugural. Nombre d’électeurs sont, en effet, fort irrités par le politiquement correct ; ils estiment qu’on ne peut plus dire ce qu’on pense sous peine d’être accusé de raciste. Ils trouvent que Trump dit tout haut ce qu’ils pensent tout bas. Et perçoivent que la parole libérée de Trump sur les Hispaniques, les Afro-Américains, les immigrés et les musulmans comme un véritable soulagement.

À cet égard, le candidat républicain a su interpréter, mieux que quiconque, ce qu’on pourrait appeler la rébellion de la base. Avant tout le monde, il a perçu la puissante fracture qui sépare désormais, d’un côté les élites politiques, économiques, intellectuelles et médiatiques ; et de l’autre côté, la base populaire de l’électorat conservateur américain. Son discours anti-Washington, anti-Wall Street, anti-immigrés et anti-médias séduit notamment les électeurs blancs peu éduqués mais aussi – et c’est très important -, tous les laissés-pour-compte de la globalisation économique.

Le message de Trump diffère de celui des leaders néofascistes européens. Il n’est pas un ultra droitier conventionnel. Il se définit lui même comme un conservateur avec du bon sens. Sur l’échiquier politique traditionnel, il se situerait plutôt à la droite de la droite. Chef d’entreprise milliardaire et star populaire de la téléréalité, Trump n’est ni un militant antisystème ni, évidemment, un révolutionnaire. Il ne critique pas le modèle politique en soi, mais plutôt les responsables qui pilotent ce modèle. Son discours est émotionnel et spontané. Il fait appel aux instincts, aux tripes, pas à la réflexion ni à la raison. Il s’adresse à cette partie de l’électorat américain gagné par le découragement et le mécontentement, et aux gens lassés de la vieille politique et du système des privilégiés, des castes. À tous ceux qui protestent et qui crient : Qu’ils s’en aillent tous ! ou Tous pourris ! , il promet d’injecter de l’honnêteté dans le système et de renouveler le personnel et les mœurs politiques.

Les grands médias ont beaucoup diffusé certaines de ses déclarations et propositions. Surtout les plus ignobles et les plus odieuses. Rappelons à cet égard, par exemple, ses affirmations à propos des immigrés mexicains illégaux qui seraient, selon lui, des corrompus, des délinquants et des violeurs. Ou bien son projet d’expulser quelque 11 millions d’immigrés latinos illégaux qu’il propose d’embarquer de force dans des bus et de les renvoyer au Mexique. Ou sa proposition, inspirée de la série Le trône de fer (Game of Thrones), de construire une colossale muraille le long des 3 145 kilomètres de frontière avec le Mexique, qui chevaucherait vallées, montagnes et déserts, pour empêcher l’arrivée de migrants latinos et dont le financement (21 milliards de $) serait à la charge du gouvernement mexicain.

Dans le même ordre d’idées, il a annoncé vouloir interdire l’entrée de tous les migrants musulmans, et s’est attaqué avec véhémence aux parents d’un militaire américain de confession musulmane, Humayun Khan, mort au combat en 2004 en Irak. Il a également a affirmé que le mariage traditionnel formé par un homme et une femme constitue la base d’une société libre et a critiqué la décision de la Cour suprême de reconnaître le mariage entre personnes du même sexe comme un droit constitutionnel. Il soutient ce qu’on appelle les lois de liberté religieuse promues par les conservateurs dans plusieurs Etats pour refuser des prestations aux personnes LGBT. Il ne faut pas oublier non plus ses déclarations sur le mensonge du changement climatique qui serait, selon lui, un concept inventé par et pour les Chinois pour provoquer la perte de compétitivité du secteur manufacturier américain.

Un tel catalogue de détestables inepties a été diffusé par les médias dominants non seulement aux États-Unis mais partout dans le monde. Au point qu’on se demande comment un personnage avec de si misérables idées peut rencontrer un tel succès chez les électeurs américains qui, évidemment, ne sont pas tous décérébrés ? Quelque chose ne cadre pas.

Pour résoudre cette énigme, il a fallu fendre le mur de l’information et analyser de plus près le programme complet du candidat républicain. On découvre alors sept autres options fondamentales qu’il défend, et que les grands médias passent systématiquement sous silence.

1) En premier lieu, les journalistes ne lui pardonnent pas ses attaques frontales contre le pouvoir médiatique. Ils lui reprochent d’encourager régulièrement son public à huer les médias malhonnêtes. Trump affirme souvent : Je ne suis pas en compétition avec Hillary Clinton, mais avec les médias corrompus.  Récemment, il a tweeté : Si les grands médias, répugnants et corrompus, couvraient de manière honnête ma campagne, sans fausses interprétations, je dépasserais Hillary de 20 %. Il n’a pas hésité à interdire d’accès à ses meetings plusieurs médias importants comme The Washington Post, Politico, Huffington Post et BuzzFeed. Il a même osé attaquer Fox News, la grande chaîne de la droite pamphlétaire, qui pourtant le soutient à fond …

2) Une autre cause des attaques médiatiques contre Trump : sa dénonciation de la globalisation économique qu’il tient pour responsable de la destruction des classes moyennes. Selon lui, l’économie globalisée est une calamité dont le nombre de victimes ne cesse de croître. Il rappelle que plus de 60 000 usines ont dû fermer ces quinze dernières années aux États-Unis et qu’environ cinq millions d’emplois industriels ont été détruits.

3) Trump est un fervent protectionniste. Il propose d’augmenter les taxes sur tous les produits importés. Et se dit prêt, s’il arrive au pouvoir, à établir des droits de douanes de 40 % sur les produits chinois. Nous allons récupérer le contrôle du pays et nous ferons en sorte que les Etats-Unis redeviennent un grand pays affirme-il souvent, en reprenant son slogan de campagne. Partisan du Brexit, il a déclaré que, s’il était élu, il ferait sortir les États-Unis de l’Accord de libre échange nord-américain (ALENA). Il s’est également attaqué au Traité Trans-Pacifique (TPP) et a confirmé que, une fois élu, il retirerait les États-Unis de l’accord : Le TPP constituerait un coup mortel pour l’industrie manufacturière des Etats Unis. Evidemment, s’il est élu, il stopperait aussi les négociations en cours avec l’Union européenne. Il va même plus loin : Nous allons renégocier ou sortir de l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Ces accords commerciaux sont un désastre, répète-t-il. Dans des régions comme le rust belt, la ceinture de rouille du nord-est où les délocalisations et la fermeture d’usines ont fait exploser le chômage et généralisé la pauvreté, ces propos sont reçus avec enthousiasme et font renaître tous les espoirs.

4) Autre option dont les médias parlent peu : son refus des réductions budgétaires néolibérales en matière de sécurité sociale. De nombreux électeurs républicains victimes de la crise économique, et tous ceux qui ont plus de 65 ans, ont besoin de la Social Security (retraite) et du Medicare (assurance maladie) mis en place par le président Barack Obama que les autres dirigeants républicains veulent supprimer. Trump a promis ne pas revenir sur ces avancées sociales. Il a aussi promis de diminuer les prix des médicaments, d’aider à régler les problèmes des SDF, de réformer la fiscalité des petits contribuables, et de supprimer un impôt fédéral qui touche 73 millions de foyers modestes.

