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février 1881 à 1882. La mission Flatters. De Long. Greely. Hugo. « L’orgueil que les navires inspirent aux hommes ». 18296
16 02 1881 Les 93 hommes de la seconde mission Flatters sont attaqués par des Touaregs au puits de Bir el-Gharama, près de l’oued Inouhaouen au sud d’Ouargla. 42 sont tués. Les 51 autres vont connaître 71 jours de calvaire, d’horreur avant de pouvoir atteindre Ouargla, à 1700 km de là, le 28 avril. Un an plus tôt, une mission déjà commandée par Flatters avait procédé aux premiers relevés pour la création d’un chemin de fer transsaharien. Elle avait dû faire demi-tour après avoir connu nombre de difficultés et dissensions. Pierre Fabiani a eu accès au rapport de la Commission d’enquête : Le lieutenant-colonel Flatters, en raison de l’expérience qu’il aurait acquise en sa qualité d’administrateur du secteur de Laghouat, fut désigné comme chef d’une mission ayant pour objet de rechercher le parcours le plus favorable à l’établissement de la voie ferrée et d’en établir le relevé topographique. [résumé] L’expédition n’était pas une petite affaire : 97 hommes : le lieutenant colonel Flatters, sept membres scientifiques et militaires : MM. Béringer, Roche, Santin, le médecin major Guyard, le capitaine Masson, le lieutenant de Dianous de la Perrotine deux sous-officiers MM. Dennery et Pobéguin, deux ordonnances Brame et Marjolet, quarante sept tirailleurs indigènes et trente et un arabes des tribus, sept guides Chaamba et Iforas, le mokadem de l’ordre des Tidjani, 3 juments, 97 chameaux de monture, 180 chameaux de bât, 280 animaux au total, 4 mois de vivres, 8 jours d’eau, et de l’or en assez grande quantité pour acheter les notabilités locales. Le départ eu lieu le 5 décembre 1880, d’Ouargla, au sud-est de Ghardaïa. Les 73 premiers jours se déroulèrent sans incident majeur. Le 16 février, le puits où il fallait abreuver – le dernier abreuvage remontait au 10 février, à Temassint – se trouvait en zone montagneuse, accessible par un défilé étroit où les animaux ne pouvaient progresser qu’en file indienne. Il fut décidé de laisser les bagages dans la plaine, gardées par 41 hommes. Les autres accompagneraient les animaux jusqu’au puits. À l’approche du puits, les premiers virent s’enfuir les hommes qui semblaient travailler à son curetage. Et, dans les minutes suivantes, plusieurs centaines de Touaregs surgissaient de leurs caches pour attaquer. Ce sera un massacre : 46 tués, 10 survivants, tous les chameaux capturés. Les 10 survivants parviendront à rejoindre les hommes de garde aux bagages. Les Touaregs ne leur donnèrent pas la chasse, sachant fort bien que, sans chameaux, les hommes étaient perdus. Donc, il ne s’agissait pas de piller l’or, puisque ce dernier était resté avec les bagages. Après le massacre des morts commença le calvaire des 51 survivants : il leur fallait rejoindre Ouargla, 500 km au nord, sans chameaux. Ils partirent le lendemain, portant le maximum de ce qu’ils avaient prélevé sur les bagages, dont le plus gros fut abandonné. Ils connurent tout, tout ce dont l’homme peut se montrer capable en situation extrême. Ils trouvèrent des chameaux, mais durent les racheter à leurs propriétaires partis à leur recherche, ils rencontrèrent des Touaregs qui, lorsqu’ils ne les combattirent pas – 4 morts, 6 blessés à Amguid -, cherchèrent à les empoisonner. Dès le 23 février, les vivres vinrent à manquer, et l’horreur s’installa : dissensions, séparations entre deux clans, anthropophagie, condamnée puis admise par les derniers sous-officiers vivants. Au bout de deux mois, le 20 avril, 11 hommes chancelants, épuisés, envahis de croûtes de crasse, arrivaient à El Messeguem où ils purent être secourus. Ils seront à Ouargla 8 jours plus tard. [fin du résumé] Certains des survivants seront interrogés par une commission d’enquête et leurs dépositions souvent inexactes, contradictoires ou volontairement tronquées seront rapportées, in extenso, dans le document officiel établi à la demande du Gouvernement Général de l’Algérie, et intitulé Deuxième Mission Flatters, Historique & Rapport Rédigés au Service Central des Affaires Indigènes Ce rapport comporte plus de trois cents pages. On retire de sa lecture un sentiment de grande confusion et l’on constate que bien des faits importants sont passés sous silence, sans doute par pudeur administrative. C’est pourquoi il serait vain de prétendre retracer, avec exactitude, la chronologie et le mouvement des événements, uniquement en s’en inspirant. Pierre Fabiani Hubert Lyautey, 27 ans, est lieutenant au 2° régiment de hussards, à Alger depuis fin 1880. Il rapporte à son père le contenu de la dépêche reçue à Alger la veille : Hier, à l’arrivée de la dépêche, [à Alger], on était terrifié : quatre cavaliers épuisés sont arrivés à Laghouat, annonçant qu’à plus de quinze jours de marche, au sud, Flatters et la plupart des officiers, surpris pendant la nuit, avaient été massacrés. Un jeune sous-lieutenant, Dianous, qui est précisément d’un régiment d’Alger, échappa au massacre et, ramassant ce qui restait de la caravane, soixante hommes, turcos et spahis, perça avec énergie et repiqua au nord. Au bout de deux jours, épuisés de faim et de fatigue, ils acceptèrent les dattes que les Touaregs vinrent amicalement leur offrir. Les dates étaient empoisonnées. Dianous et vingt-sept hommes périrent, trente échappèrent et au moment où les quatre cavaliers les avaient quittés, cette poignée d’hommes tenait encore, se défendant et marchant. Immédiatement, l’agha d’Ouargla lança quatre cents cavaliers sur méhari, mais il n’y a aucune chance pour qu’il retrouve autre chose que leurs os : trente hommes à trois cents lieues, sans vivres, sans munitions, et cernés. Que d’énergie dépensée ! C’est splendide ! Lieutenant Hubert Lyautey à son père, le 2 avril 1881, dans Un Lyautey inconnu. Le « splendide » ne peut que choquer. Il est d’un jeune lieutenant, encore frais émoulu de l’école où on lui a transmis cette vénération pour la mort au combat, cet esprit de corps de garde dont seront pétris tous les colonels qui enverront leurs hommes à la boucherie sans états d’âme lors de la première guerre mondiale. Il est très probable que Lyautey, à cinquante ans, n’aurait plus utilisé ce mot. Le lieutenant colonel Flatters porte à l’évidence une part de responsabilité du drame : une méconnaissance profonde des autochtones, de leur pouvoir, de leurs rivalités, qui le fit se séparer des éléments fiables pour engager ceux qui le trahiront, séparation de la colonne en deux pour abreuver… Mais, aussi, comme dans toute l’histoire coloniale, une irresponsabilité certaine des politiques incapables de mesurer les difficultés sur le terrain. Probablement l’ampleur du drame servit-elle à contribuer à l’émergence d’hommes plus fins , plus compétents, les Lyautey, les Laperrine etc… ![]() illustration d’Une poignée de héros, de Gabriel Galland Qu’en est-il de ce serpent des sables [qui prend la place en l’occurrence du serpent de mer], que l’on avait commencé à agiter dès le second empire pour continuer à le faire tout au long de la troisième République ? Dès 1860 Louis Hanoteau proclame en inaugurant la ligne Alger-Blida: Qui sait si un jour, reliant Alger à Tombouctou, la vapeur ne mettra pas les tropiques à six journées de Paris ? 13 03 1881 Sophia Perovskaïa, chef de la Narodnaïa Volia et quatre lanceurs de bombes parviennent à tuer le tzar Alexandre II à Saint Petersbourg, lors de la relève de la garde. Ces têtes brûlées avaient enregistré les appels au meurtre depuis Berne, le 26 octobre 1876 de l’anarchiste Pierre Kropotkine, réclamant la révolte permanente par la parole, par l’écrit, par le poignard, le fusil, la dynamite. Alexandre III son fils, 36 ans, abrogera les dernières réformes libérales, exacerbera l’antisémitisme et russifiera par la force les provinces périphériques de l’empire : de là datent les premiers pogroms contre les juifs, et partant, la première aliya – retour des Juifs de la Diaspora en Israël -. Encore aujourd’hui, l’étiquette de la vodka – Gold – qu’ils se mirent rapidement à fabriquer, comporte l’aigle à deux têtes, emblème de la Russie tzariste. L’humour juif existait déjà, et avec lui, ce qu’il y a de bien, c’est que, malgré les années passées, il ne prend pas une ride :
