Publié par (l.peltier) le 22 août 2008 | En savoir plus |
8 03 1996
Au Rwanda, retrait des derniers contingents de la Minuar.
12 03 1996
Le Congrès américain vote la loi Helms Burton, suivie le 5 août par la loi d’Amato Kennedy ; elles traduisent un coup de force visant à imposer au monde entier la lex americana. La première vise initialement à renforcer le poids de l’embargo contre Cuba et à défendre les intérêts économiques des exilés installés principalement en Floride ; la seconde cherche à sanctionner les Etats voyous pour leur soutien au terrorisme international ; elle a été votée en présence des familles des victimes du vol Pan Am 103, le Boeing qui a explosé le 21 décembre 1988 au-dessus de Lockerbie. Elle interdit, dès son vote, tout investissement en Iran et en Lybie de plus de 40 millions $ à n’importe quelle entreprise du monde, pour le secteur pétrolier et gazier.
Par la suite, les États Unis s’attribueront de manière unilatérale la possibilité de sanctionner les violations du droit international, sans demander l’avis de la communauté internationale. Il faudra bien constater que les 28 pays de l’Union européenne resteront étrangement tétanisés et divisés face à ce changement des règles imposé par leur principal partenaire économique. Au fil du temps, une arme se révélera particulièrement redoutable outre Atlantique : le droit de sanctionner toute entreprise non américaine qui commerce en dollars. Les amendes record commenceront à pleuvoir sur bon nombre d’entre elles, provoquant leur affaiblissement.
En France, les cas les plus médiatisés seront ceux de Siemens, qui versera 800 millions de dollars, en 2008, d’Alstom, 772 millions de dollars en 2014, mais aussi de la Société générale, condamnée à 1,34 milliard de dollars d’amende en 2018, et de la BNP, qui devra en 2014, débourser le montant historique de 8,9 milliards de dollars à la justice américaine.
Alstom en 2014 : 773 millions $, BNP Paribas en 2015 : 9 milliards. Commerzbank : 1.4 milliard…. Ces amendes colossales, et bien d’autres, ont été infligées par l’administration américaine à des entreprises européennes. Motif : corruption ou violation d’embargo décrétés par les Etats-Unis contre la Lybie, le Soudan, L’Iran… Pour préserver leur accès à l’incontournable marché américain, ces sociétés ont reconnu leur culpabilité et sont passés à la caisse. En dix ans, les entreprises européennes se seraient ainsi délestées de 40 milliards de $, selon un rapport parlementaire français. Et ce n’est pas fini. Washington vient d’annoncer la multiplication des poursuites contre quiconque commerce avec Cuba. Comment les Etats-Unis imposent-ils leur loi au monde entier ? Pourquoi les pays européens réagissent-ils si peu ? Dans Le droit, nouvelle arme de guerre économique le chercheur et journaliste Ali Laïdi fait la sidérante démonstration d’une hégémonie américaine presque sans entrave qui, au-delà de purs enjeux économiques, menace selon lui la diversité des sociétés humaines.
Ils activent de manière croissante un arsenal législatif assez ancien. Jadis, la corruption était admise : les pots-de-vin, versés par les multinationales pour faire des affaires à l’étranger, n’étaient pas illégaux. Mais en 1972, le scandale du Watergate révèle une corruption dévastatrice. Le législateur adopte alors, en 1977, le Foreign Corruption Practice Act (FCPA) qui prohibe ces pratiques. Pour étendre l’interdiction aux entreprises étrangères (qui sinon disposeraient d’un avantage énorme pour emporter des marchés), les Américains entament un intense lobbying. Ils convainquent l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) ; en 1997, celle-ci adopte une convention calquée sur le FCPA, ratifiée par 44 pays. En parallèle de cette croisade anticorruption, les États-Unis entendent imposer au monde leurs embargos contre Cuba, l’Iran, la Lybie. En 1996, 2 lois (voir plus haut) sanctionnent leur violation : toute société qui commerce avec ces pays, quelle que soit sa nationalité, est passible de poursuites américaines. C’est alors que l’Union Européenne commet une erreur fondatrice : elle dépose une plainte à l’OMC contre ces lois, mais, effrayée de sa propre audace, la retire aussitôt ! Et se contente de la promesse de Bill Clinton de ne pas poursuivre les entreprises européennes… Ainsi, l’Europe se place d’emblée en position de faiblesse. Après le 11 septembre 2001, tous ces dispositifs sont largement activés par les Etats-Unis au nom de la lutte contre le terrorisme qui, selon eux, pourrait être financé par la corruption et la violation des embargos.
Oui, mais les dégâts sont bien antérieurs. L’Europe n’a pas réagi aux diktats américains et a laissé le champ libre aux États-Unis, dont la stratégie offensive est parfaitement théorisée et assumée. Pour eux, la guerre économique a remplacé la guerre froide : depuis la chute du mur de Berlin en 1989 et la disparition de l’ennemi communiste, leur priorité est d’imposer leur leadership sur l’économie mondiale.
Sur l’existence d’un lien, appelé le nexus entre l’entreprise poursuivie et les Etats-Unis. Par exemple, la société effectue ses transactions en dollars, est cotée en bourse aux États-Unis, y dispose d’une filiale (même un simple bureau). Ou utilise un serveur informatique passant par les États-Unis : une adresse gmail peut suffire ! L’administration américaine détermine ce lien en toute liberté. En théorie l’OMC ou la justice pourrait contrôler la validité de ces procédures, mais personne n’ose les saisir. Les hauts fonctionnaires français et européens m’ont avoué leur peur que les États-Unis ne quittent l’OMC, déclenchant une crise économique internationale majeure.
Quelques entreprises ont été condamnées, et les constructeurs de téléphonie chinois Huawei et ZTE sont dans le viseur américain. Mais les Européens sont particulièrement ciblés, car les Etats-Unis veulent bien leur faire comprendre qu’ils sont des vassaux davantage que des alliés. Préoccupés par la montée en puissance de l’économie européenne depuis les années 1980, ils ont constamment cherché à la contenir et à la contrôler. Avec ces procédures, les entreprises poursuivies par le département de la Justice doivent payer des avocats pour effectuer l’enquête, dont le but n’est pas de les innocenter, mais au contraire de démontrer leur culpabilité, pour satisfaire l’administration et parvenir à un accord ! Elles doivent aussi communiquer des milliers de données stratégiques aux autorités américaines et, pour finir, reconnaître leurs fautes et s’acquitter d’une amende.
Il faut bien comprendre que ce n’est pas la justice qui juge, mais l’administration qui négocie, en toute liberté. Elle peut imposer enquêtes et sanctions arbitraires, du moment que l’entreprise signe l’accord reconnaissant sa culpabilité. Il contient aussi une muzzle clause (clause muselière) interdisant de le contester par la suite. Et l’administration ne craint pas les démonstrations de force : alors qu’ils enquêtaient sur Alstom depuis 2011, les Américains ont arrêté un cadre français à sa descente d’avion à New-York, en 2013. Frédéric Pierucci a passé deux ans en prison ; Alstom a accepté l’accord et l’amende fin 2014. On comprend que certains patrons n’osent plus se rendre aux Etats-Unis… L’administration est en principe soumise au contrôle de la justice… si quelqu’un la saisit. Quelques rares individus l’ont fait : Lawrence Hoskins, cadre britannique d’Alstom, a obtenu en 2018 l’annulation de la procédure contre lui par une cour d’appel américaine. Mais les entreprises, elles, ne s’aventurent jamais dans un procès long, cher et médiatique, qui risque de les bannir du marché américain. Elles se plient aux enquêtes.
Il excède largement la défense de la morale mondiale ! D’ailleurs, s’ils s’en souciaient tant, les États-Unis adhéreraient à la Cour Pénale Internationale… L’objectif financier est très clair. À New-York, la grande blague consiste à montrer aux hommes d’affaire européens les buildings construits grâce à leur argent. Autre avantage : fragiliser la concurrence. L’enquête qui vise actuellement Airbus bénéficie ainsi à Boeing. Certaines entreprises, exsangues après l’amende, sont vendues… souvent à des Américains. C’est ainsi que General Electric a racheté la branche Energie d’Alstom. Enfin, ces procédures sont une véritable source d’espionnage ! Chaque entreprise livre des millions d’informations, en violation, pour la France, d’une loi de 1968 prohibant la fourniture de données stratégiques à des autorités étrangères. Mais les dirigeants redoutent davantage l’administration américaine que la loi française…
Leur défaillance pour lutter contre la corruption est flagrante. Les entrepreneurs disent qu’il faut payer pour faire du business à l’étranger, et les gouvernements ferment les yeux. Les Américains, eux, ne versent plus de pots-de-vin, mais infiltrent les marchés étrangers par leurs réseaux de lobbying, de renseignement et d’influence. Et leurs entreprises remportent les marchés à peine l’appel d’offres émis. Nous sommes très en retard !
Il y a des pistes, embryonnaires. La première : renforcer l’Euro dans les transactions internationales. Les Européens achètent encore des Airbus en dollars ! Autre idée, l’Instex, entité mise sur pied par la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, pour permettre à leurs PME de faire du troc avec l’Iran malgré l’embargo américain. Mais une réelle résistance suppose une culture du rapport de force. Or les Européens refusent de penser l’affrontement économique, d’élaborer une doctrine qui pourrait nourrir des politiques de fermeté. Ils considèrent encore le marché comme la rencontre entre un vendeur et un acheteur bénéficiant du même niveau d’information – la théorie d’Adam Smith en 1776 ! Les Américains, à l’instar des néolibéraux Milton Friedman et Friedrich Hayek, le voient depuis longtemps comme le lieu de la concurrence. Le vainqueur étant celui qui possède la meilleure information.
Clairement. Responsable d’un XX° siècle meurtrier – deux guerres mondiales, un génocide, une décolonisation sanglante -, l’Europe n’ose toujours pas revendiquer sa puissance. Elle ne s’est pas adaptée à un commerce qui n’est plus doux, comme disait Montesquieu, mais sacrément dur ! L’Allemagne est atlantiste – Angela Merkel a publiquement reconnu aux Américains le droit de poursuivre la corruption dans le monde entier -. Les Anglais admettent depuis toujours le commerce comme une source de renseignement, et ont de plus un lien historique fort avec Washington. Les pays du sud, qui n’ont pas de multinationales, ne se sentent pas concernés ; ceux d’Europe du Nord, à forte tradition libérale, détestent les réglementations trop strictes. Si une révolte se lève, elle partira de France. En 2016, la loi Sapin 2 a créé la convention d’intérêt judiciaires, système de justice négociée calqué sur le modèle américain. En 2017, la filiale suisse de HSBC a ainsi payé 300 millions d’€ pour blanchiment de fraude fiscale. À l’administration française, cette fois ! La Banque suisse UBS, elle, a refusé de négocier, et le tribunal correctionnel l’a condamnée en février à une énorme amende : 4.5 milliard d’€. Les choses évoluent donc. Mais la récente mission du député LREM Raphaël Gauvain recommande surtout d’alourdir les sanctions contre les dirigeants coopérant avec des autorités étrangères. En plus d’être dans le collimateur américain, ils seront punis par la France, c’est la double peine ! On ne s’attaque pas toujours à la racine du problème.
La protection de la diversité des sociétés humaines. À travers leur pouvoir économique, les Américains veulent imposer leurs normes, leur conception du monde, leur mode de vie. Même au sein d’une économie de marché, demeurent différentes façons de penser, de manger, de s’habiller… Sans cette diversité, il n’y a plus de résilience possible en cas de crise mondiale. Imaginez : le monde vit selon l’american way of life, et survient une crise financière comme celle des subprimes de 2007. L’ensemble des pays serait intoxiqué, ce serait une catastrophe mondiale. Il s’agit donc bien d’un enjeu d’écologie humaine.
Propos recueillis par Juliette Bénabent. Télérama 3616 du 1 mai 2019
20 03 1996
Pendant des années, le gouvernement britannique a tenu à rassurer ses concitoyens sur le fait que l’ESB n’est pas transmissible à l’homme, se refusant à tirer les conséquences des rapports alarmants. En décembre 1995, John Major n’hésitait pas à dire : Rien ne permet d’affirmer que l’ESB soit transmissible à l’homme. Il faudra attendre ce jour pour qu’il reconnaisse qu’il existe une variante humaine à l’ESB, la variante de la maladie de Creutzfeld Jakob. Les Anglais pourraient donc bien avoir consommé de la viande contaminée pendant une bonne dizaine d’années, de 1985 à 1995. Il interdit alors l’usage dans le pays des farines animales contaminées, lesquelles, représentant un stock très important, seront exportées sans problème en Europe, et avant tout en France, pour les autres filières animales. Dans les même temps, l’Europe décrète un embargo sur le bœuf anglais. La France interdit la consommation de la moelle épinière et du cerveau des bovins français, l’iléon n’étant interdit que pour les animaux nés avant 1991.
19 04 1996
Boris Eltsine a obtenu que se tienne à Moscou un G 7 sur l’armement nucléaire, avant l’officiel qui se tiendra deux mois plus tard à Lyon. Il est à deux mois du premier tour de l’élection présidentielle et est encore largement devancé dans les sondages par le communiste Guennadi Ziouganov. Ce sommet vient à point pour lui redonner une popularité qui s’était effondrée : salaire des fonctionnaires, dont ceux des enseignants, non payés etc… À 6 % dans les sondages, il avait fait appel à Bill Clinton pour qu’il lui prête (moyennant 250 000 $) trois spécialistes en campagne électorale : Joe Shumate, George Gorton et Bill Bressner, choisis par son conseiller Dick Morris et les trois hommes s’étaient mis au travail depuis l’Hôtel Président de Moscou, poussant Boris Eltsine à se remettre en campagne : tournées, discours, pas de danse avec les rockstars du moment etc… le show habituel, et cela avait déjà payé. Il était aussi fortement poussé par sa propre fille, Tatiana Diatchenko.
21 04 1996
Le président de la Tchétchénie, Djokhar Doudaïev, ex général d’aviation russe est tué par des missiles russes qui l’avaient localisé quand il téléphonait avec un satellitaire : la guerre moderne est arrivée.
04 1996
La FDA – Food and Drug Administration – autorise la mise sur le marche de l’Isomédrine, fabriqué par les laboratoires Servier, et commercialisé sous le nom de Redux. Nombre de médecins en France savent que ce coupe faim favorise l’HATP – l’Hypertension Artérielle Pulmonaire -. Ce produit est commercialisé en France depuis 1976. Aux États-Unis, grosse campagne publicitaire et succès commercial immédiat : 18 millions de prescriptions dans l’année !
2 05 1996
Jacques Chirac remet la légion d’honneur à Gérard Depardieu.
Je l’ai vu authentiquement ému et enchanté d’avoir reçu un coup de fil du président pour le féliciter de Monte-Cristo.