5) Dénonçant l’arrogance de Wall Street, Trump propose également d’augmenter de manière significative les impôts des traders spécialisés dans les hedge funds (fonds spéculatifs) qui gagnent des fortunes. Il promet le rétablissement de la loi Glass-Steagall (votée en 1933 pendant la Dépression et abrogée en 1999 par William Clinton), qui séparait la banque traditionnelle de la banque d’affaires pour éviter que celle-ci puisse mettre en péril l’épargne populaire par des investissements à haut risque. Évidemment, l’ensemble du secteur financier est vent debout contre Trump et s’oppose au rétablissement de cette loi.

6) En matière de politique internationale, Trump s’est fait fort de trouver des terrains d’entente à la fois avec la Russie et avec la Chine. Il veut notamment signer une alliance avec Vladimir Poutine et la Russie pour combattre efficacement l’organisation Etat islamique (Daech) même si pour l’établir Washington doit accepter l’annexion de la Crimée par Moscou.

7) Enfin, Trump estime qu’avec son énorme dette souveraine, l’Amérique n’a plus les moyens d’une politique étrangère interventionniste tous azimuts. Elle n’a plus vocation à garantir la paix à n’importe quel prix. Contrairement à plusieurs responsables de son parti, et tirant les leçons de la fin de la guerre froide, il veut changer l’OTAN : Il n’y aura plus – affirme-t-il – de garantie d’une protection automatique des États-Unis envers les pays membres de l’OTAN. 

Ces sept propositions n’oblitèrent pas les déclarations odieuses et inacceptables du candidat républicain diffusées en fanfare par les grands médias dominants, mais elles expliquent sans doute un peu mieux les raisons de son succès auprès de larges secteurs de l’électorat américain. L’aideront ils à l’emporter ? On ne peut l’affirmer mais il est certain que les trois duels télévisés à venir, face à Hillary Clinton, vont être redoutables pour la candidate démocrate. Car les stratèges militaires le savent bien : dans un affrontement entre le fort et le fou, celui-ci, par son imprévisibilité et son irrationalité, l’emporte bien souvent.

En 1980, la victoire inattendue de Ronald Reagan à la présidence des États-Unis avait fait entrer le monde dans un cycle de quarante ans de néolibéralisme et de globalisation économique. Une éventuelle victoire de Donald Trump le 8 novembre prochain pourrait, cette fois, faire entrer le monde dans un cycle géopolitique nouveau dont la caractéristique idéologique principale, que l’on voit poindre un peu partout et notamment en France, serait : l’autoritarisme identitaire.

 Traduction : Rosa Gutierrez

29 09 2016   

Vol d’essai d’un avion allemand à hydrogène : le HY4.

Cet appareil à deux fuselages ressemble à deux avions qui seraient raccordés entre eux par une aile commune, portant un moteur et une hélice. Le HY4 fait peu de bruit : la motorisation, de 80 kW, est électrique. Au décollage, phase où la consommation est importante, c’est une batterie lithium-ion qui fournit l’électricité. Mais en vol, une pile à combustible puisant de l’hydrogène dans un réservoir maintenu à basse température, produit un courant par réaction avec l’oxygène de l’air et rejette de la vapeur d’eau. Résultats annoncés mais à valider : 145 km/h en croisière, 200 km/h en pointe et une autonomie de 750 à 1 000 km.

www.futurascience

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09 2016 

Yoann Barbereau était directeur de l’Alliance Française à Irkoutsk. Pour des raisons qui échappent à la notre, les Russes ont fabriqué de toutes pièces une affaire d’abus sexuel sur sa propre fille, de cinq ans, ce qui leur a permis de le mettre en prison pour 71 jours, puis de l’assigner à résidence. De ce dernier séjour, il parvient à s’échapper, parvenant à se cacher en Russie d’abord grâce à un très confortable carnet d’adresses, sa dernière résidence – 14 mois-  n’étant autre que l’ambassade de France à Moscou, sous l’autorité de Jean-Maurice Ritter qui jugea qu’un directeur d’Alliance française ne valait pas assez cher pour être exfiltré ; Yoann Barbereau quittera l’ambassade de France à Moscou à sa seule initiative, gagnera un pays voisin par ses propres moyens et passera à pied une frontière au risque de sa vie, trouvant refuge dans un pays voisin, puis regagner la France…. où il est toujours sous le coup d’une condamnation de la justice russe : 15 ans de camp. Il publiera chez Stock en 2020 Dans les geôles de Sibérie. En septembre 2022, on pourra voir sur les écrans Kompromat, de Jérôme Salle, où il prend énormément de libertés avec les faits.

21 10 2016  

Un train de la Camrail déraille près d’Esaka, une ville camerounaise entre Yaoundé et Douala. 79 morts, 551 blessés. Le groupe Vincent Bolloré est actionnaire à 79 % de la Camrail.

8 11 2016 

Donald Trump devient le 45° président des États-Unis d’Amérique.

La colère a gagné, la rage protestataire l’a emporté. Un milliardaire douteux, qui ne paye pas d’impôts depuis vingt ans, ment comme un arracheur de dents, flirte ouvertement avec le racisme, la xénophobie et le sexisme, et qui n’a jamais exercé le moindre mandat électif ou public, a su la capter. Magistralement. Le républicain Donald Trump deviendra le 45e président des États-Unis, et prendra possession de la Maison Blanche en janvier.

Le pays qui a élu Barack Obama en  2008 et en 2012, premier Afro-Américain à la Maison Blanche, diplômé d’Harvard, vient d’adouber un promoteur immobilier aux multiples faillites et qui se félicite de ses bons gènes européens. Telle est l’humeur de l’Amérique, tel est le fond de l’air dans l’ensemble de nos pays occidentaux. La démocrate Hillary Clinton n’est pas la seule vaincue de ce scrutin. Une déferlante protestataire bouscule les élites traditionnelles de part et d’autre de l’Atlantique. L’élection de Donald Trump est un bouleversement majeur, une date pour les démocraties occidentales. Comme la chute du mur de Berlin, comme le 11 septembre 2001, cet événement ouvre sur un nouveau monde, dont on peine encore à distinguer les contours mais dont une caractéristique est d’ores et déjà avérée : dans ce monde-là, tout ce qui était réputé impossible, ou irréaliste, devient désormais envisageable.

Jérôme Fenoglio. Directeur du Monde 10 11 2016

Aujourd’hui, Trump est à la Maison Blanche et, avec lui, la brutalité, la méchanceté, la haine des femmes, des Noirs, des Mexicains… En face : la lâcheté. On sait que ce qu’il raconte est faux, fou, et on s’en fout. Il a désormais l’avantage pour avoir créé la nouvelle norme : la culture du mensonge. Les progressistes sont incapables de lui répondre, car on ne peut pas moralement le concurrencer dans ce domaine.