Le terrorisme russe ne va pas rester un phénomène marginal : de 1897 à 1914, les attentats terroristes feront 17 000 victimes, [sans distinction entre morts et blessés]. La répression restera limitée, environ 4 500 condamnations à mort entre 1906 et 1909, pas toutes exécutées. mars 1881 Joseph Conrad est second lieutenant à bord du Loch Etive. Il a quitté Sydney en novembre 1880 et fait route pour Londres, via le cap Horn : L’amour qu’inspirent les navires diffère profondément de celui que les hommes ressentent pour toute autre œuvre de leurs mains – l’amour qu’ils portent à leurs demeures, par exemple – en ce qu’il n’est pas entaché par l’orgueil de la possession ; l’orgueil de l’adresse, l’orgueil de la responsabilité, l’orgueil de l’endurance, peut-être, mais c’est là, néanmoins, un sentiment désintéressé. Aucun marin jamais n’a chéri un navire – même s’il lui appartenait – pour le simple profit qu’il en pouvait tirer. Aucun, je pense, ne l’a fait : car un armateur, fût-il de la meilleure espèce, n’a jamais franchi l’enceinte de ce sentiment qui réunit, dans une intime et constante camaraderie, le navire et l’homme, qui vont s’entr’aidant contre l’hostilité implacable, quoique parfois sournoise, de ce monde des eaux qui est le leur. La mer – c’est une vérité qu’il faut bien reconnaître – ignore toute générosité. Le déploiement des plus mâles vertus – courage, audace, endurance, fidélité – n’a jamais pu émouvoir cette irresponsable conscience qu’elle a de sa puissance. L’océan a la nature sans scrupule d’un féroce autocrate dépravé par une perpétuelle adulation. Il ne peut souffrir la moindre apparence de défi, et n’a jamais cessé d’être l’irréconciliable ennemi des navires et des hommes depuis que les navires et les hommes ont eu l’audace inouïe de défier ensemble sur les flots son front irrité. Il n’a cessé, depuis ce jour, d’engloutir des flottes et des hommes, sans que jamais son ressentiment pût se satisfaire du nombre de ses victimes, de tant de navires naufragés, de tant de vies perdues. Aujourd’hui, comme toujours, il est prêt à tromper et à trahir, à écraser et à engloutir l’incorrigible optimisme de ceux qui, avec l’aide fidèle des navires, tentent de lui arracher la fortune de leur foyer, la domination de leurs univers ou simplement un peu de nourriture pour apaiser leur faim. Si sa fureur n’est pas toujours disposée à écraser, elle est toujours sournoisement prête à engloutir. La merveille la plus étonnante des eaux profondes est leur insondable cruauté. Joseph Conrad Le Miroir de la mer 1906 C’est pas l’homme qui prend la mer J’ai troqué mes santiags J’ai déserté les crasses Dès que le vent soufflera C’est pas l’homme qui prend la mer J’ai eu si mal au cœur J’me suis cogné partout Dès que le vent soufflera Oh oh oh oh oh hissez haut ho ho ho ! C’est pas l’homme qui prend la mer La mienne m’attend au port Assise sur une bite d’amarrage Dès que le vent soufflera C’est pas l’homme qui prend la mer Je f’rais le tour du monde J’irais aux quatre vents Dès que le vent soufflera Oh oh oh oh oh hissez haut ho ho ho ! C’est pas l’homme qui prend la mer Il est fier mon navire Tabarly, Pageot, Dès que le vent soufflera C’est pas l’homme qui prend la mer Ne pleure plus ma mère Regardez votre enfant Dès que le vent soufflera Dès que le vent soufflera Dès que le vent soufflera 2 04 1881 Ouverture de l’École d’application de l’infanterie de Saint-Maixent ; elle sera transférée à Montpellier en 1967. 04 1881 Création de la Caisse Nationale d’Épargne. 25 04 1881 250 000 Allemands remettent au chancelier de l’empire une pétition demandant le retrait des mesures d’émancipation des Juifs et l’interdiction de toute immigration nouvelle : c’est le début de l’antisémitisme moderne. Si le mouvement de retour en Palestine est déjà lancé, c’est vers les États-Unis qu’émigrent en grande majorité les victimes des pogroms renaissants : la communauté juive aux États-Unis compte 250 000 personnes. Mais on verra aussi une communauté juive à Kaifeng, dans la province chinoise du Henan, au nord-ouest de Shangaï. 16 06 1881 Jules Ferry institue la gratuité de l’enseignement primaire, de six à treize ans (ce n’est pas à proprement parler l’école qui est obligatoire, mais l’enseignement). Dans ces année-là il affectera à la police les locaux d’un ancien marché aux volailles, au 36, quai des Orfèvres : en héritage, les nouveaux prendront comme surnom le nom des anciens : poulet. 13 06 1881 Le capitaine de l’US Navy George Washington De Long, et son équipage, assistent, impuissants à l’écrasement par les glaces de la Jeannette, par 77°17’N et 155°48’E, à proximité d’îles auxquelles il a donné son nom : Jeannette et Henrietta. Dès le début novembre, De Long notait : Passant mes habits à la hâte, je regarde la course des glaçons, plus bruyante et désordonnée que jamais. D’immenses blocs se rencontrent, s’écrasent, ou, lancés sur notre champ, y font de larges cassures ; la glace se brise et se soulève. À chaque charge de l’ennemi, le navire se plaint, il craque dans toute sa membrure ; à chaque instant, je crois le voir arraché de son berceau. La pression est énorme ; le vacarme assourdissant. Je ne connais dans le vaste monde, aucun autre bruit qui approche cela. Les roulements et les éclats du tonnerre, les cris stridents, les plaintes, les rugissements, les craquements d’une maison qui s’effondre, combinez le tout, et vous aurez quelque idée de la commotion atmosphérique produite par ces convulsions de la banquise. Des blocs gigantesques, de sept à huit mètres de hauteur soulevés sens dessus dessous, se heurtent lourdement, et entre eux s’amassent ou s’écroulent des masses énormes de débris tabulaires : on dirait une vaste marbrerie flottante. Parfois tout s’arrête ; quelque dalle épaisse se sera achoppée sur notre champ ou en dessous ; d’autres la pressent, la poussent ; nouveaux crépitements, nouvelles clameurs : le plan des glaces s’étire, s’allonge, se gonfle en dômes ça et là. Crac ! il cède tout d’un coup, ses abords sont emportés, les dômes se fendent, la détente arrive et le défilé reprend avec ses rugissements, ses éclats, ses cris. ***** Lorsque les hommes virent et entendirent une éruption sur la glace éclairée par la lune, De Long crut qu’il assistait à la mort de la Jeannette. Deux plaques de glace gigantesques entraient en collision, créant une crête de compression. Le long de leurs franges, les floes se télescopaient, se fracassaient les uns sur les autres, soulevant la glace dans une réaction en chaîne qui semblait se diriger droit sur la Jeannette. Le commandant, son second et plusieurs membres de l’équipage, debout sur le toit du rouf, regardèrent le cataclysme avancer comme on regarde un train qui vous fonce dessus. De Long agrippa un étai et hurla : Tenez-vous bien ! Tandis que la crête mouvante approchait, les hommes, les yeux écarquillés, cherchèrent autour d’eux un cordage, un hauban et, en marmonnant des prières, se préparèrent au choc. Hampton Sides Au royaume des glaces Paulsen 2018 La Jeannette avait commencé par être la Pandore, yacht de plaisance à bord duquel sir Allen Young en compagnie de Mac Clintock avait retrouvé en 1857 les traces de l’expédition de sir John Franklin, en 1845. C’est le déjà très connu sir James Gordon Bennett, propriétaire du New York Herald, et sponsor de Stanley, qui avait voulu confirmer au pôle les exploits de Stanley sous les tropiques en achetant la Pandore et en en confiant le commandement à George Washington De Long, descendant d’une famille de huguenots français. L’objectif précis était le franchissement du passage du nord-est. Il va appareiller de San Francisco le 8 juillet 1879 : ce jour-là, Nordenskjöld n’avait plus que neuf jours à rester prisonnier des glaces, après lesquels trois jours de navigation lui suffiront pour atteindre le détroit de Béring. La position de grand patron de presse de son sponsor ne pouvait laisser De Long dans l’ignorance du projet de Nordenskjöld, mais il savait aussi qu’il était parti depuis plus d’un an, qu’on n’avait aucune nouvelle de lui et qu’il était venu sans doute compléter la liste déjà longue des victimes de l’Arctique. Les deux navires se croiseront début août dans les parages des Aléoutiennes, mais personne ne peut assurer que De Long apprit la victoire du professeur suédois. Étrangement, le drame de De Long sera perçu comme antérieur à l’exploit de Nordenskjöld, alors que ce dernier a franchi le détroit de Béring plus de deux ans avant la mort de De Long. Il avait laissé des instructions précises pour l’engagement de l’équipage : célibataires, santé parfaite, force considérable, tempérance éprouvée, gaieté. Lire et écrire l’anglais. Excellents marins, ça va de soi. Musiciens, si possible. Préférer Norvégiens, Danois ou Suédois ; éviter Anglais, Irlandais, Écossais ; refuser sans merci Français, Italiens, Espagnols. Les 32 hommes et les 23 chiens quitteront le navire en tirant sur la banquise 5 traîneaux, 2 cotres et une baleinière. Le 29 juillet – ils mènent leur vie de forçat depuis déjà plus d’un mois -, ils croient toucher terre : ce n’est qu’une île qu’ils baptiseront Bennet. Ils y resteront jusqu’au 7 août, se nourrissant d’oiseaux gras frits dans la graisse d’ours, buvant une eau délicieuse prise dans les ruisseaux. A la mi-septembre, deux jours d’une tempête furieuse séparent les trois bateaux ; le 17 les 13 hommes du cotre de De Long accostent sur la côte de Sibérie, près de l’embouchure de la Léna : ce ne sera plus qu’un interminable calvaire qui se terminera par la mort des derniers hommes vers le 1 novembre, de faim, d’épuisement… Frédéric Bernard Revue Le Tour du Monde. Les 10 hommes embarqués sur le petit cotre ont disparu : nul ne les a jamais revus. Mais les 10 hommes de la baleinière commandée par Melville eurent plus de chance : la baleinière traversa la tempête sans avarie majeure et accosta chez des Yakoutes, les gens les plus braves et les plus hospitaliers du monde. Prévenu un peu plus tard que deux blancs étrangers vivaient dans une station près de la Léna, il vint les retrouver : c’était bien les deux hommes que De Long avait envoyé en avant : trop faibles pour participer aux recherches, ils se referont une santé pendant que les autres, durant 23 jours, par un froid glacial, parcoururent plus de mille kilomètres pour retrouver De Long et ses 9 compagnons – l’un d’eux était déjà mort avant leur départ – en vain… Ce n’est qu’au printemps suivant qu’ils y parvinrent, accompagnés de Ninderman, un des deux rescapés de De Long, commençant par découvrir une Remington pendue à un faisceau de quatre morceaux de bois, puis une bouilloire, puis les corps : le carnet sur lequel De Long écrivait depuis le départ du navire, se trouvait à trois ou quatre pieds de lui :