José Dayan, réalisatrice
21 05 1996
7 moines trappistes du monastère cistercien Notre Dame de l’Atlas sont assassinés à Tibéhirine, près de Médéa, en Algérie ; ils s’étaient refusés à quitter ce pays, fût-ce au prix de leur vie puisqu’ils savaient que les assassins du FIS pourraient un jour s’en prendre à eux. Leurs supérieurs n’avaient pas jugé bon de leur donner ordre de rentrer en France, ce que leur autorisait leur fonction. Ces moines sont morts parce que leur supérieur, en ne faisant rien, a accepté qu’ils meurent. Des années plus tard, des témoignages apparaîtront, faisant porter la responsabilité de l’affaire à la Sécurité militaire algérienne, qui aurait utilisé pour faire la besogne l’émir Abou Abderrahmane Amine, alias Djamel Zitouni, chef du GIA, Groupe Islamique Armé, en même temps qu’agent de la Sécurité militaire. Et il se dit en bien des journaux que le GIA n’est qu’une création de la Sécurité militaire : la perversion au sommet de l’Etat.
Xavier Beauvois fera le film Des hommes et des Dieux, avec Lambert Wilson dans le rôle du supérieur, Michel Lonsdale. Magnifique, mais pas un mot sur l’abandon de la règle de l’obéissance par le supérieur régional. Grand Prix du festival de Cannes en 2010.
29 05 1996
En Israël, Benyamin Netanyahou [1] remporte les élections pour le poste de premier ministre avec 1% d’écart sur Shimon Peres.
La vague de terrorisme de février et mars 1996 fut un cas d’école quant à l’effet des attentats-suicides sur le cours de l’histoire. Début février Peres avait 22 points d’avance dans les sondages sur son adversaire conservateur, le faucon Benyamin Bibi Netanyahou. À la mi-mars, Netanyahou avait sensiblement comblé l’écart, et Peres n’avait plus que cinq points d’avance. Le 29 mai, Netanyahou l’emporta avec 1 % des voix. Tout cela était du aux attentats terroristes que Peres avait été incapable d’enrayer. Yahia Ayache et ses disciples avaient assuré la victoire de la droite et fait capoter le processus de paix selon l’analyse du directeur adjoint du Shin Bet, Ysraël Haason.
Ronen Bergman. Lève-toi et tue le premier. L’histoire des assassinats ciblés commandités par Israël. Grasset 2018
4 06 1996
Le premier lancement de la fusée Ariane V est un échec : elle sort de sa trajectoire en moins d’une minute et la base commande sa destruction. Trois semaines plus tard, les premiers éléments de l’enquête montreront que le logiciel de commande de la trajectoire était défectueux, tout simplement pour être resté le même que pour Ariane IV, à la trajectoire différente (moment où la fusée quitte la verticale du départ). Les deux essais suivants, dont le dernier le 21 octobre 1998, seront réussis : dès lors commencera l’exploitation commerciale d’Ariane V. Coût unitaire : environ 800 millions F.
16 06 1996
Boris Eltsine remporte le premier tour de l’élection présidentielle, avec 34 % des voix contre 32 % au communiste Guennadi Ziouganov. Il limoge son ancienne garde prétorienne : Pavel Gratchev, ministre de la Défense, et Alexandre Korjakov et fait appel pour le Conseil de sécurité, sans rancune, au général Lebed, son ancien pourfendeur, candidat lui aussi, qu’il limogera quatre mois plus tard.
20 06 1996
Jean Jacques Favier participe à la mission STS 78 à bord de la navette américaine Columbia jusqu’au 7 juillet 96.
3 07 1996
Boris Eltsine est réélu au deuxième tour président de la Russie avec 54 % des voix pour un mandat qui court jusqu’au 31 décembre 1999. Quatre mois plus tard, le 5 novembre, il subira un quintuple pontage coronarien.
15 07 1996
La terre tremble à Meythet, plus précisément à 2 km sous l’aéroport d’Annecy : cheminées détruites, voitures cabossées, télévisions et vitres cassées ; magnitude 5,2 sur l’échelle de Richter ; le séisme se trouve sur une faille, dite de la Viache, d’Annecy à Bellegarde sur Valserine (Ain), reliant le Jura aux chaînes subalpines.
17 07 1996
Caroline Dickinson, une jeune anglaise, est retrouvée morte étouffée après avoir été violée dans une auberge de jeunesse de Plaine Fougère, en Île et Vilaine, près de Saint Malo. Le meurtrier, un Espagnol du nom de Francisco Arce Montes, sera arrêté le à Miami, aux États-Unis, confondu par son ADN : le , Arce Montes se trouvait en Bretagne pour voir son fils qui habitait à Vitré. Ce jour-là, après plusieurs déboires il avait atterri à l’auberge de jeunesse de Plaine Fougères. C’est le juge Renaud Van Ruymbeke qui était en charge de l’affaire : il avait ordonné un prélèvement sur 3 800 hommes vivant dans les environs, à une époque où cette méthode était presque balbutiante. En mars 2001, incarcéré dans le comté de Miami-Dade, Arce Montes sera extradé vers la France après qu’un policier de la police de Détroit travaillant à l’office de l’immigration ait lu l’interview du juge d’instruction français chargé de l’affaire Dickinson dans le Sunday Times : il reconnaît immédiatement le nom d’Arce Montes, cité dans l’article. Un échange réciproque des justices américaine et française est organisé, après un prélèvement ADN effectué par la police française, qui le désigne comme l’assassin de Caroline Dickinson. Jugé en et confirmé par la cour d’appel en , Arce Montes sera reconnu coupable du viol et du meurtre de Caroline Dickinson et condamné à 30 ans de prison.
18 07 1996
Le vol 800, un Boeing 747 131 de la TWA, la compagnie du magnat Howard Hughes, explose quelques minutes après le décollage, au large de Long Island : 230 morts, dont 42 Français. Un an plus tard, les Américains disent toujours ne pas connaître les causes de l’accident… et la rumeur continue à parler de missile militaire tiré par erreur…
24 07 1996
Premier enregistrement d’une collision dans l’espace : ça se passe entre français : le microsatellite militaire Cerise voit le bout de son antenne coupé par un vieux morceau de fusée Ariane, le 3° étage du vol V 16, le tout à la vitesse de 50 000 km / h.
28 07 1996
Sur une rive de la Columbia, sur le territoire de la ville de Kennewick, dans l’État de Washington, au nord-ouest des Etats-Unis, deux jeunes cherchent un bon coin pour regarder la course annuelle d’hydroglisseurs. Sur une partie éboulée, l’un d’eux butte sur un galet rond, qu’il va ramasser et qui se révélera être un crâne humain selon Jim Chatters, le paléoanthropologue local qui constate que le crâne, manifestement ancien, présente des caractères caucasoïdes comme les Européens. Il parvient à extraire 350 fragments du squelette, appartenant au même individu, très vite baptisé l’Homme de Kennewick, vieux de 8 500 ans. L’os du bassin réservait une surprise : une pointe de lance en pierre taillée, presque entière, y était restée enfoncée. Elle serait la cause la plus probable de la mort de l’individu. Preuve s’il en est que le port d’arme en usage libre aux États-Unis est une très vieille histoire.
Tout cela va donner lieu à une solide empoignade entre les tribus indienne locales – Colville, Nez-Percé, Umatilla, Yakama et Wanapum -, qui voulaient enterrer selon les rites sacrés celui qu’elles appellent l’Ancien, les scientifiques, conduits par l’anthropologue Douglas Owsley, du Musée national d’histoire naturelle de la Smithsonian Institution, qui demandaient à pouvoir étudier les ossements et le gouvernement fédéral. Les Indiens n’accordent a priori aucune confiance à la science du Blanc, surtout que celle-ci avait dit dans un premier temps que l’homme de Kennewick était d’origine européenne. Le ministère de l’intérieur ayant commencé par céder aux arguments des tribus, le chercheur n’avait pas hésité à poursuivre le gouvernement fédéral, son propre employeur, avec sept collègues, pour empêcher la restitution. Après dix ans de contentieux, un juge avait donné, en 2004, aux scientifiques le droit d’étudier temporairement l’homme de Kennewick. En 2005 et 2006, les anthropologues avaient eu seize jours pour étudier les restes. Après les mesures crâniennes, Douglas Owsley avait suggéré que l’homme de Kennewick était lié aux Ainu, les populations indigènes du Japon, ou à des peuples de Polynésie.
Une étude publiée le 18 juin 2015 dans Nature viendra confirmer sa thèse. Selon l’analyse de l’ADN des restes du fossile datant de quelque 8 500 ans, l’homme de Kennewick est génétiquement lié aux Amérindiens, et non aux populations européennes préhistoriques.
Dans leur texte, les auteurs de l’étude, dirigée par Eske Willerslev, du laboratoire de paléogénétique de l’université de Copenhague, affirment avoir pu établir que l’homme de Kennewick est plus proche des Amérindiens modernes que de toute autre population dans le monde entier. Une prouesse scientifique : le séquençage du génome a été obtenu à partir de 200 mg d’os prélevés sur un doigt de la main. Les chercheurs pointent plus précisément une proximité avec la tribu Colville. Nous ne pouvons pas affirmer que les Colville sont les descendants vivants les plus proches de l’homme de Kennewick : l’échantillon de référence est trop petit, a indiqué Eske Willerslev. Mais nous pouvons dire qu’ils lui sont liés de très près.
Les conclusions publiées par Nature invalident donc son opinion et contredisent les études morphologiques. Elles n’en résolvent pas pour autant la question de l’origine du peuplement de l’Amérique. La théorie de l’arrivée par le détroit de Béring il y a environ 10 000 ans est mise en question depuis quelques années par de nouvelles découvertes d’indices de populations antérieures.
Corine Lesne. Le Monde du 24 06 2015
1 08 1996
Aux Jeux Olympiques d’Atlanta, Marie-José Perec prend l’or du 400 m. en 48″25. Le lendemain Jean Galfione en fera autant avec un saut de 5.92 m. à la perche. Un peu plus de vingt ans plus tard, l’homme se prendra de passion pour la course au large, avec une sagesse loin de toute jactance, loin du strass et des paillettes, totalement indifférent aux redondances de la mode, un homme qui ne demande qu’à être juste quelqu’un de bien.
17 08 1996
Claudie André-Deshays s’envole de Baïkonour pour la station Mir pour deux semaines : mission Cassiopée (études sur l’homme et l’animal). C’est la première Française, et quelle Française !.. à aller dans l’espace ; avec sa classe, elle pourrait prendre des récréations de temps en temps en faisant des défilés de Dior ou de quelque autre grand couturier… bien sur dans l’espace : ça aurait une gueule ! ! !
31 08 1996
Alexandre Lebed parvient à signer la paix de Khassaviourt, en Tchétchénie : les Russes se retirent, après avoir laissé 40 000 des leurs dans cette sale guerre. Boris Eltsine ne va pas tarder à se débarrasser d’un collaborateur aussi dangereux ; mais Lebed ne partira pas sans biscuits et distillera au fur et à mesure de ses voyages à l’étranger quelques petites choses dérangeantes, telles la fabrication pendant des années de petites bombes atomiques de moins de 30 kilos, dont les concepteurs, non payés, sont aujourd’hui éparpillés dans la nature, et leurs bombes de même [les États-Unis ont reconnu avoir fabriqué le même genre de jouets de 1963 à 1989]… et encore ces ventes de 1 600 chars d’assaut par les soins de Pavel Gratchev, ministre de la Défense chaud partisan de la guerre en Tchétchénie, pour son seul profit personnel, aux Croates, Serbes, Bosniaques, Azéris, qu’il comptait imputer aux pertes en Tchétchénie ! De 1992 à fin 1997, la Russie aura reçu des organisations internationales occidentales la bagatelle d’environ 72 milliards de $ d’aide ! ! Fin 1998, ils en redemandaient encore ! Et la rallonge leur sera accordée.
28 09 1996
Les talibans s’emparent de Kaboul. L’obscurantisme s’abat sur le pays :
Outre ces seize points une demande fut adressée aux femmes de Kaboul : Femmes, vous ne devez pas sortir de votre foyer. Si vous le faites, ce ne doit pas être comme les femmes qui, avant l’arrivée de l’islam dans ce pays, avaient l’habitude de sortir avec des vêtements à la mode et de se maquiller abondamment pour s’exposer à la vue de n’importe quel homme.
L’islam est une religion salvatrice qui a établi la dignité spécifique de la femme : les femmes ne doivent pas permettre que soit attirée sur elles l’attention d’hommes mauvais les regardant d’un mauvais regard. Les femmes sont chargées d’élever et de rassembler leur famille et de s’occuper des repas et des vêtements. Quand les femmes sont obligées de sortir de chez elles, elles doivent se couvrir conformément à la charia. Si des femmes sortent avec des vêtements modernes, ornés, près du corps et conçus pour plaire, afin de s’exposer à la vue de tous, elles seront maudites par la charia islamique et ne pourront jamais s’attendre à arriver au ciel. Elles seront menacées, feront l’objet d’enquêtes, seront sévèrement punies par la police religieuse comme par les anciens de la famille. La police religieuse a la responsabilité et le devoir de lutter contre ces problèmes sociaux et elle poursuivra ses efforts jusqu’à l’anéantissement du mal.
Allahu akbar – Dieu est grand.
16 10 1996
82 morts lors d’un match de foot pour les éliminatoires du Mundial au Guatemala.
20 10 1996
350 000 manifestants – d’autres sources parlent de 615 000 – se retrouvent à défiler entre les deux gares de Bruxelles : des consignes très strictes ont été imposées par le organisateurs pour que les étiquettes politiques ne cherchent pas à récupérer et noyauter : pas de slogans, pas de chants : c’est la Marche Blanche : tout un peuple dit son ras-le-bol de la sidérante carence des institutions du pays, au tout premier rang desquels la Gendarmerie, face aux rapts, viols, assassinats de Marc Dutroux, responsable de la mort d’An Marchal, 17 ans, Eefje Lambrecks, 19 ans, enterrées vivantes, Julie Lejeune, 8 ans 1/2 et Mélissa Rousso, 9 ans, Bernard Weinstein et de la détention, viol de Sabine Dardenne 12 ans, et Laetitia Delhez, 14 ans dans les années 1995-96. Le garçon, avait déjà un casier judiciaire lourd comme un âne mort et était donc bien connu des policiers comme des gendarmes. Aveuglés par leur rivalité avec la police, par les importantes réformes imminentes sur leur corps, les gendarmes ont perdu de vue leur véritable mission pour se livrer à des enquêtes free-lance, hors contrôle de la Justice, complètement inefficaces, déviées, qui les a amenés à laisser œuvrer Marc Dutroux quand ils étaient en mesure de l’arrêter et de l’empêcher de nuire. On verra une perquisition de son domicile n’aboutir à rien, alors que les deux fillettes étaient à la cave ! Comportement parfaitement criminel. Ces gens connaissent-ils seulement l’existence du mot déontologie ? Un commission d’enquête sera constituée, intégrant les familles des victimes, mais, sans pouvoir décisionnel, elle n’aboutira quasiment à rien : les soi-disant appuis, réseaux dont aurait bénéficié Marc Dutroux – ne pourront jamais être démontrés. Peut-être eut-il mieux valu que les gendarmes soient tout simplement traduits en justice.
22 10 1996
En visite officielle en Israël, Jacques Chirac se trouve dans la vieille ville de Jérusalem : les services de sécurité sont manifestement débordés : il ne cache pas son agacement, puis finit par dire son fait au responsable de la sécurité et, quelques minutes plus tard, obtiendra le départ des militaires pour rencontrer le patriarche de Jérusalem ; le clash fera le tour du monde à vitesse grand V et sa popularité auprès des Palestiniens, un grand bond en avant.