Joan Baez. Le Monde du 12 juin 2018

Donald Trump est devenu l’emblème de cette indifférence complète à la vérité allant jusqu’à une insolente falsification des faits : l’énormité de ces fameux faits alternatifs, créés de toutes pièces pour justifier ce en quoi le président croyait déjà… Se voit ainsi balayé l’idée même de vérité, selon laquelle certaines chose sont vraies indépendamment de ce que nous pouvons éprouver ou croire à leur propos. [4]

Le réel s’est en parti chargé de lutter contre cette dérive, avec un retour fracassant de l’Histoire ccs dernières années : attentats terroristes, catastrophes climatiques, effets dévastateurs de la pandémie, invasion de l’Ukraine… Ces événements ont cloué le bec à plus d’un post-véritiste vivant dans la seule fiction et à plus d’un relativiste persuadé que tout n’est qu’affaire d’interprétation. Mais ces faits ont aussi en retour alimenté la désinformation, la propagande, la manipulation et la suspicion envers la science et les savants, notamment pendant le Covid 19 et la découverte du vaccin, entourée de tant de billevesées et sommets d’irrationnalité. Le déni de la science, le dégoût de la raison, sont l’un des effets les plus dramatiques de la post-vérité. Il y a un effort commun à faire à visée démocratique – les médias traditionnels ont aussi leur rôle à jouer contre le primat des réseaux sociaux – en vue de réaffirmer, contre les pourvoyeurs d’ignorance, les lois logiques de la pensée et l’objectivité de la connaissance contre le déferlement des affects.

Claudine Tiercelin, présidente du Jury d’agrégation en philosophie. Télérama 3821 du 8 au 14 avril 2023

Covid-19 : Donald Trump s'empresse d'annoncer un accès élargi au plasma de convalescents

En démocratie directe, Hillary Clinton aurait gagné : elle a eu près de 3 millions de voix de plus que Donald Trump, qui n’a été élu que par 28 % des [petits…] électeurs. Mais les Américains ont choisi une élection indirecte, par laquelle ce sont les grands électeurs qui élisent le président, et les circonscriptions électorales sont telles que les régions très urbanisées sont en finale sous représentées par rapport aux régions à faible densité. Ces grand électeurs sont élus au scrutin majoritaire, et raflent toute la mise – winner takes all – : les pères de la Constitution souhaitaient que le président soit élu non par les électeurs, mais par les États.

L’usage à l’excès de la peur de l’autre prend le pas sur le respect du fait : de 2001 à 2013, l’Amérique a connu 3 000 morts du fait du terrorisme, mais, pour la même période, 400 000 morts du fait de l’usage des armes à feu, en vente libre pour les particuliers ! Remettre en question cette législation, Barack Obama n’y est pas parvenu, et pour Donald Trump, c’est hors de question ; par contre il essaiera très vite d’interdire l’entrée du pays aux ressortissants de certains pays arabes… essuyant alors ses premiers échecs !

Il y a des moments d’aberration dans les multitudes, il y a des noms qui entraînent les foules comme le mirage les troupeaux, comme le lambeau de pourpre attire les animaux privés de raison ; eh bien, malgré cela, je n’hésite pas à me prononcer en faveur de l’élection du président par le peuple. Et si le peuple se trompe, s’il veut abdiquer sa sûreté, sa dignité, sa liberté entre les mains d’une réminiscence d’Empire, s’il nous désavoue et se désavoue lui-même, eh bien tant pis pour le peuple ! Ce ne sera pas nous, ce sera lui qui aura manqué de persévérance et de courage.

Lamartine, en 1848, commentant la victoire de Louis Napoléon Bonaparte.

Le 11 novembre, le Midi Libre titrera en une : La France va-t-elle subir l’effet Trump ? Selon les experts, la victoire du FN à la présidentielle est peu probable.

Cette élection de Trump a mis en pleine lumière  le plantage énorme du monde de la communication, de toute la presse, des médias, qui ont révélé alors leur méconnaissance profonde du pays, avec le refus délibéré de sortir de leur bulle d’establishment, de nantis. Eh bien, le Midi Libre, trois jours après cet échec majeur, en remet une couche et nous ressert le plat de ces messieurs les experts, comme si nos experts à nous étaient bien meilleurs que les américains. Allons donc ! Laissez donc les experts faire une bonne diète en les contraignant à une cure de silence, et vous-même, messieurs les journalistes, mettez-vous donc en quête de ce qu’est le pays réel, en cessant de vous réfugier derrière des intermédiaires soi-disant experts qui s’autoproclament compétents, mais se révèlent incompétents.

Parmi les personnalités en vue, il ne sont que deux à avoir prévu le séisme : le réalisateur américain Michael Moore et l’ancien directeur du Monde diplomatique Ignacio Ramonet :

Il fut un temps où l’Atlantique était un océan. C’était avant que la téloche, le Concorde puis Internet ne réduisent cette immensité aux proportions d’un ruisseau. Mais de cette époque depuis longtemps révolue nous reste le sentiment que les Américains ne sont pas faits du même bois que nous. Il y a toujours, insidieuse, l’idée d’une lointaine peuplade, avec ses mœurs, ses rites et ses lubies. Une tribu reculée, un peu arriérée, surtout quand elle vit à Abilene, Des Moines ou Gastonia. Une étrange horde qui vient d’ailleurs de se donner un drôle de chef à plumes, strass, paillettes et moumoute dorée sur tranche.

Il faut entendre, lire, voir, ce qui se dit, s’écrit, se montre de ce qui se passe tout là-bas, sur la rive en face. Le bras est tendu vers cet ailleurs, cet horizon derrière les flots. Puisque les temps sont à ériger des murs qui rassurent, c’en est bien un qu’on bâtit là, avec cette distance physique et intellectuelle. Jamais cela n’arriverait chez nous, bien sûr. Nous n’avons rien à craindre sur notre bon vieux continent, vacciné par l’histoire et la civilisation. Ainsi s’invente-t-on des milliers de kilomètres prophylactiques. On se répète : C’est loin l’Amérique… Quelle myopie !

Comme si nulle caravelle jamais ne traversa l’océan. Comme si ce qui se passe dans ce Nouveau Monde appartenait toujours à un autre monde. Comme si Charles Lindbergh, le Big Mac ou la fibre optique n’avaient pas rapproché les deux berges à se toucher. Comme si ces États-Unis vastes et profonds, des Appalaches aux montagnes Rocheuses, du Texas au Dakota, demeuraient terra incognita. Comme si ces habitants grassouillets étaient attardés dans un folklorique Far West. Comme si ces Ricains étaient d’une culture différente, plus proches des Papous que de nous autres, Européens éclairés. Il reste de l’ethnologie dans le commentaire, de la condescendance dans l’analyse.

Qu’il est commode, réconfortant, au fond, de vouloir réduire l’électorat de Trump à des clichés : nostalgiques du Ku Klux Klan, gagas de la gâchette, bigots les bras en croix ! Mais, à lire les reportages du Monde sur cette Amérique en rupture de ban, comment ne pas voir plus qu’une proximité, plus qu’un cousinage, un vrai mimétisme des deux rivages ? Comment ne pas comprendre que cette élection s’est déroulée à un jet de pierre, un ricochet sur l’eau. Et que sa semblable – sa pareille ? – se prépare ici. Tant elle est là, sous nos yeux, même si nous rechignons à la voir, cette France de Trump. Elle est la même, exactement la même, simplement en VF.