George Washington De Long ![]() La Pandore – future Jeannette – au Groenland en 1870 Jules Verne parlera longuement de l’expédition de La Jeannette dans deux romans : Sans dessus dessous (chap.VII) et Robur le Conquérant (chap.XIV). 26 07 1881 Création de l’École Normale Supérieure de jeunes filles à Sèvres. 29 07 1881 Loi sur la liberté de la presse qui impose un cadre légal à toute publication, ainsi qu’à l’affichage public, au colportage et à la vente sur la voie publique. Elle est inspirée de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Dans le même temps, le texte en limite l’exercice et incrimine certains comportements, en réaction à la Commune. Le régime de l’autorisation préalable ainsi que le cautionnement sont abolis : on passe d’un système préventif – peu libéral car fondé sur l’autorisation préalable – à un système répressif – où seuls les délits sont réprimés, sans possibilité de censure a priori. Une répression ne se manifeste qu’à travers quelques délits de presse tels que l’offense à la personne du président de la République, l’injure ou encore la diffamation. Cette loi donne à la presse le régime le plus libéral que la France ait jamais connu : elle engendre la suppression de l’autorisation préalable, du cautionnement et du timbre comme le déclare l’article 5 : tout journal ou écrit périodique peut être publié, sans autorisation au préalable, et sans dépôt de cautionnement, ce qui réduit les lourdes charges financières des journaux et favorise les nouvelles publications. 3 08 1881 Les Suisses Mummery et Burgener gravissent le Grépon, 3484 m. dans les Aiguilles de Chamonix. 08 1881 L’expédition Greely, ce point noir de l’histoire américaine dans l’Arctique, dira Peary. En 1881, le lieutenant Adolphus Washington Greely est chargé par son gouvernement de diriger la station polaire américaine de Fort Conger, installée par le Protée. 81° 44′ lat. N. 64° 45′ long. O. Cette station faisait partie du programme d’action de la Seconde Année Polaire Internationale. C’était à l’époque la station située au point le plus septentrional du monde. Faute de ressources suffisantes du gouvernement, c’était aussi une des plus démunies. Secondé par Lockwood, un explorateur de tout premier plan, qui a battu le record de l’Anglais Markham en atteignant la latitude de 83° 24′, [725 km du pôle] le lieutenant Greely, du 5° régiment de cavalerie, remplit sa mission pendant une année avec une remarquable énergie. Il consigne en de très nombreuses notes magnétiques, météorologiques, océanographiques, zoologiques, botaniques les plus importantes observations scientifiques qu’aucune équipe polaire ait jusqu’alors été en mesure de rassembler. Le printemps s’achève. Les explorateurs se préparent gaiement au retour. Selon les plans, un navire en effet doit, au cours de l’été 1882, se porter aux abords du chenal de Robeson, à Fort Conger, pour rapatrier l’expédition. Il est convenu que, si ce navire ne parvient pas à les atteindre, des vivres seront déposés sur l’île Littleton (aux abords d’Etah) et sur la pointe du cap Sabine (île Pim) immédiatement à l’est de l’entrée du fjord Alexandra. On l’attend d’un jour à l’autre. Hélas ! rien ne paraît à l’horizon. Pour des raisons diverses, le navire, cette année-là, n’a pas été envoyé au-delà du détroit de Smith. En 1883, armé en toute hâte par le gouvernement fédéral qui est pris d’inquiétude, un second navire, le Proteus, repart vers le nord mais fait malheureusement naufrage dans le détroit de Smith à plus de 200 miles au sud de la station, avant même d’avoir pu l’atteindre. Pour différents motifs, ce navire n’est pas remplacé. Très autoritaire, Greely va, chaque jour davantage, se trouver discuté par ses compagnons. Déjà, le chef d’expédition ne correspond plus avec son second, Kilingsbury – et ce depuis le jour du départ du Proteus -, que par des notes, se refusant à lui parler ! Chaque partenaire a, du reste, par disposition spéciale, le droit singulier de faire grève ou de rompre son contrat. Toutes les conditions sont de la sorte réunies pour qu’un drame se noue. De semaine en semaine, il va lentement se dérouler et la base de Greely se transformer en camp de la haine et de la mort lente. 1883, nous sommes en été : Greely et vingt-quatre compagnons (dont deux Groenlandais d’Upernavik qui s’avéreront d’excellents chasseurs), terriblement inquiets de ne pas voir arriver le navire attendu depuis deux ans, quittent leur base de la baie de Lady Franklin et, par leurs propres moyens (deux canots et un petit youyou), font route vers le sud [de la baie de Lady Franklin au cap Sabine, il y a 825 km qu’ils mettront 51 jours à couvrir]. Selon des instructions écrites à suivre en cas de détresse, Greely se déplace le long de la côte ouest du chenal Kennedy et du bassin de Kane, soit le long de la côte orientale de la Terre d’Ellesmere, inhabitée et fort englacée. Erreur capitale et difficilement compréhensible après les expériences des Américains Kane et Hayes, auxquels la familiarité avec les Esquimaux Polaires nord groenlandais avait été salutaire, sinon salvatrice, durant leurs expéditions de 1853-1855 et 1860-1861. Cet étrange itinéraire de Greely le long d’une côte à la glace stérile et déserte ne pouvait apporter aucun contact avec les Esquimaux d’Etah et, par conséquent, aucune aide de leur part . Près du cap Sabine, sur une petite butte, Greely découvre des caisses de vivres apportées par le Proteus, phoquier de 467 tonneaux : cinq cents rations de pain, du thé et des conserves. C’est ainsi qu’il apprend que ce navire a fait naufrage, au nord du cap Sabine, le 23 juillet 1883. Dans un message trouvé le I° octobre 1883, parmi les caisses, le capitaine du Proteus, B.A. Garlington, déclare que le gouvernement fédéral ne désespère pas de sauver l’expédition – que Greely et ses compagnons ne perdent pas courage, dit-il en substance. Greely remet donc à une date ultérieure la poursuite de la retraite vers le sud. L’hiver, du reste, approche et il n’est que temps de construire un abri afin de pouvoir mieux affronter le froid : il s’installe à l’ouest du cap Sabine sur la plage nord de l’île Pim au camp dit Clay. Nous en sommes, à notre camp actuel du fjord Alexandra, éloignés seulement de quelques kilomètres. ![]() Steamer Proteus en Arctique 1881 Camp Clay, 78° 54′ N. 74° 03′ O. Troisième hiver sous une hutte recouverte par la baleinière miraculeusement portée par les flots, après son abandon. Ils ont quarante jours de vivres, mais qu’importe ! Ne vont-ils pas être prochainement relevés ? L’attente se prolongera. plus de deux cent cinquante jours. Les glaces sont, cette année-là, très abondantes et les deux navires envoyés à leur rencontre (Proteus et Neptune) n’ont pu les atteindre. Qui plus est, la dérive des glaces empêche Greely de gagner la côte groenlandaise. Oserai-je dire que – connaissant très bien le secteur – cet argument ne me convainc pas : au cas où le détroit n’est pas franchissable par bateau l’été (du fait du mauvais temps ou des glaces), en revanche, par traîneaux, l’hiver (dès décembre) et à l’avant-printemps, le détroit peut, à pied où à traîneau, être franchi ; mon exploration présente en porte témoignage. Mais il semble que Greely, épuisé, s’accroche à ses instructions et à ce petit et dernier dépôt du cap Sabine. Ancré à cette côte d’Ellesmere inhabitée, il ne croit pas devoir se porter, aussi vite que possible, alors qu’il est encore en force, sur la côte ouest- groenlandaise, dans les villages esquimaux d’Anoritoq, d’Etah, bien connus depuis les expéditions de Kane et de Hayes. Il pouvait, à tout le moins, envoyer une mission pour réclamer du secours, au lieu de faire explorer l’ouest de l’île Pim, ce qu’il entreprend, à plusieurs reprises, avec des hommes affamés. La chasse est très médiocre malgré la présence des Groenlandais. Les explorateurs en sont vite réduits à manger du lichen de roche, leurs vêtements sont en loques. Au début, quelques crevettes sont bien pêchées sur le bord de la banquise. Plusieurs renards, même, capturés et mangés. Mais très vite, c’est la famine. Les appâts des pêcheurs sont bientôt de la chair humaine pourrie. Après des souffrances inouïes, dix-huit d’entre ces hommes vont mourir de froid et de faim l’un après l’autre. Juste avant le retour du soleil, un seul est manquant (mort le 18 février), six meurent en avril, quatre en mai et sept en juin (le dernier à Godhavn, le 8 juillet, après le sauvetage). Parmi eux : l’admirable Lockwood ; le Groenlandais Christiansen ; Kilingsbury, le second, auquel Greely refusera de parler jusqu’à son agonie ; Octave Pavy, l’explorateur-médecin, [de nationalité française] apprécié de tous, qui, se sentant condamné, se suicide en avalant ce qui reste de la pharmacie et se jette à l’eau pour ne pas être mangé. Jens, qui se noie en chassant le phoque… Il est très vraisemblable que les morts aient été la dernière ressource des survivants affamés. C’est sans doute le médecin Pavy qui, découpant habilement avec son scalpel la chair utile des morts, notamment dans l’espace intercostal, a permis au groupe de survivre. Dépeçage également des cuisses, des bras et des jambes. Ultimes marques de respect ? La face, les mains et les pieds ne furent pas touchés. Pavy était si habile que seul un examen attentif a permis de déceler le travail chirurgical qu’il exécutait sous la peau. Après sa mort, les corps des nouvelles victimes (quatre) ont été raclés par les affamés et démembrés à un point tel qu’il n’a pas été possible d’en rassembler les restes épars. Officiellement, ces quatre, ainsi que Pavy, ont été considérés comme perdus… en mer. Afin de faire bon poids, dans les bières des autres, les sauveteurs mirent… des pierres en guise de squelettes. Mais écoutons plutôt le bouleversant récit de Greely, dans son journal intitulé Dans les glaces arctiques, relation de l’expédition américaine à la baie de Lady Franklin. Paris, Hachette 1889 :