10 1996
Jean Arthuis décide que le contribuable mettra la main à la poche encore une fois pour boucher le nième trou du Crédit Lyonnais : de 40 milliards de renflouement par l’État, on est passé à 100 en 1996. En 1997, le trou est désormais estimé dans une fourchette de 70 à 150 milliards de francs, montant imputable à des erreurs de gestion. Le montant de ce qui relève de la pure et simple escroquerie serait de 3 milliards. Jean Maxime Lévesque a été inculpé mais bon nombre de responsables de ce gouffre, continuent à couler des jours heureux, y compris le premier d’entre eux, Jean Yves Haberer, qui attendra mars 98, pour être mis en examen, et seulement au titre de président d’Althus et non du Crédit Lyonnais. Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. La presse avait pourtant commencé à tirer quelques fusées éclairantes dès 1991, mais que voulez-vous, bonnes gens , un licenciement ça coûte à l’employeur autour de 600 000 F, Jean Yves Haberer, patron de l’époque s’entendait au mieux avec Pierre Bérégovoy… et le Directeur du Trésor n’était autre que Jean Claude Trichet. Aujourd’hui, quatre-vingt trois plaintes sont en cours, concernant les filiales ; nul ne sait si le procès du Crédit Lyonnais lui- même aura lieu ; personne ne cherche à déclencher l’opération, car chacun sait qu’il est déjà trop vieux pour espérer en voir la fin. Un Consortium de Réalisation, dirigé par Michel Rouger, remplacé en 1998 par Raymond Levy, à la tête de 500 juristes plutôt bien payés essaie de démêler le sac de nœuds, en vendant au mieux ce qui peut l’être : François Pinault y fera de très juteuses affaires. Les frais annuels de fonctionnement du CDR sont de 1,5 milliard F, dont 0,6 pour les seuls frais d’avocats.
7 11 1996
Lancement de la sonde américaine MGS : Mars Global Surveyor : elle arrivera la 11 septembre 1997. Son altimètre laser lui permettra de dresser une carte topographique de Mars, avec une marge d’erreur de 13 mètres maximum. Elle apporte des éléments prouvant que de vastes zones de la planète ont été autrefois inondées. À peu près au même moment, lancement russe de Mars 96… qui retombe sur terre quelques instants après le décollage.
1996
62, 4 millions de touristes en France cette année, les étrangers dépensant 60 milliards. 67 millions en 1997… La France est, de très loin, le pays le plus visité du monde. Toujours en France, premières mesures de précaution concernant les farines destinées à l’alimentation bovine, en réaction au développement de l’ESB. Premier décès en Angleterre dû à la variante de la maladie de Creutzfeldt Jakob.
Une institutrice de Mont de Marsan explique les conditions de son métier : Aujourd’hui, l’école, concurrencée par les médias, n’est plus le lieu unique du savoir. Les gosses ont plus de connaissances qu’avant, mais en vrac. En même temps, beaucoup de parents n’ont plus le mode d’emploi de leurs enfants. L’école a été rattrapée par la crise sociale et subit le choc des familles monoparentales, du chômage… Nous, on encaisse les conséquences sans pouvoir agir sur les causes…
Les parents se sont enfermés dans un rapport de consommateurs vis-à vis de l’école. Il veulent absolument que leurs enfants réussissent. Or, les écarts grandissent. Autrefois, le monde paraissait plus cohérent. Apprendre aux gamins les valeurs de respect, de tolérance, semble tellement loin de ce qu’ils vivent… Je me sens démunie, abandonnée au confluent de toutes les difficultés de la société.
Françoise Loustau, épouse Vincent, Télérama N° 2482 6 Août 1997.
Sa grand mère, Étiennette, 87 ans, elle aussi institutrice jusqu’en 1963 se confie aussi : Je me sens vieille comme Mathusalem. J’arrive d’un autre monde, d’une autre vie. On se contentait de peu. Nous passions nos vacances à l’école, sous les ormeaux, à faire de la couture, à lire, à se promener à vélo. Sur les chemins, les enfants soulevaient leur béret pour nous saluer. Aucun d’eux ne songeait à, comment vous dites, déjà ? à taguer, ni à détériorer la classe. J’exerçais mon métier sans me préoccuper de l’administration ou des réformes. J’enseignais comme j’étais bâtie, avec mon intelligence et mon cœur.
Etiennette Loustau, institutrice retraitée. Télérama N° 2482 6 Août 1997.
Franco Bassanini, socialiste, puis démocrate de gauche en Italie, fondateur du Think Tank Astrid, spécialisé dans l’étude de la réforme de l’État, devient ministre chargé de la réforme de l’État dans le gouvernement Prodi. Il le reste jusqu’à 2001, dans les deux gouvernements D’Alema et Amato. La richesse de l’arsenal législatif de l’Italie n’avait alors rien à envier à la richesse archéologique de Rome : une incroyable superposition de strates, une sédimentation depuis la naissance du pays au XIX° siècle : pas moins de 150 000 lois… dont 40 000 sont encore en vigueur ; petit florilège :
Sous son impulsion, les gouvernements de gauche mènent une réforme marquée par la réduction du nombre de ministères à douze, la simplification des procédures administratives – le délai pour ouvrir une activité est passé de 3 ans à 3 mois, les documents administratifs de 38 millions à 5,6 millions par an -, la décentralisation de fonctions autrefois gouvernementales en appliquant le principe de subsidiarité qui veut que tout ce que peut faire la plus petite collectivité ne soit pas pris en charge par une plus grande. Point majeur de la réforme : 80 % des fonctionnaires passent volontairement sous un régime de droit privé à la place du statut de fonctionnaire. Il introduit également la rémunération au mérite. La dépense pour la rémunération du personnel public est réduite de 12,6 % du PIB en 1992 à 10,6 % du PIB en 2000.
Pareil homme ne pouvait laisser la France indifférente : il va être reconnu, invité et participera aux propositions de réformes françaises : administrateur de l’ENA de 2001 à 2005, membre du comité d’évaluation des stratégies ministérielles créé en 2003 par Jean-Pierre Raffarin, membre de la Commission pour la libération de la croissance française – Commission Attali -. Il y a en particulier prôné une dérégulation de la fonction publique, sur le modèle de la réforme italienne. la fonction publique, en France comme en Italie, souffre d’un excès de régulation. On peut en améliorer la qualité en réduisant effectifs et coûts de gestion. [suite sur le Figaro du 14 octobre 2007]. Mais la France n’est pas l’Italie, et innombrables sont les forteresses qui défendent bec et ongles le statu quo, l’immobilisme. Pour s’attaquer à cela, il faudrait un courage dont est complètement dépourvu l’ensemble de la classe politique. Aucune réforme française n’a atteint le dixième de celle qu’a impulsé cet italien chez lui.
Naissance du groupe de Shangaï qui comprend la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, et le Tadjikistan, qui deviendra l’OCS avec l’intégration de l’Ouzbékistan en 2001. Il s’agit de coopération pour être à même de mieux lutter contre les fléaux que sont le terrorisme, le séparatisme et l’extrémisme. Nombre de voisins y participent en tant qu’observateurs.
L’Espace économique unifié, projet ambitieux que la participation souhaitée de l’Ukraine a considérablement compliqué, est une des variantes de la restauration de l’autorité russe. Sans doute le projet a-t-il traîné à cause de Kiev. Mais sa mise en œuvre, au début de l’année 2010, aux termes de l’accord signé à Minsk le 27 novembre 2009, lors du sommet de l’Union économique eurasienne (Evrazec), doit prendre la forme d’une union douanière regroupant Russie, Biélorussie et Kazakhstan. Le président Medvedev, signataire de l’accord, a tenu à en définir l’ambition. C’est une étape sur la voie de l’Espace économique unifié qui devrait voir le jour en 2012 et, a-t-il précisé : Vous savez comment est née l’Union européenne ? En combien de temps l’Union intégrée, qui n’était au départ qu’une union autour du charbon et de l’acier, s’est constituée ?… Nous allons dans la même direction, à un rythme convenable Le propos indique bien la direction suivie : le modèle, c’est l’intégration européenne, ce dont témoigne, au chapitre des mesures adoptées pour compléter l’espace douanier, la création d’un Fonds commun de crise.
L’Organisation du traité de sécurité collective, dont font partie quatre Etats d’Asie centrale, participe aussi de cette logique de rassemblement autour de la Russie dans un cadre communautaire, ce qui dissimule quelque peu le rôle pivot joué par Moscou.
Mais la Chine est étrangère à ces deux instances qui ne sont pas spécifiquement d’Asie, alors que le groupe de Shanghai, lui, est une institution asiatique dont Moscou et Pékin sont les moteurs, et c’est ce qui lui confère une place toute particulière dans la nouvelle dynamique des rapports russo-chinois.
L’organisation de Shanghai est à tous égards une création inédite, d’un nouveau type, comme le répètent à l’envi responsables et experts russes. Elle est née à Shanghai, en 1996, de l’accord sur un projet de sécurité régionale entre cinq Etats : Russie, Chine, Kazakhstan, Tadjikistan, Kirghizstan. À l’origine, il s’agit d’assurer la sécurité des frontières des Etats signataires dans une région riche en conflits frontaliers, déclarés ou potentiels. Plus de 8 000 kilomètres de frontières communes courent entre Chine-Russie, Chine-Kazakhstan, Tadjikistan-Kirghizstan, mais aussi entre ces trois Etats d’Asie centrale et, enfin, entre Russie et Kazakhstan.
L’accord conclu à Shanghai permet d’espérer la stabilisation d’une région menacée avant tout par la situation afghane. Ce qui était à l’origine un traité régional aux objectifs restreints va cependant très vite évoluer pour devenir une alliance régionale plus importante, puis un système d’alliances débordant l’Asie centrale. Lors du sommet qui réunit du 14 au 16 juin 2001, pour le cinquième anniversaire de sa création, les membres du groupe à Shanghai, celui-ci se transforme en effet en Organisation de coopération de Shanghai et se donne d’emblée des objectifs plus ambitieux que ceux de 1996. La lutte contre les trois fléaux majeurs de l’époque – terrorisme, séparatisme extrémisme – figure désormais au programme de l’organisation, aux côtés des problèmes de sécurité régionale. L’organisation s’élargit aussi géographiquement à l’Ouzbékistan, qui quitte le GUAM et la rejoint au moment où elle prend sa forme définitive. Elle se dote alors de structures permanentes : un secrétariat installé à Pékin et une structure antiterroriste régionale dont la création, évoquée dès 2001, aura lieu en 2004 à Tachkent.
Organisation centro-asiatique à l’origine, le rassemblement de Shanghai va s’ouvrir en peu de temps à d’autres pays d’Asie, accueillis comme observateurs : la Mongolie en 2004 ; l’Inde et le Pakistan en 2005, lors du sommet d’Astana ; l’Iran, invité au sommet de Shanghai de 2006 en la personne du président Ahmadinedjad ; enfin, en 2007, au sommet de Bichkek, l’organisation a accueilli, sans qualifier encore leur statut, des représentants de l’Afghanistan et du Turkménistan. De même, le secrétaire général adjoint de l’ONU, l’Américain Lynn Pascoe, était-il présent à ce sommet. Les quatre États qui ont reçu le statut d’observateurs pourraient d’ailleurs devenir membres de l’organisation : tel est du moins le souhait de la Russie. Mais le président mongol hésite à s’engager trop avant, tandis que la Chine freine le mouvement dès lors qu’il s’agit d’intégrer pleinement l’Inde et l’Iran. Dans le cas de l’Inde, les raisons qui sous-tendent le désir russe de l’incorporer et la volonté chinoise d’éviter un tel changement statutaire sont patentes. Pour la Russie, l’Inde, qui n’a pas d’intérêts propres en Asie centrale, équilibrerait le face-à-face des deux grands protecteurs au sein de l’organisation, et élargirait le champ des grands Etats présents dans la région ; elle y est donc favorable, puisqu’elle n’y est déjà plus seule. Si la Chine ne favorise pas ce projet, en revanche, c’est précisément qu’elle ne tient pas à y installer une puissance qui puisse un jour se trouver en rivalité avec elle. Dans le cas de l’Iran, la position russe n’est pas moins intéressée : Moscou, qui est en peine de soutenir les ambitions nucléaires de Téhéran, au risque d’affaiblir sa propre position à l’échelle mondiale, voit, en l’attirant en Asie centrale, une compensation à l’aide limitée qu’elle lui apporte. Mais la Chine, de son côté, est inquiète de voir l’organisation défier les États-Unis, ce qui serait le cas si l’Iran était pour de bon incorporé au groupe de Shanghai.
Ces désaccords feutrés sur la composition de l’organisation ne doivent cependant pas dissimuler l’essentiel des avantages qu’elle représente pour la Russie. Tout d’abord, c’est son appartenance en position centrale à l’OCS qui légitime définitivement son identité asiatique et sa prétention à jouer un rôle en Asie, non comme État extérieur s’ingérant dans la vie de la région, mais comme puissance de la région. Dans sa formation d’origine comme dans sa composition élargie, l’organisation de Shanghai est une alliance asiatique et centro-asiatique, et la Russie y figure comme État d’Asie ou Eurasie. Par là aussi, le rôle revendiqué par Moscou en Asie centrale ne prête pas à contestation.
L’organe régional de 1996 aux visées modestes est bel et bien devenu, en quelques années, une alliance multilatérale dans laquelle Russie et Chine jouent un rôle déterminant, même si les orientations défendues par les deux pays ne sont pas toujours identiques. Pour la Russie, l’objectif est d’abord de sécurité et de coopération militaire, tandis que la Chine insiste davantage sur la coopération économique. L’organisation pourrait-elle donner naissance à une zone de libre échange ? Ici, les immenses capacités commerciales de la Chine effraient non seulement la Russie, incapable de fournir les mêmes efforts, mais aussi les élites locales qui craignent de tomber dans la dépendance économique quasi exclusive de Pékin.
Cette alliance – car c’est bien d’une alliance qu’il s’agit, même si l’on ne saurait la comparer à l’OTAN – a acquis, avec les ans, une solidité et une efficacité que l’on ne peut contester. Les manœuvres militaires dans le cadre de Mission de Paix, où la Russie déploie chaque année des forces impressionnantes, présentent l’avantage d’offrir d’elle l’image d’une puissance – image qu’elle n’avait plus quelques années auparavant. Pour Moscou, c’est un facteur d’influence non négligeable qui explique l’insistance mise à privilégier les aspects militaires de cette alliance. De surcroît, la Russie a tenté de lier le Traité de sécurité collective à l’organisation de Shanghai en proposant le déploiement de manœuvres communes pour Mission de Paix 2007, arguant du fait que le Traité de sécurité collective disposait de forces propres, d’une force de réaction rapide, alors que l’organisation de Shanghai, elle, en était dépourvue. Le Traité de sécurité collective ayant dans sa mission les mêmes objectifs et plus ou moins le même programme politique, la proposition semblait légitime. Elle offrait aux yeux de Moscou un grand avantage : contrairement à la Chine, seule la Russie est membre des deux organisations, et elle est en outre le chef de file du Traité de sécurité collective. Un accord sur des manœuvres communes lui aurait donc conféré un poids particulier en Asie centrale, où elle serait devenue la force militaire dominante. L’opposition chinoise a fait échouer ce projet.