On écoutait les anciens sidérurgistes de Pennsylvanie remâcher le sentiment d’abandon et on croyait entendre ceux qu’on avait interrogés il y a quelques années dans la vallée de la Fensch. Dans cette vallée des anges, ainsi baptisée pour la terminaison des communes (Nilvange, Florange, Knutange…), les habitants se sentaient aussi délaissés. On a surnommé la Rust Belt (la ceinture de rouille) les anciens États industriels du nord des États-Unis qui se sont majoritairement donnés à Trump, par dépit. La ceinture de rouille… L’image irait si bien aux hauts-fourneaux et laminoirs de Gandrange ou d’Hayange, monstres à l’arrêt, le métal rongé par l’oxydation, colosses en ruine, laissant à leurs pieds des bonshommes inutiles, à oublier. La vallée de la Fensch ma chérie, c’est l’Colorado en plus petit, chantait Bernard Lavilliers.

On écoutait les gens de Virginie ou d’Alabama, ces rednecks (cous rouges) et leur fierté de campagnards. Ils parlaient de leur religion du travail, de leur glorification du dollar [5] arraché à la sueur du front. On repensait à ce vieil éleveur désespéré, rencontré dans un coin de Normandie. Lui et sa femme vivaient avec moins de 1 000  € de retraite par mois, après avoir nourri la France, cette ingrate. Le fiston, célibataire par défaut, avait repris la ferme. Grevé de dettes, saoulé de normes, exténué par un labeur inutile, il avait tenté de se suicider.

On écoutait les évangéliques de la Bible Belt (la ceinture de la Bible), corset de religion qui enserre le sud des États-Unis. Ces culs-bénits racontaient leur réprobation de mœurs qu’ils jugeaient dissolues, mais aussi leur recherche d’une morale de vie. On repensait alors à La Manif pour tous. En parcourant les rangs de ces centaines de milliers d’opposants au mariage des homosexuels, on avait effleuré ce même mélange confus, entre rejet et foi, entre sectarisme et éthique, cette même quête de sens au risque de l’intolérance.

On écoutait, mille fois ressassés, ces propos sur l’Amérique qui fout le camp. On repensait à ces deux amis, rencontrés lors d’un raout de voitures de collection dans le centre de la France, qui avaient décidé de rester scotchés, du mange-disque à la radio flashy, dans les années soixante, celles de leurs 20 ans. Quand Donald Trump dit : La France n’est plus la France, il s’adresse à eux et à tous les nostalgiques qu’on aurait tort de réduire à des passéistes.

On écoutait, écoutait ainsi tous ces Américains qui adoubaient ce personnage sulfureux, malgré ou à cause de ces outrances. On repensait à ces ouvriers de Camargue, épris de chasse et de liberté, emplis de culture virile, qui se plaignaient de voir leur mode de vie émasculée par les bobos. On repensait à ce cordonnier bourguignon que les charges sociales mettaient à genoux. On repensait à cet ouvrier de l’arsenal de Cherbourg dont l’avenir était en pointillé, à la merci d’erratiques commandes.

On repensait en fait à tant de visages que cela en devenait effrayant. Tous ces déclassés emplis de rage, car c’est bien de rage qu’il s’agit, tous ces électeurs qui croient qu’ils n’ont rien à perdre… À la merci des beaux parleurs, des marchands d’illusions, en quête d’un patron plus que d’un président, d’un big boss qui leur fera miroiter une paternaliste protection. Ils sont si nombreux de ce côté de ce ru qu’on appelle l’Atlantique.

Benoît Hopquin. Le Monde du 20 12 2016

16 11 2016

Emmanuel Macron vient d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle à Bobigny. Alexandre Benalla met violemment à la porte de la salle un militant communiste qui voulait poser une question, probablement embarrassante. Petit détour sur le chemin du retour par la basilique de Saint Denis pour se recueillir sur les tombeaux des rois de France, hors caméras et hors micros. Quand on se croit investi d’une mission sacrée, il ne faut rien négliger.

25 11 2016   

Dernière vache sacrée du communisme, Fidel Castro meurt. Exit le Lider Maximo. Nombreux seront les faux-culs à le pleurer. Quelques-uns, sincèrement. Plus rares ceux qui oseront dire : Enfin !

Castro I° est mort une seconde fois. Mais cette fois ce sera la bonne, car son frère Castro II l’a annoncé sur un ton mélodramatique digne du plus ringard des feuilletons. Fini cette présence oppressante, mais nous nous en rendrons compte seulement quand quelque temps aura passé, des années peut-être.

Oui, car le monde s’obstine aujourd’hui à nous vendre ce produit périmé, ce produit de marketing inventé par Castro I° et acheté par la planète entière : Lui et sa Révolution. Les acheteurs, bien sûr, ont confondu Castro et Cuba, et ils ont cru, ils croient encore que la fête avait été inventée par le tyran, et quand ils parlent de Cuba ils ne se réfèrent qu’à l’île auréolée de cette espèce de cette fête ridicule et tapageuse que les gauchistes du monde entier assimilent à mon pays. Non, Cuba n’est pas Castro. Castro n’a jamais compris ce qu’était Cuba.

Castro I° est mort, et ici, en France, François Hollande se livre à une sorte de pirouette lamentable en citant encore le vilain embargo des États-Unis. Hollande n’est au courant de rien, il reste fidèle à son habitude de ne se rendre compte de rien. Le tyran est mort et le président trouve le plus pathétique des détours : l’embargo. Il ne faisait pas référence à l’embargo que le castrisme a imposé aux Cubains pendant cinquante-sept ans et à ses camps de concentration, les UMAP (Unités militaires d’aide à la production). Non, Hollande se réfère à l’embargo américain qui n’a jamais empêché Cuba d’être envahie pendant plus de trente ans par les Soviétiques et de commercer avec le monde occidental, notamment avec la France. Pas plus qu’il n’explique l’origine de cet embargo, qui était moins un embargo qu’un boycott commercial. Et nous devrons en rester là.

Mais Hollande n’a pas été seul à adopter cette attitude, il a suivi le cortège des éloges émis surtout par la classe politique. Il a été au diapason aussi de l’ignorance de la plupart des journalistes.

J’ai pensé que la mort de Castro me rendrait très heureuse, et que je pourrais enfin ici en France m’ouvrir en racontant la vérité sur la dictature castriste. Mais non. Je n’éprouve qu’un grand dégoût. Un immense dégoût. C’est tout. Je me contente d’archiver visages et propos, comme ceux du premier ministre canadien, Justin Trudeau – Fidel Castro, leader plus grand que nature, a consacré près d’un demi-siècle au service du peuple cubain, a-t-il notamment déclaré – , et tant d’autres, qui paieront un jour pour leurs offenses au peuple cubain.

Je me rappelle maintenant mes parents, morts en exil. Je me rappelle de tant d’hommes et de femmes exécutés massivement dans les camps, et j’évoque les écrivains, les peintres, les musiciens, exilés et morts avant d’avoir pu vivre ce grand moment de libération personnelle qu’aucun de ces lèche-bottes du Dictateur Favori ne pourra comprendre.