Parages du cap Sabine, 6 juin 1884. Aux sergents Brainard, Long, Frederik : malgré les assurances que le soldat C.B. Henry nous a données, il vient de reconnaître avoir volé à l’ancien campement des courroies de peu de phoque… il sera … exécuté dans la journée, toutes précautions prises pour qu’il ne puisse nuire à personne. Vous tirerez, suivant l’usage, avec deux cartouches à balle et une cartouche à blanc. Cet ordre est impératif et absolument nécessaire pour conserver aux autres quelques chances de survie. Signé : A.W. Greely, premier lieutenant au 5° de cavalerie, etc., commandant l’expédition de la baie de Lady Franklin. Vers 2 heures, on entendit deux coups de feu… Chacun, sans exception, reconnut que le malheureux avait mérité son sort…
D’un navire américain, la Thétis, débarquent rapidement en effet quelques marins. Ils sont saisis d’épouvante devant le tableau qu’offrent ces deux hommes qui se traînent sur la plage. Sur une petite éminence, ils aperçoivent enfin une tente battue par le vent, d’où partent des gémissements. Un des marins éclate en sanglots. Faute de pouvoir trouver assez vite la porte de l’abri, la toile est entaillée au couteau. La vision découverte est un spectacle d’horreur. Sur l’un des cotés, près de l’entrée, la tête tournée vers l’extérieur était étendu un homme apparemment déjà mort. La mâchoire pendante, il nous regardait les yeux ouverts, fixes et vitreux, les lèvres sans vie. De l’autre coté, il y avait un autre homme, vivant mais sans mains et sans pieds, avec une cuillère attachée au moignon de son bras droit… Vis à vis, marchant sur ses mains et ses genoux, un homme noir avec une longue barbe désordonnée dans une robe sale et déchirée, une petite calotte rouge sur la tête et des yeux brillants et fixes. Quand Colwell apparut (adjoint du commandant de la Thétis, le Capitaine Winfield Scott Schley), il se souleva et mit ses lunettes.
Récit de Jean Malaurie Les derniers rois de Thulé Plon 5° édition 1989 Trois ans après le drame de De Long, cet autre drame qui glace d’épouvante, n’est pas sans rappeler par son horreur celui du Naufrage de la Méduse, 65 ans plus tôt : un commandement militaire, non pour faire la guerre mais pour affronter les risques d’une expédition, dont ils n’ont pas l’expérience. Ne peut-il s’agir que des aléas de tous ceux qui essuient les plâtres ? Moins de dix ans plus tôt, les hommes du Polaris qui savaient eux aussi ce qu’est la zizanie, étaient sortis vivants de huit mois de dérive sur des bouts de glace parce qu’ils avaient à leurs cotés quatre Esquimaux ; les hommes de Greely, refusant la solution qui leur aurait fait rejoindre une côte fréquentée par les Esquimaux s’étaient faits piéger par les dissensions, la haine, puis la mort de faim, de 17 hommes.
![]() Stereoscopic image of the Greely expedition exhibition at the Columbian Exposition, 1893 reproduction of a woodcut from 1882, digital improved. (Photo by: Bildagentur-online/Universal Images Group via Getty Images) Everyone, officers, sergeants and soldiers being forced to pull boats, engraving from the International Polar Expedition of 1881-1884, led by Adolphus Greely (1844-1935). Arctic, 19th century. Paris, Bibliothèque Des Arts Decoratifs (Library) (Photo by DeAgostini/Getty Images) 06 1881 Clarence Bicknell, pasteur anglican découvre la vallée des Merveilles, – Meraviglie, alors en Italie – et c’est le coup de foudre. Il va y passer douze ans à relever, inventorier, publier ce trésor de gravures rupestres protohistoriques. Il n’était pas le premier à en prendre connaissance, mais ceux qui étaient passés par là avant lui, s’étaient contentés d’explications plutôt délirantes. Parfois, quand nous montions tôt le matin ou en descendant tard dans la soirée, nous avons observé les vaches blanches debout ou couchées à l’intérieur de leur enclos entouré d’une barrière de mélèzes à proximité de leurs cabanes rectangulaires ; nous avons été frappés par la ressemblance qu’avait cette scène avec les gravures rupestres, et nous nous sommes demandés si les points incisés sur les figures ne représentaient pas les troupeaux des sculpteurs. […] Si ceux qui ont gravé des figures de leurs araires et de leurs bœufs, et probablement aussi de leurs parcs, avaient voulu dépeindre le tableau de l’un de leurs habitats avec les troupeaux, ils n’auraient su le faire de façon plus vivante, encore que symbolique. […] Le jour où nous fîmes cette découverte, j’explorais les pentes au-dessous du lac inférieur quand j’entendis la voix de M. Pollini très excité qui criait : Venez, venez, j’ai découvert le portrait du chef des tribus. Il n’était pas facile d’y arriver si vite. Il fallait monter et descendre, sauter et grimper. Cette figure étrange nous rappelle les danseurs endiablés ou les sorciers des tribus sauvages. Bien loin de là, dans la haute Egypte, Mohammed Ahmed ibn Abdallah, alias al Mahdi – le bien guidé par Dieu – déclare le djihad dans toute la région sur base de fondamentalisme musulman, fort des conditions politiques et économiques locales : le khédive s’est fait le valet des infidèles. Pour sauver Khartoum la pervertie, il faut épurer le monde, chasser le pouvoir apostat, éradiquer la corruption, brûler les mécréants au feu de la vraie foi, au fer de la vraie loi . Ainsi se joignent à lui tous les chefs musulmans qui ne supportent pas que le pouvoir ait été remis à des Européens, ainsi que les marchands d’esclaves qui refusent tout contrôle de leur très lucrative activité. En juin 1882, ses troupes infligeront une lourde défaite à celles du gouverneur égyptien de Khartoum. Le 18 janvier 1883, il prendra El-Obeid, capitale du Kordofan, le 4 novembre de la même année, il écrasera une colonne commandée par un anglais, le colonel Hicks : 9500 tués de ce côté, colonel inclus, et en décembre, c’est Rudolf Carl von Slatin gouverneur de la région de Dara qui se rendra et passera plusieurs années en prison à Omdurman, tout à côté de l’actuelle Khartoum. Dans le silence apaisant mais inquiétant de l’étoile nouvelle et chevelue, le pacha lit un avertissement. Il connaît la réputation du mahdi et le prend au sérieux. Il décide de fortifier la ville. Entreprise étrange, irréelle même. Fortifie-t-on Khartoum, ville mort-née, oui ; ville de boue, grossièrement et mollement sortie du désert, ville dont les tempêtes de sable brouillent les traits en quelques heures, où les pluies surabondantes font s’écrouler les maisons, et transforment les rues en caniveaux puants ? D’ailleurs, que faut-il craindre ? Des forts déjà nous défendent. Et les deux Nils. Au sud, il est vrai que la cité se perd dans les sables mous, tel un porc-épic bien hérissé, mais dont le ventre est vulnérable. N’y pensons pas. Nous sommes là pour vivre et pour jouir – disent les puissants, les marchands, les Blancs, et moi, le hokomdar. Etienne Barilier. Dans Khartoum assiégée. Phebus 2018 4 09 1881 Jean-Louis Mouras, de Vesoul, dépose un brevet pour une nouvelle fosse d’aisance dite vidangeuse automatique et inodore, autrement dit la fosse septique. 1 10 1881 Ouverture à Montpellier du premier lycée de jeunes filles de France. 1881 Lois sur la liberté de réunion, d’association. Ces lois, et celles à venir, en 1901, sur la liberté d’association, en 1905, sur la séparation des Églises et de l’État devront leur existence essentiellement à l’influence en haut lieu des francs-maçons. Création de HEC : Hautes Études Commerciales. Alexis Millardet, professeur de botanique à Bordeaux, et Gayon mettent au point la bouillie bordelaise – mélange de chaux et de cuivre – pour combattre le mildiou qui ravage le vignoble. Ce champignon s’étale en tâche huileuse sur le dos de feuilles, détruisant ainsi les inflorescences, maculant les grappes, allant jusqu’à craqueler les rameaux. Reconstitué à partir de plants américains, le vignoble français était ainsi à l’abri du phylloxéra, mais sensible au mildiou. Quant il ne restait rien du plant antérieur, les viticulteurs greffaient souvent l’aramon, un cépage très productif, mais à faible degré : les deux tiers du vignoble titraient moins de onze degrés. Sous la férule de Nicolas Rambourg, maître de forges de la forêt de Tronçais, la ville de Commentry s’était industrialisée, avec la fabrication du verre, qui demande beaucoup de chaleur, donc beaucoup, et même trop, de bois. Tant et si bien que l’activité s’était ralentie et que les autorités publiques avaient décidé d’une reconversion dans l’exploitation de la houille ; la dépression de 1870 avait mis beaucoup de monde au chômage. Et dans ce contexte lourd à gérer, Christophe Thivier s’était fait une place tant et si bien qu’il avait été élu maire en 1881, premier maire socialiste, issu du milieu ouvrier. En juillet 1882, il demandera la suppression de la Coopérative de la forge, pour éviter la ruine du petit commerce. Il deviendra député de l’Allier en 1889, se présentant à l’Assemblée nationale en blouse d’ouvrier : Mes électeurs ne veulent pas que je me déguise pour la séance d’ouverture. Ils m’ont donné le mandat d’y aller endimanché, comme je suis ordinairement: ma blouse par-dessus mon paletot. En 1895, Commentry lui réservera des funérailles grandioses. 