Mais ce sont là des divergences mineures qui ne doivent pas faire oublier les impressionnants progrès accomplis par l’organisation. Elle a su se faire entendre, sinon obéir, lorsqu’elle a réclamé le retrait des bases américaines. Elle a aussi doté les Etats membres de moyens de multiplier les liens entre eux, coordonné leurs luttes à travers la structure antiterroriste et développé une véritable coopération militaire sur le terrain.
Pour la Russie, les bénéfices tirés du développement de l’organisation de Shanghai sont réels. Sans doute ceux qui soutiennent que Russie et Chine sont condamnées à brève échéance à entrer dans une compétition ouverte, voire dans une confrontation, considèrent-ils qu’il s’agit là d’une opération opportuniste de courte durée, sans avenir. Mais, si l’on souscrit à l’idée que la Russie tient de plus en plus à préserver son partenariat avec la Chine, alors il faut admettre que l’organisation de Shanghai en est une des composantes fortes. Elle permet à Moscou d’accepter la présence de la Chine en Asie centrale et de tenir compte de ses intérêts dans la région, intérêts qu’elle ne peut ni ignorer ni vaincre. La Russie a inscrit dans sa politique étrangère le principe du pragmatisme. Elle sait que la Chine fait désormais partie du paysage centro-asiatique. Grâce au groupe de Shanghai, elle limite les conséquences de cet état de fait et y contrôle en partie les progrès de l’influence chinoise. Si la Russie n’était membre que du Traité de sécurité collective face à une organisation de Shanghai dominée par la Chine, cette division tournerait aussitôt à une lutte d’influences, voire à une confrontation, alors que la cogérance russo-chinoise de l’organisation apaise les tensions et renforce le rôle de la Russie sur l’échiquier centro-asiatique. En outre, le tandem russo-chinois caracolant en tête de l’organisation permet de contenir les ambitions américaines manifestées après le 11 septembre 2001 et de rassembler un groupe d’Etats, tous asiatiques, qui, sans verser dans un anti-américanisme effréné – Pékin, mais aussi Moscou y veillent -, mettent en lumière la position marginale des Etats-Unis, puissance extérieure à la région et à ses intérêts.
Même si le groupe de Shanghai n’est pas une alliance comparable à l’OTAN, il offre pour la Russie un autre avantage. De par son unité, il s’oppose à la CEI, toujours divisée par des mécontentements et par la méfiance de la plupart des Etats envers Moscou. Le groupe de Shanghai se présente comme un complément à une CEI difficile à gérer et qui ne progresse guère dans la voie de la concorde et de l’unité. Tandis que la CEI reste, pour nombre de ses membres, une structure évocatrice de l’impérialisme russe, le groupe de Shanghai — la présence de la Chine en son sein est à cet égard précieuse – ne suggère en rien une domination ou des projets impérialistes de Moscou. La Russie en est certes un membre de grande importance, mais elle n’est pas seule dans ce cas. La présence de la Chine, de l’Inde peut-être bientôt, l’exonère de tout soupçon de vocation dominatrice. Cet avantage, dû au tandem qu’elle y forme avec la Chine, la Russie le reconnaît en prenant en compte les intérêts chinois en Asie centrale. La volonté de Pékin de ne pas se laisser déborder par le séparatisme ouïgour implique qu’il puisse compter sur la solidarité des Etats voisins. Pour leur part, les gouvernements autoritaires de la région ne sont guère enclins à soutenir ces frères musulmans qui se réclament de libertés qu’eux-mêmes refusent à leurs administrés. Quant à la Russie, par hostilité à toutes les révolutions de couleur, elle appuie les régimes en place et, par là même, répond aux intérêts chinois. L’accord entre Moscou et Pékin sur les conditions de la stabilité en Asie centrale est profond ; il repose pour les deux capitales sur des préoccupations intérieures, ce qui renforce encore leur intérêt commun pour l’organisation de Shanghai. Celle-ci, à son tour, conforte leur coopération et leur partenariat stratégique.
Les États d’Asie centrale membres de l’organisation de Shanghai y trouvent aussi leur compte. Tout d’abord, en s’élargissant à l’Ouzbékistan et dans une certaine mesure au Turkménistan dont le président, en dépit de ses réticences, a participé au sommet de Bichkek, l’OCS se présente toujours davantage comme une instance représentative de l’ensemble de la région. En accueillant des Etats comme l’Inde ou l’Iran, elle leur offre aussi des ouvertures internationales qui leur confèrent une nouvelle dimension. Grâce au tandem russo-chinois, les Etats centro-asiatiques ne sont plus menacés d’être mis sous la tutelle d’une seule grande puissance, mais peuvent au contraire manœuvrer entre Chine et Russie, voire – on l’a vu dans la querelle des bases – inclure les États-Unis dans ces manœuvres et défendre leurs intérêts en jouant des rivalités des grands. Au sein de l’organisation, la Russie et la Chine pèsent certes d’un poids réel, mais tous les États d’Asie centrale – dont certains sont particulièrement vulnérables, comme le Kirghizstan ou le Tadjikistan, en raison de l’absence de ressources naturelles, ce qui leur interdit d’adopter, comme le fait le Turkménistan, des postures très indépendantes – disposent sans exception d’un forum pour se faire entendre. Leur soutien à l’organisation et à ceux qui en sont les chefs de file s’en trouve accru. Et la Russie, habituée au sein de la CEI à des partenaires peu commodes, jouit ici d’un cadre de relations apaisées avec ses anciens sujets.
Si l’on ne peut préjuger de l’avenir de l’organisation de Shanghai et si l’on ne saurait la définir comme un pendant de l’OTAN en Asie, force est de constater qu’en quelques années elle s’est imposée dans la région et au-delà, et qu’elle est devenue une structure parfaitement acceptée par tous ses membres, qui gagne constamment en importance géopolitique. Ce constat diffère de celui qui peut être fait pour le Traité de sécurité collective, annoncé à grand fracas comme un OTAN d’inspiration russe, mais qui piétine, peut-être parce que trop lié à la CEI, alors que l’organisation de Shanghai, qui véhicule aussi les ambitions russes en Asie, permet à l’action de la Russie, qui y apparaît en tant que pays eurasiatique, de n’être pas obérée par les arrière-pensées et les amertumes de la CEI. Dans le groupe de Shanghai comme dans toute sa politique asiatique, la Russie se présente comme un pays neuf, débarrassé du poids de son empire et de toute ambition impériale.
Pour Moscou, l’organisation de Shanghai est donc un atout précieux qui, dans la compétition géopolitique affectant son ancien espace de domination, lui offre la possibilité de changer de rôle. Dans la CEI globalement entendue, en dépit de ses protestations et surtout malgré la retenue qu’elle a observée jusqu’en 2008 face à l’hostilité de ses anciens sujets, notamment dans les révolutions de couleur, la Russie a toujours été perçue comme l’ancienne puissance dominante. Dans le cadre de l’organisation de Shanghai, au contraire, où elle ne peut revendiquer de zone d’influence ni arguer de quelques droits historiques, elle s’est taillé en peu d’années un rôle inédit, celui de partenaire égal à l’ensemble de la communauté qui s’est formée depuis 1996 et surtout à compter de 2001.
Dans le grand jeu asiatique qui se dessine, ce nouveau rôle permet à la Russie de n’être plus que l’Eurasie, et non un avatar de l’ancien Empire. La transformation de l’Asie centrale, région d’importance seconde, en théâtre principal de la géopolitique contemporaine, aura fortement contribué à cette mue.
Hélène Carrère d’Encausse. La Russie entre deux mondes. Fayard 2010
Si ces nouvelles républiques de l’ex-URSS ont résisté à des décennies de domination soviétique, c’est d’une part parce qu’elles ne représentaient pas d’intérêt stratégique comme économique, mais aussi sans doute parce que l’URSS n’a pas éprouvé le besoin de détruire les cultures populaires, souvent marquées par une identité très forte : il en va ainsi des Kirghizes chez lesquels on peut voir encore aujourd’hui des enfants de 12, 14 ans se lancer dans l’interminable chant de l’épopée de Manas, le héros mythique du pays, et qui ne s’arrête que lorsque le père vient y mette fin. Epopée dont, parmi les 75 versions existantes, il en est qui comptent plus de 500 000 vers ! L’Unesco s’est évidemment emparée de pareille trouvaille pour la classer au patrimoine de l’humanité.
1 01 1997
Interdiction en France de l’amiante. Une étude Inserm-INVS de 2012 évalue le bilan potentiel de l’hécatombe entre 130 000 et 180 000 décès. Sans compter le coût financier pour la société. Pour la seule année 2015, 965 millions d’€ ont été versés au titre des maladies professionnelles liées à l’amiante selon l’Assurance-maladie, 623 millions d’€ au titre de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (Acaata), et 438 millions d’€ pour le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), soit un total de plus de 2 milliards. Vingt ans plus tard, l’affaire sera toujours devant les tribunaux, le parquet manœuvrant sans cesse pour que les coupables bénéficient d’un non-lieu.
17 01 1997
Parti le 15 novembre 1996 de l’île Berkner, au sud-est de l’Argentine, le Norvégien Borge Ousland, 34 ans, parvient sur la Base Mac Murdo, sur l’île de Ross, à l’autre extrémité de l’Antarctique, après être passé par le pôle sud : 2 840 km en 64 jours, en solitaire et sans assistance !
24 01 1997
Les Ehpad –Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes – à but lucratif sont autorisés à bénéficier des aides publiques.
L’État et le conseil général fixent les tarifs, règlent un tiers de la note [pour le principal via les APA – Allocation Personnalisée d’Autonomie]- et contrôlent les établissements. Le résidant finance la majeure partie du prix.
Un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) est une structure médicalisée habilitée par l’État à recevoir des personnes de plus de 60 ans, en perte d’autonomie, pour des séjours permanents ou spécifiques (hébergement temporaire, accueil de jour, accueil Alzheimer, etc.), et à leur dispenser des soins (art. L.312-1 6° du Code de l’action sociale et des familles, CASF). L’Ehpad peut être public, associatif ou privé à but lucratif. Une convention tripartite est conclue entre le gestionnaire, le directeur de l’Agence Régionale de Santé (ARS) et le président du conseil général (art. L.313-12 du CASF) ; elle fixe, pour une durée de cinq ans, les objectifs de qualité de la prise en charge et les moyens financiers de fonctionnement.
[…] Les ressources d’un établissement dépendent notamment de la tarification de trois prestations (art. L.314-2 et R.314 -158 du CASF). Le tarif hébergement représente la fourniture du gîte et du couvert non liée à l’état de dépendance du résidant (art. R.314-159 du CASF). Le tarif dépendance recouvre le matériel, l’assistance et la surveillance nécessaires à l’accueil de la personne dans le cadre de sa perte d’autonomie (art. R.314-160 du CASF). Le tarif soins prend en compte les prestations médicales et paramédicales (art. R.314-161 du CASF). Des prestations complémentaires – librement acceptées et réglées par les résidants – peuvent être facturées par le gestionnaire. Elles doivent alors figurer dans le contrat de séjour du résidant et être portées à la connaissance du président du conseil général (art. L.314-2 du CASF).
/www.lagazettedescommunes.com/6028/10-questions-sur-le-financement-des-ehpad-2/
01 1997
Sur le versant sud, – italien – du Mont Blanc, 2,5 millions de mètres cubes de roche se détachent de l’éperon de la Brenva, provoquant une gigantesque avalanche qui déferle jusqu’au fond du val Veni, remontant le versant opposée et tuant deux skieurs.
En Tchétchénie, Alan Maskhadov est élu président de la république, mais il se laissera vite déborder par plus radicaux que lui, Chamil Bassaïev et Salman Radouïev qui organiseront des attentats sur le sol russe, à l’origine d’une seconde guerre de Tchétchénie.
13 02 1997
Loi portant création de Réseau Ferré de France (RFF). RFF devient propriétaire et gestionnaire du réseau ferré français, et se voit transférer la dette relative au réseau. La SNCF devient entreprise ferroviaire mais continue d’assurer l’entretien des voies et la gestion des circulations pour le compte de RFF dans le cadre d’une convention ad-hoc.
23 02 1997
Incendie à bord de Mir : Sacha Lazoutkine se prépare à changer une cartouche de perchlorate de lithium destinée à un générateur d’oxygène quand une longue flamme jaillit de l’appareil. Un extincteur ne fonctionne pas, deux autres restent accrochés à leur support. Un astronaute commence à préparer un des deux Soyouz arrimés à la station pour une évacuation d’urgence quand un autre astronaute parvient à éteindre l’incendie, qui aurait duré une dizaine de minutes.
02 1997
Jean Arthuis décide encore une fois que le contribuable paiera les fabuleux trous creusés par nos très chers Énarques ; cette fois-ci il s’agit de ceux qui ont dirigé le GAN… et l’ardoise est d’environ 50 milliards. L’État s’engage à en éponger 9.
03 1997
Vladimir Poutine est nommé N°2 de l’Administration présidentielle en Russie et prend la tête de la mystérieuse Direction du Contrôle… du contrôle en fait, de la corruption dans les régions. Cela permet de se faire de nombreux dossiers… Ce n’est qu’en juillet 1998 qu’il sera nommé à la tête du FSB.
En matière de répression des minorités, la Chine fait du sur place. Mais ils sont de plus en plus nombreux ceux qui n’hésitent pas à affronter la prison, voire la mort, pour dire ce qui est : Rebiya Kadeer, mère courage des Ouïgours.
À quoi pense-t-elle, Rebiya Kadeer, en regardant les 3 000 députés de l’Assemblée nationale populaire chinoise devant lesquels, elle s’apprête à prendre la parole ? Est-elle nerveuse ? Anxieuse ? Tremblante ? A-t-elle le moindre doute sur ce qu’elle s’apprête à faire ? Allons ! Elle est bien trop fière pour avouer une quelconque faiblesse. Mais on croit volontiers que son cœur bat la chamade et que cette allure altière qui semble défier tous les hiérarques de Chine cache un trac inédit chez cette combattante-née. C’est la première fois qu’en tant que députée, choisie par le Parti en raison de son fabuleux succès dans les affaires, elle s’exprime dans cet immense Palais du peuple situé sur la place Tiananmen à Pékin, et elle sait pertinemment que ce sera la dernière. Car ce qu’elle va dire est impensable devant pareille instance. C’est du soufre. Elle sait qu’elle se condamne.
Bien sûr, comme le veut la règle, elle a transmis aux cadres du Parti il y a plusieurs jours une copie de son supposé discours. Elle y rendait hommage au communisme et à la grande sagesse de ses leaders éclairés. Elle soulignait combien sa région natale du Xinjiang, à l’extrême ouest du pays et autrefois indépendante sous le nom de Turkestan oriental, bénéficiait de l’apport des Chinois qui avaient fourni instruction et richesse aux Ouïgours, peuple autochtone de culture musulmane. Bref, elle flattait outrageusement le pouvoir, disant exactement le contraire de sa pensée pour tromper la censure. Car il s’agissait d’un faux discours ! Le vrai, c’est maintenant qu’ils vont l’entendre, lu par l’interprète officiel qu’elle a rencontré hier soir dans le plus grand secret et qui, dans une minute, va traduire ses propos du ouïgour au chinois. Elle sait que la loi interdit d’interrompre l’orateur une fois son discours entamé. Ce sera donc son grand moment. Le tournant de ma vie, dit-elle aujourd’hui. Un point de non-retour.