Mais non. Malgré tout on l’appelle ici le Grand Révolutionnaire, le Lider Maximo, alors qu’il n’a été que le pire des gangsters, le caïd, celui qui a vendu Cuba d’abord aux Soviétiques et maintenant aux Américains. L’indésirable qui a inoculé le venin du communisme à l’Afrique, qui a utilisé des armes chimiques dans des villages africains, l’inventeur de la guerre des guérillas, l’inspirateur des narco-guérillas et des terroristes de l’ETA, le trafiquant de drogue qui, protégé par la complicité internationale, a toujours su échapper à tout tribunal et à toute justice, par ses ruses séductrices d’éternel trublion.

Et l’on rabâche encore à la radio qu’avant 1959 Cuba était le bordel des Américains, que la bourgeoisie avait fui l’île à l’arrivée du Grand Commandant de la Révolution. Des bêtises à la pelle. Cuba est maintenant le bordel du monde, surtout des Européens. Quelle insulte aux femmes cubaines, aux travailleuses et travailleurs qui ont contribué à faire de mon pays, en  1957, l’un des plus développés du continent. Quel mensonge !

En attendant, à Cuba, le peuple fait semblant de pleurer alors qu’il jubile à l’intérieur, et à Miami les exilés de diverses générations, surtout les jeunes, font la fête alors qu’ils pleurent à l’intérieur. En France, à Paris, nous, les Cubains, nous devons supporter les mensonges répugnants des admirateurs du Sanguinaire des Antilles. Mais moi je m’y refuse, je m’y refuse toujours. J’ai suspendu mon drapeau cubain au balcon et, ma fille à côté de moi, j’ai crié de toutes mes forces : Vive Cuba Libre !

Zoé Valdés. Le Monde du 29 11 2016

Jean Ziegler ne partage pas cet excès d’indignité, en faisant valoir, et certainement à juste titre, qu’à Cuba, contrairement à la situation antérieure à Fidel Castro, aujourd’hui tous les enfants mangent à leur faim, et que la médecine est accessible à tous, et de très bonne qualité. Cela devait être dit puisque cela ne pouvait rester caché.

27 11 2016              

Alain Juppé perd les primaires de la droite pour l’élection présidentielle de 2017 contre François Fillon, qui obtient plus de 44 % des suffrages – soit un peu moins de 2 millions de voix -, contre 28 % pour Juppé. Avec 4.38 millions de votants au second tour, l’ensemble de la presse s’accordera pour dire que c’était là un taux de participation exceptionnel. Il y a à peu près 47 millions d’inscrits sur les listes électorales en France ; en tablant sur un partage des voix entre droite et gauche, à la louche, à 50/50, cela fait 23.5 millions de votants pour la droite. Cela signifie que plus de 19 millions d’électeurs de droite se sont abstenus. Les 1.927 millions de voix pour Fillon représentent certes 44 % des votants, mais seulement 12.20 % des voix de la droite : on est tout de même très loin d’un triomphe. Est-ce donc significatif ?

Hier encore, un ami français me le confirmait. Aux primaires de la droite, il aurait voté Alain Juppé plutôt que François Fillon si un proche ne l’avait averti in extremis : il est pour les musulmans ! D’ailleurs, m’apprend-il en souriant, on l’appelle Ali juppé sur les réseaux sociaux.

Il est vrai que depuis des semaines, les ennemis du maire de Bordeaux avaient martelé sur Internet qu’il avait financé une grande mosquée, vanté les mérites républicains d’un imam, défendu l’identité française heureuse de sa diversité, etc. Des photomontages le dépeignaient vêtu en mollah ou en imam…

Un an jour pour jour après les terribles attentats de Paris, ces attaques indécentes ont été orchestrées lors d’une élection pour la présidentielle française. Sur mon compte personnel Facebook, je recevais aussi des blagues sur Ali Alain. Au second tour des primaires, ces attaques nauséabondes ont contribué à la défaite d’Alain Juppé. Certes, parmi d’autres facteurs, mais elles ont pesé dans le choix des électeurs indécis.

Pour les défenseurs de la République fraternelle, des campagnes politiques dignes, cette réalité est douloureuse. Elle m’a ramené à l’élection présidentielle américaine de 2008 dont les débats m’avaient alors outré. Enseignant à UCLA (Los Angeles), je suivais la campagne, Barack Obama étant donné vainqueur par les sondages. Les coups bas pleuvaient, venant des républicains, qui inventaient des affiliations équivoques du candidat noir à l’islam, insistant sur son enfance en Indonésie, sa scolarité dans une école coranique, des connexions avec des réseaux terroristes.

Si bien que, lors d’un meeting de John McCain, quelqu’un avait crié dans la foule  kill him ! (tuez-le) ! L’appel au meurtre en direct avait aussitôt été repris en chœur par d’autres voix parmi les milliers de personnes dans la salle, chauffées à blanc. Il avait libéré le souffle galvanisant de la rhétorique identitaire, blanche et chrétienne. La haine islamophobe était libérée publiquement contre Barack Hussein Obama. Deux jeunes néonazis avaient même été arrêtés, peu avant l’élection, qui projetaient d’assassiner Obama pour déjouer le complot arabo-musulman.

En tant que Français de culture musulmane, j’étais atterré, inquiet de ce déferlement de haine. J’avais cependant été rassuré par un homme politique qui monta au créneau contre les dérapages de son parti : Colin Powell. Issu de la minorité noire, ancien secrétaire d’Etat à la défense de G. W. Bush, il appela à voter Obama. Les dérives raciales chez les républicains l’avaient écœuré : … Je suis aussi troublé par un autre argument de McCain, que d’autres membres du Parti républicain mettent aussi en avant. On ne se gêne plus pour dire des choses comme : M. Obama est un musulman ! Or, il n’est pas musulman. Il est chrétien et l’a toujours été. Mais la vraie réponse est : Et alors, s’il l’avait été ? Est-ce un problème d’être musulman dans ce pays ? La réponse est non, ça, ce n’est pas l’Amérique. Est-ce un problème d’être un enfant américain musulman de 7 ans et de rêver de devenir président des États-Unis ? J’ai entendu des membres éminents de mon parti lancer qu’Obama était musulman et qu’il devrait être associé au terrorisme ! Ce n’est pas une façon de faire, en Amérique…

Une autre fois, un incident raciste s’était encore produit lors d’un meeting républicain. Une vieille dame avait surgi sur scène pour saisir le micro et crié qu’Obama était un Arabe et qu’elle ne voterait jamais pour lui ! Surpris, McCain lui avait arraché le micro, s’empressant de rappeler que le sénateur Obama n’était pas un Arabe, mais quelqu’un de décentÉtrangement, ces dérapages n’avaient pas suscité de remous particulier dans les communautés religieuses, peut-être rompues à son expression publique libérée. Le grand silence attestait à mes yeux le recul de leur capacité d’indignation. Lors de cette élection historique de 2008, Colin Powell avait lancé la bonne question : était-ce un problème d’être musulman aux États-Unis ?