1° centrale électrique à Goldaning, dans le Surrey ; 1° tramway électrique Siemens à Berlin ; définition des mesures d’électricité : toutes ces nouveautés sont mises en valeur pour la première Exposition internationale d’Électricité qui se tient à Paris. L’électricité a une longue histoire. Le premier des philosophes, Thalès de Milet, s’était aperçu que, si l’on frottait un morceau d’ambre, il attirait à lui des substances légères comme le liège ou le parchemin. Le nom de l’énergie en jeu dérive d’ailleurs du mot grec elektron, qui veut dire ambre. Entre Thalès (580 av. J.-C.) et l’Anglais William Gilbert au XVII° siècle ap. J.-C, le progrès, en ce domaine comme en bien d’autres, resta très modeste, même si le prince des premiers naturalistes, Théophraste, découvrit que certains minéraux s’électrifient quand on les chauffe. Il savait aussi que certains poissons produisent des décharges électriques foudroyantes et connaissait les remarquables propriétés du ver luisant et de la luciole. William Gilbert était un savant issu d’une vieille famille du Suffolk. C’est lui qui, dans son étude sur le magnétisme. De Magnete, a le premier qualifié d’électriques ces phénomènes. Cent ans plus tard, Robert Boyle démontra que l’attraction qu’un corps exerce sur l’objet qu’il attire est réciproque. Pendant ce temps, à Magdebourg, Otto von Guericke construisait une machine électrostatique avec des électrodes en soufre. Isaac Newton en construisit un autre exemplaire à Cambridge, en remplaçant le soufre par du verre. Plusieurs chercheurs avaient remarqué que l’on produit de l’électricité en frottant de la soie, des cheveux ou de la laine. En France, Charles François de Fay établit que les propriétés de l’électricité sont de deux sortes, attractive ou répulsive, négative ou positive. En 1745, E. G. von Kleist (Poméranie) et Musschenbroek (Hollande) découvrirent, chacun de leur côté, la bouteille de Leyde. Moins élégant que son nom pourrait le suggérer, cet objet était quand même une œuvre d’art, comme la plupart des inventions à cette époque. On remplissait partiellement d’eau un flacon de verre mince puis on le fermait avec un bouchon de liège. Ensuite, on faisait passer une tige métallique à travers le bouchon de façon qu’elle arrive au contact de l’eau. En tenant la bouteille à la main, on présentait la tige métallique à une machine électrique et il s’ensuivait une décharge électrique. Un savant de Londres, sir William Watson (qui découvrit aussi que la sainteté est dans la polygamie) s’aperçut alors que l’on pouvait remplacer la main et l’eau, respectivement, par une chaîne et du fer ou du mercure. C’est à la suite de ces expériences que le premier grand savant né aux États-Unis, Benjamin Franklin, démontra l’identité de l’électricité et de la foudre en faisant voler un cerf-volant en soie pendant un orage. Il soutint que l’électricité n’était pas créée par la friction mais qu’elle existait à l’état diffus et qu’on l’accumulait simplement dans des matériaux capables de l’attirer. D’après lui, quand on frotte un globe de verre, il accumule l’électricité de la personne qui le frotte et pourra redonner cette électricité à un objet ou une personne qui en a moins. Franklin prouva également que, dans les échanges électriques, la quantité d’électricité soustraite d’un corps est identique à la quantité d’électricité gagnée par l’autre corps. Un peu plus tard, Alessandro Volta, professeur de physique à Pavie, découvrit que, si l’on sépare une pile de disques en cuivre ou en argent d’une pile de disques en zinc par un linge mouillé, ils produisent de l’électricité, à condition que le plus petit élément de chaque pile soit relié à un conducteur. C’est ainsi que naquit le mot volt et que fut construite la première batterie électrique. Volta montra aussi que tous les métaux pouvaient être placés dans un ordre tel que chacun d’entre eux devient positif s’il entre en contact avec celui qui le précède. En 1807, sir Humphry Davy annonça qu’il avait effectué la décomposition par électrolyse de la potasse et de la soude, obtenant ainsi deux nouveaux métaux, le potassium et le sodium. La Royal Society de Londres lui fournit deux mille paires de disques électriques avec lesquels il produisit le premier arc électrique – trouvant la première utilisation pratique de l’électricité. En 1819, Hans Christian Oersted, professeur de chimie à Copenhague, établit que, si l’on tient près d’un fil conducteur , reliant les derniers disques d’une des piles de Volta un aimant monté sur pivot ou l’aiguille d’une boussole, celle-ci est déviée perpendiculairement au fil. Il mit ainsi en évidence l’existence d’un champ magnétique autour du conducteur. L’année suivante, François Arago, en France, et Humphry Davy, en Angleterre, découvrirent chacun de leur côté la possibilité d’aimanter le fer et l’acier avec un courant électrique. André-Marie Ampère, né près de Lyon (son père avait été exécuté sous la Révolution pour avoir protesté contre les excès des révolutionnaires), était professeur de mathématiques à Paris. En 1820, dans une communication à l’Académie des sciences, il annonça qu’il avait découvert l’interaction dynamique entre les conducteurs de courants électriques. Les premiers travaux sur l’électricité furent donc, en quelque sorte, une entreprise internationale dans laquelle l’État n’intervint pratiquement pas. Le XIX° siècle n’apporta pas de modification à cette situation. Parmi les grands noms associés aux recherches sur l’électricité, celui de Michael Faraday occupe une place prépondérante. Fils d’un forgeron du Surrey, il fut placé en apprentissage chez un relieur. En 1812, il assista aux conférences de Davy et devint son assistant. En 1822, il fit flotter un fil électrifié autour d’un pôle magnétique. En 1831, il démontra qu’en faisant tourner un disque de cuivre entre les pôles d’un aimant, on produit de l’électricité. Il réussit également à faire décrire des cercles à un fil électrifié autour d’un aimant fixe. Ces découvertes entraînèrent la création de toute une industrie complètement nouvelle. Il s’agit d’un cas exemplaire (car ils furent rares au début de la révolution industrielle) où la science influença la technologie, et non pas l’inverse. En règle générale, les théoriciens ont exprimé les principes des inventions après que l’inventeur lui-même eut terminé son travail. Le disque de cuivre de Faraday n’en donna pas moins naissance à de nombreuses applications pratiques. Deux ans plus tard, à Göttingen, Cari Friedrich Gauss, directeur de l’observatoire, et son assistant, Wilhelm Weber, envoyèrent des signaux électriques chez leur voisin, au moyen d’un fil placé sur la cathédrale de la ville. La première grande application pratique de la découverte de l’électricité fut le télégraphe, vers 1840. Entre 1832 et 1870, les différents domaines scientifiques découlant des découvertes de Faraday se constituèrent: à partir de 1842, William Thompson (qui devint lord Kelvin) travaillait sur l’électromagnétisme, Werner von Siemens sur la dynamo et James Clerk Maxwell sur la physique expérimentale. La dynamo fut définitivement mise au point en 1870 par un Belge, Zénobe T. Gramme. Tout ceci permit de doter les machines de moteurs électriques. On put assister à des démonstrations de l’utilisation de l’électricité pour la fabrication des machines-outils à l’exposition de Vienne, en 1873. L’électricité commença à remplacer la vapeur pour actionner les chaînes de montage suspendues qui étaient alors si répandues dans les grandes usines. On utilisa aussi très vite l’électricité pour s’éclairer. En 1858, le phare de Dungeness, sur la côte sud de l’Angleterre, avait des lampes alimentées à l’électricité (conçues par Faraday et son assistant, Holmes). Différents types de filaments furent testés dans les années suivantes. En 1875, la gare du Nord, à Paris, et l’usine du chocolat Menier (toujours à la pointe du progrès), à Noisiel-sur-Marne, s’équipèrent d’un système d’éclairage électrique. En 1878, Joseph Swan, un chimiste originaire de Sunderland, fabriqua la première lampe à filament satisfaisante mais Thomas Edison en inventa une autre dont il fit la publicité avec une irrésistible énergie. Edison était né d’un marchand de bois canadien établi sur la rive sud du lac Huron, et avait commencé sa carrière comme vendeur de journaux. Lui et Swan unirent leurs forces en 1883. Boston ne tarda pas à s’éclairer à l’électricité, suivie par d’autres villes d’Amérique. Edison avait déjà construit une centrale électrique pour New York en 1881 et devint un des plus grands chefs d’entreprise de la société industrielle. La même année, Milan se dotait d’une centrale similaire. En Angleterre, l’électricité éclaira les débats à la Chambre des communes, dès 1881 également. Quand 1900 arriva, plus personne ne songeait à discuter la suprématie de l’électricité sur le gaz ou sur toute autre forme d’énergie. Moins dangereuse et plus fiable que le gaz, elle était aussi plus propre. Ces inventions eurent d’immenses conséquences