Elle fait face à la salle : un hémicycle de deux étages bourré de représentants du peuple venus de toute la Chine ; les galeries supérieures réservées aux journalistes. Le gouvernement et le président sont assis derrière elle. Elle tend son texte à l’interprète. Il tremble sans doute plus qu’elle. Mais il se lance sans fléchir ; elle surveille. Puis il bafouille, se reprend, accélère, impatient d’en finir : Est-ce notre faute si les Chinois occupent nos terres ? Si nos conditions de vie sont si précaires ?… L’interprète s’éponge le front, la salle est stupéfaite. Tous les yeux sont braqués sur elle. Alors, elle enchaîne, le sang bouillonnant, presque hors d’elle. Elle ne lit pas le chinois, mais elle peut le parler lorsqu’elle s’est préparée, et la fièvre du moment lui fait pousser des ailes. En vingt-sept minutes, elle décrit la tragédie ouïgoure comme aucun Chinois ne l’avait jamais perçue. L’expropriation des paysans privés de leurs terres arables et quasiment interdits de travail au pays, leur transfert forcé dans les usines du Sud, l’extrême pauvreté et le génocide culturel, les campagnes publicitaires pour attirer dans les villes chinoises les jeunes filles ouïgoures exploitables dans les maisons closes, l’incroyable différence de traitement entre Chinois et Ouïgours en matière de droits, d’écoles, de salaires ; les exactions policières (tuer quelqu’un est devenu aussi fréquent qu’abattre un oiseau), les milliers de prisonniers politiques… Et pourquoi le gouvernement fait-il émigrer les malades du sida de toute la Chine vers nos villes ? Quel est le but des autorités ? Tout y passe, avant de terminer par un appel à une réelle autonomie de sa région, si nécessaire à la paix.
Le monde devait savoir. La salle applaudit à tout rompre. Et le président Jiang Zemin, ses ministres sur les talons, vient lui prendre les mains et la complimenter avant de disparaître. Elle en rit encore. Quelle hypocrisie ! Il y a une expression ouïgoure pour décrire ce type de situation : une bombe recouverte de chocolat. Il fallait bien que les cadres gardent la face devant le Parlement. Mais je pressentais qu’ils me feraient payer très cher mon audace. Que je perdrais ma fortune et ma liberté. Que je risquais de ne plus revoir mon mari et que mes onze enfants allaient probablement souffrir. Je savais tout cela. Mais alors ? Elle sourit d’un air à la fois résolu et fataliste. Je devais parler. Je le devais au peuple ouïgour. J’étais devenue une femme célèbre, la plus riche de Chine. Et je savais que ma voix porterait dans tous les recoins du pays, peut-être même à l’étranger. Alors, je n’avais pas le droit de me dérober. Mais pourquoi ce jour-là ? Pourquoi ? Ses yeux lancent des éclairs et sa voix grave monte d’un ton. À vif, Rebiya Kadeer, lorsqu’elle parle de son peuple.
Parce que deux mois plus tôt, le 7 février 1997, les Chinois avaient fait preuve d’une violence inouïe pour réprimer une manifestation pacifique d’Ouïgours dans la ville de Gulja. Des dizaines de personnes, dont des femmes et des enfants, furent abattues, des milliers furent déportées, torturées, leurs dents arrachées une à une. J’avais moi-même enquêté, recueilli les témoignages, visionné les films pris par la police et l’armée. Trop, c’était trop ! Le gouvernement avait condamné à mort l’intégralité du peuple ouïgour. Le monde devait savoir !
Mais après le discours ? Après les félicitations factices et diverses manœuvres visant à l’empêcher d’accéder à la presse ? Après, ce fut la chute. Et la mise en route d’un rouleau compresseur destiné à m’anéantir. La police cueille la députée à la sortie de l’avion qui la ramène dans sa province. Elle est conduite vers le bureau des services secrets et on lui annonce la destitution de tous ses titres et mandats politiques. Puis rapidement, on confisque son passeport. Le moindre de ses déplacements est soumis à autorisation, des hommes en noir la suivent comme son ombre. Toutes ses sociétés sont paralysées, ses initiatives entravées et son grand projet de former au commerce les femmes ouïgoures saboté. Pourtant son crédit auprès de son peuple n’a jamais été si fort. Avant le discours, et malgré toutes mes aides aux plus démunis, les gens me considéraient comme une femme d’affaires. Après, j’étais devenue une héroïne ! Mais les Chinois accroissent leur emprise sur le pays ouïgour. Les colons arrivent, par centaines de milliers, prioritaires en tout et noyant la population autochtone, dont le moindre signe vestimentaire, culturel, religieux évoquant la tradition ouïgoure est sauvagement réprimé. L’étau se resserre.
Alors Rebiya Kadeer fait une dernière tentative pour prévenir le monde de l’étouffement de son peuple. Elle rassemble un maximum de documents et articles de presse sur les violations des droits de son peuple et tente de les faire parvenir à son mari, déjà exilé aux Etats-Unis, grâce à une délégation de parlementaires américains de passage dans le Xinjiang le 6 août 1999. Las ! C’est la faute qu’attendaient les autorités chinoises pour en finir avec la rebelle. Une voiture lancée à toute vitesse tente de pulvériser son taxi mais la manque. Des hommes à mitraillettes l’entourent et aussitôt l’arrêtent : Divulgation de secrets d’Etat. Prison, interrogatoires, menaces, humiliations, grève de la faim. On lui prédit une condamnation à mort, et elle se sent fin prête. C’est un moment intéressant, celui où vous croyez vous rendre à votre exécution, raconte-t-elle, calmement. Vous êtes fier et votre courage est décuplé car ce n’est ni une mort stupide ni une mort honteuse. Vous mourez pour une cause ! Celle de votre peuple ! C’est immense ! Elle échappe à la mort mais reçoit une condamnation à huit ans de prison.
Un destin. Libérée en 2005 pour raisons médicales – en fait sous la pression d’organisations humanitaires internationales -, elle est expédiée dans un avion à destination des États-Unis. Six de ses enfants y résident déjà. Les cinq autres restent en Chine pour servir de moyen de chantage et seront tour à tour arrêtés, torturés, sommés de la dénigrer publiquement…
La dame se tient bien droite, dans ce petit hôtel de Genève où elle est de passage en ce mois de juin 2014 pour une réunion à l’ONU. Elégante dans un tailleur classique qui lui tombe à la cheville, ses longues tresses devenues son image de marque dansant plus bas que sa taille, elle ne fait assurément pas ses 68 ans et n’avoue aucune fatigue malgré ses multiples voyages en tant que présidente du Congrès mondial ouïgour en exil. Non, jamais elle n’arrêtera. On assassine le peuple ouïgour ! Les procès publics se succèdent, suivis d’exécutions dans des stades. Le gouvernement chinois joue la terreur. Je reste le seul espoir dans le cœur d’un peuple de malheureux et de désespérés. Un de mes fils que j’aime tant est encore en prison. Il a été torturé, on m’a fait entendre ses cris. Ils savent qu’une mère ne peut pas entendre ça. Puisse-t-il avoir l’intelligence de me pardonner ! Car je suis désormais la mère de tout un peuple !
Elle vit à Washington et saisit toutes les estrades pour porter les revendications des Ouïgours et prévenir le monde que le désespoir d’un peuple ne peut conduire qu’à des issues fatales. Elle prône la paix, sans relâche, quand le gouvernement de Pékin l’accuse d’encourager le terrorisme. Un destin, sourit-elle. Celui d’une petite Ouïgoure née très pauvre, mariée à 15 ans pour aider sa famille, jetée à la rue après un divorce et une ribambelle d’enfants, et qui, impétueuse et douée, bâtit ex nihilo un empire commercial et immobilier afin de devenir riche, immensément riche – seule façon d’obtenir influence et prestige, de gagner la considération du pouvoir… et d’accéder un jour à la tribune suprême.
Annick Cojean. Le Monde 20 août 2014
4 05 1997
Christine Janin, 40 ans, exerçant la médecine à Annecy et originaire de Chamonix arrive au pôle nord après 63 jours de marche à pied et à ski, ayant parcouru 950 km de banquise sans chien de traîneau, tirant 70 kg de vivres et de matériel. Elle était partie de Sredny, à la pointe du cap Arktichevsky, sur l’ile Komsomolets, en Terre du Nord, le 3 mars, accompagnée du sherpa russe Sergueï Ogorodniko. Ils ont été ravitaillés quatre fois par hélicoptère. Au pôle même les attendaient neuf adolescents cancéreux, venus en avion avec une équipe de médecins. C’est en racontant son expédition [victorieuse], en octobre 1990, à l’Everest à des enfants malades de l’hôpital Trousseau, qu’elle s’engage dans cette voie en créant l’association A chacun son Everest. Après l’Everest, elle s’offrit le plus haut sommet de chaque continent. Les fonds recueillis serviront à l’ouverture d’un centre de convalescence d’enfants à Chamonix.
19 05 1997
Les troupes de Kabila, encadrées par des tutsis ougandais, rwandais et burundais, avec à leur tête un jeune tutsi rwandais, James Kabarebe, entrent à Kinshasa, et donc Mobutu s’en va, d’abord dans son palais de Gbadolite, puis au Togo et pour finir, au Maroc. Elles ont quitté les rives du lac Kivu sept mois plus tôt, mais à quoi bon se hâter d’en finir avec la guerre quand il y a tant de femmes à violer, quand elle se révèle tellement rémunératrice : à mi-chemin, Kisangani est le carrefour des prospecteurs et trafiquants en tous genres du diamant, et les troupes rwandaises se serviront copieusement. Et il y a encore le coltan, dont le Congo est le premier producteur mondial, le coltan, si indispensable à tous nos portables, smartphones, et autres plaquettes.
Les guerres de conquête ont repris en Afrique, telles qu’elles avaient été interrompues par la colonisation, il y a près de 100 ans. Dans la région des Grands Lacs, les petits pays que sont l’Ouganda, le Burundi, le Rwanda, surpeuplés, sans richesse autre qu’agricole, très souvent dominés par l’ethnie Tutsie, pourtant minoritaire, s’offrent l’immense Zaïre, 5 fois la France, riche de minerais, diamants, or, et aux forces exsangues après 30 ans de pillage et de corruption de la part de Mobutu. Pour ce faire, ils ont tout de même eu la pudeur de faire sortir de sa retraite un révolutionnaire zaïrois de seconde zone, Laurent Désiré Kabila, dont Che Guevara ne disait pas vraiment de bien : poltron, peu sérieux et noceur. Au passage, dans la région du lac Kivu où se trouvent encore environ 1 million de réfugiés hutus du Rwanda, depuis le génocide qu’ils ont commis sur les Tutsis en 1994, ces derniers en éliminent entre 150 000 et 200 000. 500 000 autres regagneront le Rwanda fin 1996, les 300 000 restant partant vers l’ouest : Gabon, Zaïre, Angola.
29 05 1997
Kabila prête serment dans le grand stade de foot flambant neuf. Les chefs d’État du Rwanda et de l’Ouganda sont là, à ses côtés, et encore ceux de l’Angola et de Zambie, mais les Kinois ne se bousculent pas : un tiers des sièges restera vide. Il débaptise à nouveau le Zaïre pour reprendre celui d’origine Congo. C’en est donc fini de la dictature de Mobutu, place à celle de Kabila qui le verra repartir en guerre contre ceux qui l’avaient porté au pouvoir : les Rwandais et les Ougandais qui ne parvenaient pas à oublier ce pays de cocagne regorgeant de richesses.
Pour faire oublier tout cela, le pays verra se développer deux opiums bien corsés : la musique, mariée avec la bière, les deux plus grandes stars étant sponsorisés par chacune des deux grandes marques de bières : Bralima – Brasserie et Limonaderie de Léopoldville, racheté en 1987 par Heineken – qui produit la Primus, et Bracongo – Brasserie du Congo – qui produit la Skol. Bracongo sponsorise Werrason et Bralima Jean-Baptiste Mpiana. Mais le plus grand, c’est Werrason et c’est donc Bracongo qui prend le plus gros des parts de marché. Mais en 2005, Werrason, au retour d’un séjour en Europe trahira Bracongo pour Bralima : ah ! quelle affaire mon cher ! Et la situation s’inversera : Bralima deviendra le premier !
L’autre opium, c’est la religion, mais il faut plutôt dire les religions, avec un prosélytisme hypertrophié venu des États-Unis : les noms eux, restent bien locaux : l’Armée de l’Éternel, l’Armée de la victoire, Combat spirituel, la Chapelle des vainqueurs. On y fait des miracles en veux-tu en voilà, on encaisse les cotisations, on respecte la richesse… tout comme au bon vieux temps.
Et, dans tout cela, l’affaire la plus juteuse et de loin, c’est le portable : les opérateurs qui ont obtenu les licences roulent sur l’or.
1 06 1997
Chirac a voulu jouer au plus malin en dissolvant l’Assemblée Nationale un mois plus tôt, pour avoir les coudées franches jusqu’à la fin de son mandat… Et c’est une majorité de gauche qui revient au pouvoir ! Sans aucun doute la plus grosse partie de poker menteur de la 5° République, perdue par le donneur de jeu ! N’est pas Mitterrand qui veut ! On verra dans la presse des titres du genre : gamin, l’arroseur arrosé etc…
Le vulgaire imbécile est toujours avide de grands événements, quels qu’ils puissent être, sans prévoir s’ils lui seront utiles ou préjudiciables ; le vulgaire imbécile n’est ému que par sa propre curiosité.
Ludovico Ariosto, dit l’Arioste, poète italien, 1474-1533.
Le Front National obtient 1 député avec 3 700 000 électeurs, le Parti communiste, avec 2 500 000 électeurs, en obtient presque 40 ! Il nommera Lionel Jospin 1° ministre. Les socialistes ne s’attendaient pas à arriver au pouvoir ! Gouverner, c’est prévoir, mais encore faut-il avoir prévu de gouverner. Une des premières mesures des socialistes de retour au pouvoir sera de confirmer deux promesses de la campagne électorale : la fermeture du surgénérateur de Creys Malville, qui, après dix ans d’âge, aura coûté 60 milliards, passant de reconversion en reconversion pour cause d’échecs successifs. Sur ces dix ans, il aura réellement fonctionné 30 mois. Il faudra remettre encore 16,5 milliards pour l’arrêter définitivement : ce genre de décision ne peut être que politique car les techniciens français, incapables de reconnaître une erreur, sont donc incapables de prendre la décision d’arrêter une expérience ; et techniquement étant donné que cela n’a pas été construit pour être un jour démonté, plus on va y voir de près, plus cela paraît une entreprise redoutablement difficile : on compte dix ans au bas mot pour y parvenir. Deuxième arrêt : celui du chantier du canal Rhin Rhône : heureusement, cela n’a pas démarré depuis longtemps, et il suffira de payer des dédommagements pour des terrains déjà acquis ou préemptés.
25 06 1997
On le croyait immortel, eh bien non ! le Commandant Cousteau nous tire sa révérence.