Barack Hussein Obama a malgré tout été élu. Il a même gagné son second mandat, qui s’achève au moment même où en France Alain a perdu à cause d’Ali. Le camp de François Fillon peut se réjouir de sa victoire, mais les lésions sociales provoquées par les attaques racistes resteront dans la mémoire des millions de musulmans de France. Elle montre combien utiliser l’islam comme épouvantail aujourd’hui peut être rentable en politique. Et vice versa. C’est indigne au pays de la fraternité, mais surtout pour ces citoyens français qui s’appellent Ali et qui, depuis les années 1970, sont contraints à des amputations patronymiques pour éviter les discriminations, à se dissimuler pour ne pas subir l’humiliation du refoulement, quitte à se renier, et à montrer patte blanche.

Il y a une corrélation positive entre l’appréciation de son prénom et l’estime de soi. Et vice versa. Le prénom est le premier élément que l’individu livre sur lui et, quand il est donné lors des premières rencontres, il fait l’objet d’une évaluation par les autres et conditionne la désirabilité sociale de l’individu. Plus il est fréquent, plus il est apprécié, car la familiarité favorise la préférence. Je me souviens que dans les années 1970-1980, de jeunes Arabes se faisaient appeler par des prénoms européens, Aldo, Luigi, Jimmy, plutôt que Mohamed, Bachir ou Ali. Plus tard, l’usage de diminutifs a permis de masquer l’indésirabilité sociale du prénom : Mustapha est devenu Mouss, Mohamed Momo, Samir Sami, etc. ; puis l’usage du verlan a fait de Karim Rimka, de Maurad Radmo et de Kamel Melka, etc.

L’impact psychologique à long terme était prévisible. Le rejet du prénom par la société signifiait le rejet de l’histoire des parents, des ancêtres, de la généalogie et, en somme, de l’islam. Le balancier identitaire finirait un jour par revenir en boomerang. Du reniement de soi, on passerait à l’ostentatoire. Nous sommes au cœur de ce cercle vicieux.

Aux États-Unis, une figure mondiale de la boxe est morte récemment. Le plus grand champion de tous les temps avait choisi dans les années 1960 de s’appeler Mohamed Ali, non plus Cassius Clay, pour retrouver une fierté identitaire dans l’Amérique ségrégationniste. En France, on savait que Mohamed n’était pas le meilleur prénom pour trouver du travail, mais beaucoup réalisent que même Ali est devenu la figure emblématique du repoussoir : associé à un patronyme du terroir, comme Juppé par exemple, il définit désormais une souillure, un antonyme. C’est Clovis embrassant Zidane ! Jusqu’à quand la Hogra ( mépris en arabe) va-t-elle durer ?

Azouz Begag. Le Monde du 8 décembre 2016

Azouz Begag a été ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances dans de gouvernement Villepin, sous Chirac, de 2005 à 2007. Certes, on a vu sur les réseaux sociaux des Ali Juppé, mais on a vu aussi tous les autres candidats ainsi caricaturés, ce qui écorne quelque peu la pertinence de l’argument d’Azouz Begag.

Il en faudra encore du temps aux Instituts de sondage pour réaliser combien leurs méthodes de travail sont devenues obsolètes pour appréhender la réalité, et aucun d’entre eux n’a encore pris la mesure du poids des réseaux sociaux dans les élections, fantastiques entreprises de crétinisation, d’avancée à vitesse V vers le degré zéro de l’intelligence, du sens critique ; impérialisme du slogan, du mélange inextricable du vrai et du faux, où personne n’a de position qui lui permette de faire un peu de rangement dans tout ce foutoir ; et les mieux placés pour mesurer tout cela sont les créateurs de ces réseaux… qui mettent tous leur progéniture dans des établissements où sont proscrits n’importe quel type d’écran ; on n’y connaît que la craie, le tableau noir, le papier et le crayon.

Monsieur Begag est poli, mais en fait ce dont il veut parler, c’est de la montée en puissance de l’imbécillité, du crétinisme. L’affaire n’est pas nouvelle : mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose disait Voltaire, le problème, c’est qu’aujourd’hui, avec la puissance de feu de ces réseaux sociaux, ce n’est pas quelque chose qui en reste, mais le quelque chose a pris la plus grosse part… jusqu’à gagner une élection.

Donc François Fillon arrive largement vainqueur. Le pauvre homme ne sait pas encore qu’arrivé à ce stade, il a mangé tout son pain blanc, et que ne va plus rester très bientôt sur la table que du pain noir… Tous ces bons catholiques cramponnés à leur traditionalisme comme à une bouée de sauvetage qui ont voté pour l’honnête homme vont devoir ouvrir les yeux pour réaliser qu’il n’est qu’un notaire véreux et cupide, habile à tripatouiller la loi pour qu’elle lui permettre de grossir son bas de laine : sa femme Pénélope a touché pendant des années des salaires plus que confortables sans fournir aucune preuve de travail effectif correspondant. Les copains comme Marc Ladreit de Lacharrière vont mentir comme des arracheurs de dents pour prétendre le contraire. François Fillon est bien comme nombre de politichiens : avant de servir, je pense d’abord à me servir. À ce régime les électeurs devraient fondre comme neige au printemps et François Fillon repartir à l’anonymat d’où les catholiques traditionalistes l’avaient un moment sortis. D’ailleurs, si cet homme avait eu la carrure d’un homme d’État, il aurait rapidement démissionné de son poste de premier ministre de Nicolas Sarkozy, en refusant de se cramponner à cette fonction de collaborateur, subissant humiliations sur humiliations. D’honnête homme passablement psychorigide, il sera passé en quelques semaines au statut de parfait minable.

Et puis, il y a surtout cette faute politique et stratégique grave qu’est l’instauration d’une primaire au sein d’un parti politique pour le choix d’un candidat à une élection présidentielle, car c’est la dénaturation absolue de l’essence d’une élection du président au suffrage universel : cette élection est d’une nature bien particulière, dans laquelle le charisme du candidat pèse lourd, tout comme l’affectif des électeurs pèse lourd lui aussi, et aussi, un peu du mystère inhérent au choix d’un chef par un peuple. Une primaire vient casser tout cela, le réduire en miettes, car le vainqueur d’une primaire, c’est le vainqueur d’une élection interne à un parti, et ce n’est pas du tout la même chose ; et c’est le plus médiocre, le moins exposé aux querelles internes qui sort du chapeau, Fillon avant Juppé, et, cinq ans plus tard, Valérie Pécresse avant Xavier Bertrand, avant Michel Barnier…. Certes il faut éviter la multiplicité des candidatures, mais il suffit pour cela de changer les chiffres du montant des signatures à recueillir pour être candidat.