commerciales. En Allemagne, par exemple, un ingénieur du nom d’Emile Rathenau acheta les droits d’exploitation de l’invention d’Edison pour l’Allemagne et fonda l’AEG (Allgemeine Elektrizitats-Gesellschaft) qui, entre 1883 et 1903, transforma le pays en y multipliant les appareils électriques à un rythme inconnu dans les autres pays d’Europe. Producteurs et distributeurs d’électricité s’organisèrent alors en un formidable cartel vertical. Si l’on avait rapidement adopté l’électricité pour s’éclairer, il n’en alla pas de même dans l’industrie. Les générateurs n’atteignaient leur capacité maximum que quelques heures par jour. Il semblait donc difficile de les utiliser sur une grande échelle. Le problème fut toutefois résolu avant la fin du XIXe siècle. L’électricité jouait un rôle essentiel dans nombre de nouvelles activités : plusieurs sociétés électrochimiques s’étaient créées pour produire de l’aluminium et du sodium. Même en Italie, les premières applications industrielles de l’électricité apparurent dès 1892. En revanche, l’Angleterre prit un certain retard par rapport aux États-Unis et à l’Allemagne : ce n’est en effet qu’à partir de 1903 et 1905 que des centrales électriques importantes commencèrent à y fournir de l’énergie en gros et à remplacer les petites unités d’intérêt local. On constate d’ailleurs, pour les années qui suivirent, un retard semblable dans l’adoption des nouvelles technologies. La conversion de l’industrie à l’électricité fut facilitée par l’expansion de l’énergie hydro-électrique après 1890. On savait depuis 1829 que l’on pouvait équiper les roues hydrauliques d’une turbine, innovation due à Benoît Fourneyron. Une de ces premières installations fournissait 2 300 volts par minute avec une chute d’eau de 106 mètres. Cependant, il existe peu de chutes d’eau de cette importance en Europe. La première installation hydro-électrique convaincante fut celle des chutes du Niagara (1886). Après cette première réussite, les États-Unis exploitèrent les chutes des Appalaches, tandis que Barcelone s’alimentait en électricité en implantant des usines hydro-électriques dans les Pyrénées. La turbine apparut peu après, quoique la plus grande réussite en ce domaine ait été enregistrée avec la version vapeur, imaginée par Charles Parsons pour les bateaux en 1884 et adoptée par la British Navy, techniquement très avancée, en 1897. C’est à la turbine que les cuirassés, à partir de 1905, durent leur vitesse. A ce moment-là, on avait commencé à donner bien d’autres applications à l’énergie électrique. Au premier rang de ces nouveautés, comme on l’a vu, figure le télégraphe et on peut, sans hésiter, attribuer la deuxième place au téléphone (1876); il faut également réserver une des premières places au microphone, inventé à peu près à la même époque. A partir de 1902, plusieurs cités se dotèrent de chemins de fer souterrains électrifiés. Deux ans plus tard, on entreprit de remplacer la vapeur par l’électricité sur les principales lignes de chemin de fer. En une génération, l’électricité devint la principale source d’énergie dans de multiples domaines et rendit les habitants des pays riches tributaires des centrales pour l’éclairage, la cuisine et le chauffage, dépendance totalement inconnue jusque-là. Les nouveaux moyens de divertissement ou d’éducation, comme la radio et la télévision, dépendent pareillement de l’approvisionnement électrique. Le niveau de la consommation électrique renseigne donc, lui aussi, sur la richesse d’un pays. Les syndicats d’électriciens prirent très tôt conscience de leur force : Pataud, chef de file des électriciens français à la Belle Époque, plongea Paris dans l’obscurité lors d’une grève en 1908, et fit éclater une autre grève à l’Opéra au cours d’une visite royale. L’augmentation des salaires qu’il demandait fut accordée dès les premières minutes de négociation. Les travailleurs de l’électricité n’ont jamais oublié la leçon implicite de cette grève. Les politiciens non plus. Hugh Thomas Histoire inachevée du monde Robert Laffont 2018 La photographie était jusqu’à présent un art demandant une très lourde logistique : plaques de verre enduites de collodion, boite de 50 cm de coté, une tente etc…George Eastman invente une machine à préparer des plaques en continu, qu’il n’est plus nécessaire de développer aussitôt : des plaques sèches au gélatino-bromure d’argent : sa société se nomme Eastman Dry Plates Company, qui deviendra Kodak en 1888. Un an plus tard il invente le film souple à la place des plaques de verre. Gaston Maspero, professeur au Collège de France à 27 ans, directeur général des fouilles et antiquités de l’Égypte, devait avoir un bon contact comme on dit aujourd’hui, et grandement conscience de la nécessité de se mêler aux autochtones, car c’est ainsi qu’il entra en relation avec un pilleur de tombes qui le conduisit sur le site où se trouvaient les momies de la XXI° dynastie : Deir el- Bahari, dans la Vallée des Rois, où l’on découvrit plus de 3 000 statuettes, des papyrus et 36 cercueils contenant les dépouilles des plus grand pharaons d’Égypte, dont celle de Ramsès II. Léon Gambetta, président du Conseil envoie en Corse Emmanuel Arene, aux ordres duquel se tiendront le préfet et son administration : il fera le choix de la facilité en mettant en place un clientélisme : ce dernier épousera le clanisme local qui se verra ainsi conforté par ces distributions d’emplois, de pensions et d’avantages. Indépendance de la Roumanie, royaume reconnu par l’ensemble des pays d’Europe La France impose son protectorat à la Tunisie, privant ainsi le bey de Tunis de toute indépendance. A la suite d’une révolte sanglante, le gouvernement devra démissionner. Nous pouvons dire à ces peuples (parlant des colonies) sans les tromper que là où la France est établie, on l’aime ; que là où elle ne fait que passer, on la regrette ; que partout où sa lumière resplendit, elle est bienfaisante ; que là où elle ne brille pas, elle a laissé derrière un long et doux crépuscule, où les regards et les cœurs restent attachés. Jean Jaurès 1881 Des soldats français revenant justement de Tunisie défilent à Marseille : quelques sifflets fusent, venus, dit-on, de l’importante communauté italienne : il n’en faut pas plus pour que cette dernière se voit soumise à la vindicte populaire pendant trois jours : il n’y a pas de morts mais les biens sont souvent détruits ; on parlera de Vêpres marseillaises. Dans l’Afrique de l’Est, le métis arabo-africain Hamed ibn Mohammed al-Murjebi, alias Tippo Tipp (±1835-1905) qui sera six ans plus tard wali – gouverneur ou préfet – de toute la région des Stanley Falls, mais, pour l’heure n’est que le plus grand marchand d’esclaves et morfil – ivoire – de l’Afrique, dit sa vision de l’esclavage : Les hommes blancs se font des idées bien fausses sur nos coutumes et sur nos mœurs. Tout ce qui n’existe plus chez eux-mêmes de date récente, ils ont la prétention de l’abolir immédiatement chez les autres ! […] De fait, quelle différence y-a-t-il entre un esclave et un domestique ? Ce dernier est libre et quitte son maître quand il lui plaît. Mes esclaves, eux, se garderaient bien de me quitter. Ils sont trop contents de leur sort ! Si j’étais injuste à leur égard, ils fuiraient peut-être… Mais à quoi cela leur servirait-il ? À retomber sous la domination de leurs pareils, à être vendus de nouveau, maltraités, tués peut-être et à devoir travailler deux fois plus qu’auparavant […] Il n’y a pas de manque de dignité à passer du joug abominable d’un tyran nègre, sous la tutelle protectrice d’un Arabe auquel sa religion commande la bienveillance et la justice. Nous sommes très fraternels pour les nègres, puisque nous élevons nos enfants avec les leurs, et plus paternels assurément que vous autres avec vos laquais ! […] Si nous achetons des hommes, c’est qu’on nous offre de nous les vendre et que nous ne pourrions pas nous les procurer autrement. Et mieux vaut pour eux qu’ils tombent entre nos mains qu’entre celles des tribus ennemies – toutes le sont – qui les massacrent, les épuisent et les abrutissent. Si vous appelez sujétion arbitraire l’obligation de travailler pour le nègre, naturellement fainéant, et qui préfère voler son pain à le gagner honorablement, je me permettrai de vous demander où vous placez votre moralité […] La traite existe toujours à l’intérieur, et c’est l’Africain même qui ne veut pas qu’on la supprime. Il se vendrait lui-même si on l’émancipait ! L’indépendance pour lui, n’est autre chose que la licence, le vol, le brigandage, la folie et aussi la misère la plus invétérée. Nous ne nous entendrons jamais sur cette question-là. Tippo Tipp à Jérôme Becker Tabora 1881 L’argumentation est celle de tous les dominants sur les dominés… la réalité peut être toute autre : Certes la présence avait rendu désormais impossible la capture et la traite des esclaves. Car l’allégeance au drapeau tricolore valait soumission mais aussi protection. Toutefois cela était de pus en plus aléatoire à mesure que l’on s’écartait des côtes, puis des rives du Congo, puis de celles de l’Oubangui. Crampel l’avait payé de sa vie dès lors qu’il s’était engagé dans le bassin du Chari qui devait le mener au Tchad. Et Gentil avait bien compris que, sans la destruction de l’empire de Rabah, des milliers d’esclaves continueraient de marcher en colonnes vers Zanzibar, le Soudan ou la Tripolitaine. Mais parallèlement l’Église agissait dans un autre domaine, celui