Son dernier surnom donné par les journalistes au sommet de la Terre à Rio en 1992 : Captain Planet est à marier avec ce que disait de lui un océanographe américain : il a été un merveilleux agent de publicité de la mer. Businessman hors pair, il faut arrêter là l’oraison funèbre. Le bidouillage avait nettement ses préférences sur la rigueur et l’honnêteté scientifique, que ce soit en matière de cinéma, d’archéologie sous-marine, ou de plongée profonde. Il n’a pas vraiment été l’inventeur du scaphandre autonome avec Gagnan, car en fait, c’est ce dernier qui avait inventé le détendeur pour les besoins des gazogènes pendant la dernière guerre ; Cousteau ne fit que l’adapter sur des bouteilles d’air comprimé, pour la plongée, encaissant des royalties qui financèrent ses premières expéditions. 7 ans après sa mort, le destin de la Calypso était au cœur d’une de ces franchouillardes histoires de famille, sinistre et écœurante : Cousteau s’était rapidement remarié après la mort de sa première femme et la seconde obtint de lui un testament qui déplumait autant que faire se peut ses enfants pour faire d’elle sa seule héritière…et la pauvre fille, que seul l’argent intéresse, aura le plus grand mal à mettre sur pied un projet à même de sauver le navire… réussissant d’abord à torpiller les projets qui venaient d’ailleurs : enfants ou ex-collaborateurs de son mari.
Accident dans l’espace, entre la station Mir, sur orbite depuis 11 ans et le vaisseau Progress : les panneaux solaires furent sérieusement endommagés. L’impact a provoqué une déchirure dans la cloison du module Spektr, qui se vide de son air. Il faut isoler ce module qui fuit en fermant son sas, et les différence de pressions empêchent le maniement de l’écoutille du sas. Les cosmonautes mettent en œuvre le principe de fonctionnement des cocottes minute Lagostina : une plaque est apposée sur le sas que la différence de pression plaque contre son entrée : le sas est enfin isolé. Un autre sas sera acheminé depuis la Terre par un autre vaisseau Progress. Trois semaines plus tard, un passager déconnectait un branchement informatique par inadvertance : plus de courant pendant 12 heures.
06 1997
Les sondages opérés par Médiamétrie donnent 1,3 M de téléspectateurs disparus ces dernières années…
Pour que Rotterdam puisse rester au sec, – certains quartiers sont à – 6 mètres sous le niveau de la mer – les Hollandais mettent en service un barrage anti-tempêtes mobile – deux portes blanches, une sur chaque rive de la Meuse qui sépare le port de la mer du Nord – de 22 mètres de haut, 210 mètres de long, 15 000 tonnes d’acier : c’est le Maeslantkering, le dernier des grands travaux qui ont été décidé après la tempête de 1953. Les travaux ont commencé en 1991.
4 07 1997
La sonde américaine Pathfinder, en route pour Mars depuis 7 mois, y dépose le robot Sojourner, surnommé Rocky : masse de 11 kg, soit un poids de 4 kg sur Mars, 30 cm de haut, 48 de large, 61 de long, vitesse de 24 mètres à l’heure ; coût : 25 millions $, le 1/10° du coût total de la mission. Il est doté d’un détecteur qui analyse la composition de surface des roches. Son énergie lui est fournie par des batteries et des panneaux solaires qui lui permettent de disposer de 30 watts. Son appareillage est protégé du froid jusqu’à – 40°. Il se guide par caméras laser et communique avec Pathfinder par radio UHF. Sojourner deviendra silencieux pour la terre 4 mois plus tard… ne donnant plus signe de vie… mais, pourquoi pas, faisant peut-être le mort ? Sojourner est le nom d’une Noire américaine qui se battit au XIX° siècle contre l’esclavage. L’exploit se déroule pour l’Independance Day ; il a coûté 250 millions $. À la tête de ce cumul de merveilles de technologies, un malien de 45 ans, Cheick Modibo Diarra, génie des mathématiques, repéré huit ans plus tôt par deux chercheurs de la Nasa. Le principal argument pour espérer y découvrir autre chose que de l’inerte tient dans un météorite de 2 kg, attribué sans certitude absolue à Mars, tombé dans l’Antarctique il y a 13 000 ans, après 16 millions d’années d’errance, et découvert en 1984, nommé par la Nasa : ALH 84001 : l’argument ne tiendra pas bien longtemps, et, fin 98, tous les scientifiques compétents reconnaîtront qu’il n’est pas possible de confirmer cette hypothèse.
Mais nous irons sur Mars, vous verrez. L’humanité ne résistera pas à un tel défi.
Pourquoi ?
Le sport, voyons. C’est la seule raison, mais c’est une raison forte.Hubert Curien, ancien président du CNES.
La science est une contribution majeure pour des besoins mineurs.
Matthieu Ricard. Le moine et le philosophe p.32 J.F. Revel. M. Ricard. Nil éditions.97
7 07 1997
L’OMS – Organisation Mondiale de la Santé – estime à 8,4 M le nombre d’hommes et de femmes atteints du Sida ; mais ce sont seulement 1 644 183 cas qui lui ont été signalés. 581 429 aux États-Unis, 103 262 au Brésil, 82 174 en Tanzanie, 59 782 en Thaïlande, 45 395 en France. Par continents, 797 227 aux Amériques, 576 972 en Afrique, 191 000 en Europe, 71 000 en Asie et 8 000 en Océanie. En France, 2 000 malades parviennent à se soigner par la tri-thérapie, qui assomme le virus mais ne le tue pas, moyennant 120 000 F/an/malade. Bernard Kouchner, dans un plaidoyer pour la création d’un Fonds de solidarité thérapeutique international, parle de plus de 33,6 millions de séropositifs dont 23,3 se trouvent en Afrique; 16, 3 millions en sont mortes depuis le début de l’épidémie, dont 13,3 en Afrique. On compte 16 000 contaminés chaque jour. 91 % des décès dus au sida ont lieu en Afrique. Le pays le plus touché aujourd’hui, le Bostwana, va voir son espérance de vie passer de 65 ans il y a 5 ans à 40 ans dans 5 ans. En recrudescence, car maladie opportuniste la plus courante autour du sida, la tuberculose a fait 2,908 M de victimes en 1997 dans le monde, dont 85 % en Afrique et Asie du sud est. En Afrique, l’augmentation sur l’année 97 est estimée à 6 millions de personnes. Les accords internationaux en matière de santé autorisent aujourd’hui un État à faire fabriquer localement des formes génériques de médicaments : c’est une licence obligatoire. Il peut aussi importer depuis d’autres pays aux prix les plus bas. L’Afrique du Sud et la Thaïlande ont voulu exploiter ces possibilités : les menaces de rétorsion américaines les en ont empêché.
En France, l’alcool tue environ 40 000 personnes par an : 27 000 directement d’alcoolisme, 10 000 de cancer des voies aéro-digestives supérieures liés à l’alcool et 3 000 accidents mortels de la route, dus à l’alcool. De 22,3 l d’alcool pur par an par personne en 1970, on est passé à 17 litres par an en 1989, puis 11 l en 1996, passant ainsi derrière le Luxembourg et le Portugal, en Europe. Cette affaire coûte environ 115 milliards par an à la collectivité, soit 1,42 % du PIB.
Le tabac lui, est responsable de 60 000 morts, dont la quasi totalité des 24 000 décès dus au cancer du poumon. Les taxes sur le tabac rapportent 60 milliards par an, mais son coût social est de 89 milliards, soit 1,10 % du PIB. En 1997, on comptera 228 décès par overdose d’héroïne. Le coût global des drogues licites – alcool, tabac – et illicites – héroïne, cocaïne, cannabis, ecstasy – est de 218 milliards de francs par an , soit 2,68% du PIB (8134 milliards) avec bien sûr une marge d’erreur devant l’inconnu de certains coûts pour lesquels il n’est pas possible de disposer de chiffres. Le coût de drogues illicites serait de 13,35 milliards représentant 0,16 % du PIB. Ramené par an et par tête d’habitant – en tablant sur 58,443 millions, cela représente 1 966 F pour l’alcool, 1 520 F pour le tabac et 227 F pour les drogues illicites. Le coût social de l’alcool est à peu près de moitié plus élevé en France que dans deux autres pays de niveau de vie comparable : l’Australie et le Canada.
Écrire sur un produit, fût-il tabagique, dont l’État a le monopole de la vente qu’il tue et le vendre tout de même, c’est pour le moins paradoxal ! Dire aux gens, dans le même élan, voici votre poison préféré, en vente sous notre contrôle, mais sachez qu’il est mortel, et ne venez pas dire qu’on ne vous aura pas prévenu, c’est une assez curieuse démarche ! Dans un même emballage, l’État se fait dealer et se veut médecin, est taxeur et conseilleur, fournisseur et prohibitionniste.
Pierre Georges, Le Monde du 4 12 2002, après décision du gouvernement d’aggraver l’avertissement sur les paquets en remplaçant : nuit gravement à la santé par Le tabac tue
En 2005, près de vingt-cinq millions d’Africains vivaient avec le sida, et treize millions en étaient morts – soit davantage que toutes les victimes de la traite négrière atlantique, quatre siècles durant. Douze millions d’enfants avaient perdu au moins un parent suite à la maladie. Si l’Afrique avait à ce point souffert de cette épidémie, c’est que cette dernière s’était répandue dans l’ensemble de la population hétérosexuelle avant même qu’on sache que la maladie existait, tandis que sur les autres continents elle avait généralement été importée dans des groupes spécifiques – comme les homosexuels ou les toxicomanes – qui pouvaient plus facilement être isolés et ciblés. En comparaison, les modes de comportement sexuel restaient secondaires : les Africains ne sont pas plus dépravés que beaucoup d’autres peuples, même si les réseaux d’échanges de partenaires étaient plus vastes et plus dangereux que ceux des sociétés musulmanes et de la plupart des cultures asiatiques, où l’activité sexuelle hors mariage est davantage limitée à la prostitution. Le médiocre statut social des femmes, surtout dans une bonne part de l’Afrique orientale et australe, joua un rôle important : en 2005, elles représentaient 57 % des cas d’infection, pourcentage le plus élevé du monde. Les maladies sexuellement transmissibles étaient aussi plus répandues en Afrique, notamment le HSV-2, provoquant des ulcères génitaux, qui se développent en symbiose avec le sida. L’urbanisation rapide, et souvent chaotique, du continent lia l’épidémie à la croissance démographique massive de la période ; il en fut de même pour la proportion exceptionnellement élevée de jeunes, tout particulièrement exposés aux risques. La pauvreté, comme l’activité sexuelle, ne contribua sans doute que secondairement à l’épidémie : il y avait en effet beaucoup plus de pauvres en Asie qu’en Afrique, où l’épidémie ne se concentra pas de manière significative chez les plus pauvres des pays pauvres, comme le montra l’exemple du Botswana, où elle fut très virulente. Pourtant, l’insuffisance des systèmes médicaux africains, surtout là où ils avaient été érodés par les programmes d’ajustement structurel, retarda l’identification de la maladie, et de surcroît contribua grandement aux souffrances des malades du sida, tout en retardant l’usage de médicaments antirétro-viraux. En 2005, il manquait près d’un million de travailleurs de la santé en Afrique subsaharienne.
En règle générale, les États réagirent avec lenteur, et sans trop d’intérêt, à l’épidémie. Leurs dirigeants, dans leur grande majorité, y voyaient une atteinte honteuse à une dignité nationale fraîchement acquise et, de toute façon, un phénomène qui dépassait leurs capacités d’intervention. Sous les pressions de l’Organisation mondiale de la santé, ils mirent en place des programmes minimaux de lutte contre le sida, mais seuls Abdou Diouf au Sénégal et Yoweri Museveni en Ouganda pesèrent de tout leurs poids pour les soutenir. Les premières réactions des peuples, pareillement, furent souvent marquées par la dénégation. La prise de conscience fut rapide quand l’ampleur de l’épidémie devint apparente, mais le caractère insidieux de la maladie et l’absence de tout traitement efficace favorisa des explications moralisantes, et la stigmatisation des personnes atteintes, ce qui encouragea des formes de dissimulation qui contribuèrent à l’extension de l’épidémie. Dans le même temps, toutefois, les fortes structures familiales africaines venaient généreusement en aide aux malades et aux enfants orphelins, tandis que les ONG proliféraient : en 2005, rien qu’en Ouganda, près de deux mille d’entre elles luttaient contre le sida. La longue durée de la maladie, la recherche fiévreuse d’un remède, le fardeau de l’assistance, le besoin de préserver la dignité familiale par des funérailles décentes, faisaient du sida une maladie coûteuse, souvent ruineuse pour les familles pauvres. Son coût social, beaucoup plus vaste, apparut de façon particulièrement frappante en 2001-2003, quand le Malawi et les régions voisines connurent une famine d’un genre nouveau, particulièrement sévère parmi les familles appauvries par le sida, au sein desquelles les vieillards ou les veuves luttaient pour venir en aide aux enfants orphelins, sans plus avoir de biens à vendre, et sans espoir d’améliorer leur situation.
Le milieu des années 1990 fut marqué par un profond pessimisme : l’épidémie se propageait à vive allure (surtout en Afrique australe), les programmes gouvernementaux étaient à court d’argent et d’énergie, l’espoir de trouver un remède ou un vaccin n’avait débouché sur rien. C’est pourtant à ce moment que deux faits inattendus suscitèrent de nouveaux espoirs. L’un était la preuve, à l’origine en Ouganda, que le chiffre des personnes infectées par le VIH commençait à tomber à une vitesse surprenante : de 13 % chez les adultes au début des années 1990 à 6,7 % en 2006. Les raisons en sont toujours discutées. Certains affirmaient par exemple qu’il y avait moins de gens infectés parce que les comportements sexuels devenaient plus responsables, suite aux campagnes d’éducation et à une expérience directe des souffrances des malades – et les Ougandais avaient été tout particulièrement exposés aux unes comme aux autres. Certains niaient le déclin de l’infection ou l’existence d’un changement significatif dans les comportements sexuels, et déclaraient que plus de 80 % de la réduction du nombre d’infections étaient dus au fait que les malades infectés mouraient plus fréquemment. L’analyse du phénomène, menée entre 1998 et 2003 dans la partie orientale du Zimbabwe, laisse penser que le changement des comportements est l’explication principale dans cette région. Ailleurs, les preuves d’une réduction des cas d’infection n’émergèrent que lentement au Kenya (rural et urbain), dans des zones rurales très touchées de Tanzanie, dans les villes de Burkina-Faso et de Zambie, ainsi qu’à Abidjan, Kigali et Lilongwe. Les raisons n’en étaient nulle part certaines, mais cela nourrit l’espoir que l’épidémie pourrait au moins être contrôlée. Ce sentiment fut renforcé par des indications montrant un usage accru des préservatifs, et l’abandon par les jeunes d’un comportement sexuel irresponsable et ce, même en Afrique du Sud, où les aînés avaient longtemps désespéré d’une génération perdue aliénée pendant la lutte contre l’apartheid.