10 12 2016  

Mike Horn se lance dans une traversée de l’Antarctique : 5 100 km de la base russe de Novolazarevskaya à la base française de Dumont d’Urville, en passant par le pôle sud. Il tire un traîneau de 170 kg en étant lui-même sur des skis et il est tracté par un cerf-volant. Très vite il endommagera l’un de ses skis, qu’il continuera tout de même à utiliser. Le 9 janvier, il sera au pôle sud ; le 26 janvier, 800 km au-delà, par -45°, il se luxera l’épaule dans une chute dans une crevasse. Il perdra l’une des trois voiles de son cerf-volant, qui était d’un aide précieuse par beau temps : il parviendra ainsi à faire plus de 200 km en un jour ! 57 jours plus tard, le 7 février 2017, il atteindra la base française de Dumont d’Urville.

aventure extrême Mike Horn - L'aventurier tous terrains - Activmag

 

Un Nouvel exploit et record mondial pour Mike Horn – Rémy Cointreau

Mike Horn, premier homme à traverser l'Antarctique 5100 km en 57 jours

 

25 12 2016    

À bord de son trimaran Sodebo, – 31 m. de long, 35 de haut, 21 de large -, 2,5 millions €, Thomas Coville boucle un tour du monde en solitaire en 49 jours 3 h 7’ 38″ : il bat ainsi le précédent record de Francis Joyon  de 2008 de 8 jours et 10 h ! des pointes fréquentes à 35 nœuds – 63 km/h !

Le trimaran «Sodebo Ultim'» de Thomas Coville n'en était pas à son premier tour du monde.

On est tout de même assez loin – 9 jours de plus – du record du monde en équipage pris en 2017 par  Francis Joyon en 40 jours 23 h 30’ et 30″ avec 5 hommes sur Idec-Sport un trimaran de 31.5 mètres de long, pouvant porter jusqu’à 520 m² de voiles, record qui vient démentir le dicton en vogue dans tous les ports bretons : Onze Français sur un bateau, ça donne onze Français ; onze Anglais sur le même bateau, ça fait un équipage.

Trophée Jules Verne : Francis Joyon boucle le tour du ...

2016                                  

Trop de voitures ? Certes. Il faut inventer des solutions : nombre de départements vont subventionner des déplacements à bas prix : 1 € ou 1.5 € pour tout voyage sur les bus des lignes départementales : très bien, les bus existent déjà, les routes existent déjà, il suffit donc de remplir les bus ; excellente subvention au moindre coût. Par contre, si l’on se risque à mettre le nez dans les histoires de vélo, c’est une véritable catastrophe, plutôt même un scandale de démagogie et d’arnaque au contribuable : un velib – vélo en libre service – quel que soit son statut, coûte entre 2 000 et 4 000 € par an à la collectivité qui le gère, le vol étant la principale cause de ce coût astronomique. Ce sont là des expériences auxquelles on met fin dans les meilleurs délais quand on est un responsable politique honnête et soucieux des deniers des contribuables… eh bien non, les expériences se poursuivent, à grand renfort de démagogie et d’irresponsabilité… démagogie, car le montant des abonnements est dérisoire eu égard au coût : de 20 à 30 € par an ! Il aurait pu être multiplié par cinq. Là encore on préfère faire payer le contribuable que l’usager.

14 01 2017   

Au Brésil, dans la prison d’Alcaçuz, à 25 km de Natal, on découvre les corps de 26 prisonniers pendus, démembrés ou décapités : c’est le bilan de plusieurs jours d’affrontements entre le PCC [Primero comando da capital – Premier commando de la capitale] et le RN [Sindicato do crime do Rio Grande do Norte – Syndicat du crime du Rio Grande do Norte – les deux gangs qu’abrite la prison.

28 01 2017  

Les Américains qui manifestent contre la présidence de Donald Trump sont en nombre, les plus souvent anonymes. Mais les boss de la Silicon Valley s’y mettent aussi, et à l’exception d’Elon Musk et de Trevis Kalanik, fondateur de Uber, qui se sont fait embaucher par Trump, la levée de boucliers est unanime :

Donald Trump pourra se vanter d’avoir fait descendre dans la rue des milliardaires de la Silicon Valley. Sergueï Brin, le cofondateur de Google, 13° fortune des États-Unis selon le classement Forbes, se trouvait, samedi 28 janvier, au milieu de la foule qui manifestait à l’aéroport de San Francisco contre le décret Trump. Une vision rare pour un homme qui ne passe pas pour être particulièrement grégaire.

Brin s’est laissé photographier avec un bébé dans sa poussette portant un écriteau : Je veux que mes grands-parents reviennent d’Iran. Né à Moscou, l’inventeur est arrivé en 1979 aux États-Unis, à l’âge de 6 ans, lorsque sa famille a fui l’antisémitisme en URSS. Je suis ici parce que je suis moi-même un réfugié, a-t-il expliqué.

Parmi le millier de manifestants se trouvait une autre figure de la Silicon Valley : Sam Altman, 31 ans, qui dirige Y combinator, l’une des pépinières de start-up les plus courues. Il est temps que les sociétés high-tech prennent position, explique-t-il sur son blog. Nous sommes maintenant à ce stade où quelque chose est en train de se mettre en place qui sera enseigné dans les livres d’histoire, et pas dans un sens positif (…). C’est une brèche ouverte dans le contrat de l’Amérique avec tous les immigrants du pays.

Dans la Silicon Valley, où on se préoccupe peu de nationalités, le décret de Donald Trump sur les étrangers a fait l’effet d’un retour en arrière atterrant. Nombre d’employés ont des cartes vertes qui donnent le droit de travailler aux États-Unis. Quand ils ont découvert que les mesures antiterroristes de Trump s’appliquaient aussi à eux ou que leur situation serait examinée au cas par cas, selon le bon vouloir des agents de l’immigration, les entrepreneurs ont été sidérés. Je croyais qu’on avait passé le point où le lieu de naissance comptait plus que l’éducation et les choix de vie, confie Reza Malekzadeh, investisseur d’origine iranienne, et ancien membre de l’équipe fondatrice de la société de logiciels VMware. Je suis attristé et je ne comprends pas. Je contribue à l’économie et à la société américaines. À croire que tout ce que j’ai fait dans ma vie ne compte plus. Comme lui, beaucoup ont préféré mettre leurs déplacements en attente.

Par la voix de Sundar Pichai, son PDG (né en Inde), Google a demandé à la centaine d’employés originaires de l’un des sept pays de la liste noire et se trouvant en voyage de rentrer immédiatement aux États-Unis. Satya Nadella, le PDG de Microsoft (également d’origine indienne), a fait état de 76 employés affectés. Sur les réseaux sociaux, beaucoup ont publié la photo de Steve Jobs, dont le père était syrien. Ou reproduit la liste des entreprises phares de la Vallée fondées par des immigrants de la première ou deuxième génération : Google, Facebook, Amazon, Oracle, IBM, Uber, eBay, Tesla… Sous le hashtag #MuslimBan, les enfants ou petits-enfants de réfugiés ont partagé leur émotion. Les commentaires assimilent souvent réfugiés, migrants, détenteurs de cartes vertes, dans un même élan généreux : Let them in (Laissez-les entrer). Jusqu’à faire référence à l’Holocauste, et au refus en  1939 des États-Unis d’accueillir les juifs fuyant l’Allemagne nazie.