qu’elle considérait être le sien, la réhabilitation des âmes déchues. Le signe le plus évident de cette déchéance était la pratique courante de l’anthropophagie. Pas seulement comme exercice rituel et religieux ou comme dernier recours contre la faim. L’anthropophagie comme passion irrésistible et naturelle, qui ne concerne pas seulement les prisonniers, les esclaves ou les cadavres. Qui vise tout le monde et d’abord les enfants rassemblés en véritables parcs de viande fraiche ou vendus au marché. Le père Affaire, visitant en 1893 les villages de la rive droite de l’Oubangui, rapportait les faits suivants : On amène les esclaves sur le marché et celui qui ne peut se payer le luxe d’un esclave entier achète seulement un membre, qu’il choisit à son goût. S’il choisit le bras, le client fait une marque longitudinale, avec une sorte de craie blanche, et le propriétaire attend qu’un autre client choisisse l’autre bras et lui fasse la même marque. Chacun choisit ainsi les bras, les jambes, la poitrine, etc… et lorsque tous les membres ont été marqués, on coupe tout simplement la tête du pauvre esclave, qui est immédiatement dévoré sur place. Dans notre temps de relativisme des valeurs, de respect des cultures d’autrui et de haine de soi, comment réagitait-on ? Allaire, lui, ne s’embarrassait pas pas et concluait : Des faits aussi odieux se passent de commentaires et l’on ne peut qu’applaudir les courageux missionnaires qui vont braver les plus épouvantables tortures pour évangéliser ces tristes peuplades. Augouard [évêque du Congo français et de l’Oubangui] lui-même en plaisantait. Ainsi lors d’un tournée en Europe pour recueillir des fonds pour ses missions, à une admiratrice qui s’inquiétait: Mais vous, Monseigneur, vous ne craignez rien pour vous, il répondait : Moi ? Oh non ! Je suis trop maigre. Son humour était intarissable qui le faisait ainsi remarquer, quand on lui décernait le titre d’évêque des anthropophages: On ne dira pas que mes diocésains ne désirent pas s’unir à moi. Même avec Léon XIII, il ne se départissait pas de son espièglerie. Reçu par le pape en 1894, et alors que celui-ci s’inquiétait : Est-il vrai que les nègres se mangent entre eux ? il conformait. Le pape faisant alors remarquer en souriant que l’Église ne possédait pas encore de saints qui aient été mangés, Augouard répondait : eh bien, saint père, je tâcherai de commencer. Et la pape de s’exclamer Ah mais non! Je ne veux pas, vos paroissiens ne me laisseraient pas de reliques. Philippe San Marco Sortir de l’impasse coloniale Mon petit éditeur 2016 Dans la même région, les habitants du royaume de Buganda, l’actuel Ouganda construisent pour quatre de leurs Kabakas – souverains – un tombeau qui respire la paix : juste une immense paillotte, proche du lac Victoria :
![]() Le Muzibu Azaala Mpanga Création d’un ministère de l’Agriculture. Les progrès techniques de l’agriculture entraînent une diminution du besoin de main d’œuvre : l’exode rural a commencé depuis déjà plusieurs décennies : à partir de 1881, les campagnes se vident de 100 000 personnes par an, de 130 000 à partir de 1891 ! Affaibli par la maladie et la famine, Sitting Bull se rend. Les Indiens se lancent dans des combats perdus. Tout va être entrepris pour les parquer, les diminuer, les déposséder. Le général Sheridan – un bon Indien est un Indien mort – se charge des derniers massacres. Auguste Pavie, petit homme plutôt fluet doté d’une volonté et d’une intelligence peu commune s’est engagé dans la marine. Il aurait bien aimé participer à la construction du canal du Nicaragua, auquel Louis Napoléon Bonaparte, le futur Napoléon III s’était intéressé dès 1846. Mais il doit se contenter de postes sans intérêt et démissionne pour entrer au service télégraphique d’Indochine comme agent auxiliaire stagiaire. Il rentre en France pour combattre pendant la guerre de 1870 sous les forts de Paris, puis regagne Saïgon en 1872. Il sera muté à Kâmpôt, sur le golfe du Siam en 1876. Ses qualités d’explorateur et son aptitude à s’imprégner de la civilisation locale le font remarquer. Il apprend le cambodgien, se voit confier de petites missions d’exploration qu’il accomplit à merveille en dressant des itinéraires précis. Le nouveau gouverneur civil Le Myre de Vilers lui confie la direction du chantier de la ligne télégraphique entre Phnom-Penh et Bangkok (1881-1885); une épreuve d’autorité et de charisme pour conduire une équipe d’une soixantaine d’ouvriers, annamites et khmers. Nous manquons de tout, les Siamois ne nous donnent que du riz, nous n’avons plus de sel. Un ou deux travailleurs de chaque groupe passent le jour dans la forêt à chercher des herbages, des lézards et de grosses araignées pour nourrir les camarades. Il aura relevé 6 000 km. Il rentre en France accompagné de plusieurs jeunes Cambodgiens fils de fonctionnaires de mérite pour lesquels il fonde et dirige l’école cambodgienne à l’hôtel de Saxe, au 12 rue Jacob. Emile Chabrand, originaire de Barcelonnette, a entrepris un tour du monde, qui le mène entre autres au Japon : son expérience de l’Extrême Orient n’est pas tout à fait celle d’Auguste Pavie : L’habitude au Japon étant de se baigner chaque soir, mes hôtesses veulent me conduire au bain. Trois d’entre elles m’offrirent successivement la moitié de leur mandarine d’une façon si aimable, si courtoise, si engageante, que je ne pouvais refuser. L’heure passait et bientôt, elles me souhaitaient une bonne nuit d’un petit air entendu. Mon sommeil fut interrompu à trois reprises par trois visiteuses ! Voyageurs à Nara ! Si vous voulez dormir tranquille, n’acceptez jamais de demi-madarine. Emile Chabrand 1843-1893 Tour du monde de Barcelonnette au Mexique 1892 Editions Gisko 2008 02 1882 L’Union Générale, banque catholique vient de faire faillite : l’antisémitisme renaissant en attribue la faute aux Rothschild : Les désastres financiers qui viennent de ravager tant de familles nous montrent le Juif tout puissant du haut de son trône et les sociétés modernes asservies au joug de ce roi sans entrailles. Les Juifs sont les rois de la finance. R.P. Bailly, Assomptionniste, directeur de la Revue La Croix, qui deviendra quotidien plus tard. 9 03 1882 Étienne Jules Marey annonce qu’il vient d’obtenir, au moyen de la photographie instantanée, l’analyse complète des différentes formes de locomotion, y compris le vol des oiseaux : c’est le chrono photographe à plaque fixe, qui annonce le cinéma. Ernst Abbe et Carl Zeiss mettent au point des microscopes qui permettent de distinguer des particules de l’ordre de 2 millièmes de millimètre d’épaisseur : ce progrès va entraîner celui de l’identification des tissus. 11 03 1882 Renan ne se montre pas chaud partisan du devoir de mémoire : L’oubli, et je dirai même l’erreur historique, est un facteur essentiel de la création d’une nation, et c’est ainsi que le progrès des études historiques est souvent pour la nationalité un danger. L’investigation historique, en effet, remet en lumière les faits de violence qui se sont passés à l’origine de toutes les formations politiques, même de celles dont les conséquences ont été le plus bienfaisantes. L’unité se fait toujours brutalement ; la réunion de la France du Nord et de la France du Midi a été le résultat d’une extermination et d’une terreur continuée pendant près d’un siècle… […] L’homme n’est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation. Ernest Renan Conférence Qu’est-ce qu’une nation ? en Sorbonne. [Le texte intégral de cette conférence se trouve dans la catégorie Discours] Il n’éprouve d’ailleurs pas plus d’affection pour la démocratie que pour la mémoire : La démocratie fait notre faiblesse militaire et politique[…] La démocratie est le plus fort dissolvant de l’organisation militaire. L’organisation militaire est fondée sur la discipline ; la démocratie est la négation de la discipline. Ernest Renan Réforme intellectuelle et morale de la France. 4 04 1882 Création du RTM : Restauration des Terrains de Montagne, un service des Eaux et Forêts spécialisé dans la lutte contre l’érosion principalement de l’eau en terrain de montagne ; cela concerne essentiellement les terrains très en pente dont les sols sont fragilisés par un excès d’eau et se traduira les plus souvent par la construction de petits barrages de rétention des boues et aussi par la plantation d’épicéas ou/et sapins, à même d’absorber 200 litres d’eau par jour. Outre les grandes entreprises de reboisement – Landes, Sologne, Champagne, Lubéron -, l’effort est général pour redonner une place en vue à l’arbre, tant de la part des particuliers que de l’État ou des municipalités : Le XVII° siècle n’a guère été forestier. D’une part, certes, c’est un siècle qui a eu peur de manquer de bois du fait de la consommation croissante des manufactures et de la marine ; d’autre part, on trouve jusqu’à la fin du XVIII° siècle des exemples de jugement négatif sur l’action de la forêt qui refroidit le climat et qui de toutes façons doit être défrichée afin de permettre une mise en valeur des terres, considérée comme la principale source de richesse d’un pays. Au XVIII° siècle, plus sur la fin qu’au début, apparaît une attitude tout à fait différente qui signifie peut-être la fin de l’idéologie du défrichement qui s’enracine dans la nuit des temps : l’idéologie du reboisement. Gérard Brugnot, Yves Cassaire Restaurer la montagne Museon Arlaten 2004 Sur les versants du mont Faron à Toulon, de