La seconde source d’espoir fut la découverte en 1994 que le premier médicament antirétroviral, l’azidothymidine, pouvait réduire spectaculairement la transmission du virus des mères à leurs enfants. Au début, il était trop coûteux pour être utilisé en Afrique, mais dès 1998, des génériques meilleurs marché en étaient au stade des essais. En Afrique du Sud, cela provoqua des conflits entre les médecins, les militants et les malades d’un côté, et de l’autre le gouvernement dirigé par l’ANC, qui craignait que se concentrer sur le sida ne porte tort à son programme d’assistance médicale aux pauvres. Tandis que les militants s’inspiraient des traditions du mouvement anti-apartheid pour mettre sur pied une organisation intitulée CAT (Campagne d’Action pour un Traitement), le gouvernement se réfugiait dans ce que ses adversaires dénoncèrent comme des manœuvres d’obstruction et de dénégation. Après quatre ans de querelles, il décida enfin de fournir des rétroviraux aux femmes enceintes infectées par le VIH. En 2003, il annonça la mise en place d’un plan visant à procurer des médicaments à ceux qui en étaient à un stade avancé de la maladie, afin de la contenir (mais pas de guérir). Entre-temps, leur prix avait baissé, et les financements internationaux avaient considérablement augmenté. En décembre 2005, plus de 200 000 Sud-Africains recevaient un traitement antirétroviral, bien que ce chiffre ne représente que 21 % des requêtes. Dans toute l’Afrique subsaharienne, 800 000 personnes en suivaient un (soit 17 % de ceux qui en avaient besoin), les programmes ayant connu le plus de succès étant ceux du Botswana (85 % des malades), de la Namibie (75 %), de l’Ouganda (51 %) et du Sénégal (47 %).
L’usage des antirétroviraux – et à plus forte raison la perspective de découvrir un vaccin – modifiait le regard porté sur la maladie : l’épidémie de sida, si souvent considérée comme une métaphore de l’échec de l’Afrique à entrer dans la modernité, pourrait au contraire être le moyen par lequel la médecine moderne s’assurerait enfin la prééminence sur le continent. Par d’autres côtés, les racines de l’épidémie plongeaient profondément dans le passé de l’Afrique, celui du désengagement de l’État comme de la lutte anti-apartheid des années 1980, de la rapide croissance démographique des années 1990, des villes et des réseaux commerciaux de la période coloniale, des grandes épidémies ayant marqué les débuts de la domination européenne ; des notions d’honneur et de devoir familial grâce auxquelles les Africains avaient si souvent affronté l’adversité ; et de la colonisation de l’espace naturel qui avait été au cœur de leur histoire et qui désormais, une fois de plus, leur imprimait sa marque.
John Iliffe. Les Africains. Flammarion 2016
10 07 1997
4 ans après les élections laborieusement mises en place par l’ONU, au prix d’un plan de paix qui aura coûté la bagatelle de 22 milliards $, – la plus coûteuse opération de l’ONU -, le Cambodge s’enfonce à nouveau dans la guerre : les ex-communistes refusent de continuer à partager le pouvoir avec les royalistes, et donc les en chassent.
31 07 1997
Les Espagnols terminent le creusement de leur part de tunnel de Somport, long de 8,6 km, qui relie Pau à Saragosse, par la vallée d’Aspe, à 1 100 m. Coté français, c’était terminé depuis un an. Destiné au trafic voitures et poids lourds, il est en parallèle avec un ancien tunnel ferroviaire à une voie, fermé depuis qu’en 1970, un train dérailla. Il reliait Oloron à Canfranc. Les opposants au tunnel, arc boutés sur l’impérative tranquillité d’une vallée très encaissée, feront beaucoup de bruit pour empêcher les travaux. Mais, accident du tunnel sous le Mont Blanc aidant, en 1999, la solution de la remise en service du tunnel ferroviaire pour du ferroutage reprend du poil de la bête.
07 1997
Télérama publie des récits de vie de famille, du début de ce siècle à nos jours : l’indestructible joie de vivre y côtoie la lassitude, l’horreur parfois.
Le dernier hiver a été long. Je me suis ennuyée. Tellement que je n’avais même plus envie de rien faire… Nous n’avions pas l’habitude d’être choyés. Le milieu des petits paysans pauvres était rude, cruel. Parfois ignoble. Si un patron venait à engrosser une servante qui ne voulait pas de son enfant, il arrivait encore, avant 14, qu’on donne le nourrisson à manger aux bêtes. C’était un autre temps. Pour avoir le droit d’aller une semaine à l’école, il fallait, les 10 jours suivants, garder jour et nuit vaches, moutons ou chèvres, s’occuper des frères et sœurs, travailler aux champs. Et on mangeait mal et peu… Jamais de viande. Sauf au Carnaval et en novembre, quand on tuait le cochon. Alors, on s’empiffrait tellement qu’on avait des indigestions. Les cadeaux d’anniversaire, les présents de Noël, on ne savait pas ce que c’était. On recevait juste trois noix pour la nouvelle année. Pourtant, on s’amusait. Il y avait tant de gamins, dans les prés, qui gardaient seuls le bétail…
Justine Penissard, née en 1899. Le Menoud. Indre
Le petit prix, si ce n’est l’absence totale de prix, de la vie d’un enfant, était alors la norme ; le progrès des moyens thérapeutiques aidant, l’enfant prit une place grandissante au sein du foyer au début du XX° : lorsqu’il projetait de faire l’ascension du Mont Blanc en compagnie de Jacques Balmat, en août 1786, le docteur Paccard vint ausculter Judith, sa petite fille de quelques mois, alors malade… laquelle maladie ne les empêchèrent nullement de mettre à exécution leur projet… avec le succès que l’on sait… à leur retour, la petite Judith était morte.
La face nord des Drus a trop chaud : les rochers jusqu’alors soudés par la glace en leur profondeur, de 2 500 à 3 754 m d’altitude voient fondre ce ciment, et c’est la chute d’à peu près 300 000 m³ qui vont changer une bonne partie de la face, donnant ainsi aux amateurs de première quelques nouveaux terrains.
20 08 1997
Maciej Zaremba, journaliste d’origine polonaise, publie dans Dagens Nyheter, quotidien suédois une enquête révélant que, de 1932 à 1979, le gouvernement suédois, c’est à dire les sociaux démocrates, a procédé à la stérilisation d’à peu près 60 000 êtres humains, dont 95 % de femmes : trop bêtes, trop pauvres, trop bronzées… Il faudra attendre l’arrivée au pouvoir des libéraux, centristes et conservateurs en 1979 pour que cesse ce programme.
22 08 1997
Crucibal Materials, – une entreprise américaine qui fabrique des aimants, produit hautement stratégique – est vendue à YBM Magnex International, apparemment américain, en fait noyautée par un très haut gradé de la mafia russe, Semion Mogilevitch [100 000 $ du FBI à qui fournira des renseignements fiables]. Qu’en fera-t-il ?
25 08 1997
Lionel Jospin signe la fin de l’âge d’or du Minitel : Le Minitel, réseau uniquement national, est limité technologiquement et risque de constituer progressivement un frein au développement des applications nouvelles et prometteuses des technologies de l’information… Je demande que France Télécom propose des solutions incitatives afin de favoriser la migration progressive du vaste patrimoine de services du Minitel vers Internet.
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En 1997, on compte 14,5 millions de Minitélistes contre un petit million (devenus 4 deux ans plus tard) d’Internautes. France Télécom va essayer, avec un certain succès de contrôler l’accès à Internet par la création de son accès Wanadoo : avec 160 000 abonnés, cela représenterait 20 % du marché français. Le téléphone portable, lui, se porte à merveille : instrument idéal de la frime, il prospère dans un monde de frime : 6 217 000 en mars 98, non compris les faux.
En ne faisant pas évoluer la technologie du Minitel depuis son lancement, au début des années 80, France Télécom s’est enfermé dans une logique purement commerciale [6,3 milliards de francs de rapport par an dont 3,1 reversés aux fournisseurs de services]. Le principe du kiosque, qui a institué la tarification des services télématiques à la durée, a largement participé à l’expansion du Minitel. Il présente en effet le double avantage de la simplicité et de l’efficacité. Grâce à lui, les 25 000 services sont largement rémunérateurs pour leurs auteurs et pour France Télécom. D’où l’émergence, en France, d’une industrie télématique. À contrario, le paiement des services sur Internet se révèle beaucoup plus délicat à mettre en œuvre, ce qui entrave pour l’instant le développement du commerce électronique à l’échelle mondiale.
Paradoxalement, le kiosque, véritable moteur du Minitel, est devenu son principal frein. La facilité avec laquelle il permet de gagner de l’argent et l’absence totale de concurrence par d’autres systèmes a figé à la fois la technologie et des tarifs prohibitifs.
Internet est issu d’une culture diamétralement opposée, celle de la gratuité de l’information, de l’absence de centralisation, de la concurrence acharnée entre les acteurs et d’une fuite en avant technologique permanente. Si les industriels gagnent encore peu d’argent sur Internet, ils sont en train d’inventer un nouveau média à l’échelle mondiale. Parallèlement, le Minitel se momifie à vue d’œil… et ce n’est pas l’accès à Internet par Wanadoo qui changera radicalement le cours des choses… les services présents sur le Minitel tardent trop à basculer sur Internet… les banques, par exemple, ne sont pas pressées de voir disparaître la manne de la consultation des comptes personnels.
En France, la télématique n’est pas considérée comme un outil d’information, de communication, de prospection ou de marketing, mais comme un centre de profit pur et simple.
Michel Alberganti. Le Monde 27 Août 1997.
31 08 1997
Lady Di meurt dans un accident de voiture en compagnie de Doddi Al-Fayed, son nouvel amant. Le chauffeur, était aussi en état d’ivresse à plus de 150 km/h, poursuivie par des paparazzi. Le garçon avait cru pouvoir les semer en prenant au départ du Ritz une autre voiture que celle de l’aller. Selon un médecin légiste, si Lady Dy, à l’arrière, avait pu mettre une ceinture de sécurité, elle aurait pu être soignée sans difficultés. L’ambulance mettra deux heures pour aller du Pont de l’Alma à La Pitié Salpêtrière : à une heure de la nuit où la circulation est fluide, les curieux ne manqueront pas de se poser des questions… auxquelles personne ne sera en mesure de répondre. Personne non plus ne sera en mesure de dire où pouvait bien être alors Jacques Chirac, disparu des radars, injoignable : les paparazzi prétendent qu’il ne pouvait être joint que par les seuls bras de Claudia Cardinale [2] : ce qu’il y a de sur, c’est qu’on n’en aura jamais la preuve.
La presse viole impudemment la vie privée des célébrités au nom de Tout le monde a le droit de tout savoir, slogan mensonger pour un siècle de mensonge, car, bien au-dessus de ce droit, il y en a un autre perdu aujourd’hui : le droit qu’a l’homme de ne pas savoir, de ne pas encombrer son âme créée par Dieu avec des ragots, des bavardages, des futilités.
Alexandre Soljenitsyne.[3]
Les obsèques donnèrent lieu à sa quasi béatification et une fondation de soutien des associations soutenues par Lady Dy fût mise sur pied : six mois plus tard, elle avait recueilli 400 millions de F, dont plus de la moitié par la seule vente de la chanson créée alors par Elton Jone, mais c’est seulement un tiers de ce joli gâteau qui sera remis aux organisations humanitaires.
24 08 1997
La jeunesse catholique connaît ses grands jours à Paris, avec les JMJ : Journées Mondiales de la Jeunesse. Le pape est de la fête… les responsables des réjouissances ont passé commande à Élisabeth de Portzamparc, très tendance, d’un fauteuil pour Sa Sainteté : il va être en aluminium…. et se tordra lamentablement et rapidement sous le poids du Saint Père qui, aura tout de même le temps, au passage, de se brûler les fesses et les bras, tant la machine infernale avait chauffé au soleil…
4 09 1997
Lionel Jospin refuse la privatisation d’Air France à Christian Blanc, son PDG, qui démissionne. Neuf mois plus tard, cette décision accouchera de la plus scandaleuse grève des pilotes, à l’ouverture du Mondial de foot.
5 09 1997
À la veille des funérailles de Lady Di, Élisabeth II lui rend hommage :
Nous avons tous essayé de surmonter cela de différentes façons. Ce n’est pas facile de ressentir la perte de quelqu’un. Au choc initial succède souvent un mélange d’autres sentiments : le désarroi, l’incompréhension, la colère et de la peine pour ceux qui restent.
En tant que reine et en tant que grand-mère, je souhaite tout d’abord rendre hommage en personne à Diana. Elle était un être humain exceptionnel et talentueux. Dans les bons comme dans les mauvais moments, elle n’a jamais perdu son sourire et ses rires. Elle n’a cessé d’inspirer les autres avec sa chaleur et sa bienveillance. Je l’admirais et la respectais pour son énergie et son engagement envers les autres, en particulier pour son dévouement envers ses deux garçons. Cette semaine à Balmoral, nous avons tous aidé William et Harry à surmonter la perte dévastatrice dont eux et tous les autres ont souffert. Personne qui a connu Diana ne l’oubliera. […] C’est une opportunité pour montrer au monde entier que la nation britannique est unie dans le deuil et le respect. Que ceux qui sont morts reposent en paix.
Mère Thérésa s’en va à son tour : les Indiens lui feront des obsèques nationales et elle s’en ira très vite et tout droit au Paradis : Quand on dit qu’il vaut mieux apprendre à pêcher à un homme qui a faim, plutôt que de lui donner un poisson, c’est bien… mais il faut bien aussi s’occuper de ceux qui n’ont même pas la force de tenir une canne à pêche.
15 09 1997
Les Laboratoires Servier annoncent la cessation de la commercialisation mondiale de l’Isomédrine et du Pondéral. Vendu dans 85 pays, 70 millions de personnes en ont consommé ; en France, 7 millions. Quelques heures plus tard, le Redux est retiré du marché américain, car il provoque des atteintes des valves du cœur, ou valvulopathies : une class action est menée, des procès ont lieu dans tout le pays : le groupe Servier passera au travers des mailles du filet, car c’est la société qui le distribue qui supportera l’entière responsabilité : il lui faudra provisionner 21.1 milliards de $ pour indemniser les victimes !
22 09 1997
Nuit d’horreur à Bentalha, dans la banlieue d’Alger : près de 400 personnes massacrées.
09 1997
Une bonne partie de l’Indonésie est en feu : c’est environ 2 millions d’hectares qui partent en fumée. La conjonction d’une exceptionnelle sécheresse, d’une déforestation inconsidérée [traditions agricoles, moyen le plus économique pour les candidats à l’émigration et pour les forestiers de reconvertir les terrains] et d’un sous-sol souvent tourbeux qui peut entretenir un feu souterrain pendant des années, crée des conditions telles que les pouvoirs publics, même s’ils avaient été plus responsables, mieux équipés, n’auraient pas pu faire grand chose.
Principal accusé : El Niño, dont la manifestation première se traduit par un réchauffement des eaux de surface le long des côtes du Pérou à la période de Noël, d’où son nom. Quelle est la situation en temps normal dans ce Pacifique sud ? Une masse d’eau chaude de la taille des États-Unis se trouve à l’ouest du Pacifique, et s’enfonce en profondeur dans les océans. Les alizés, soufflant d’est en ouest, maintiennent cette poche à l’ouest. Si les alizés, certaines années, viennent à faiblir, cette eau chaude se dirige vers l’est, à 250 km/jour. Donc, en temps normal, ce sont les pays de l’ouest pacifique – Philippines, Nouvelle Calédonie, Asie du Sud Est, nord de l’Australie et Papouasie Nouvelle Guinée, qui subissent des pluies très importantes. Et quand les alizés viennent à faiblir, ce sont les côtes ouest de l’Amérique du Sud qui reçoivent ces pluies. Selon la National Oceanic and Atmospheric Administration, la périodicité en est variable, de 2 à 10 ans : notre siècle a connu 23 épisodes dont ceux de 1991, 1994 et 1997.