Sam Altman a appelé les PDG des grandes entreprises à s’exprimer sans équivoque, et quel que soit le risque commercial. Parmi les patrons, le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, qui est marié à une médecin d’origine chinoise, a été le premier à se manifester. Si nous avions fermé les portes aux réfugiés il y a quelques décennies, la famille de Priscilla – Chan, sa femme – ne serait pas là aujourd’hui. Apple ne pourrait pas exister sans l’immigration, encore moins prospérer et innover, a rappelé Tim Cook, le successeur de Steve Jobs. Le PDG de Netflix, Reed Hastings, a été le plus percutant : Les actions de Trump causent du tort aux employés de Netflix autour du monde. Et elles sont tellement non américaines qu’elles nous font de la peine à tous. Mais Elon Musk, de Tesla, qui est lui-même d’origine sud-africaine et dont le New York Times a récemment vanté la bromance avec Donald Trump, a été plus mesuré. Comme Travis Kalanik, le fondateur de Uber, il a accepté un poste de membre du conseil économique du président-businessman. Pour les PDG du high-tech, la situation est un peu compliquée.

L’industrie est sur la défensive. Symbole de la globalisation honnie par la Rust Belt et de la robotisation dévoreuse d’emplois, elle se sent coupable de la coupure avec l’Amérique profonde. Le ministre français de l’économie, Michel Sapin, récemment en déplacement dans la Silicon Valley, racontait avoir été frappé par la prudence de ses interlocuteurs. Certains étaient terrorisés à l’idée que s’ébruitent leurs projets d’investissements en Europe. De peur d’être la cible d’un Tweet rageur de l’occupant de la Maison Blanche.

Corine Lesnes. Le Monde du 31 01 2017

2 02 2017

Un contrôle de police tourne mal à Aulnay sous Bois : Théodore Luhaka, 22 ans est gravement blessé :

C’est alors que l’agent Marc-Antoine Castelain, qui se trouve derrière Théo, lui porte un coup d’estoc au niveau des fesses avec la pointe de sa matraque, qui provoque une rupture du sphincter anal. Le jeune homme s’effondre au sol, où il continue de recevoir des coups. A son arrivée au commissariat d’Aulnay-sous-Bois, il présente un important saignement au niveau des fesses et est immédiatement envoyé à l’hôpital. Quand on lui demandera, le lendemain, d’évaluer l’intensité de la douleur ressentie sur le coup, de 1 à 10, Théo répondra dix. L’affaire avait entraîné plusieurs jours de manifestations et d’émeutes. Le président de la République de l’époque, François Hollande, s’était rendu à l’hôpital au chevet du jeune homme, qui prendra pour avocat Eric Dupond-Moretti avant que celui-ci, devenu ministre de la justice, ne cède la place à son associé, Antoine Vey.

[…] Deux phases litigieuses de cette interpellation seront jugées à Bobigny : le coup de matraque ayant entraîné la grave blessure dont a souffert Théo, d’une part ; les gestes violents commis ensuite, alors que le jeune homme, tombé à terre et maîtrisé par les policiers, ne bougeait plus, d’autre part. Les seconds ne feront pas débat. Dès lors que la partie civile était au sol et immobile, les actes de violences étaient nécessairement disproportionnés, estime la juge d’instruction qui recense, dans son ordonnance de mise en accusation, un deuxième coup d’estoc – dans le ventre cette fois – et un coup de poing infligés par Marc-Antoine Castelain, 34 ans aujourd’hui, un coup de poing à l’abdomen asséné par Tony Hochart, 31 ans, et un coup de genou lancé par Jérémie Dulin, 42 ans.

[…] La vidéo démontre ainsi que, dans les dix secondes précédant le coup, Théo cesse de se débattre et que, même s’il résiste encore manifestement au point de parvenir à arracher sa main de l’emprise de M. Hochart, il est bloqué contre un muret, ne gesticule plus et ne porte pas atteinte à l’intégrité physique des policiers. Cette dizaine de secondes de « calme relatif (…) permettait à Marc-Antoine Castelain d’analyser la situation et de renoncer à son geste, estime la juge.

L’affaire passera aux Assises de Bobigny, en Seine Saint Denis  le 9 janvier 2024. Verdict du 19 01 2024 : un an de prison avec sursis pour le principal accusé, trois mois avec sursis pour les deux autres.

Henri Seckel Le Monde du 10 01 2024

02 2017 

Bernard Cazeneuve, premier ministre français, se rend à Wuhan, en Chine pour marquer la participation de la France à l’accréditation par les autorités chinoises d’un laboratoire de prévention et de lutte contre les maladies infectieuses et émergentes, élément central de coopération franco-chinoises. Olivier Guyonvarch consul de France à Wuhan y sera encore le 24 janvier 2019.

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[1] réalisé en 1922 par Paul Landowski, Albert Caquot et Heitor da Silva Costa sur le Corvocado : 30 mètres de haut, en stéatite et béton… plus moche que ça, tu meurs. De Landowsky encore, moins moche, le monument aux morts de Barcelonnette en 1923, et, dans la même ville, la statue de Jacques Stuart Fitz, duc de Berwick, en 1924, lequel apporta la vallée de l’Ubaye à la France avec le traité d’Utrecht.

[2] L’agent infectieux du charbon est la bactérie Bacillus anthracis, dont les spores peuvent résister plusieurs années, voire plusieurs décennies dans la terre, avant d’être ingérées par des animaux en pâture. Les spores peuvent aussi être transportées par les cours d’eau. Elles peuvent également être véhiculées par l’air, si on les y dispersait. (Site Institut Pasteur)

[3] …qui nous apprendra au détour d’une question qu’il ignore ce qu’est un détendeur [ce que fabriquait le père d’Anne Pingeot]… le cher homme n’a jamais dû passer beaucoup de temps dans une cuisine…

[4] Emmanuel Macron n’ira certes pas aussi loin que Donald Trump, mais il ira tout de même dans la même voie, avec son inénarrable en même temps… et en même temps. En même temps libéral et en même temps socialiste, en même temps atlantiste et en même temps soucieux de plaire à Poutine, en même temps pour les énergies renouvelables et en même temps pro nucléaire, etc, etc. Tout et son contraire. Pourquoi voulez-vous que j’ai un choix à faire, quand je veux plaire à tous ? 

[5] ce en quoi il adorent non un mythe mais une espèce sonnante et trébuchante qui donne une vraie suprématie mondiale à ce pays, le seul au monde à pouvoir se permettre d’imposer des amendes record à des banques et des entreprises étrangères qui ont osé ignorer leur règles : 8.9 milliard $ pour la BNP en 2015, 772 millions pour Alstom en 2014, Commerzbank : 1.4 milliard, lesquelles paient sans sourciller car elle savent ce qu’il leur en coûterait de ne pas passer sous les fourches caudines… un pays encore, qui n’hésite pas à en mettre un autre sur la paille – l’Iran – sans même avoir à tirer un seul coup de fusil : et ça marche affreusement bien : fin 2018, l’Iran est dans la dèche la plus complète du seul fait d’une décision de Donal Trump, puisque toute transaction commerciale internationale ne peut se faire sans l’aval des États-Unis !  N’oublions jamais cette barbarie.