Notre Dame des Doms à Avignon, du mont Duplan à Nîmes et de Notre Dame de la Garde à Marseille, il s’agissait à la fois d’embellir la ville, d’assainir l’air et de protéger les cités d’une éventuelle érosion. Sur les terres de montagne, superficielles et pentues, les reforestations visaient la protection des routes et des habitations contre les dangers de l’érosion, de l’éboulement et des avalanches. Enfin, sur les terres ingrates et délaissées par l’agriculture, les plantations devaient alimenter les besoins de la nouvelle industrialisation en résineux. Martine Chalvet Une histoire de la forêt Seuil 2011 Le reboisement va avoir ses héros : Prosper Demontzey (1831-1898), l’Hercule soutenant les montagnes, associe les techniques du génie civil et biologique : une de ses plus belles réalisations : le bassin du Riou Bourdou en Ubaye. Et encore Georges Fabre qui consacrera l’essentiel de sa vie au reboisement de l’Aigoual (cf 1894). Mais il ne faudrait pas croire que le souci du maintien des sols soit né avec le RTM : il n’est que de se promener là où les sols sont fragiles : les Monts de St Guilhem de Désert, le piton volcanique de la Sure, aujourd’hui presqu’île sur le lac du Salagou, pour voir de nombreux barrages en travers de talwegs la plupart du temps à sec, mais ravageurs quand ils débordent d’eau : la seule fonction de ces barrages est bien de casser la puissance d’érosion de ces eaux en furie, et ils sont là depuis des siècles. 10 04 1882 Robert Koch annonce à ses collègues de la Société de physiopathologie de Berlin la découverte de la bactérie responsable de la tuberculose, le bacille qui prendra son nom. Un an plus tard, c’est le bacille du choléra qu’il identifiera Kommabacillus, Vibrio comma ou bacille virgule, ignorant en toute bonne foi, sa découverte par l’Italien Pacini, trente ans plus tôt : Si Pacini doit être considéré comme le vrai découvreur du vibrion cholérique, il n’en reste pas moins que c’est Koch qui a su convaincre la communauté scientifique. Il a pu le faire d’abord par sa rigueur méthodologique (élégance technique) et surtout en intégrant cette découverte au sein d’une théorie scientifique générale sur la nature, les mécanismes de transmission et les observations épidémiologiques des maladies infectieuses. Wikipedia 22 04 1882 Raz de marée sur La Rochelle. 13 07 1882 Inauguration de l’Hôtel de Ville de Paris, reconstruit par Théodore Ballu et Pierre Joseph Edouard Deperthes. 13 12 1882 Alphonse Bertillon établit les premières fiches signalétiques de délinquants. 1882 L’Américain Henry Seely invente le fer à repasser électrique, qui ne fût commercialisé en France, par Calor, qu’en 1917. Ce que l’on nommait alors la réclame n’aura pas à trop se creuser la tête : votre confort ne tient qu’à un fil. La Pennsylvania Railroad est la plus grosse entreprise du monde : 30 000 employés : plus que le gouvernement fédéral. Sa technicité lui fera créer les premiers programmes de formation professionnelle, ses besoins financiers contribueront beaucoup au développement de la Bourse. Antonio Gaudi commence la construction de la Sagrada Familia à Barcelone ; on lui demande : A quoi bon décorer aussi richement des clochers de plus de cent mètres, puisqu’on le les voit pas du sol ? Les anges la verront, répond-il. Cent ans plus tard nul ne saurait dire quand elle risque d’être terminée ; lorsque ce sera le cas, elle comprendra 12 clochers latéraux entourant un clocher central à plus de 170 mètres… à l’intérieur, une galerie accueillerait 1 500 chanteurs accompagnés par 5 orgues. En juin 1937, George Orwell, né Eric Blair, dans les derniers jours de sa guerre aux côtés du POUM – Parti Ouvrier d’Unification Marxiste, anti-stalinien, proche de la CNT, le syndicat anarchiste – tombera sur elle : l’un des monuments les plus hideux du monde, avec ses quatre flèches comme des bouteilles de vin du Rhin… Les anarchistes ont fait preuve de bien mauvais goût en ne la faisant pas sauter. Au Japon, Jigorõ Kanõ met au point le judo. Il sera introduit en France en 1935 par Kawaishi Mikinosuke. Le docteur Pinsker, un Allemand, lance l’idée de création d’une nation juive. Des habitants du village italien de Segusino, proche de Venise, décident d’émigrer, non pas en Amérique du sud comme la plupart de leurs compatriotes émigrés, mais au Mexique et ils se poseront à Chipilo, pas bien loin de Mexico, au sud-est. Un de leurs descendants Rafael Piloni, explique pourquoi : On leur avait fait un lavage de cerveau, à nos ancêtres. On leur avait dit qu’ici les mules croulaient sous le poids de l’or tellement les terres étaient riches. Les Vénitiens sont venus, ils n’ont rien trouvé de ce qu’on leur avait promis, avec en plus l’obstacle de la langue. Cela a été le premier mensonge de Porfirio [le général Porfirio Díaz, président du Mexique de 1876 à 1911]. Les terres se révéleront incultes, mais la majorité d’entre eux n’aura pas envie de refaire les valises et donc resteront. Pour s’en sortir d’en d’aussi mauvaises conditions, il n’y avait qu’une chose : le travail et comme il ne leur faisait pas peur, ils prospérèrent. Ils sont encore là, parlant un dialecte proche de leur vénitien de la fin de XIX° siècle, le chipileño. Ils se sont bien sûr mis à la page, avec une équipe de foot de la Juve, une autre de l’Inter de Milan etc… Première de l’aiguille du Géant, qui domine Courmayeur à 4013 m. Le grand guide de Courmayeur, Emile Rey, y laissera la vie, 13 ans plus tard. À Marseille, Alphonse et Théodore Carmagnolle créent un scaphandre rigide – des pièces métalliques rigides, les articulations étant constituées d’un tissu qu’ils disent étanche, le tout pour un poids de 320 kg -. Il est alimenté en air à la pression atmosphérique depuis la surface. Il y aura une brève mise à l’eau et on en restera là : ça fuyait par toutes les parties en tissu ! Il faudra attendre plus de 20 ans pour voir une autre réalisation, sans fuites. École Normale de St Cloud, surnommée Le couvent sans crucifix. Lettre de Jules Ferry aux instituteurs pour définir la mission des hussards noirs de la république. Dès 1879, les Conseils à propos de la vie privée de l’instituteur étaient très précis : On ne verra jamais l’instituteur désœuvré les jours de congé. Cette inaction produit le plus mauvais effet sur l’esprit des populations… Il ne faut pas qu’il se conduise comme un campagnard que les futilités de la foire amusent, que les trompettes et les tambours des baladins attirent, que les sornettes, les farces grossières des pitres et des jocrisses désopilent… Il ne lui sera pas défendu d’assister à un concert où des artistes de talent se font entendre, mais il doit consulter sa bourse. ***** Le sérieux, ou plutôt l’austérité laïque toute nouvelle dont l’École normale imprégnait ses émules, se trouvait justement calquée sur la rigueur qui prévalait dans les séminaires religieux. Or, ce rigorisme imposait deux choses aux normaliens : l’abstention totale et définitive d’église, et le renoncement absolu au cabaret, deux lieux de perdition également incompatibles avec la dignité de l’enseignant moderne, ouvert sur le Progrès. […] Un instituteur public devait montrer en toutes circonstances l’exemple d’une pureté rigide dans sa vie privée totalement engagée, par son métier, dans une laïcité militante. Un élève-maître surpris à la messe aurait été sévèrement sanctionné par son directeur ! Et puis, il y a toujours, partout, des délateurs emplis du désir de nuire… En cas de récidive le garçon aurait encouru l’exclusion pure et simple de l’école, évidemment sous un prétexte quelconque et fallacieux. Claude Duneton Le Monument Balland 2003 Au jeune député Jean Jaurès qui l’interrogeait sur l’orientation générale du gouvernement, Jules Ferry répondait : Organiser l’humanité sans Dieu et sans Roi. ***** Être laïque, […] c’est refuser aux religions qui passent le droit de gouverner l’humanité qui dure. Ce n’est point haïr telle ou telle Église ou toutes les Églises ensemble; c’est combattre t’esprit de haine qui souffle des religions et qui fut la cause de tant de violences, de tueries et de ruines. Être laïque, c’est ne point consentir la soumission de la raison au dogme immuable, ni l’abdication de l’esprit humain devant l’incompréhensible ; c’est ne prendre son parti d’aucune ignorance ; c’est croire que la vie vaut la peine d’être vécue, aimer cette vie, refuser la définition de la Terre vallée de larmes ; ne pas admettre que les larmes soient nécessaires et bienfaisantes, ni que la souffrance soit providentielle ; c’est ne prendre son parti d’aucune misère. Ernest Lavisse Annales de la Jeunesse laïque n°1, juin 1902 L’Angleterre occupe l’Égypte. L’émancipation des femmes commence en Angleterre : elles resteront propriétaires de leurs biens après le mariage. Racing Club de France. Premières colonies de vacance. Création de la ligue des patriotes qui devient le fief des revanchards (…contre les Allemands). La Conférence Internationale Polaire de Hambourg, en 1879, a décidé de la Première Année Polaire Internationale 1882-1883. Si les Eaux et Forêts ont déjà intégré l’écologie, il n’en va pas de même pour les chasseurs : Les montagnards font une chasse continuelle aux ours et aux aigles. Ils les poursuivent dans le creux des rochers, ils luttent contre elles et, de jour en jour, ces bêtes malfaisantes deviennent plus rares. G. Bruno. Le tour de France par deux enfants.
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