En 1997, les conséquences auront été exceptionnellement dramatiques : sécheresse au Japon et dans les 2 Corées, sécheresse et incendies en Indonésie, Malaisie, Philippines, Thaïlande, Australie, famine en Papouasie Nouvelle Guinée, inondations en Somalie Éthiopie, Kenya, sécheresse en Afrique Australe et dans la région des Grands Lacs, tornades en Floride et dans les Caraïbes, inondations dans le Sud Ouest des États-Unis, au Mexique, en Colombie, Équateur, Pérou, Chili. En 1997, ce sont 4,5 millions d’hectares de forêts asiatiques qui seront partis en fumée.
Le gouvernement indonésien doit importer 4 millions de tonnes de riz, quand les réserves mondiales sont de 18, plus d’un million de personnes en Papouasie Nouvelle Guinée en sont réduites à se nourrir de racines, la Floride connaîtra en février 98 les tornades les plus dévastatrices de son histoire, et l’Amazonie – plus précisément l’État brésilien du Romeira, au sud-ouest du Guyana – sera en flammes avec environ trois millions d’hectares touchés – la surface de la Belgique – : les brûlis habituels des Indiens Yanomamis ont pu prospérer grâce à la sécheresse alors qu’ils sont habituellement douchés par les pluies de décembre : le gouvernement brésilien déploiera tous les moyens possibles, hélicoptères, avions, etc… en vain. Les Indiens en appelleront alors aux deux sorciers de la tribu des Kaiapos, pour un rituel de la pluie. Le lendemain, de violents orages éteindront presque tous les feux.
El Nino tenu en respect par des sorciers primitifs, ce n’est pas la lune, mais tout de même presque le Pérou.
Et fin 98, c’est le cyclone Mitch qui ravage l’Amérique centrale : les premiers chiffres, donnés par les autorités centrales parleront de plus de 25 000 morts au Honduras, Costa Rica, Nicaragua. Un mois plus tard, quelques personnes sérieuses – il y en a, même dans les médias -, reverront ce chiffre à la baisse : dans certains endroits, les chiffres avaient été multipliés par vingt. Leur attention fût attirée par le fait qu’il n’y avait pratiquement aucun blessé là où l’on annonçait des milliers de morts : or, inévitablement, dans toute catastrophe, il y a plus de blessés que de morts. Ceci dit, les médias ne parlent que pour la première fois d’un phénomène qui est né avec les premiers gros financements humanitaires : à savoir que les intervenants, si l’honnêteté ne leur est pas précieuse, ont tout intérêt à grossir les chiffres : les budgets alloués en seront d’autant plus importants, les responsables des grandes agences de l’ONU auront des points d’avancement pour leur sacro sainte carrière. Ainsi, dans les années 75, l’UNICEF diffusait de par le monde entier le chiffre de 50 millions d’enfants morts de faim chaque année quand ce chiffre de 50 millions représentait alors le nombre total de morts par an !
13 10 1997
L’ex URSS n’en finit pas de se craqueler. La CEI marque ses faiblesses, avec la naissance d’un concurrent, même s’il ne veut pas dire son nom. Il se donne pour raison d’être de former, aux frontières russes, un pôle pro-occidental et pro-OTAN, et de se rapprocher de l’Alliance atlantique.
L’une des grandes faiblesses de la CEI a toujours été la variabilité constante de sa composition : l’Ukraine, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, l’Ouzbékistan ont, par moments, bruyamment manifesté à son endroit une volonté de séparation et ignoré de manière ostentatoire les projets et structures de sécurité collective. Plus grave encore : le 13 octobre 1997, la Géorgie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Moldavie se sont unis pour former un groupement nouveau, le GUAM, qui devient GUUAM le 23 avril 1999 avec l’adhésion de l’Ouzbékistan. Le GUAM, avec un ou deux U, constitue pour la Russie un véritable défi. Entente entre États soucieux d’affirmer leur différence avec elle, ses membres le présentent volontiers comme une alliance anti-CEI, en quête d’appuis occidentaux. Au sein de cette instance, le rôle central de l’Ukraine, qui ne cherche pas à dissimuler son hostilité à la CEI et à la Russie, est particulièrement troublant pour Moscou. Au cours de cette même période, la Russie n’a pourtant pas ménagé les efforts de rapprochement avec Kiev, concluant le 28 mai 1997 un accord de partage sur la flotte de la mer Noire, puis, trois jours plus tard, lors d’une rencontre au sommet entre présidents russe et ukrainien, signant un traité d’amitié et de coopération que renforcera, le 28 février 1998, la signature d’un accord décennal de coopération économique. En apparence, les tensions entre les deux pays tendent alors à s’apaiser, mais la naissance du GUAM témoigne de la précarité de ce rapprochement. Ne serait-ce pas une version politique du meurtre du père ? suggèrent des observateurs russes, tels Andranik Migranian ou Alexandre Tsipko, inquiets de la perte continue du prestige de la Russie dans cet étranger proche.
Hélène Carrère d’Encausse. La Russie entre deux mondes. Fayard 2010
15 10 1997
Lancement par la NASA, d’un tandem de sondes d’exploration du système solaire, Cassini-Huygens. L’orbiteur Cassini sera satellisé autour de Saturne qu’il atteindra en juillet 2004 ; l’atterrisseur Huygens devrait se poser sur Titan, satellite de Saturne. Le tout pèse 5 577 kg et aura coûté la bagatelle de 20 milliards de francs. Le voyage sera de 3,5 milliards de km. L’atmosphère de Titan se promène entre -171° et – 90°. Christiaan Huygens (1629-1695) avait découvert les anneaux de Saturne, et Jean Dominique Cassini (1625-1712) leur séparation.
18 10 1997
Inauguration du musée Guggenheim à Bilbao, réalisé par Frank Gehry, financé – 100 millions $ – intégralement par le gouvernement autonome basque, mais géré tout aussi intégralement par le directeur de la Fondation Guggenheim, depuis New York : Frank Gehry se joue du béton comme un couturier du tissu, et Bon Dieu ! que la robe est belle…
22 10 1997
Patrick Boissier, nouveau patron des Chantiers de l’Atlantique, annonce la couleur pour les mois et années à venir : tous les coûts, production, études, doivent diminuer de 10 à 25 %, développement de la sous-traitance, doublement de la production, déménagement de la direction financière et commerciale de Paris vers Saint Nazaire… tout cela pour pouvoir se passer, dans les trois ans qui viennent, des aides publiques, lesquelles pouvaient atteindre jusqu’à présent 30 à 35 % du montant des commandes quand les règles européennes les limitent à 9 % du prix de revient d’un navire. En 1997, la loi de finances les fixaient à 750 millions, mais ce sont 1 297 millions qui ont été versés, compte tenu des reports de crédits des années précédentes. 6 mois plus tard, les Chantiers de l’Atlantique recevront de la Royal Carribean Cruise Cruceros leur plus grosse commande : 4 paquebots de 85 000 tonneaux, 294 m de long, 1 000 cabines – le Norway, ex-France en fait 315 -, et 2 autres, plus petits, de 350 cabines pour l’américain Renaissance. Cela représente, avec 15 millions d’heures de travail, et autant pour les sous-traitants, deux ans d’activité, de juin 2000 à juin 2002.
30 10 1997
Lancement réussi d’Ariane V. L’échec du lancement du 4 juin 96 a coûté 2 milliards F. L’amélioration des performances du lanceur, 6,7 milliards. Le dernier modèle d’Ariane IV peut emporter une charge de 4,7 t. Ariane V peut emporter aujourd’hui une charge de 5,9 t à 6,8 t. Elle emportera au cours des ans des charges de plus en plus lourdes, jusqu’à 12 t en 2006, ceci pour être à même de concurrencer les Américains, Russes, Chinois, et bientôt les japonais et les Indiens. Le marché fait l’objet d’une concurrence très forte. Aujourd’hui, le prix du kilo en orbite géostationnaire va de 20 000 $ à 30 000 $. Lorsque sera lancée la quinzième Ariane V, le prix devrait avoir baissé à 18 000 $ le kilo. Ce sont environ 110 satellites qui seront lancés, chaque année, pendant les dix années à venir, pour une bonne part consacrés aux multimédia, en orbite basse.
10 1997
Les mines antipersonnel, l’arme du pauvre – on en trouve à moins de 2 $ l’unité ! – parviennent à réunir la plupart des gouvernements contre elles : un projet de traité les condamnant a été approuvé en septembre à Oslo et sera ratifié le 3 décembre à Ottawa. Mais les principaux pays producteurs ne le signeront pas : États-Unis, Russie, Inde, Pakistan et Chine. Ces mines ont déjà tué 600 000 personnes, et ce nombre augmente de 26 000 par an. La France, qui en a produit jusqu’en septembre 1995, en détient un stock de 1,4 million qu’elle s’est engagée à détruire avant la fin de l’an 2000 : ce sera chose faite le 20 décembre 1999 où la dernière mine sera détruite sur le site de Précigné, dans la Sarthe. Reste un stock de 5 000, strictement contrôlé, pour l’apprentissage des démineurs.
Le corps des procureurs de la République, jusque là plutôt fort sérieux, en prend un vieux coup avec la déclaration du procureur du Var, assurant que le conseiller général du Var, retrouvé mort avec 8 balles dans le corps, s’est en fait, contrairement aux apparences, bien suicidé.
Crise politique en Italie : le patron des ex-communistes, Massimo d’Alema, modèle d’intransigeance, de rigidité et d’arrogance, refuse de suivre Romano Prodi… qui s’en va ; les ex-communistes italiens, qui en ont marre de la valse des gouvernements autant que leurs autres concitoyens et apprécient beaucoup Romano Prodi, inondent le siège du parti de protestations, par courrier, fax, téléphone et Massimo d’Alema fait machine arrière avec toutes ses qualités de dirigeant, et Romani Prodi revient occuper son poste : n’arrêtez jamais de gueuler, il peut arriver que ça serve à quelque chose… Mais un an plus tard, les communistes répéteront le même scénario et réussiront à faire repartir Romano Prodi et c’est … Massimo d’Aléma qui deviendra premier ministre.
7 11 1997
Un communique de la NAS – National Academy of Sciences –, annonce le lancement d’un programme russo américain, avec participation anglaise, pour des recherches conjointes dans des instituts russes du système Biopréparat. Washington, Moscou et Londres ont convenu de ne transmettre à aucun pays tiers les résultats du programme, qui coûterait sur 5 ans, 38,5 millions $ au département d’Etat américain. Ce programme ne vise à rien d’autre que la fabrication d’armes biologiques, commencée dès 1972, en URSS, près de Sverdlovsk, à la Cité 19.
La fabuleuse hypocrisie des gouvernements américains les emmènera aux bords d’une nouvelle guerre contre l’Irak… pour détruire ses armes biologiques. Koffi Annan, secrétaire général de l’ONU parviendra à désamorcer le conflit, mais le passage à l’acte se fera en décembre 98.
Dire que l’homme est un loup pour l’homme, c’est être bien méchant pour les loups.
8 11 1997
Aux Trois Gorges, les autorités chinoises procèdent à la dérivation du Chang Jiang [anciennement Yang tsé kiang], pour permettre les débuts de la construction de ce qui sera en 2009 le plus grand barrage hydroélectrique du monde, appuyé sur 30 millions de m³ de terre, 27 de béton, pour retenir 40 milliards de m³ d’eau, étalée sur 660 km de long, 632 km² ; le barrage, proche de Yichang, aura 2 335 m de large, 185 mètres de haut ; il comportera 26 générateurs d’une capacité totale de 18,2 millions de kw/h, avec une production annuelle de 84,7 milliards de kw/h, équivalente à celle de 20 centrales nucléaires. Estimation du coût en 2000 : 24 milliards $. Les premiers travaux ont commencé en 1993, la mise en eau du barrage commencera en juin 2003. Se retrouveront sous les eaux : 1 300 mines, 300 000 m² de latrines, 2,8 millions de tonnes de déchets domestiques et industriels, des abattoirs, 40 000 tomes, 4 000 hôpitaux… de quoi faire un sacré bouillon de culture… Le premier drame, humain : près d’1,2 million de personnes déplacées, les unes à proximité dans des villes nouvelles, les autres beaucoup plus loin.
Les Rochers du dos du dragon, [barre rocheuse de 5 km de long et 50 m de large qui avance dans le fleuve au confluent du Yang-Tsé et de la Rivière Pengxi [4], près de la ville de Yunyang] jusque là apparaissaient et disparaissaient au gré des eaux : ils vont disparaître définitivement et les gens du Yunyang ne pourront plus se promener dessus ou prédire avec des poules si l’année à venir sera faste ou néfaste ; ils ne pourront plus que se remettre en mémoire la chanson populaire : Si, de part et d’autre des Rochers du dos du dragon, entourés de banc de sable, les eaux du fleuve s’écoulent, la richesse ne durera pas et les fonctionnaires intègres ne termineront pas leur mandat.
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Même avec dix mille pinceaux finement taillés, il serait difficile de décrire la beauté des falaises de la gorge de Qutang. (la première des Trois Gorges)
Zhang Wentao 1644 – 1711
17 11 1997
Sur les terrasses du temple de la reine Hatchepsout, rive gauche du Nil, à l’ouest de Louxor, des islamistes tuent 58 étrangers au pistolet mitrailleur et à l’arme blanche. D’autres attentats suivront, celui du vol 9268 – Airbus A 321 de MetroJet, qui fera 224 morts au-dessus du Sinaï le 31 octobre 2015, le massacre de la mosquée soufi de Bir al Abed, sur le littoral méditerranéen du Sinaï le 24 novembre 2017, faisant 305 morts et une centaine de blessés. Fin 2017, le nombre de touristes n’atteindra pas la moitié de ce qu’il était en 1995.
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[1] Lequel Benyamin Netanyahou, un jour fatigué des querelles incessantes entre Juifs et Chrétiens pour savoir si le Messie était déjà venu ou bien s’il fallait encore l’attendre, mit provisoirement fin aux discussions avec un : écoutez-moi, je vous propose quelques chose de très simple, la prochaine fois qu’on le voie, la première question à lui poser sera : est-ce que c’est la première ou la deuxième fois que tu viens ?
[2] Claudia Cardinale, dont Marcello Mastroianni, expert, dit qu’elle est la seule fille simple et saine dans ce milieu de névrosés et d’hypocrites. Chirac n’a pas que des qualités mais il a du goût. Claudia Cardinale en première dame de France reprenant la suite des Médicis … ça en aurait jeté ! Mais Claude Chirac, sa fille avancera une autre version, assurant que son père était bien dans son lit, rue du Faubourg Saint Honoré, où Christine Albanel, future ministre de la Culture, était de permanence ce soir-là. Et c’est elle qui aurait choisi de ne réveiller Jacques Chirac qu’à cinq heures du matin, ce dernier demandant alors à son épouse de se rendre au chevet de Lady Diana.
[3] L’écrivain sait de quoi il parle : installé depuis 1976 aux Cinq Ruisseaux, au cœur d’une forêt du Vermont, il a dû subir perfidies et calomnies de la presse pour s’être régulièrement refusé aux mondanités médiatiques.
[4] Il est bien possible qu’ils aient servi de lieu de tournage à Balzac et la petite tailleuse, sorti en 2002.